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Quant aux noms terminés en iere, comme lumiere, premiere, & tous les autres qui ont un e muet à la derniere fyllabe, & un autre e à la pénultieme, les uns mettent un Accent Aigu é fur la pénultieme fyllabe, les autres y mettent un Accent Grave è; plufieurs n'y veulent aucun Accent. La prononciation de cet e tient le milieu entre celle de l'é fermé & de l'é très-ouvert; de forte que nous n'avons point d'Accent qui puiffe indiquer le fon de cet e. Quoiqu'il paroiffe approcher un peu plus de l'é fermé que de l'é très-ouvert, cependant on peut dire qu'il n'a befoin d'aucun Accent, parce que fa prononciation eft fuffilament déterminée par fa pofition, l'e pénultieme ne pouvant jamais être muet devant une derniere fyllabe muete. Il faut feulement obferver que fi on eft obligé de diviser un mot fur cet e pénultieme, il faut y mettre un Accent Aigu pour le faire prononcer: Ils arivé-rent; ils pénétré-rent.

L'Accent Aigu fe place encore fort bien fur la fyllabe pré, quand elle eft initiale dans un mot François dérivé d'un Latin qui commence par la prépofition præ: car alors l'é eft foiblement ouvert, comme dans ceuxci, précédent, prérogative, prétexte, prébende, précaution, précepte precipice, précis, prédefiné, Prédicateur, Préface, Préfet, & plufieurs autres femblables.

Enfin l'é Aigu eft encore admis, & fe prononce fermé, au commencement, au milieu, & à la fin de tous les mots où il fe trouve fuivi d'une voyele, quelle qu'elle foit, pourvu qu'il n'y forme pas une diphthongue. En voici des exemples approuvés par nos Modernes Créateur, néanmoins, préambule, il agréa: Réel, fuppléer, créé: Déité, obéiffance, obéi: Théorie, préoccupé, Théologie, Réunion, réuffir, & plufieurs autres femblables.

:

Enfin, pour placer à propos l'Accent Aigu, il faut connoître l'é fermé ou foiblement ouvert, par-tout où il fe rencontre, & l'oreille ne peut s'y acoutumer qu'à force d'entendre parler des perfones dont la prononcia

tion eft fans défaut.

Pour éviter la prononciation choquante de deux e muets qui fe rencontreroient de fuite, l'e muet des premieres perfones des Verbes devient fermé & prend l'Accent Aigu, quand ces perfones font fuivies du pronom perfonel je, avec lequel elles ne font qu'un mot: aime-je? parlé-je ?

ARTICLE IV. Du Tréma, ou double point place fur les Voyeles.

Il n'y a en François que trois voyeles qui portent des points en tête, favoir, ë, ï, ii, dont l'usage est de montrer qu'elles ne forment pas une diphthongue avec la voyele qui les précede, & que par conséquent on doit les prononcer séparément, comme on va le voir.

L'e Tréma ne fe rencontre qu'après l'a, l'o & l'u.

Après l'a comme en ces mots, Aërius, Aëtius, aëré, & femblables, où l'ë Tréma fert pour éviter qu'on ne prononce Erius, Erius, aré, &c.

Après l'o, dans aloës, poële, Noël, pour empêcher qu'on ne prononce l'o & l'e comme la diphthongue æ, qui fe trouve en ces mots œcuménique, adémateux, afophage, &c. quoique plufieurs bons Ecrivains n'admettent pas même le Tréma dans ces circonftances, parce que nous n'avons point de mots où l'a fe prononce en diphthongue; car dans ceux que nous venons de citer, il tient lieu d'un e fimple. D'ailleurs, toutes les fois que des deux voyeles qu'il faut prononcer séparément, l'une eft un é fermé, ou foiblement ouvert, l'Accent Aigu qu'il porte eft fuffifant pour empêcher qu'il ne foit confondu dans la prononciation avec la fyllabe qui le précede ou qui le fuit. Ainfi dans aéré, aérien, poéfie, l'Accent Aigu fur l'e produit le même effet que les deux points. Mais fi cet e fait la pénultieme fyllabe d'un mot qui a un e muet à la derniere, comme il n'eft pas fufceptible de l'Accent Aigu, on peut y mettre les deux points, comme dans Noël, poële. Par la même raison les deux points font inutiles dans aloès, parce que l's s'y prononce fortement, & que l'e doit avoir un Accent Grave.

Et enfin après l'u, dans aiguë, ambiguë, ciguë, &c. pour faire connoître qu'on doit prononcer ces mots autrement que ceux-ci, fatigue, Langue, & femblables.

A l'égard des mots rue, connue, menue, & tous les autres qui finiffent par ue, précédés d'une autre confone que g, il n'y faut point de Tréma, parce qu'on ne peut confondre la terminaifon de ces mots avec

aucune autre.

L'i Tréina fe place après l'a, l'o & l'u.

Après l'a dans hair, Adélaïde, Danaïde, Thébaïde, & femblables, pour empêcher qu'on ne prononce l'a & l'i comme dans les mots air chair, chaine, &c. où ils forment la diphthongue ai. Par la même raifon, il faut écrire aïeul, faïence, caier, ou cahier, glaïeul, païen, camaïeu, caïeu, gaïac, jaïet, judaïque, judaïfer, Judaïsme, laïc, naif, naïveté, Nicolaites, profaique, Spondaique, & autres femblables.

A

L'i étant après un é fermé, & devant faire fa fyllabe séparée, les deux points y font abfolument inutiles, & l'Accent Aigu fuffit fur l'e, pour diftinguer la prononciation de l'e & de l'i. Ainfi il faut fimplement écrire, Enéide, obéir, Deité, réimpofition, réimpreffion, réimprimer, réinfecters reintégrer, réintégrande, réitération, réitérer; fideicommis, Néréide, Plébéien, Pléiades, & femblables, pour marquer que l'e & l'i n'y forment pas la diphthongue ei, comme en ceux-ci, frein, dessein, plein, pleine, &c.

L'ï Tréma fe met après l'o dans Stoïcien, floïque, floïquement, héroïque, fimoïs, & femblables, parce que l'o & l'i n'y forment pas la diphthongue oi, comme en ceux-ci, oifeau, moitié, emploi, &c. Enfin il y en a qui placent l'i Tréma après l'u en ces mots, Louife, bruïne, nous concluïons, Druïde, jouïssance, éblouï, ouï, auditus & femblables, pour faire connoître que ces trois voyeles o, u & i, forment pas dans ces mots la diphthongue oui, ni ui, comme en ceuxci, oui, ita, (qui quelquefois eft de deux fyllabes chez les Poêtes,

ne

auquel cas il faudroit écrire oui) patrouille, rouille, bouillon, grenouille, ruiffeau, &c.

On pouroit cependant encore fe paffer de mettre l'ï Tréma après u & ou, dont le fon ne change pas, foit qu'ils forment une ou deux fyllabes avec l'i. C'eft l'ufage qui apprend quand ui & oui doivent être d'une ou de deux fyllabes. Ils font prefque toujours d'une feule dans la converfation, & l'on ne doit faire fentir la diftinction des deux fyllabes que dans le difcours foutenu & dans la Poéfie. Ainfi dès que le fon n'en est pas différent dans ces deux manieres de les prononcer, l'ï Tréma y eft inutile.

Il n'y a pas plus de raifon de metrte les deux points fur l'i des diphthongues ui & oui, qu'il n'y en auroit de les mettre fur l'une des trois voyeles ia, ie, io, &c. qui fe prononcent tantôt en une & tantôt en deux fyllabes. Cependant on ne les diftingue jamais par les deux points quand elles forment deux fyllabes: il doit en être de même à l'égard des voyeles ui & oui.

L'u Tréma fe place après les voyeles a & o.

Après l'a, dans ces mots, Archelais, Emmaüs, Efau, Saül, & femblables, pour marquer qu'elle n'y eft pas diphthongue, comme en ceux-ci, Laudes, Saumon, Paul, &c.

Après l'o, en ces mots, Pirithous, Bagoüs, & femblables, pour faire voir que la derniere fyllabe de ces mots ne fone pas comme la diphthongue ou, qui fe trouve en ceux-ci, tous, gott, jour, &c. dont la prononciation eft bien différente. Pour en avoir une preuve inconteftable, il ne faut que comparer ces deux noms Saül, Roi des Ifraëlites, & Saul, Apôtre. L'Orthographe de ces deux mots eft femblable; ce, font les mêmes lettres : cependant la prononciation en est bien différente; car le premier eft de deux fyllabes qu'on prononce séparément Sa-ül; au contraire, le fecond n'eft que d'une, puifqu'on prononce Saul comme Paul: ainfi il faut avouer qu'il n'y a que le Tréma ou les deux points qui fe trouvent fur l'ü qui en font la différence: d'où il faut conclure qu'il ne doit être employé que dans ces fortes d'occasions; c'est-à-dire, pour diftinguer d'une diphthongue les voyeles qui n'en forment pas, & qui doivent être prononcées séparément.

Par les mêmes raifons qui vienent d'être expliquées à l'égard de l'e fermé ou foiblement ouvert après o & a, & avant i, il n'est pas néceffaire de mettre deux points fur l'u quand il est après une fermé, pour empêcher qu'on ne prononce ces deux voyeles comme la diphthongue eu, l'Accent Aigu fur l'é fuffira pour les faire prononcer séparément avec le fon qui leur eft propre. Ainfi on écrira réunion, réussir, &c. & non réunion, réussir, &c.

On a fouvent confondu l'i Tréma avec l'y: delà vient qu'on le trouve dans ces mots, Roïaume, nétoïer, aïant, & cent autres où il ne doit pas avoir d'entrée, l'y ayant droit d'y être placé par préférence, comme nous l'avons montré en parlant de l'Y.

On écrivoit auffi autrefois avec un i Tréma les mots loüer, joüer,

Louis, bouillon, grenouille, jouir, & plufieurs autres femblables, & cela, difoit-on, pour empêcher qu'on ne prononçât lover, jover, Lovis bovillon, grenoville, jovir, & ainfi des autres. Mais aujourd'hui où la figure de l'u voyele & de l'v consone est aufli différente à la vue, que le fon l'eft à l'oreille, il n'y a que les gens qui ne favent pas lire qui puiffent s'y méprendre.

ARTICLE V. De l'Apoftrophe.

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L'Apoftrophe a été inventée pour marquer l'élifion ou fuppreffion d'une voyele finale, & aider à la prononciation. Elle doit fe mettre à la place de l'e dans ces monofyllabes, je, te, fe, la, le, de. , ce, me que, ne, lorfque la finale est mangée par le mot fuivant, qui commence par une voyele, comme en ces exemples: J'aime, il t'aime, il s'aime l'ambition, l'honeur, c'eft, d'avoir, il m'aime, il n'a, qu'il, & femblables, pour faire voir qu'on ne doit pas prononcer, il fe aime, la ambition, le honeur, il ne à, & ainfi des autres.

Elle fe met encore après ces mots entre & jufque, lorsqu'ils font fuivis de ceux-ci, autres, eux, elles, à, au, aux, ici. Exemples, entr'eux, entr'elles, entr'autres, jufqu'à, jusqu'au, jufqu'aux, jufqu'ici, & femblables, pour marquer que la finale du premier mot eft mangée par le fuivant.

L'ufage veut auffi qu'on la mette dans les mots, aujourd'hui, cejourd'hui, d'hui en un an, d'abord.

On s'en fert encore quelquefois pour fupprimer l'e final du mot grande, quand il eft joint à ceux-ci, grand' Meffe, grand peur, grand'chambre grand' falle, grand'chere, grand'pitié, grand'chofe, mais cette regle n'est générale & toujours ufitée que dans le mot grand'mere.

Enfin, quand la particule fe rencontre devant les pronoms il & ils, l'ufage général veut qu'on faffe une élifion, & qu'on écrive s'il, s'ils, avec une Apoftrophe.

C'eft abufivement que l'on a quelquefois fupprimé l'e du mot quelque, pour y mettre une Apoftrophe: quelqu'afaire, quelqu'événement. C'est unir mal à propos deux mots qui doivent être séparés. Si on fupprimoit l'e dans ce mot, bientôt il faudroit le fupprimer dans tout autre, par-tout où il feroit fuivi d'une voyele, & prefque tous les mots fe trouveroient confondus les uns avec les autres. Mais non: il faut laiffer cet e au mot quelque comme à tous les autres, quoiqu'il y foufre élifion dans la prononciation.

ARTICLE VI. De la Divifion.

Le figne qu'on appele Divifion, parce qu'il fert à divifer les mots à la fin des lignes, pouroit auffi être appelé Trait-d'union, parce qu'il fert auffi à joindre & unir ensemble deux ou trois mots qui, pour ainfi dire, n'en forment qu'un, comme on peut le voir dans ceux-ci : Avant-coureur, avant-garde, arriere-ban, franc-fief, porte-manteau; c'est-à-dire,

vis-à-vis, & quantité d'autres, qu'on trouvera diftribués felon l'ordre alphabétique dans ce Traité.

Mais le principal ufage de la Division est, comme nous l'avons dit, de divifer ou couper les mots qui ne pouvant être mis entiers dans une ligne où il en entre une partie, font achevés au commencement de la fuivante, ce qu'on doit abfolument éviter dans les Tires, & autant qu'il eft poffible dans les placards, les in folio, & même dans les in-4°, où elle ne doit être admise que très-rarement. Dans les in-8°, in-12 & in-16, elle eft plus fupportable: cependant on doit encore alors l'éviter, du moins dans les premieres Pages, dans les Epîtres Dédicatoires & dans les titres des Chapitres, Articles, ou Paragraphes: mais elle est fi fréquente dans les petits Livres, tels que font les in-12 à deux colonnes, les in-18, les in-24, les in-32, & les autres encore plus petits, auffi-bien que dans les additions ou notes marginales, qu'on ne peut prefque plus l'y

éviter.

Lorsqu'on ne peut fe difpenfer de l'employer, voici les regles qu'il convient de fuivre dans la maniere de l'appliquer.

La Divifion ne doit être placée qu'entre deux fyllabes; & il faut que celle qui la précede foit au moins de deux lettres, comme an-née : car ċe figne auroit très mauvaise grace après une feule voyele, comme en ces mots, a-vec, a-voir, é-vénement, o-blation, i-vrogne, & femblables, à moins qu'il n'y eût devant cette premiere fyllabe une élifion, comme d', l', n', ce qui rend la Division tolérable, quand d'ailleurs on eft gêné. Exemples, d'a-mour, l'é-vénement, n'a-voit, &c. Ainfi au lieu de mettre à la fin d'une ligne a- & au commencement de la fuivante vec il faut mettre le mot entier dans la ligne fuivante.

On ne doit jamais placer la Divifion au milieu d'une diphthongue, ni au milieu de plufieurs voyeles qui peuvent former une ou deux diphthongues: voici des exemples de ce défaut, ca-ur, ay-ant, Roy-aume, A-out, recueillir, exempti-on, & plufieurs autres femblables qu'il faut abfolument éviter.

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La Divifion a encore lieu entre les Verbes & leurs Nominatifs, quand ils font tranfposés; ce qui arive quand il y a une interrogation après ces mots, je, tu, il, elle, nous, vous, ils, elles & on. Exemples, dis-je, vois-tu, croit-il, eft-elle, allons-nous, irez-vous, y feront-ils, viendront-elles, croit-on, &c. Mais quand les Verbes fe terminent par un e muet ou par un a, on ajoute un en faveur de la prononciation lorfque ces Verbes font fuivis des pronoms il, elle & on; & ce i fe met entre deux Divisions. Exemples, Penfe-t-il, parle-t-elle, dira-t-on ? Autrefois on mettoit une Apoftrophe après le au lieu de la Divifion mais ce n'eft plus l'ufage, parce qu'en effet il n'y a là aucune élision; au contraire, ce eft inséré là précisément pour empêcher qu'il n'y ait élifion.

La Divifion fe place encore fort bien après les pronoms moi, toi, foi, lui, elle, nous, vous, eux & elles, lorfqu'ils font fuivis du mot même relatif. Exemples, moi-même, toi-même, foi-même, lui-même

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