ticulier pour efprouver à quisera le plus vaillant, Mais ils donnent des batailles d'armée à armée, & ils n'ont pour but que la conquefte des Villes & des Provinces, on attaque tout ce que l'on croit pouvoir emporter.

Tout le monde fçavoit que plus de trois mois après qu'on eut appris aux Indes la mort d'Habas fecond, le Roy de ce pays-là continua toûjours les preparatifs de la Guerre pour aller affieger Kanddaar, & une preuve de cela bien évidente; c'eft que pendant tout ce temps le commerce fuft interdit avec la Perfe avec autant de rigueur qu'auparavant ; ce qui n'euft pas efté fi le Prince Indien euft abandonné le deffein de la guerre, pour le mépris qu'il faifoit de ce nouvel ennemy, qu'il croyoit trop jeune pour meriter d'eftre la matiere de fes triomphes.

La verité eft comme je l'ay oüy

dire à des perfonnes tres-intelligentes qu'Aureng - Zeib fut détourné de fon entreprise par la Princeffe fa fœur, qui luy reprefenta, qu'il ne devoit point mettre en compromis la gloire qu'il avoit déja acquise, que jusquesicy il avoit regné avec beaucoup de reputation, qu'elle ne luy pouvoit point eftre oftée s'il fe tenoit en repos, que la fortune ne luy pouvoit plus faire beaucoup de bien mais qu'elle luy pouvoit faire beaucoup de mal, que la pri fe de Kand-daar n'eftoit pas une chofe aifée, que fon pere par deux fois avec une puiffante armée n'avoit pû l'emporter; que la plufpart de ceux de fa Cour pour n'être compofée que de Perfans, ne le ferviroient qu'à regret, & ne l'affifteroient que mollement; Qu'en un mot, s'il ne fortoit pas avec honneur de cette guerre, il alloit flétrir d'une tache qui ne s'effaceroit jamais. La haute re

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putation où il avoit vefcu jusques alors, qui n'avoit pas befoin de cette conquefte pour s'agrandir, puis qu'elle fe foûtenoit affez par elle-mefme. Le Prince fe laiffa perfuader, & fans doute qu'il fit fagement; car il n'y avoit rien de

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vray que ce que cette Princeffe luy difoit, qu'il n'y avoit pas beaucoup à gagner pour luy dans cette entreprife, mais qu'il y pourroit avoir infiniment à perdre.

Celuy quí eftoit cy-devant General des Efclaves, & qui eftoit alors General d'armée n'eftoit party de la Cour que depuis un mois, quand Mirza-Ibrahim arriva tout tremblant, aprés s'eftre bien fait attendre. Car il avoit apris dés Tauris le tour que le General des Efclaves luy avoit joué, & comme quoy il avoit découvert tout le fecret de fes intrigues. Cependant il avoit déja receu la permiffion de venir à la Cour, & cette permiffion eftoit une necef

fité d'obeïr, reduit à cette extremité, il ne preffa plus fon voyage avec tant de chaleur; il n'en faifoit les apprêts que tres lentement, & differoit le plus qu'il pouvoit de partir, s'excufant tantoft fur la mauvaife heure & fur la mauvaise disposition des Planettes, tantoft fur quelque indifpofition qui luy eftoit furvenuë. A la fin pourtant il falut marcher, mais il alloit à fi petites journées, qu'il employa le double du temps qu'il faloit à ce voyage; & peuteftre évitoit-il de rencontrer fur la route le General des Efclaves qui s'en alloit à fon nouveau Gouvernement; Il est aisé à juger s'il fut mal receu à la Cour, lors qu'il y fut arrivé, il ne trouva perfonne qui ne luy fift mauvais vifage: Si bien que pour amollir le cœur des Miniftres & des plus puiffans, il fe vid obligé de leur faire bonne part des trefors qu'il avoit amassez, & de leur permet

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tre de piller fur luy ce qu'il avoit pillé fur le peuple.

Les Miniftres pour executer mieux le deffein qu'ils avoient de s'attirer de riches prefens de ce Seigneur appuyerent les plaintes qui venoient à la Cour contre luy. Car il faut fçavoir qu'en Perfe chaque particulier de quelque baffe condition qu'il foit, eft receu à former des plaintes contre les Gouverneurs, Les Fermiers Royaux, & les autres perfonnes femblables qui ont quelque autorité fur eux : Et lors que les Miniftres veulent perdre quelque grand qui eft dans les Provinces, leur rufe ordinaire eft d'appuyer les cris de ces miferables Et ; mefme pour leur donner plus de poids, ils ont foin de groffir leur nombre, & les font venir en foule au Palais demander justice au Roy: On en fit à peu prés de mefme à ce Seigneur-cy; Mais comme les principaux de la Cour ne