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ques de la Pologne, et de faire ressortir tout ce que sa force et sa grandeur avaient eu d'influence bienfaisante et heureuse sur les destinées de l'Europe. Enfin nous n'avons cessé de montrer l'image fidèle de cette Pologne qui a su conserver jusqu'aujourd'hui la candeur et la sublimité de son caractère, de cette Pologne qui, dans ce mélange de bien et de mal que la civilisation offre aux peuples, sut choisir pour elle une gloire militaire sans injustice et sans conquê tes, une liberté vierge d'égaremens systématiques et de crimes civils; de cette Pologne qui, prosternée devant la croix du Christ, pleine d'espoir dans sa miséricorde, a eu le bonheur de marier sa religion à sa nationalité. C'est encore cette même Pologne, cette grande personnification de la religion unie à la liberté, que nous allons suivre dans sa pénible et glorieuse carrière. Mais aujourd'hui nous la ferons sortir de son isolement; nous lui donnerons des compagnes aussi jalouses qu'elle de la liberté. C'est notre devoir en effet, car nous disions dans notre prospectus :

« Le Polonais ne peut prétendre isoler la cause polo« naise des autres intérêts de l'Europe; involontairement « même il sera souvent rappelé à jeter les yeux sur les « événemens dont elle sert de théâtre, et qui ne peuvent «< manquer d'avoir un rapport plus ou moins direct avec a les intérêts de la Pologne. Nous annonçons donc l'inten« tion de ne pas négliger la politique étrangère, mais « nous la considérerons uniquement sous le point de vue polonais. »

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Les discussions de politique étrangère étaient donc essentiellement liées à l'intention qui créa le Polonais. Si nous nous en sommes souvent abstenu jusqu'à présent, c'est que, dans l'intérêt même du lecteur, nous ne devions pas lui présenter toutes les questions à la fois; il nous fallait traiter d'abord une certaine série de faits importans et plus spécialement relatifs à la Pologne, avant de le conduire à l'examen de la grande question européenne, où

la Pologne, une fois connue, devait plus naturellement trouver place à ses yeux. Cela fait, un champ plus vaste s'ouvre à nous; une variété plus attrayante est permise à nos travaux. Aussi, sans dévier du plan primitivement adopté, nous consacrerons en grande partie notre journal aux questions de politique étrangère. Mais quel peuple d'Europe pourrait être indifférent aujourd'hui sous un rapport quelconque à l'indépendance polonaise? Quoi de plus naturel par conséquent que de trouver la Pologne liée à toute question de politique étrangère? Néanmoins nous nous attacherons de préférence aux nations qui vivent comme la Pologne de leur vie morale, qui vivent dans le cœur de tous les peuples, et à celles qui commencent l'œuvre de leur indépendance nationale. Comme il est difficile pourtant, sinon impossible, de séparer les inté rêts politiques d'une nation de ses oeuvres littéraires, le Polonais ouvrira aussi ses colonnes à des articles de lit térature étrangère, pour donner au lecteur le moyen de comparer la littérature de la Pologne à celle des autres pays. Une collaboration précieuse est assurée à notre journal; et, outre les écrivains qui nous ont déjà prêté l'appui de leur talent, d'autres non moins distingués vont s'associer à nos travaux. Nous nous bornerons aujour d'hui à nommer MM. Tommaséo, Orioli, et Mamiani, qui s'occuperont de la politique et des productions scientifiques et littéraires de l'Italie.

Toutes ces considérations nous ont engagé à modifier le titre de notre journal, afin qu'il se trouvât plus en harmo nie avec son extension projetée. En conservant son premier titre, le Polonais, nous mettrons pour second titre : journal des intérêts de l'Europe, au lieu de journal des intérêts de la Pologne.

Nous terminerons cet exposé par un tableau statistique des articles qui composent les quatre volumes, classés, d'après leurs sections respectives. Nous n'avons pas cru nécessaire de faire entrer dans ce tableau la chronique et

les nouvelles diverses qui accompagnent chaque numéro, et qui donnent un précis aussi exact que complet des actes de l'administration russe en Pologne, et de la situation de l'émigration polonaise.

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On peut considérer la religion dans l'homme-Dieu et dans les hommes. Considérée du premier point de vue, toutes les contradictions disparaissent, et le cœur se trouve en face de la plus belle et de la plus pure vérité. Toute la doctrine et toute la morale du christianisme se réduit au mystère de l'incarnation, dont la rédemption n'est que le

(1) La nationalité polonaise, reposant principalement sur sa religion, tout asservissement à une puissance étrangère ou hostile à cette religion devient impossible; c'est ce qui nous détermine à insérer l'article que l'on va lire. (Note du D.)

prolongement, le reflet et la fleur. Dieu s'est fait homme afin que les hommes deviennent Dieu, par participation en Jésus-Christ et par Jésus-Christ; voilà toute la doctrine chrétienne! Il n'est pas un dogme de notre foi, pas un pré cepte de morale qui ne puisse se rapporter à cette vérité, qui est comme le noyau de toutes les autres et comme la racine de cette plante si florissante et si belle. Je vais plus loin, et je dis que toute l'histoire n'est que le développement de l'humanité par l'incarnation. Avant Jésus-Christ tout le mouvement historique n'est qu'un long travail d'attente et d'espérance; l'idée de lumière personnelle de Dieu et de l'homme se reproduit dans toutes les mythologies, dans toutes les sociétés, chez tous les peuples. Depuis JésusChrist tout est développement de cette union, toute l'histoire, pour qui la considère attentivement, n'est que la rédemption successive de l'humanité, comme la vie du chrétien n'est que la rédemption successive de l'homme par la grâce.

Le christianisme seul donne une haute idée de la dis gnité de l'homme, car chaque chrétien doit devenir par adoption et par participation ce que le Christ est par nature, c'est-à-dire Dieu, cette incarnation adoptive de l'homme à plusieurs degrés, dont le premier est la grâce, le second, l'eucharistie, et le troisième la gloire. Hors du christianisme, l'homme est un animal raisonnable; dans le christianisme, c'est un ange participant de la nature divine par la grâce, nourri de la substance même de l'homme-Dieu par l'eucharistie, et irrévocablement déifié par la gloire, sans qu'il perde pour cela sa personnalité; car, quelque puissante que soit la grâce de Dieu, elle ne force jamais la libre volonté de l'homme, qui peut toujours l'accepter et la refuser, tant il y a de respect en Dieu pour la volonté et la personnalité humaines.

Ce n'est que dans le christianisme seul que peut exister l'égalité parfaite, telle qu'aucun homme ne l'aurait pu concevoir. La nature fait les hommes inégaux; il n'y a que la

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religion du Christ qui détruit cette inégalité. L'un naît plus fort, l'autre plus faible; celui-ci plus doué d'intelligence, celui-là plus simple, et quelque éclairé que soit l'homme, il est obligé de donner aux mystères du christianisme la même foi que le plus simple paysan. Si vous ôtez les mystères, l'Église devient une école, la foi un système ; l'inégalité reparaît; l'homme devient l'esclave de l'homme, disciple de l'homme. Le catholique ne reconnaît pour son intelligence d'autre maître que Dieu, d'autre règle que sa parole infaillible dont l'Église n'est que l'écho et l'interprète; car, lorsque l'Église décide un article de foi, elle ne fait que déclarer ce que l'humanité a toujours cru dans l'Église. La foi, c'est l'incarnation de la pensée divine dans la parole et l'intelligence humaine, comme la grâce n'est que l'incarnation de l'amour divin dans le cœur et la volonté de l'homme, comme les sacremens ne sont que l'union de Dieu et de la nature, une sorte d'incarnation de la grâce de Dieu dans la nature pour la sanctification de l'homme. Hors de la foi, l'intelligence humaine est un mystère inabordable; hors de la grâce, la volonté de l'homme est un abîme insondable: saus les sacremens, la nature est couverte d'un voile impénétrable pour l'homme. Chacune de ces propositions pourrait fournir matière à de longs développemens; je mne borne à indiquer les principes les plus généraux dont il est facile à une intelligence élevée de tirer toutes les conséquences. Je vous prierai seulement de bien vous pénétrer de l'idée de la foi.

La foi, ce n'est pas une simple opinion, ce n'est pas une conviction, ce n'est pas seulement un acte de l'esprit, c'est l'union et comme l'identité de l'intelligence et de la volonté de l'homme. Je ne crois pas parce que je vois, je ne crois pas parce que je suis convaincu, c'est-à-dire vaincu par une intelligence humaine supérieure à la mienne, je crois parce que je veux. Je puis voir avec évidence la vérité et ne pas y croire, car la foi c'est une adhésion de ma volonté, que rien, pas même Dieu, ne peut forcer, c'est une croyance

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