Images de page
PDF
ePub

La loi du 21 mai 1836 a réglementé, dans son application, les obligations qui résultent du principe précité. On sait que les ressources des communes sont insuffisantes pour pouvoir entretenir d'une manière complète la totalité des routes et chemins qui les traversent; l'économie de la loi de 1836 consiste à classer les routes ou chemins communaux en deux catégories: la première comprend les chemins d'une utilité générale et incontestable, on lui applique toutes les ressources communales; la seconde, dans laquelle se rangent les autres voies, est forcément négligée dans l'intérêt de la première ; cette négligence forcée ne doit cependant être que momentanée; et, à mesure que les ressources de l'association communale augmenteront, les chemins de la deuxième catégorie passeront à la première.

Les voies de communications comprises dans la première classe, prennent le nom de chemins vicinaux.

Il n'entre pas dans les limites de notre ouvrage, de donner les règles à suivre pour opérer le classement des chemins vicinaux, il nous suffit de dire que ce classement ne peut être déterminé que par arrêté du préfet, précédé d'enquête, délibération du Conseil municipal et avis du sous-préfet (Ordonnance, 17 août 1836). L'arrêté du préfet fixe la direction du chemin et sa largeur ; cet arrêté attribue définitivement au chemin le sol compris dans les limites qu'il détermine (Loi 1836, art. 15).

[ocr errors]

Le droit des riverains dépossédés se résout en une indemnité, ainsi que cela a lieu en toute espèce d'expropriations. En matière de chemins vicinaux, cette indemnité est fixée par le juge de paix du canton, après un rapport d'experts, nommés dans les formes que nous indiquons ci-après. On conçoit la gravité de la mission confiée au juge de paix et aux experts, ils remplacent le jury de la loi sur l'expropriation, et doivent avoir la même indépendance, puisque les mêmes intérêts leurs sont confiés.

M. Dufour, no 602, dit que l'indemnité ne doit pas être préalable à la dépossession, il s'appuie sur un arrêt de Cassation du 7 juin 1838. Sans vouloir critiquer la jurisprudence de la Cour suprême, et l'opinion du consciencieux jurisconsulte, nous pensons que les principes de la dépossession doivent être toujours les mêmes, qu'il s'agisse d'opérer sur une grande étendue ou sur une parcelle de terre, et qu'il n'est pas impossible de concilier le texte de notre loi avec la garantie donnée à la propriété par la loi civile et politique; c'est ce que nous nous sommes déjà efforcé de faire sentir quand nous avons vu la même jurisprudence appliquée à la dépossession des terrains devant servir à un chemin de halage.

46. L'entretien des chemins vicinaux, nous l'avons vu, incombe aux communes, auxquelles la loi accorde pour cet objet la faculté de s'imposer extraordinairement; elle détermine aussi les prestations en nature qui sont dues par les habitants, et même par les animaux de la commune. Sur la proposition du préfet, les chemins vicinaux peuvent, selon leur importance, être déclarés chemins vicinaux de grande communication: cette détermination appartient aux Conseils généraux, après avis des Conseils municipaux et d'arrondissement; dans ce cas, ils peuvent recevoir des subventions sur les fonds départementaux; les chemins simplement vicinaux peuvent jouir du même privilège, mais seulement dans des cas extraordinaires.

47. Il y a souvent lieu à des règlements d'indemnités relatives aux dégradations apportées aux chemins vicinaux, et c'est là une matière très-fertile en expertises; la loi en a déterminé les causes et fixé l'objet.

Toutes les fois qu'un chemin vicinal, entretenu à l'état de viabilité par une commune, sera habituellement et temporairement dégradé par des exploitations de mines, de carrières, de forêts, ou de toute autre entreprise industrielle appartenant à des particuliers, à des établissements publics, à la Couronne ou à l'État, il pourra y avoir lieu à imposer aux entrepreneurs ou propriétaires, suivant que l'exploitation ou les transports auront eu lieu pour les uns ou les autres, des subventions spéciales, dont la quotité sera proportionnée à la dégradation extraordinaire qui devra être attribuée aux exploitations. Elles seront réglées annuellement, sur la demande des communes, par les Conseils de préfecture, après des expertises contradictoires.

Ces subventions pourront aussi être déterminées par abonnement; elles seront réglées, dans ce cas, par le préfet en Conseil de préfecture.

Il y a également lieu à expertise, dans les cas où il s'agit de fixer une indemnité due pour occupation temporaire de terrain, pendant la construction ou réparation des chemins, et autres causes semblables. « Les extractions de matériaux, les dépôts ou en» lèvement de terre, les occupations temporaires de terrains, se>> ront autorisés par arrêté du préfet, lequel désignera les lieux; » cet arrêté sera notifié aux parties intéressées, au moins dix jours >> avant que son exécution puisse être commencée. Si l'indem»nité ne peut être fixée à l'amiable, elle sera réglée par le Con? seil de préfecture sur rapport d'experts. »

[ocr errors]

L'action en indemnité, des propriétaires, pour les terrains qui auront servi à la confection des chemins vicinaux, et pour extraction de matériaux, sera prescrite par le laps de deux ans.

48. Après avoir vu les cas d'expertise prévus par la loi, il nous reste à déterminer le mode de nomination des experts.

L'un sera nommé par le propriétaire, et l'autre par le sous-préfet. En cas de discord, le tiers-expert sera nonimé par le Conseil de préfecture (Art. 17).

Il nous semble qu'il aurait mieux valu laisser au pouvoir judiciaire, complètement étranger à tout intérêt, la nomination du tiers-expert.

49.-Les chemins communaux (on donne ce nom, comme nous l'avons vu, aux voies de communication non classées vicinales) sont, quant à leur entretien, à la charge des communes qui, n'en abandonnant pas la propriété, doivent s'opposer à tout empiètement ou détériorations. Il nous semble hors de doute, et cela par application des principes généraux du droit, que si un propriétaire riverain d'un chemin communal, par suite d'une exploitation particulière, mine, bois, etc., le détériorait, il devrait être tenu à en opérer le rétablissement; s'il en était autrement, les autres riverains souffriraient de l'usage d'un seul, conséquence évidemment injuste, en présence de ce grand axiôme de droit et d'équité: quiconque cause à autrui un préjudice, lui doit réparation. Bien entendu que, dans ce cas, les tribunaux civils seraient seuls

compétents.

50.

Il peut se faire qu'un chemin classé comme vicinal, cesse d'avoir cette existence, par suite soit de changement de direction, soit d'abandonnement; dans ce cas, les propriétaires riverains de la partie de chemin qui cesse de servir de voie de communication, peuvent faire soumission de s'en rendre acquéreurs, et d'en payer la valeur, d'après fixation faite par experts, suivant la forme que nous avons déterminée. S'il s'élève une contestation entre la commune et le propriétaire riverain, M. de Cormenin estime, et avec raison, suivant nous, que les tribunaux sont seuls compétents : dans ce cas, ils auront à examiner le rapport d'expert, et peut-être à faire procéder à une nouvelle expertise, car ils ne sont en aucune manière liés par les textes que nous avons cités, et qui ne sont pas applicables à cette contestation. Cependant, le mode de nomination des experts donnant une grande garantie d'indépendance et de lumière, une nouvelle expertise nous semble devoir être très-rare.

Experts.

10

« L'effet de la soumission ne peut cependant pas être d'enlever » aux propriétaires riverains leurs droits de vue, d'issue et dés» serte sur le chemin supprimé et vendu. » M. de Cormenin réserve cette question aux tribunaux civils.

Enfin, nous terminons ce que nous avons à dire sur la matière, par l'art. 1o de la loi de 1836 : les chemins vicinaux reconnus et maintenus comme tels, sont imprescriptibles.

SECTION TROISIÈME.

DES SERVITUDES MILITAIRES.

51. Tous immeubles et ouvrages servant à la défense de l'État, forment une propriété nationale.

52. Des lois des 10 juillet 1791 et 17 juillet 1819.

53. Principe des servitudes militaires.

54. Du plan et de ce qu'il doit contenir.

55. Renvoi aux dispositions de la loi sur l'expropriation, et au texte de l'ordonnance du 1er août 1831.

51. Tous terrains de fortifications des places de guerre ou poste militaire, tels que remparts, parapets, fossés, chemins couverts, esplanades, glacis, ouvrages avancés, terrains vides, canaux, floques ou étangs dépendant des fortifications; et tous autres objets faisant partie des moyens défensifs des frontières du royaume, tels que lignes, redoutes, batteries, retranchements, digues, écluses, canaux et leurs francs-bords, lorsqu'ils accompagnent les lignes défensives ou qu'ils en tiennent lieu, quelque part qu'ils soient situés, soit sur les frontières de terre, soit sur les côtes, et dans les îles qui les avoisinent, sont propriétés nationales ; en cette qualité, leur conservation est attribuée au ministre de la guerre.

52.- Deux lois, la première de l'Assemblée nationale, en date du 10 juillet 1791, et une seconde, du 17 juillet 1819, ont réglé lá nature et l'étendue des servitudes militaires.

C'est surtout la dernière de ces lois qui nous doit occuper, nonseulement parce qu'elle reproduit ou modifie une partie de la première, mais en outre, parce qu'elle prescrit des travaux d'expertise et levées de plans considérables.

53.

Il ne peut être fait aucun chemin, levée ou chaussée, ni creusé aucun fossé dans l'étendue de 974 mètres au

tour des places de guerre, et 584 mètres autour des postes militaires.

Au-delà de 250 mètres des fortifications, il est permis d'élever des bâtiments et clôtures en bois et en terre, sans y employer de pierres ni de briques, même de chaux ni de plâtré, autrement qu'en crépissage; pour les places de première et deuxième classe. A pareille distance des ouvrages d'une place de troisième classe, il peut être fait telle construction qu'on juge convenable, sauf le droit qu'a l'administration de la guerre, dans les deux cas, de faire démolir toutes ces constructions, sans aucune indemnité pour les propriétaires. Tels sont les principes généraux des servitudes militaires, qui sont, comme on le voit, fort onéreuses pour la propriété qu'elles frappent. Aussi, une certaine tolérance est permise et vient déroger, en vertu de la loi de 1819, à la rigueur de celle de 91. Ainsi, le ministre de la guerre peut permettre, par exception, la construction de moulins et autres semblables usines en bois, et même en maçonnerie, à condition que lesdites usines ne seront composées que d'un rez-de-chaussée, et à charge, par les propriétaires, de ne recevoir aucune indemnité pour démolition en cas de guerre. Les permissions de cette nature ne peuvent toutefois être accordées qu'après que le chef du génie, l'ingénieur des ponts-et-chaussées et le maire auront reconnu, concert, et constaté par procès-verbal, que l'usine qu'on se propose de construire est d'utilité publique, et que son emplacement est déterminé par quelque circonstance locale qui ne peut se

rencontrer ailleurs.

54. L'une des prescriptions essentielles de la loi de 1831 concerne un plan dont elle prescrit la levée, et auquel elle attache, avec raison, une grande importance. Voici ses dispositions à l'égard de ce plan :

Les terrains militaires appartenant à l'État, sont limités par des bornes plantées contradictoirement avec les propriétaires des terrains limitrophes ; ces bornes doivent être rattachées à des points fixes et rapportées sur un plan spécial de circonscription.

[ocr errors]

Les distances que nous avons précédemment énumérées, comme soumises à l'exercice des servitudes militaires, seront marquées, quant à leurs points extrêmes, par des bornes qui, réunies de proche en proche par des lignes droites, serviront de limites extérieures aux terrains soumis auxdites servitudes. Ces bornes seront, comme nous l'avons dit précédemment, rattachées à des points fixes et rapportées sur le plan de circonscription.

« PrécédentContinuer »