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excité tant d'émotions, fera-t-elle baisser d'un cran la sienne, si naturelle, si précise et si parlante? Je ne le crois pas, et l'on peut déjà s'en apercevoir la poésie des Méditations est noble, volontiers sublime, éthérée et harmonieuse, mais vague; quand les sentiments généraux et flottants auxquels elle s'adressait dans les générations auront fait place à un autre souffle et à d'autres courants, quand la maladie morale qu'elle exprimait à la fois et qu'elle charmait, qu'elle caressait avec complaisance, aura complétement cessé, cette poésie sera moins sentic et moins comprise, car elle n'a pas pris soin de s'encadrer et de se personnifier sous des images réelles et visibles, telles que les aime la race française, peu idéale et peu mystique de sa nature. Nous ne savons pas bien, personne, quelle est cette figure vaporeuse et à demi angélique d'Elvire. Le poëte a essayé depuis de nous la montrer en prose, mais ses vers ne le disaient pas. Le Lac, si admirable d'inspiration et de souffle, n'est pas lui-même si bien dessiné que les Deux Pigeons; et, quand j'entends réciter aujourd'hui, à quelques années de distance, quelqu'une de ces belles pièces lyriques qui sont de Lamartine ou de son école, j'ai besoin, moi-même qui ai été malade en mon temps de ce mal-là, d'y appliquer toute mon attention pour la saisir, tandis que La Fontaine me parle et me rit dès l'abord dans ses peintures:

Du palais d'un jeune Lapin
Dame Belette, un beau matin,
S'empara c'est une rusée.

Le maître étant absent, ce lui fut chose aisée.

Elle porta chez lui ses pénates, un jour

Qu'il était allé faire à l'Aurore sa cour
Parmi le thym et la rosée.......

Et le début de Perrette au pot au lait, et celui des Deux
Chèvres, et celui de la Perdrix :

Quand la Perdrix

Voit ses petits

En danger, et n'ayant qu'une plume nouvelle...

et cent autres débuts brillants de vie et de fraîcheur, comme ils nous prennent aujourd'hui aussi vivement qu'au premier jour! comme ils ne vieillissent ni ne pâlissent pas! Ici rien ne s'évanouit. Évidemment, La Fontaine ne se met à conter et à peindre que quand il a vu. Son tableau lui échappe pour ainsi dire, et nous saute aux yeux; et, dès les quatre premiers vers, il nous a fait tout voir. - Je laisse à chacun de poursuivre la comparaison, et de conclure, s'il y a lieu. Ma conviction bien paisible, c'est que La Fontaine, comme Molière, n'a rien qu'à gagner du temps; le bon sens, si profondément mêlé à son talent unique et naïf, lui assure de plus en plus l'avenir.

FIN DU TOME SEPTIEME.

Je cherche, à chaque réimpression, à corriger quelques inexactitudes qui ont pu d'abord m'échapper. J'indiquerai ici deux corrections à faire qui ne se rapportent point au présent volume, mais l'une à un tome antérieur, et l'autre à un volume subséquent qu'il ne me sera peut-être pas donné de voir réimprimer. Au tome V de cette troisième édition, page 169, à l'article de Madame de Motteville, à propos de sa sœur cadette qu'on appelait Socratine à cause de sa sévérité, au lieu de ces mots : « et qui finit par se faire carmélite,» il faut mettre et qui finit par se faire religieuse de la Visitation.»

Au tome XV (1re édition), à la page 452, à l'article sur les Mémoires de Saint-Simon, dans cette phrase : « Après sa retraite de la Cour, il venait quelquefois à Paris et allait en visite chez la duchesse de La Vallière ou la duchesse de Mancini (toutes deux Noailles)..., >> au lieu de « la duchesse de Mancini, il faut lire la marquise de Mancini. »

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