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PSYCHÉ.

J'ai cru pour vous, mes sœurs, une gloire assez grande,
Si la possession d'un mérite si haut. . . .

SCÈNE IV.

LYCAS, PSYCHÉ, AGLAURE, CIDIPPE, CLÉOMÈNE, AGÉNOR.

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Hélas!

que pour le Roi tu me donnes à craindre!

LYCAS.

Ne craignez que pour vous, c'est vous que l'on doit plaindre.

PSYCHÉ.

510 C'est pour louer le Ciel, et me voir hors d'effroi,

515

De savoir que je n'aye à craindre

que pour moi. Mais apprends-moi, Lycas, le sujet qui te touche.

LYCAS.

Souffrez que j'obéisse à qui m'envoie ici,

Madame, et qu'on vous laisse apprendre de sa bouche
Ce qui peut m'affliger ainsi.

PSYCHÉ.

Allons savoir sur quoi l'on craint tant ma foiblesse.

SCÈNE V.

AGLAURE, CIDIPPE, LYCAS.

520

AGLAURE.

Si ton ordre n'est pas jusqu'à nous étendu,
Dis-nous quel grand mal-heur nous couvre ta tristesse.

LYCAS.

Hélas! ce grand mal-heur dans la cour répandu,

Voyez-le vous-même, Princesse,

Dans l'oracle qu'au Roi les Destins ont rendu.
Voici ses propres mots, que la douleur, Madame.
A gravés au fond de mon âme :

Que l'on ne pense nullement

525 A vouloir de Psyché conclure l'hyménee;

Mais qu'au sommet d'un mont elle soit promptement

En

pompe funèbre menée,

Et

que de tous abandonnée,

Pour époux elle attende en ces lieux constamment
530 Un monstre dont on a la vue empoisonnée,
Un serpent qui répand son venin en tous lieux,
Et trouble dans sa rage et la terre et les cieux.
Après un arrêt si sévère,

Je vous quitte, et vous laisse à juger entre vous,
535 Si
par de plus cruels et plus sensibles coups

Tous les Dieux nous pouvoient expliquer leur colère.

SCÈNE VI.

AGLAURE, CIDIPPE.

CIDIPPE.

Ma sœur, que sentez-vous à ce soudain mal-heur
Où nous voyons Psyché par les Destins plongée ?

AGLAURE.

Mais vous, que sentez-vous, ma sœur?

CIDIPPE.

540 A ne vous point mentir, je sens que dans mon cœur Je n'en suis pas trop affligée.

AGLAURE.

Moi, je sens quelque chose au mien
Qui ressemble assez à la joie.

Allons, le Destin nous envoie

545 Un mal que nous pouvons regarder comme un bien.

FIN DU PREMIER ACTE.

PREMIER INTERMÈDE.

La scène est changée en des rochers affreux, et fait voir en éloignement une grotte effroyable.

C'est dans ce désert que Psyché doit être exposée, pour obéir à l'oracle. Une troupe de personnes affligées y viennent déplorer sa disgrâce. Une partie de cette troupe désolée témoigne sa pitié par des plaintes touchantes, et par des concerts lugubres, et l'autre exprime sa désolation par une danse pleine de toutes les marques du plus violent désespoir.

PLAINTES EN ITALIEN,

CHANTÉES PAR UNe femme désolée, ET DEUX HOMMES AFFLIGÉS.

FEMME DÉSOLÉE.

Deh! piangete al pianto mio,
Sassi duri, antiche selve,
Lagrimate, fonti, e belve,
D' un bel volto il fato rio.

PREMIER HOMME affligÉ.

Ahi dolore!

SECOND HOMME affligé.

Ahi martire!

PREMIER HOMME affligÉ.

Cruda morte!

SECOND HOMMe affligé.

Empia sorte!

TOUS TROIS.

Che condanni a morir tanta beltà!

Cieli, stelle, ahi crudeltà ! (1)

(1) Ici, comme on le verra à l'Appendice, p. 101, il y a dans le livret de 1671 et dans

le Ballet des ballets une strophe de plus, chantée par la Femme désolée.

SECOND HOMME affligé.

Com' esser può fra voi, o Numi eterni,
Chi voglia estinta una beltà innocente?
Ahi! che tanto rigor, Cielo inclemente,
Vince di crudeltà gli stessi Inferni.

PREMIER HOMME afflige.

Nume fiero!

SECOND HOMMe affligé.

Dio severo!

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ENSEMBLE.

Perchè tanto rigor
Contro innocente cor?

Ahi! sentenza inudita,

Dar morte a la beltà, ch' altrui dà vita!

FEMME DÉSOLÉE.

Ahi! ch' indarno si tarda,

Non resiste a li Dei mortale affetto,
Alto impero ne sforza;

Ove commanda il Ciel, l'uom cede a forza.
Ahi dolore (2) etc. Come sopra.

Ces plaintes sont entre-coupées et finies par une entrée de ballet

de huit personnes affligées (3).

(1) Nume fierto!» (Éd. 1671, 1673, 1674; faute évidente.)

(2) Dans le livret et dans le Ballet des ballets, la reprise n'est pas Ahi dolore! etc., mais Deh! piangete, etc.

(3) de huit personnes affligées, qui par leurs attitudes expriment leur douleur.» (Éd. 1682.)

– Voyez ci-après, à l'Appendice, p. 101-103, l'Imitation en vers français des plaintes en italien, tirée du Ballet des ballets.

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