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J'admire quelle joye on gouste à tout cela,
Et je ne sçavois point encor ces choses-là.
ARNOLPHE.

Oüy; c'est un grand plaisir que toutes ces tendresses,
Ces propos si gentils et ces douces carresses;
Mais il faut le gouster en toute honnesteté,
Et qu'en se mariant le crime en soit osté.

AGNÉS.

N'est-ce plus un peché lors que l'on se marie?

Non.

ARNOLPHE.

AGNÉS.

Mariez-moy donc promptement, je vous prie.

ARNOLPHE.

Si vous le souhaitez, je le souhaite aussi,

Et pour vous marier on me revoit icy.

AGNÉS.

Est-il possible?

ARNOLPHE.

Oüy.

AGNÉS.

Que vous me ferez aise!
ARNOLPHE.

Oüy, je ne doute point que l'hymen ne vous plaise.

AGNÉS.

Vous nous voulez nous deux...

ARNOLPHE.

AGNÉS.

Rien de plus asseuré.

Que, si cela se fait, je vous carresseray!

ARNOLPHE.

Hé! la chose sera de ma part reciproque.

AGNÉS.

Je ne reconnois point, pour moy, quand on se mocque. Parlez-vous tout de bon?

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Ouy.

Mais quand?

ARNOLPHE.

AGNÉS, riant.

ARNOLPHE.

Dés ce soir.

Dés ce soir. Cela vous fait donc rire?

AGNÉS.

ARNOLPHE.

Vous voir bien contente est ce que je desire.
AGNÉS.

Helas! que je vous ay grande obligation!

Et qu'avec luy j'auray de satisfaction!

ARNOLPHE.

Avec qui?

AGNÉS.

Avec... Là...

ARNOLPHE.

Là... là n'est pas mon compte.

A choisir un mary vous estes un peu prompte.
C'est un autre, en un mot, que je vous tiens tout prest,

Et quant au monsieur Là, je pretens, s'il vous plaist,
Deust le mettre au tombeau le mal dont il vous berce,
Qu'avec luy desormais vous rompiez tout commerce;
Que, venant au logis, pour vostre compliment
Vous luy fermiez au nez la porte honnestement,
Et, luy jettant, s'il heurte, un grez par la fenestre,
L'obligiez tout de bon à ne plus y parestre.
M'entendez-vous, Agnés? Moy, caché dans un coin,
De vostre procedé je seray le témoin.

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Je suis maistre, je parle : allez, obeïssez.

C'est assez.

ACTE III

O

SCENE PREMIERE.

ARNOLPHE, AGNÉS, ALAIN,

GEORGETTE.

ARNOLPHE.

UY, tout a bien esté, ma joye est sans pareille.
Vous avez là suivi mes ordres à merveille,
Confondu de tout poinct le blondin seducteur:
Et voila de quoy sert un sage directeur.
Vostre innocence, Agnés, avoit esté surprise.
Voyez, sans y penser, où vous vous estiez mise:
Vous enfiliez tout droit, sans mon instruction,
Le grand chemin d'enfer et de perdition.

De tous ces damoizeaux on sçait trop les coustumes:
Ils ont de beaux canons, force rubans et plumes,
Grands cheveux, belles dents et des propos fort doux;
Mais, comme je vous dis, la griffe est là dessous,
Et ce sont vrais Sathans, dont la gueule alterée
De l'honneur feminin cherche à faire curée.
Mais, encore une fois, grace au soin apporté,

Vous en estes sortie avec honnesteté.

L'air dont je vous ay veu luy jetter cette pierre,
Qui de tous ses desseins a mis l'espoir par terre,
Me confirme encor mieux à ne point differer

Les
nopces où je dis qu'il vous faut preparer.
Mais, avant toute chose, il est bon de vous faire
Quelque petit discours qui vous soit salutaire.
Un siege au frais icy.

[A Georgette.]

Vous, si jamais en rien...
GEORGETTE.

De toutes vos leçons nous nous souviendrons bien.
Cet autre monsieur là nous en faisoit accroire;
Mais...

ALAIN.

S'il entre jamais, je veux jamais ne boire. Aussi bien est-ce un sot: il nous a l'autre fois

Donné deux escus d'or qui n'estoient pas de poids.

ARNOLPHE.

Ayez donc pour souper tout ce que je desire,

Et

pour nostre contract, comme je viens de dire, Faites venir icy, l'un ou l'autre, au retour, Le notaire qui loge au coin de ce carfour.

SCENE II.

ARNOLPHE, AGNÉS.

ARNOLPHE, assis.

Agnés, pour m'écouter laissés là vôtre ouvrage.
Levez un peu la teste et tournez le visage;

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