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PRÉFACE

OU EST EXPOSÉ LE DESSEIN ET LA DIVISION

DE CET OUVRAGE.

Il ne faut pas abandonner plus long-temps aux nouveaux critiques la doctrine des Pères et la tradition de l'Eglise. S'il n'y avoit que les hérétiques qui s'élevassent contre une autorité si sainte, comme on connoît leur erreur, la séduction seroit moins à craindre mais lorsque des catholiques et des prêtres; des prêtres, dis-je, ce que je répète avec douleur, entrent dans leur sentiment, et lèvent dans l'Eglise même l'étendard de la rebellion contre les Pères; lorsqu'ils prennent contre eux et contre l'Eglise, sous une belle apparence, le parti des novateurs, il faut craindre que les fideles séduits ne disent comme quelques Juifs, lorsque le trompeur Alcime s'insinua parmi eux (1): Unprêtre du sang d' Aaron, de cette ancienne succession, de cette ordination apostolique à laquelle Jésus-Christ a promis qu'elle durera toujours, est venu à nous, il ne nous trompera pas; et si ceux qui sont en sentinelle sur la maison d'Israël ne sonnent point de la trompette, Dieu demandera de leur main le sang de leurs frères, qui seront déçus, faute d'avoir été avertis.

Il nous est venu depuis peu d'Hollande un livré intitulé, Histoire critique des principaux commen(4) I. Machab. v11. 14.

tateurs du nouveau Testament, depuis le commencement du christianisme jusqu'à notre temps, etc., par M. Simon, prêtre. C'est un de ces livres, qui ne pouvant trouver d'approbateurs dans l'Eglise catholique, ni par conséquent de permission pour être imprimés parmi nous, ne peuvent paroître que dans un pays où tout est permis, et parmi les ennemis de la foi.

Cependant, malgré la vigilance et la sagesse du magistrat, ces livres pénètrent peu à peu, ils se répandent, on se les donne les uns aux autres : c'est un attrait pour les faire lire, qu'ils soient recherchés, qu'ils soient rares, qu'ils soient curieux, en un mot, qu'ils soient défendus, et qu'ils contiennent une doctrine que personne ne veut approuver; c'est un air de capacité et de science, que de s'écarter des sentimens communs : et ceux qui ne songent pas qu'il y a une mauvaise liberté, louent les auteurs de ces livres comme gens libres et désabusés des préjugés

communs.

A toutes ces qualités, l'auteur du livre dont nous parlons, ajoute celle d'être critique, c'est-à-dire, de peser les mots par les règles de la grammaire, et il croit pouvoir imposer au monde, et décider sur la foi et sur la théologie par le grec ou par l'hébreu dont il se vante.

Sans ici lui disputer l'avantage qu'il veut tirer de ces langues, et sans embrasser le parti de ceux qui y excellent le plus, et qui n'avouent pas que M. Simon y ait fait autant de progrès qu'il se l'imagine, je me contenterai de lui faire voir dans la suite de

cet ouvrage, qu'il est tout-à-fait novice en théologie, et non-seulement qu'il prononce trop hardiment, mais encore qu'il prononce mal, pour ne rien dire de plus, sur des matières qui le passent.

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Avant que d'entrer dans cette discussion, il faudroit donner en général une idée de son ouvrage ; mais personne ne le sauroit faire bien précisément. S'il s'en falloit rapporter au titre, on croiroit, qu'en promettant de donner l'histoire des principaux commentateurs du nouveau Testament, il voudroit nous faire connoître seulement leur génie et leur savoir, leur genre d'écrire, leur manière d'interpréter, le temps et l'occasion de leur composition, et les autres choses semblables, sans entrer dans les questions, ou décider sur le fond, qui seroit un ouvrage immense, et auquel plusieurs grands volumes ne suf firoient pas; mais ce n'est pas le dessein de notre auteur. Sous prétexte d'une analyse telle quelle, qu'il fait semblant de vouloir donner de certains endroits, il veut dire son sentiment sur le fond des explications, louer, corriger, reprendre qui il lui plaira, et les Pères comme les autres, décider des questions, non pas à la vérité de toutes, car ce seroit une entreprise infinie, mais de celles qu'il a voulu choisir, et en particulier de celles où il a occasion d'insinuer les sentimens des sociniens, tant contre la divinité de Jésus-Christ que sur la matière de la grâce, ou en commettant les Grecs avec les Latins, et les Pères les plus anciens avec ceux qui les ont suivis, il interpose son jugement avec une autorité, qui assurément ne lui convient pas.

rien. Tout paroîtra dans la suite; et pour procéder plus nettement dans cet examen, je me propose de faire deux choses: la première, de découvrir les erreurs expresses de notre auteur sur les matières de la tradition et de l'Eglise, et ce qui tend à la même fin, le mépris qu'il a pour les Pères, avec les moyens indirects par lesquels, en affoiblissant la foi de la Trinité et de l'incarnation, il met en honneur les ennemis de ces mystères : la seconde, d'expliquer en particulier les erreurs qui regardent le péché originel et la grâce, parce que c'est à ces mystères qu'il s'est particulièrement attaché.

DÉFENSE

DE LA TRADITION

ET DES SAINTS PÈRES.

PREMIÈRE PARTIE,

Où l'on découvre les erreurs expresses sur la Tradition et sur l'Eglise, le mépris des Pères, avec l'affoiblissement de la Foi, de la Trinité et de l'Incarnation, et la pente vers les ennemis de ces mystères.

LIVRE PREMIER.

ERREURS SUR LA TRADITION ET L'INFAILLIBILITÉ
DE L'ÉGLISE.

CHAPITRE PREMIER.

La Tradition attaquée ouvertement en la personne de saint Augustin.

Pour commencer par où il commence lui-même, c'est-à-dire, par saint Augustin, il l'attaque sans déguisement, comme sans mesure, dès les premiers mots de sa préface, et il l'attaque sur la matière où il a le plus excellé, qui est celle de la grâce : ce que je remarque ici, non dans le dessein d'entamer ce

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