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$ 15. Condamnation par le

consulaire

pays neutre.

ports les prises des belligérants, ce qu'il peut accorder ou refuser à son gré, pourvu qu'il le fasse d'une manière impartiale, à toutes les puissances belligérantes; mais cette condition n'est pas impliquée dans une simple permission générale d'entrer dans les ports neutres. Le bâtiment preneur qui profite pour lui-même d'une telle permission, ne perd pas par là la possession militaire de la propriété capturée, ce qui donne aux cours des prises de son pays juridiction exclusive pour déterminer la loyauté de la capture. Cette juridiction peut être exercée pendant que la propriété capturée est dans le port neutre, ou bien la prise peut être conduite de là infra præsidia du pays de celui qui a fait la capture, et où siége le tribunal. Dans l'un ou l'autre de ces cas la réclamation de tout propriétaire neutre, même sujet de l'État dans le port duquel le vaisseau ou les biens peuvent avoir été conduits, doit en général être soutenue devant les cours de prises du pays belligérant, qui seul a droit de juridiction sur la question de prise ou de non-prise 1.

ture.

Cette juridiction ne peut être exercée par une autorité tribunal déléguée dans le pays neutre, telle qu'un tribunal consusiégeant en laire siégeant dans le Port neutre, et agissant conformément aux instructions de l'État de celui qui a fait la capUne pareille autorité judiciaire en matière de prise de guerre ne peut être concédée par l'État neutre aux agents d'une puissance belligérante dans les limites de son territoire, là même où le gouvernement neutre lui-même n'a pas le droit d'exercer une pareille juridiction, excepté dans le cas où sa propre juridiction et sa souveraineté neutres ont été violées par la capture. La sentence de condamnation prononcée par le consul d'un État belligérant dans un port neutre est donc considérée comme in

1 VALIN, Commentaire sur l'ordonnance de la marine, liv. III, tit. ix. Des prises, art. 15, t. II, p. 274. LAMPREDI, Trattato del commercio de' populi neutrali in tempo di guerra, p. 228.

suffisante pour transférer la propriété de vaisseaux ou de biens capturés comme prise de guerre et conduits dans ce port pour y être jugés 1.

La juridiction du tribunal de la nation qui capture est concluante sur la question de propriété sur la chose capturée. Sa sentence met fin à toute controverse relative à la validité de la capture entre le réclamant et celui qui a fait cette capture et ceux qui réclament après eux; elle termine toute question judiciaire sur la matière. Mais là où cesse la responsabilité de ceux qui ont fait la capture, commence celle de l'État. Il est responsable envers les autres États des actes des bâtiments preneurs commissionnés par lui, du moment où ces actes sont confirmés par sentence définitive des tribunaux qu'il a chargés de déterminer la validité des captures de guerre.

Grotius expose qu'une sentence judiciaire inique (in re minime dubia) au préjudice d'un étranger, donne à sa nation le droit d'obtenir réparation par représailles: «En effet l'autorité du juge,» dit-il, «n'a pas la même force par rapport aux étrangers que par rapport aux sujets de l'État. Toute la différence qu'il y a entre les sujets et les étrangers par rapport à ces sortes de sentences injustes, c'est que les sujets ne peuvent pas légitimement en empêcher l'exécution par des voies de fait, ou maintenir leur droit par la force contre l'effet d'une telle sentence, à cause de la dépendance où ils sont de l'autorité dont elle émane au lieu que les étrangers ont droit de contraindre ceux du pays à les satisfaire;» (c'est du droit de représailles que traite l'auteur) «droit néanmoins dont ils ne doivent faire usage que quand il n'y a plus moyen d'obtenir ce qui leur est dû par les voies ordinaires de la justice 2.

1 ROBINSON'S Admiralti Reports, vol. I, p. 135, The Flad Oyen. 2 Quod fieri intelligitur non tantum si in sontem aut decitorem judicium intra tempus idoneum obtineri nequeat, verum etiam si in re

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Distinction

entre les

civils

et les

De même aussi Bynkershoek, en traitant le même sujet place un jugement injuste sur le même pied que la violence ouverte, en autorisant des représailles de la part de l'État dont les sujets ont été ainsi offensés par les tribunaux d'un autre État. Et Vattel, en énumérant les différents modes par lesquels la justice peut être refusée au point d'autoriser des représailles, mentionne «un jugement manifestement injuste et partial. >> Et quoiqu'il déclare, ce qu'on ne saurait nier, que les jugements des tribunaux ordinaires ne doivent pas être requis sur des questions. frivoles ou des points douteux, néanmoins il est évidemment fort loin de leur attribuer ce caractère de sainteté qui empêcherait absolument les étrangers de chercher réparation auprès d'eux 1.

Ces principes sont sanctionnés par l'autorité de nombreux traités entre les différentes puissances de l'Europe, réglant le sujet des représailles, et déclarant qu'elles ne seront accordées qu'en cas de déni de justice. Une sentence injuste doit certainement être considérée comme un déni de justice, à moins que le simple privilége d'être entendu avant condamnation ne soit tout ce que renferme l'idée de justice.

Même en supposant que des jugements injustes des tribunaux tribunaux civils ne forment pas matière à représailles, il de prices y a évidemment une énorme distinction à cet égard entre les tribunaux ordinaires de l'État, procédant d'après les lois civiles comme étant la règle de leurs décisions, et les tribunaux de prises établis par son autorité pour admi

minime dubia (nam in dubia re præsumptio est pro his qui ad judicia publice electi sunt), plane contra jus judicatum sit. Nam auctoritas judicantis non idem in exteros quod in subditos valet...... Hoc interest, quod subditi executionem etiam injustæ sententiæ vi impedire, aut contra eam jus suum vi exsequi licite non possunt, ob imperii in ipsos efficaciam exteri autem jus habent cogendi, sed quo uti non liceat quamdiu per judicium suum possint obtinere. (GROTIUs, de Jure belli ac pacis, lib. III, cap. II, § 5, no 1.)

1 BYNKERSHOEK, Quæstionum juris publici lib. I, cap. xxiv. VATTEL, Droit des gens, liv. II, chap. vIII, § 350.

nistre le droit des gens aux étrangers comme aux sujets. Les tribunaus civils ordinaires acquièrent la juridiction sur la personne ou la propriété d'un étranger par son consentement exprès, s'il intente volontairement une poursuite, ou implicite, s'il transporte par le fait sa personne ou sa propriété sur le territoire. Mais quand les cours des prises exercent leur juridiction sur des vaisseaux capturés en mer, la propriété des étrangers est amenée de force dans le territoire de l'État qui a constitué ces tribunaux. Suivant le droit naturel, les tribunaux du pays de celui qui a fait la capture ne sont pas plus les juges directs exclusifs des captures de guerre faites en pleine mer sous le pavillon neutre que ne le sont les tribunaux du pays neutre. L'égalité des nations semblerait, en principe, défendre l'exercice d'une juridiction ainsi acquise par force et par violence, et administrée par des tribunaux qui ne peuvent être impartiaux entre les parties en cause, parce qu'ils sont créés par le souverain de l'une pour juger l'autre. Telle est cependant la constitution actuelle des tribunaux investis par le droit positif international de la juridiction exclusive des prises capturées en guerre. Mais l'imperfection du droit des gens volontaire, dans son état présent, ne peut opposer une barrière efficace aux réclamations d'un gouvernement neutre cherchant indemnité pour ses sujets qui ont été injustement privés de leur propriété, sous l'administration erronée de ce droit. L'institution de ces tribunaux loin d'exempter ou de vouloir exempter le souverain de la nation belligérante de la responsabilité des actes de ses croiseurs, est destinée à déterminer et à fixer cette responsabilité. Ces croiseurs, ne sont responsables qu'envers le souverain qui les commissionne. Tant que les saisies sont régulièrement faites sur les bases apparentes de juste soupçon, et qu'elles sont suivies d'un prompt jugement dans le mode usuel, et jusqu'à ce que les actes de ceux qui ont fait la capture soient confirmés par le sou

verain dans les sentences des tribunaux chargés par lui de prononcer en matière de prises, l'État neutre n'a aucun motif de plainte, et ce qu'il souffre est l'inévitable résultat du droit de capture du belligérant. Mais dès que la décision du tribunal en dernier ressort a été prononcée (en la supposant non garantie par les faits de la cause et par le droit des gens appliqués à ces faits), et que justice a été définitivement refusée, la capture et la condamnation deviennent les actes de l'État, actes dont le souverain est responsable vis-à-vis du gouvernement du réclamant. Rien n'est plus irrégulier que de soutenir que le souverain est responsable envers les États étrangers des actes de ses tribunaux, si ce n'est de soutenir qu'il est responsable de ses propres actes qui, dans les relations des États, sont constamment pris pour base de plainte, de représailles et même de guerre. On ne peut imputer aux actes des tribunaux de prises plus de sainteté, même par les plus extravagantes théories du caractère concluant de leurs sentences, qu'on ne peut en attribuer équitablement aux actes du souverain lui-même. Mais ces actes cependant, qui n'obligent que ses sujets, ne peuvent, s'ils ne sont pas conformes au droit public du monde, être considérés comme obligeant les sujets d'autres États. Un tort à eux fait forme également un juste sujet de plainte de la part de leur gouvernement, soit qu'il vienne directement du souverain lui-même, ou qu'il soit causé par l'opération de ses tribunaux. Les tribunaux d'un État ne sont qu'une partie, et une partie subordonnée, du gouvernement de l'État. Mais le droit de représailles contre les actes injurieux du gouvernement entier, de l'autorité suprême, existe incontestablement en faveur des États étrangers dont les sujets ont souffert de ces actes. Ce droit doit encore exister bien plus clairement quand ces actes procèdent de personnes, d'autorités ou de tribunaux responsables envers leur souverain, mais non responsables envers un gouver

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