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ments survenus exigent des dispositions nouvelles, il doit y être pourvu par le gouvernement, dans un règlement d'administration publique, rendu sur la proposition du préfet du département, de manière que la quotité de la contribution de chaque imposé soit toujours relative au degré d'intérêt qu'il a aux travaux qui doivent s'effectuer (Ibid. art. 2).

Les rôles de répartition des sommes nécessaires au paiement des travaux d'entretien, réparation ou reconstruction, sont dressés sous la surveillance du préfet, rendus exécutoires par lui; et le recouvrement s'en opère de la même manière que celui des contributions publiques (Ibid. art. 3).

Toutes les contestations relatives au recouvrement de ces rôles, aux réclamations des individus imposés, et à la confection des travaux, doivent être portées devant le Conseil de préfecture, sauf le recours au gouvernement, qui décide en Conseil d'Etat (Ibid. art. 4).

Lorsque les travaux de réparations et de reconstructions d'une digue établie sur une rivière navigable, intéressent à la fois la navigation et les propriétaires d'usines qui profitent de la retenue des eaux, les propriétaires de ces usines sont obligés de contribuer aux réparations de cette digue, lorsque l'imputation des dépenses a été faite conformément aux usages locaux et aux anciens arrêts du conseil rendus relativement aux réparations de cette digue.

Les avances faites ou à faire sur les fonds de la navigation pour les travaux à exécuter d'urgence, ne sont point un obstacle au recours de l'administration contre les riverains qui profitent des tra

vaux.

20. On comprend, par la lecture de ce qui précède, que les cours d'eau, non navigables ni flottables, se divisent en cours d'eau libre et cours d'eau soumis à des dispositions réglementaires administratives; nous allons essayer de donner l'idée, en ce qui concerne notre matière, de la division des pouvoirs administratifs et judiciaires.

Le pouvoir administratif réglementaire des cours d'eau appartient seulement au Roi, le Conseil d'État entendu; mais, dans la pratique, il n'en est point ainsi, et toutes les dispositions réglementaires émanent seulement des préfets; au moins ces mesures, administratives devraient-elles être approuvées du ministre de l'intérieur; cependant la Cour de cassation, par une jurisprudence constante, a reconnu à l'ordonnance du préfet, pure et simple, la force obligatoire nécessaire pour asseoir ses arrêts.

Il faut donc, d'après les distinctions que nous allons poser, s'adresser soit aux tribunaux ordinaires, soit au préfet.

Seulement, dans le cas où les règlements du préfet porteraient atteinte à des intérêts particuliers, il faudrait les déférer au Conseil d'État, qui, d'après sa jurisprudence, les considère comme de nul

effet.

Suivant cette distinction, si des propriétaires veulent demander la réformation d'un ancien usage ou d'un ancien règlement, ils le peuvent en provoquant un règlement d'administration publique, conformément aux articles 33 et 34 de la loi du 16 septembre 1817 (Ordonnance du 10 janvier 1821).

C'est aux administrations à prononcer lorsqu'il s'agit de prendre sur un cours d'eau une mesure de police non répressive, d'en ordonner le curage ou d'y faire faire des travaux quelconques, soit pour faciliter l'écoulement des eaux, soit pour empêcher qu'il ne nuise au public. Ainsi, un arrêt de Cassation, du4 février 1807, a prononcé la nullité d'une ordonnance du juge de paix de ChâteauRenard, du 22 février 1814, par laquelle ce juge avait ordonné différents travaux relativement au ru ou cours d'eau de la Dardenne et de la rivière de Douanne. Et un décret du 19 mars 1808 a annulé un jugement qui déclarait arbitraire et vexatoire un arrêté du maire de la commune de Coussel, portant que la vanne d'un moulin serait de suite abaissée à un degré déterminé pour l'écoulement des eaux.

Au maire appartient le pouvoir de réglementer l'usage de l'eau qui coule d'une fontaine communale (Cass., 5 novembre 1825). Il est aussi donné à ce magistrat d'intervenir dans les cas d'urgence, sécheresse ou inondation, ou afin de pourvoir à la salubrité (Loi du 24 août 1790).

Mais c'est devant les tribunaux que doivent être portées les contestations relatives aux cours d'eau qui ne forment ni des fleuves ni des rivières flottables, lorsqu'elles présentent à décider une question d'usage résultant seulement de l'existence d'un cours d'eau non réglementé.

Et particulièrement si une digue faite par un particulier à travers une rivière non navigable, pour la pêche de cette rivière, doit ou ne doit pas être détruite ( Décret du 12 avril 1812).

De même, à l'égard des eaux d'un moulin placé sur un ruisseau; les tribunaux connaissent exclusivement des contestations sur la propriété des eaux, et sur la quantité de celles qui appartiennent soit au moulin supérieur, soit au moulin inférieur, dans

l'intérêt privé des propriétaires. Mais l'administration serait appelée à connaître des questions de police ou d'administration, notamment de celles relatives au déversoir, etc. (Bordeaux, 3 août 1841).

C'est aussi aux tribunaux que l'on doit s'adresser pour faire décider si un ancien règlement, par lequel ont été faits le partage et la distribution des eaux entre les propriétaires riverains d'un ruisseau, doit être annulé, sur le fondement que les eaux ont été distribuées d'une manière inégale entre eux, et que le seigneur féodal y a paru comme riverain et possesseur d'un moulin (Cass., 8 septembre 1814; Besançon, 21 nov. 1828).

C'est également aux tribunaux, à connaître des contestations élevées entre deux particuliers, à raison des travaux exécutés par l'un d'entre eux sur un cours d'eau, à l'égard duquel ces deux particuliers ont fait une convention (Ordonnance du 10 janvier 1821).

C'est encore aux tribunaux, qu'il appartient de prononcer sur les points qui divisent les propriétaires de différents terrains, ayant droit en commun à la jouissance des eaux d'une fontaine, lorsque le mode de jouissance n'est déterminé ni par les titres, ni par aucun règlement particulier et local.

Chacun de ces propriétaires peut même provoquer ce règlement, quelque long que soit le laps de temps qui s'est écoulé sans qu'il ait été demandé, parce que le droit de le provoquer est pour chaque propriétaire un droit facultatif inhérent à leur qualité de communiste, et par conséquent imprescriptible (Cass., 10 avril 1821).

C'est enfin à l'autorité judiciaire, qu'il appartient de prononcer sur un acte par lequel deux particuliers se sont interdit respectivement de changer la direction d'un cours d'eau. Mais s'il y avait lieu de pourvoir à un meilleur mode d'écoulement des eaux dans l'intérêt des riverains, l'administration serait seule compétente à statuer (Ordonnance du 19 décembre 1821).

En général, toutes contestations d'intérêt privé entre particuliers sur l'application d'un règlement administratif pour le cours des eaux, sont de la compétence des tribunaux (Ordonnance du 20 février 1822).

Ainsi, un tribunal prononce valablement sur une demande en dommages-intérêts, intentée par les riverains d'un cours d'eau réglementé, pour le préjudice qui leur est causé par l'élévation donnée au déversoir d'une usine (Cass., 2 janvier 1832).

Aux termes de l'article 6 de la loi du 25 mai 1838 sur les justices de paix:- Les juges de paix connaissent, à charge d'appel, des

entreprises commises, dans l'année, sur les cours d'eau servant à l'irrigation des propriétés et au mouvement des usines et moulins. Cet article ajoute sans préjudice des attributions de l'autorité administrative dans les cas déterminés par les lois et par les règlements. Nous citons cette disposition législative comme complément des principes sur la matière (1).

SECTION DEUXIÈME.

DU BORNAGE.

21. Définition.

22. Qui peut demander le bornage, et quand peut-il être demandé?

23. Bornage judiciaire et amiable.

24. Des rapports d'experts.

25. Solution de quelques difficultés.

26. Des bornes. Bornes mobiles et immobiles,

27. Théorie présentée par M. Desgodets sur la position exacte d'une limite couverte par un mur.

28. Précautions à prendre pour la pose des bornes.

29. Du tribunal compétent pour juger l'action.— Des frais.

21. Le bornage est un droit immobilier, appartenant à toute personne possédant à titre de propriétaire, à l'effet de faire déterminer, vis-à-vis des propriétaires voisins, la limitation exacte de son héritage et la fixation irrévocable des limites.

22. — Tout propriétaire peut obliger son voisin au bornage de leurs propriétés contiguës (C. C. 646).

Celui qui demande le bornage n'a pas besoin de justifier de sa propriété, il suffit qu'il possède à titre de propriétaire, animo domini, soit par lui-même soit par quelqu'un qui possède en son nom, l'héritage pour lequel il exerce l'action de bornage. Sa possession le fait présumer propriétaire, tant que le véritable propriétaire ne se présente pas et ne réclame pas cette possession.

Il n'est pas besoin que sa propriété soit irrévocable, il suffit qu'il ait un droit de propriété, quand bien même ce droit serait résoluble.

(1) Antérieurement à la loi de 1838, l'art. 3 du C. de P. établissait la compétence des juges de paix relativement aux entreprises sur les cours d'eau commises pareillement dans l'année.

Ainsi, par exemple, quoique l'acquéreur à faculté de rachat ait une propriété résoluble, il peut demander le bornage, parce qu'il peut exercer tous les droits de son vendeur (C. C. 1665).

De même, le propriétaire d'un héritage indivis, auquel appartient en même temps un héritage particulier, contigu de celui qui est commun, peut requérir le bornage, parce que l'indivision d'un héritage ne peut pas priver l'un des co-propriétaires de cet héritage de l'exercice des droits qu'il a comme propriétaire d'un fonds particulier contigu à celui qui est commun (L. 27, ff. de servi. præd. rust.).

Le droit de bornage étant un droit immobilier, il ne peut pas être exercé par le tuteur d'un mineur ou d'un interdit, sans autorisation du conseil de famille, laquelle autorisation est absolument nécessaire au tuteur, soit pour introduire en justice une action relative aux droits immobiliers du mineur ou de l'interdit, soit pour acquiescer à une demande relative aux mêmes droits. Mais un tuteur peut défendre à une demande en bornage, sans autorisation du conseil de famille. Par argument de l'art. 465 du Code civil, qui permet au tuteur de défendre à une demande en partage, sans y être autorisé par un conseil de famille (C. C. 464, 465, 509).

Le bornage ne pouvant être demandé que par un propriétaire, et contre un propriétaire (C. C. 646), il ne peut pas être requis par les usufruitiers, parce qu'ils possèdent pour autrui et détiennent précairement la chose du propriétaire (C. C. 2236).

Par la même raison, il ne peut pas être réclamé par les fermiers.

Ces derniers, par le seul motif qu'ils ne sont que détenteurs précaires, ne peuvent pas même intenter d'action lorsqu'ils sont troublés dans l'exercice d'une servitude nécessaire ou utile à leur exploitation. La Cour de cassation, par arrêt du 7 septembre 1808, a cassé un jugement du tribunal civil de Laon, qui avait admis un fermier à se plaindre du trouble qu'il avait éprouvé dans la jouissance d'un sentier nécessaire à son exploitation, et maintenu ce fermier dans la possession de ce sentier.

Le même motif milite contre les usufruitiers et les emphyteotes

à temps.

Quoique les usufruitiers, les emphytéotes à temps et les fermiers ne puissent pas demander le bornage, ils ont droit d'exercer une action contre le propriétaire, pour le forcer à le demander. Ils ne peuvent pas même se dispenser d'exercer cette action, lorsque le bornage devient nécessaire pour faire cesser l'usurpation

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