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un vaste musée, où l'art du sculpteur offre à nos regards, avec orgueil, un nombre considérable de nouveaux chefs-d'œuvre. Autrefois l'amateur devait se résoudre à visiter dix ou douze églises de la capitale pour y admirer le même nombre de mausolées, tels que ceux du cardinal de Richelieu, dans celle de la Sorbonne; du curé Languet, à Saint-Sulpice; du cardinal de Fleury, à Saint-Thomas-du-Louvre, etc. Aujourd'hui, nos cimetières, sans compter ceux des grandes villes des départemens, établis sur leur modèle, en offrent des centaines, non moins admirables par leurs formes et leurs ornemens, que précieux par la matière de leur construction.

sance,

Depuis plus de vingt ans, un grand nombre de familles opulentes, ou seulement dans l'aiont élevé des monumens aux personnes dont elles déploraient la perte, et ces monumens sont devenus si nombreux, qu'ils ont rendu nécessaire l'agrandissement des cimetières du Père La Chaise, de Montmartre, et l'établissement de celui du Mont-Parnasse, en remplacement de celui de Vaugirard, où il n'était plus possible de creuser une fosse commune sans toucher aux sépultures dont le terrain était aliéné. Celui de Clamart, qui reçoit

les corps morts des hôpitaux de l'arrondissement, et celui de Saint-Marcel qui l'avoisine, sont les seuls pour lesquels un emplacement n'ait pas encore été désigné hors des barrières.

Ce qui est bien digne de remarque, c'est que le vaste enclos du Père La Chaise est ouvert, en vertu du libre exercice des cultes, aux morts qui, de leur vivant, appartenaient au lutheranisme, au calvinisme, au judaïsme et au schisme des Grecs. Là, une sépulture. commune reçoit la dépouille mortelle de tous les enfans du père commun des hommes, qui fait luire son soleil sur tous sans aucune distinction de croyance et de culte. Il est vrai que les luthériens et les calvinistes se sont réservé un emplacement particulier, et que les juifs ont choisi pour leur sépulture un terrain qu'ils ont enfermé de murs; mais ces réserves n'en sont pas moins comprises dans le grand cimetière, et la grande porte n'en est pas moins ouverte à tous, sans qu'un portier, aposté par l'intolérance, dise aux non-catholiques: On n'entre pas ici.

Une autre remarque qui se fait aisément par les personnes qui visitent le cimetière dont nous parlons et les autres, soit de la capitale, soit des provinces, c'est ce nombre prodigieux de croix qui s'élèvent sur les tombes de toutes les for

mes, et même sur toute la longueur des fosses communes. Les catholiques de France n'ont donc pas abjuré leur croyance, comme quelques écrivains atrabilaires voudraient nous le persuader; ils sont donc encore convaincus de l'existence de Dieu, de l'immortalité de l'âme, et de la divinité de Jésus-Christ. Le cimetière du Père La Chaise, hérissé de plusieurs milliers de croix, ce signe auguste et sacré de notre salut, n'est donc pas un cimetière athée, ainsi que le prétendent certains hommes qui se trompent, ou qui sont de mauvaise foi.

C'est un spectacle bien touchant que celui que trois cimetières de la capitale présentent, les dimanches, les jours de fêtes, et principalement le 2 novembre, jour consacré aux prières pour les défunts. De tous côtés, circulent autour des tombes, de nombreuses familles vêtues de deuil, qui sont venues renouveler la douleur causée par la perte des personnes que le trépas leur à enlevées dans le cours de l'année. Ici, une épouse et des enfans, les yeux baignés de larmes, prient en sanglotant, prosternés au pied de la pierre sépulcrale sous laquelle repose la dépouille mortelle d'un époux et d'un père; là, des jeunes gens jettent des fleurs sur le tombeau du savant et du mai

tre qui, naguère, les guidait dans la carrière épineuse des sciences. Plus loin, de vieux guerriers, à l'aspect du monument qui renferme la cendre du grand capitaine qui les précéda vingt fois dans le chemin de la victoire, s'agenouillent en pleurant, et se racontent les uns aux autres les grandes batailles d'Italie, d'Autriche, de Prusse, de Russie et d'Espagne, où, à leur tête, il se précipitait sur les bataillons de l'ennemi. Le voilà donc, disent-ils, le voilà renfermé sous ce froid monument, celui dont le nom vivra éternellement dans les fastes immortels de notre gloire, et dont les exemples enflammeront nos derniers neveux de l'amour de la patrie!

Il est impossible de calculer l'heureuse influence du spectacle qu'offrent nos cimetières, sur les mœurs des familles et des individus. Toutes les tombes qui se pressent sous des berceaux de feuillage, et devant chacune desquelles le spectateur peut s'arrêter pour en lire les inscriptions, parlent plus fortement à l'âme que le sermon le plus pathétique sur la courte durée de la vie, l'incertitude de la dernière heure et le néant des choses humaines. Le jeune homme et la jeune fille qui, par le mouvement de la seule curiosité, se sont rendus dans ces funėbres enceintes, s'y sentent bientôt pénétrés de

sentimens qui leur étaient inconnus. Ils y apprennent par des faits, aussi nombreux que certains, que le trépas n'épargne ni la jeunesse ni la beauté. En effet, sur cent tombeaux, il en est plus des deux tiers qui renferment les restes de jeunes garçons, de jeunes filles et de jeunes épouses.

Depuis quelques années, les missionnaires du mont Valérien ont établi au bas de la terrasse de leur enclos, du côté du nord-est, un cimetière qui, d'abord destiné à leur sépulture et à celle des autres ecclésiastiques logés dans les vastes bâtimens du Calvaire, reçoit aujourd'hui la dépouille d'autres personnes pieuses qui, par leur testament, ont demandé et obtenu la faveur d'y être inhumées. On y voit déjà plusieurs monumens fort simples, au nombre desquels on remarque le tombeau de M. de Beauvais, ancien évêque de Sénez, prédicateur éloquent et qui fut l'ami intime du vertueux Juigné, ancien archevêque de Paris et député à l'assemblée constituante.

DISCOURS FUNÈBRES SUR LES TOMBEAUX.

DEPUIS plus de vingt-quatre ans, s'est introduite la coutume de prononcer un éloge

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