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Adoration des mages; une sainte Catherine; un saint Thomas d'Aquin, et une Vierge du Parrocel ; une Assomption de la Vierge, et une sainte Marthe relevant Notre-Seigneur, par Mignard; et enfin un saint François d'Assises mourant, par Vanloo.

L'église de Sainte-Marthe possédait encore plusieurs autres tableaux de prix; mais, lors de la révolution, ayant été transportés dans le grenier de l'hospice des indigents, les pauvres en firent passer la plus grande partie à la lessive pour se faire des pantalons avec la toile.

Mais la plus grande perte qu'ait faite à cette époque la paroisse fut celle d'un buste de sainte Marthe en or massif, donné à la ville par Louis XI, qui avait fondé un chapitre avec quinze bénéfices. Ce buste, autour duquel toute la vie de sainte Marthe était représentée en émail, pesait, non compris la statue du roi, qui priait à genoux devant lui, vingtdeux mille ducats d'or. Au moment de la disette il fut transporté à Gênes, et échangé contre du blé ; la république de Gênes le prit pour son poids, c'est-àdire pour cent mille francs.

Une autre relique non moins précieuse était un bras de vermeil renfermant un os de sainte Marthe, et aux doigts duquel il y avait quatre-vingt-dix bagues, dont quelques-unes valaient jusqu'à dix mille francs. Vers la même époque où ce buste partait pour Gênes, le bras se mettait en route de son côté.

On n'a jamais su à quelle destination il était arrivé. Une chose curieuse à voir dans cette église de Tarascon est le tombeau de sainte Marthe, moins remarquable pour le mérite de son exécution que pour la vénération qu'il inspire. Au reste, la sainte, qui est de marbre blanc sur un lit de marbre noir, est belle, et, vue à la clarté tremblante de la lampe qui éclaire cette chapelle souterraine, elle est d'un aspect tout à fait religieux et imposant.

Comme Tarascon ne nous offrait rien d'autrement curieux à voir, nous déterminâmes notre ami Boyer à remettre, vers les cinq heures du soir, son cheval au cabriolet, et nous partimes pour Arles, où nous arrivâmes à neuf heures.

VIII

Arles.

Arles est la Mecque des archéologues français : c'est la cité antique par excellence. Des monuments romains forment le sol, et autour d'eux, à leurs pieds, à leur ombre, dans leurs crevasses, a poussé, l'on ne sait comment, par la force végétative de la civilisation religieuse de saint Louis, une seconde ville gothique, qui à son tour a donné naissance à des maisons qui, tant bien que mal, ont formé la ville moderne. Au premier aspect, ce sont ces deux dernières que l'on aperçoit; mais l'œil interroge-t-il les fondations, fouille-t-il les ruelles, réunit-il les débris, c'est la ville romaine qui reparaît, avec son théâtre, son cirque, son prétoire, ses thermes, son forum, le palais de ses empereurs, son autel de la Bonne Déesse et son temple de Jupiter Olympien.

Le squelette du géant a été mal enseveli, et de tous côtés ses ossements percent la terre.

C'est qu'Arles, s'il faut en croire Ausone, était la reine des Gaules : « Le lieu où elle était bâtie, écrivaient Honorius et Théodose à Agricola, préfet des Gaules, était si heureusement choisi, elle avait une si grande foule de commerçants, tant de voyageurs affluaient dans son port, que tout ce qui naissait ailleurs venait à elle : si bien que, devenue l'entrepôt du monde, on eût dit, à la quantité des objets qu'étalaient ses marchés, que ces richesses exotiques étaient le produit de son propre sol. En effet, tout ce que le riche Orient, l'odorante Arabie, la fertile Afrique, la molle Assyrie, la belle Espagne et la Gaule féconde recueillaient dans leurs campagnes, elle le prodiguait au besoin, au désir ou au caprice du Sybarite le plus raffiné, et tout ce qui était produit venait à elle par terre, par mer et par fleuve, dans des barques, dans des navires et dans des chariots (1). »

Aussi la ville d'Arles fut-elle chère à Constantin. Elle balança Byzance dans son esprit; car un temps il l'avait habitée; il y avait été heureux, et sa femme, Fausta, y avait mis au jour son fils aîné, qui porta le même nom que lui. Quelle fut la cause qui empêcha Arles de devenir la seconde capitale du

(1) Vita imp. Honor. et Theod., lib. II, § 3.

monde? On ne sait. Constantin s'en dégoûta-t-il comme un amant d'une maîtresse, et lui fut-il infidèle en voyant les eaux bleues du Pont-Euxin et les rivages fleuris du Bosphore? Son dégoût lui vint-il du danger qu'il courut dans son palais sur le Rhône, la nuit où, prévenu par sa femme, il vit, caché derrière une tapisserie, son beau-père Maximin Hercule s'avancer vers le lit impérial, son épée à la main, et poignarder un eunuque qu'il avait fait coucher à sa place? Ou bien encore le terrible mistral, le fléau de ces contrées, parut-il un ennemi trop obstiné, un adversaire trop violent, à un homme qui avait respiré le vent frais d'Ostie et la brise parfumée de Naples?

Ce fut d'Arles que partit Constantin pour aller combattre Maxence; ce fut pendant le voyage des Gaules à Rome qu'une croix lumineuse lui apparut, avec l'inscription: In hoc signo vinces; et ce fut en double souvenir de sa ville chérie et de sa victoire sainte qu'il fit frapper des médailles d'or, d'argent et de bronze, portant d'un côté une main qui sort d'un nuage tenant une croix, et de l'autre côté une légende composée de ces deux mots: Arelas civitas.

Maxence noyé dans le Tibre, et tous les prisonniers élargis, l'empereur, solennellement baptisé par le pape Silvestre, revint à Arles, où en 314 il assembla un concile, en 316 fit célébrer les jeux décennaux, et en 324 nomma trois Césars: Crispus,

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