Images de page
PDF
ePub

nent à des hommes, des moyens que la raíson avoue, et que l'expérience a même consacrés; et les arts, accessoires plus ou moins utiles. d'institutions plus fortes et plus graves, ne sont pas par eux-mêmes un secours pour la mora le, et même, faussement dirigés, seroient plutôt un obstacle; et ils ne peuvent pas plus servir à réprimer nos passions, que des amulettes à guérir nos maladies.

pas.

La

gouvernement, ne

Les gouvernemens, ces grands instituteurs des peuples, ne peuvent agir directement sur l'homme, parce que l'action du public, appliquée à l'individu, est toujours trop forte ou trop foible. Il l'écrase ou ne l'aperçoit même société, représentée par le peut donc régler l'homme que par l'intermédiaire des corps, qui ont assez de force pour pouvoir supporter son action, et toute l'autorité qu'il faut pour la faire ressentir à leurs membres; et c'est ce qui fait des corps parfaitement disciplines, composés des individus les plus indisciplinables.

La famille est un corps; elle est même plus qu'un corps, car elle est une société, et autant société que l'Etat lui-même, dont elle est, par sa constitution native, le germe, le type, et

même la raison, puisque l'Etat existe après la famille, par la famille, pour la famille, et constitué comme la famille. Le pouvoir domestique est, dans son action domestique, autant pouvoir, c'est-à-dire, aussi indépendant que le pouvoir public dans son action publique. Mais comme ces deux pouvoirs existent ensemble et l'un pour l'autre, ils ont entre eux des rapports nécessaires, des rapports qui, selon qu'ils sont observés ou méconnus, influent puissamment sur l'amélioration du corps social ou sur sa dégénération; et il y a de quoi s'étonner que les nombreux écrivains qui ont traité des matières politiques, et quelques-uns avec de grands talens et une vaste érudition, n'aient, aucun, commencé par poser cette question, la plus importante et la première de toutes dans l'organisation sociale: Quels sont les rapports de l'Etat et de la famille?

Le premier corps de la société politique', et celui sans lequel la société politique n'existeroit pas, et ne seroit qu'un despotisme odieux ou une démocratie turbulente, est la noblesse, action constitutionnelle du pouvoir, ses yeux, sa voix et ses mains; qui remplit sous sa direction, et par ses ordres, la grande, l'éminente

fonction qui comprend tout le service de la société, la fonction de juger et celle de combattre; la noblesse, qu'on peut appeler le sacerdoce de la royauté, puisqu'elle est, corps et biens, consacrée à son culte. C'est sur ce corps que le pouvoir peut agir, et c'est ce corps qu'il doit régler, pour régler par lui le reste de la société; car c'est par des exemples et non par des leçons et des édits, qu'on peut former les hommes. C'est ce corps composé de familles dévouées au service des sujets, qu'il est nécessaire de constituer, et pour l'état public et même dans son état domestique, et qui même a été partout, plus ou moins, constitué sous ces deux rapports, et constitué par les mœurs, à défaut de lois positives. Mais je m'aperçois, et peut-être un peu tard, que je fais un roman genre sérieux; et sans parler des autres, on n'en veut aujourd'hui que du genre effrayant. Je m'arrête donc; mais en attendant que ce roman devienne histoire, je renfermerai toute ma pensée, comme tous les besoins de la société et tous les devoirs des gouvernemens, dans ce peu de mots : Qu'il faut tout régler : dans des hommes qui doivent être la règle vivante de tous.

du

la bonhomie qui lui sied si bien, elle deviendra artificieuse, dissimulée, peut-être méchante; et qu'y a-t-il de plus dangereux qu'une bêtise méchante?

Mais si ceux qui ont le mieux connu les hommes, et qui se sont occupés avec le plus de fruit de leur éducation, recommandent d'éloigner de la vue des enfans les subalternes, dont l'exemple peut faire prendre à leur esprit ou à leurs manières des habitudes vicieuses, quoiqu'elles ne soient pas toujours des vices; si l'esprit d'imitation naturel à l'homme, et si fort au premier âge, peut rendre dangereux, même pour l'organisation physique des enfans, si aisée à fausser, le commerce habituel des personnes qui ont quelque difformité, qui boitent, qui louchent, qui bégayent, qui nasillent, etc., pense-t-on qu'il soit indifférent pour la raison et les habitudes du peuple, de mettre continuellement sous ses yeux le spectacle de la sottise et de l'ineptie? L'ignorance admire beaucoup, et, de l'admiration à l'imitation, il n'y a qu'un pas. Je ne parle pas des mœurs du peuple, qui courent d'autres dangers dans la fréquentation des spectacles. Tout est dit depuis long-temps sur ce sujet., et mieux que je ne pourrois le fai

re, par un écrivain assez malheureux pour avoir fait autorité par ses erreurs plutôt que par les vérités qu'il a proclamées. C'est peut-être à la fréquentation de spectacles frivoles ou licencieux qu'on pourroit attribuer l'infériorité de la populace des grandes cités, comparée au peuple des campagnes dans les provinces recu

lées, sous le rapport de la raison, du bon sens, même de l'industrie. Le caractère et les habitudes de la populace, dans quelques grandes villes, paroissent en effet un composé des deux rôles qui attirent presque uniquement son atten. tion, et dont toutes les pièces des petits théàtres lui offrent le modèle, les valets et les niais. C'est, d'un côté, une grande adresse à mal faire, une étonnante fécondité d'invention pour tromper, pour surfaire, pour duper, pour dire des injures; de l'autre, une profonde ignorance, une merveilleuse facilité à s'étonner de tout, à tout croire, à tout applaudir, à se prêter à tous les changemens; double disposition qui fait les vauriens et les badauds, si communs dans les grandes villes, et qui rend les uns et les autres des instrumens de révolution si actifs et si aveugles..

Au contraire, partout où le peuple, laissé à

« PrécédentContinuer »