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servitude ne subsistât toujours, parce que le fonds commun peut bien devoir une servitude au fonds particulier qui appartient en entier à un des maîtres du fonds commun (L. 20-27, ff. de servit. præd. rust.).

Enfin, si le propriétaire du fonds dominant devient maitre de partie du fonds servant, ou si le propriétaire du fonds servant devient maître de partie du fonds dominant, la servitude se perd en partie (L. 8, paragr. 2, ff. de servit. ):

Si, par exemple, nous héritons chacun pour moitié d'un jardin de cinquante ares, pour l'arrosement duquel le parent auquel nous avons succédé avait le droit de prendre chaque jour dix tonneaux d'eau dans le puits de votre maison, cette servitude se trouve éteinte pour moitié par la réunion qui se fait, dans votre main, de la moitié de l'héritage dominant avec l'héritage servant; en conséquence, je ne puis plus prendre que cinq tonneaux d'eau par jour dans votre puits.

Mais si l'objet de la servitude ne pouvait pas être divisé, la règle n'a plus d'application. Si, par exemple, ma maison est assujettie au droit de ne pouvoir être élevée, pour ne point nuire aux vues d'une maison voisine, et que nous achetions en commun cette maison voisine, je ne pourrai pas plus élever ma maison, depuis notre acquisition, que je ne le pouvais auparavant.

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233. On ne peut pas regarder deux héritages comme réunis dans la main du même propriétaire, lorsqu'il ne possède l'un de ces héritages qu'en vertu d'un partage provisionnel fait entre lui et ses cohéritiers mineurs, parce qu'un partage provisionnel n'est point attributif de propriété, et que ce n'est que par un partage définitif qu'un cohéritier devient propriétaire des héritages compris dans son lot.

SIII. EXTINCTION DES SERVITUDES PAR LA RÉSOLUTION DU DROIT DU PROPRIÉTAIRE QUI A CONSENTI LA SERVITUDE.

234. La résolution du droit de celui qui a consenti l'exercice d'une servitude opère la révocation de cette servitude.

235. Exemples et distinctions.

236. Exception à ce mode d'extinction.

237. Quid des servitudes consenties par un tiers détenteur contraint au délaissement.

234. Les servitudes s'éteignent, lorsqu'ayant été imposées

sur un héritage par un propriétaire dont le droit n'était pas incommutable, le droit de ce propriétaire vient à se résoudre pour une cause existant au moment où il est devenu propriétaire, et contre laquelle il n'a aucune exception à proposer; car il n'a pas pu accorder sur cet héritage plus de droits qu'il n'en avait luimême. C'est le cas de la maxime : soluto jure dantis, solvitur jus accipientis (1).

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235. Ainsi, par exemple, si le propriétaire d'un immeuble en est dépossédé en vertu de la faculté de rachat, que son vendeur s'était réservée, les servitudes qu'il avaît accordées sur cet immeuble cessent avec la possession de l'immeuble, qui retourne entre les mains du vendeur, exempt de toutes les charges dont l'acquéreur l'avait grevé (C. C. 1673, paragr. 2).

Pareillement, lorsqu'une donation entre vifs est révoquée, pour cause d'inexécution des conditions sous lesquelles elle a été faite, ou pour cause de survenance d'enfants, ou réduite, parce que le donateur a excédé la faculté que la loi lui accordait de disposer, les biens immeubles compris dans la donation révoquée ou dans sa réduction retournent dans le patrimoine du donateur, libres de toute servitude (C. C. 929, 954 et 963).

Il en est de même si une vente d'héritage est rescindée pour cause de violence et de dol, et même pour cause de lésion, quoique, dans ce dernier cas, l'acheteur puisse conserver l'héritage en suppléant le juste prix, parce que, pour qu'on puisse dire que le droit d'un propriétaire se résout pour une cause existant au moment où il est devenu propriétaire, il suffit que l'action sur laquelle il est contraint de délaisser l'héritage soit une action à laquelle aucun fait de ce propriétaire, intervenu depuis le contrat, n'a donné lieu, mais qui naît d'un vice du contrat, telle qu'est l'action rescisoire (Loiseau, du Déguerpissement, liv. 6, chap. 3).

Il en est encore de même si une vente d'héritage est déclarée nulle, faute par l'acquéreur d'en avoir payé le prix, parce que, dans će cas comme dans les cas précédents, la résolution de la vente remet les choses dans le même état que si la vente n'avait jamais existé (C. C. 1183, 1184, 1654, 1655 et 1656).

-

236. Mais si celui qui a concédé un droit de servitude sur un héritage avait, lors de cette concession, un droit irrévocable de propriété sur cet héritage, et que son droit n'ait été éteint que pour une cause procédant de son fait, cette extinction de son droit de

(1) L. 11, ff. quemad. servit. amit.

propriété n'entraîne pas celle des servitudes qu'il a constituées. Par exemple, lorsqu'un donataire a concédé des servitudes sur l'héritage qui lui a été donné, la révocation de la donation, pour cause d'ingratitude, ne préjudicie point à ces servitudes, si elles ont été accordées antérieurement à l'inscription qui doit être faite de l'extrait de la demande en révocation, en marge de la transcription des actes contenant la donation et l'acceptation de cette donation (C. C. 958).

237. Pareillement, lorsqu'un tiers détenteur subit le délaissement d'un héritage sur lequel il a établi des servitudes, elles ne sont point éteintes par le délaissement.

Le délaissement d'un héritage, par un tiers détenteur, n'est en effet qu'un simple abandon de la possession : celui qui le fait, n'est point exproprié jusqu'à l'adjudication, et ne s'ôte point le pouvoir, tant que l'adjudication n'est point faite, de conserver l'héritage qu'il a délaissé, en payant toute la dette et les frais (C. C. 2175) pour lesquels le délaissement est fait. Enfin, même après l'adjudication, le délaissant n'est pas dépouillé de tous les droits qu'il avait sur l'héritage délaissé, parce que ses créanciers personnels, après tous ceux qui sont inscrits sur les précédents propriétaires, exercent leur hypothèque, à leur rang, sur le bien délaissé (C. C. 2177), et que s'il reste quelque chose du prix de l'adjudication, après l'acquittement des créances, cet excédant appartient au délaissant. Ainsi les servitudes créées par le tiers détenteur, sur un héritage, subsistent après le délaissement de cet héritage.

Mais comme un délaissant n'a pas pu accorder plus de droit qu'il n'en avait lui-même sur l'héritage délaissé, et que ceux auxquels il a concédé des servitudes sur cet héritage sont nécessairement primés par l'hypothèque des créanciers qui en ont forcé le délaissement, les propriétaires des fonds auxquels les servitudes sont dues n'ont pas d'autre moyen, pour conserver ces servitudes, que de payer les créanciers qui leur sont préférables à raison de leurs privilèges et hypothèques, et de faire vendre ensuite l'héritage servant à la charge des servitudes.

S IV. EXTINCTION DES SERVITUDES PAR LA REMISE DU DROIT FAITE AU Débiteur.

238. Ce mode d'extinction peut être exprès ou tacite. 239. La remise du droit peut être limitée, et, dans ce cas, être renfermée dans ses limites.

elle doit

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238. Les servitudes s'éteignent par la remise expresse ou tacite qui en est faite gratuitement, ou à prix d'argent, par le propriétaire de l'héritage dominant qui a le pouvoir de disposer de ses immeubles.

La remise est expresse, lorsque le propriétaire de l'héritage dominant y renonce expressément. Elle est tacite, lorsque le propriétaire du fonds dominant tolère, de la part de celui du fonds servant, des actes contraires au droit de servitude.

Lorsqu'il y a plusieurs propriétaires de l'héritage dominant, il faut que la remise de la servitude soit faite par tous les propriétaires.

Mais quoique la remise d'un droit de servitude faite par l'un des propriétaires ne l'éteigne pas, elle a au moins cet effet, qu'elle rend celui qui a fait la remise non recevable à réclamer et exercer ce droit tant que les autres propriétaires ne le réclament pas.

239. Si la remise n'est faite que pour une portion du fonds assujetti à la servitude, elle n'est valable que pour cette portion. Si le propriétaire de deux servitudes n'en remet qu'une, il conserve l'autre.

Ainsi, celui qui, ayant droit de faire passer de l'eau dans le fonds d'autrui et d'empêcher le propriétaire d'y bâtir, accorde seulement la permission de bâtir, ne perd pas le droit de faire passer de l'eau.

Pareillement, si ma maison doit à la vôtre deux sortes de servitudes, l'une de ne pouvoir être élevée plus haut, l'autre de recevoir l'eau des gouttières de vos bâtiments, et que vous m'affranchissiez de la servitude de ne pas pouvoir élever ma maison, je ne pourrai cependant pas l'élever à telle hauteur que l'eau de vos gouttières ne puisse pas tomber dessus.

Mais si je ne puis pas élever ma maison sans anéantir la servitude à laquelle elle est assujettie de recevoir les eaux de vos bâtiments, vous ne pouvez plus exiger cette dernière servitude, à laquelle vous êtes censé avoir tacitement renoncé, parce que si vous pouviez l'exiger, la permission que vous m'avez accordée d'élever ma maison deviendrait sans effet.

Si je vous dois un droit de passage à travers mon champ, et que vous me permettiez de clore mon champ ou d'y construire des bâtiments dans l'endroit assujetti au passage, vous perdrez votre droit de chemin. Néanmoins, si mon bâtiment était construit en arcades, et formait une voûte qui ne gênât point le passage et qui ne fermât point, ce bâtiment ne vous ferait pas perdre votre droit de passage, parce que sa construction n'aurait rien qui fût contraire à ce droit.

S V. EXTINCTION DES SERVITUDES PAR L'EXPIRATION DU LAPS DE TEMPS POUR LEQUEL ELLES ONT ÉTÉ CONSENTIES.

240. Mode d'extinction formulé sous ce paragraphe.

240.

-

Lorsque les servitudes n'ont été accordées que pour un certain temps, elles cessent à l'échéance de ce temps.

S VI. EXTINCTION DES SERVITUDES PAR LA PRESCRIPTION, RÉSUL

TANT DU NON USAGE PENDANT TRENTE ANS.

241. Le non usage pendant trente ans opère la prescription. 242. Les prescriptions par dix et vingt ans ne sont pas applicables aux servitudes.

243. A partir de quel moment commencent à courir les trente ans? 244. Comment doit-on entendre le non usage?

245. Le propriétaire d'une servitude éteinte par prescription, peut, en certains cas, la faire revivre.

246. Ce qu'on entend par non usage à l'égard des servitudes continues.

247. La prescription ne se peut fonder sur la violence.

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249. Le mode de la servitude se prescrit comme la servitude elle

même.

250. Principes généraux sur la prescription applicable à la ma

tière.

251. Exception au mode d'extinction par prescription.

241. La servitude est éteinte par le non usage pendant trente ans (C. C. 706).

Mais, pour la prescrire par le non usagé, il faut qu'elle soit de telle nature, qu'elle ait pu rester, pendant tout le temps requis pour prescrire, dans un état de non exercice susceptible de produire la libération, et cette libération ne saurait résulter d'un état des lieux essentiellement variable (Caen, 5 décembre 1827).

242. La prescription par dix ou vingt ans, que la loi déclare ouverte au profit de celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble, ne s'applique pas aux servitudes. Elles ne se prescrivent que par trente ans.

243.

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Les trente ans commencent à courir, selon les diverses espèces de servitudes, ou du jour où l'on a cessé d'en jouir,

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