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l'enregistrement qui sert de base à leur liquidation et à leur perception; que ce principe a été néanmoins modifié par l'art. 59 de la loi du 28 avril 1816, qui contient deux dispositions bien distinctes; que, d'après la première de ces dispositions, les droits de mutation établis par cette loi ne doivent étre perçus que sur les mutations postérieures à sa publication; que, d'après la même disposition, les lois antérieures s'appliquent aux mutations effectuées jusqu'à ladite publication; que, d'après la seconde disposition de cet article, on doit continuer d'exécuter, à l'égard des actes, l'art. 1. de la loi du 27 ventose an 9;—ATTENDU que la première partie dudit art. 59 énonce généralement tous les droits de mutation dont il est fait mention dans cette loi, qui en élève la quotité et ne fait aucune distinction entre les droits de mutation dus par décès et ceux dus par suite d'aliénation d'immeubles; que, par conséquent, la seconde disposition, cu ordonnant, à l'égard des actes, l'exécution de l'art. 1, de la loi du 27 ventose an 9, n'a compris que les actes ordinaires et non les actes de vente, puisque ces derniers actes étaient déjà compris dans la première partie de l'article comme donnant lieu aux droits de mutation établis par la nouvelle loi; qu'en le décidant ainsi, le tribunal civil de Strasbourg a fait une juste application de la première partie dudit art. 59, et n'a violé par conséquent ni la seconde partie de cet article, ni l'article premier de la loi du 27 ventose an 9.-REJETTE, etc,

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Du 13 janvier 1818.- Section civile.-M. Brisson, président. M. le conseiller Vergès, rapporteur,

COMPROMIS.-ARBITRES,-REFUS.-EXPIRATION.

L'arbitrage finit-il, à compter du jour de refus de l'un des arbitres, alors même que ce refus n'a pas été connu de l'une des parties? Rés. aff.

Le 22 septembre 1815, les sieurs Lefortier et Marie compromettent sur une contestation qui les divise, et au sujet de laquelle le sieur Marie a obtenu, en justice de paix, plusieurs jugemens contre Lefortier.

Chacune des parties nomme un arbitre. Le compromis ne fixant aucun délai, la mission des arbitres doit durer trois mois, aux termes de l'article 1007 du Code de procédure civile, et ne cesser, par conséquent, que le 22 décembre 1815,

Avant l'expiration de ce délai et le 28 novembre, le sieur Lefortier interjette appel devant le tribunal de Pont-Audemer, des jugemens de la justice de paix, sur lesquels il a précédemment autorisé les arbitres à

prononcer.

Le sieur Marie soutient cet appel non recevable, comme interjeté pendant l'arbitrage.

Pour soutenir la régularité de l'appel par lui interjeté, Lefortier expose que, par une lettre en date du 10 octobre 1815, le sieur Poupart, son arbitre, lui a fait connaître qu'il refusait sa mission; qu'ainsi, à dater de ce jour 10 octobre 1815, le compromis a cessé d'exister; que conséquemment son appel a été valablement interjeté le 28 novembre suivant. Par jugement du 14 juin 1816, le tribunal civil de Pont-Audemer reconnaît en fait que, le 10 octobre précédent, l'arbitre du sieur Lefortier a refusé d'accepter sa mission; mais, en droit, le tribunal décide que ce refus n'a pas eu l'effet d'anéantir le compromis, par la raison que la déter

mination de l'arbitre, quoique connue du sieur Lefortier, ne l'a pas été également du sieur Marie, sa partie adverse; le tribunal de Pont-Audemer conclut de là, que l'arbitrage a subsisté jusqu'au 22 décembre 1815, et que l'appel du sieur Lefortier, interjeté avant ce délai, est par cela même non recevable.

Le sieur Lefortier s'est pourvu en cassation de ce jugement, pour violation expresse de l'art. 1012 du Code de procédure, qui porte que le compromis expire, par le refus, le déport ou l'empêchement de l'un des arbitres, sans exiger que l'événement qui fait ainsi cesser l'arbitrage, soit connu des deux compromettans, ni même de l'un d'eux.

Le sieur Marie a fait de vains efforts pour justifier le jugement attaqué. Il s'est attaché à soutenir que, n'ayant pas été informé du refus de l'arbitre Poupart, ce fait devait être réputé non avenu à son égard; et que, dès-lors, le sieur. Lefortier n'avait pu en exciper pour justifier son appel.

ARRÊT.

LA COUR,-sur les conclusions de M. Cahier, avocat général; -Vu l'article 1012 du Code de procédure, portant « le compromis finit par le décès, refus, déport ou empêche»ment d'un des arbitres, s'il n'y a clause qu'il sera passé outre, ou que le remplacement » sera an choix des parties ou au choix de l'arbitre ou des arbitres restans. »>-CONSIDÉRANT que le compromis dont il s'agit est du 22 septembre 1815; que, le 10 octobre suivant, le sieur Poupart, arbitre du sieur Lefortier, a déclaré ne pas accepter sa mission; que ce fait est constaté par le jugement attaqué; que le compromis n'autorisait pas l'arbitre qui restait, ni à juger seul, ni à s'adjoindre un collègue, et que les parties ne s'étaient pas imposé l'obligation de remplacer l'arbitre ou les arbitres refusans; qu'ainsi, aux termes de l'article cidessus, le compromis dont il s'agit, avait pris fin à dater du 10 octobre; que n'existant plus de fait ni de droit depuis cette époque, il n'a pu faire obstacle à l'appel interjeté postérieurement le 28 novembre;-CONSIDERANT que, bien que l'une des parties en cause n'ait pas eu connaissance du refus fait par l'arbitre Poupart, ce refus n'en est pas moins constant, et qu'il suffisait, aux termes de la loi, pour anéantir le compromis;-CASSE.

: Du 24 décembre 1817.-Section civile.-M. le comte Desèze, pair de France, premier président.-M. le conseiller Zangiacomi, rapporteur. MM. Jousselin et Loiseau, avocats.

TESTAMENT OLOGRAPHE.-LÉGATAIRE UNIVERSEL.-VÉRIFICATION D'ÉCRITURE.- ENVOI EN POSSESSION. SAISINE LÉGALE. HÉRITIERS LÉGITIMES.

Lorsqu'un légataire universel, nommé par un testament olographe, a été envoyé en possession de la succession, par ordonnance du président du tribunal (1), les héritiers du sang, autres que ceux en faveur desquels la loi a établi une réserve, peuvent-ils réclamer provisoirement la

(1) Cette condition de l'envoi en possession par le président du tribunal, est essentielle pour opérer la saisine. La Cour de cassation a reconnu que le président pouvait l'accorder ou la refuser, suivant les circonstances. (Voyezl'arrêt.)

saisine des biens, sous le prétexte qu'ils méconnaissent l'écriture et la signature du testateur? Rés. nég.

Cette question s'est fréquemment présentée devant les Cours royales, et toutes (1) ont proclamé d'avance la distinction consacrée par l'arrêt que

nous rapportons.

Le 11 novembre 1815, décès de la demoiselle Marie-Anne Duflo; le lendemain, apposition des scellés à la requête des sieurs Lesouef et consorts, héritiers légitimes de la défunte.

Le 15 du même mois, le sieur Robin présente au président du tribunal. civil du Havre un paquet cacheté en forme de lettre oblongue, portant; «A M. Louis Robin marchand drapier à Angerville, pour étre

ouvert après ma mort. »

Le président dresse procès-verbal de l'ouverture du testament, et en constate l'état.

Le sieur Robin y est institué légataire universel de tous les biens meubles et immeubles laissés par la testatricé, sous la charge néanmoins de plusieurs legs particuliers.

Le lendemain 16 novembre, le testament est enregistré et déposé chez le notaire Morisse. En vertu de l'ordonnanne du président, une expédition en est délivrée au sieur Robin, qui, le 30 du même mois, présente requête à l'effet d'être envoyé en possession, conformément à l'art. 100 du Code civil.

Le même jour, 30 novembre, ordonnance du président, ainsi conçue; « Considérant que ce que prescrit l'article 1007 du Code civil a été observé, attendu qu'il est articulé que la testatrice n'a laissé aucun héritier, auquel une quotité de ses biens soit réservée par la loi; d'après les articles 1007 et 1008 du Code, envoie le sieur Robin en possession du legs universel à lui fait par la demoiselle Dufto, conformément à la loi. »

Le 5 décembre et jours suivans, reconnaissance et levée des scellés, à la requête du sieur Robin et en présence des héritiers du sang. Le sieur Robin est constitué gardien définitif des objets inventoriés, et, comme tel, demeure saisi des clefs à la fin de chaque vacation.

Le 5 janvier 1816, au moment de la clôture de l'inventaire, les sieurs Lesouef et consorts déclarent ne pas reconnaître la signature mise au bas de l'acte qualifié testament olographe de la demoiselle Duflo, leur parente; ils s'opposent, en conséquence, à l'ordonnance du président du tribunal, du 30 novembre, à ce que le sieur Robin s'immisce en rien dans l'administration des biens de la succession, et demandent à être envoyés provisoirement en possession des biens qui la composent.

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La prétention des sieurs Lesouef et consorts est rejetée en première instance, par les motifs suivans: « Considérant que, par le testament olo

(1) Voyez particulièrement l'arrêt de la Cour de Paris, du 10 janvier 1809, et celui de la Cour de Colmar, du 12 juillet 1807, vol. de 1810, pag. 50 et 51, suppl.

graphe dont il s'agit, Robin a été institué légataire universel; que, parmi les héritiers de la demoiselle Duflo, il n'y en a aucun à qui la loi réserve une quotite de ses biens; qu'ainsi Robin, en sa qualité, a été, par la mort de la testatrice, saisi de plein droit, sans être tenu de demander aucune déli vrance; que seulement, aux termes de l'article 1008 du Code, il a dû se faire envoyer en possession par ordonnance du président; considérant que le Code, dans ses dispositions, en saisissant de plein droit, dès le moment du décès, par le seul fait de l'existence de l'acte, le légataire universel, et en donnant exécution à cet acte, établit au moins en sa faveur une présomption légale qui le maintient virtuellement, jusqu'à ce que, par des preuves et autres moyens de droit, on soit parvenu à l'anéantir; qu'il ne suffit donc pas, pour l'invalider (à la différence des actes ordinaires sous seing-privé auxquels la loi n'accorde aucune créance que préalablement ils n'aient été reconnus ou vérifiés), d'une simple déclaration de ne pas reconnaître la signature....... Le tribunal, en accordant acte de l'opposition à l'ordonnance d'envoi en possession du 30 novembre dernier, laquelle est jointe au référé, juge à tort le référé interjeté par les héritiers de la demoiselle Duflo, les déclare, quant à présent, non recevables. »

Ce jugement, en date du 9 février 1816, est confirmé, sur l'appel, par arrêt de la Cour royale de Rouen du 28 mars de la même année, dont voici les termes : « Vu les articles 1004, 1006, 1007 et 1008 du Code civil; attendu que Robin, légataire, s'est conformé aux dispositions des art. 1007 et 1008, en obtenant du juge l'envoi en possession; que, de droit, par le vœu de ces divers articles, de fait, par l'ordonnance du juge, il a été constitué en bonne et valable possession; que, dans cet état de choses, si les lignagers de la demoiselle Duflo prétendent contester le testament, ils se constituent demandeurs; que, dès-lors, il leur incombe d'agir et d'éta blir le mérite de leur contestation; qu'en attendant, la provision est due au titre, et que, dans l'espèce, le testament revêtu de l'ordonnance du juge forme le titre; que ce serait donc déroger au vou de la loi que de priver le légataire de la saisine. »

Les sieurs Lesouef et consorts se sont pourvus en cassation de cet arrêt, pour violation des art. 1323 et 1324 du Code civil, et fausse application des art. 1006 et 1008 du même Code.

Aux termes des art. 1323 et 1324, disent les demandeurs, la partie à qui l'on oppose un acte sous seing-privé, est obligée d'avouer ou de désavouer formellement son écriture et sa signature; mais ses héritiers ou ayant-cause peuvent se contenter de déclarer qu'ils ne connaissent point l'écriture ou la signature de leur auteur, et, dans ce cas, la vérification en est ordonnée en justice. Ces dispositions de la loi reposent sur un principe plein de sagesse ; elles ont pour objet de donner une garantie contre la production et l'exécution de faux actes, dont le préjudice peut devenir irréparable en définitive. Or, ces principes s'appliquent indubitablement aux testamens olographes comme aux autres actes non revêtus de la signature d'un officier public, puisque de leur nature les testamens olographes sont des actes sous seingprivé. Il suit de là que le légataire institué par un acte de dernière volonté de No. II-Année 1818.

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cette espèce, ne peut, lorsque cet acte est méconnu par les héritiers légitimes, disputer à ceux-ci la saisine qui leur est conférée de plein droit par l'article 724 du Code civil, tant que la véracité de son titre n'est pas

-reconnue.

On objecte, il est vrai, dans l'espèce, l'ordonnance d'envoi en possession délivrée par le président du tribunal; mais cette objection qui pourrait avoir quelque gravité dans les cas où l'ordonnance dont il s'agit ne serait intervenue qu'après la méconnaissance du testament par les héritiers légitimes, ne mérite ici aucune considération, puisqu'au moment où le sieur Robin a obtenu du président l'envoi en possession, les sieurs Lesouef et consorts, qui n'ont pas eu connaissance de la demande du sieur Robin, n'avaient pas encore méconnu la signature mise au bas du prétendu testament de leur parente. La Cour royale de Rouen a donc ouvertement violé les articles cités.

C'est un principe, répondait le défendeur, formellement consacré par les art. 1004 et 1006 du Code civil, que, lorsqu'il n'existe point d'héritiers auxquels une quotité des biens du défunt soit réservée par la loi, le légataire universel est saisi de plein droit par la mort du testateur. Néanmoins l'application de cette règle pour le cas où les héritiers du sang sont écartés de la succession par un testament olographe ou mystique, est subordonnée à la nécessité de l'envoi en possession du légataire par une ordonnance du président du tribunal (art. 1008); c'est de l'accomplissement de cette formalité que la loi fait dépendre la saisine du légataire institué par un testament olographe ou mystique, mais aussi la saisine ne peut lui être contestée, dès qu'il a rempli la condition exigée par la loi.

C'est en vain qu'on parle des dangers auxquels seraient exposés les héritiers du sang, si le légataire universel pouvait, en vertu d'un testament olographe et argué de faux, retenir provisoirement les biens de la succession: c'est au juge qu'il appartient exclusivement d'apprécier ces dangers; et lorsqu'ils sont à craindre, lorsque de graves présomptions s'élèvent contre la sincérité du testament dont l'exécution lui est demandée, le président du tribunal peut, il doit même, dans sa sagesse, refuser au légataire l'ordonnance d'envoi en possession.

Quant à la distinction que les demandeurs en cassation ont cherché à établir entre le cas où l'ordonnance du président du tribunal a précédé et le cas où elle a suivi la méconnaissance du testament, outre qu'elle est repoussée par le texte de la loi qui n'en admet aucune, il est evident qu'elle n'a pu entrer dans la pensée du législateur. Les héritiers légitimes qui auront conçu des doutes sur la fidélité du testament qui les dépouille, ne négligeront sans doute aucun des moyens propres à éclairer, sur ce point, la religion du président du tribunal, et il est tout naturel que ceux qui seront en retard ne puissent imputer qu'à eux-mêmes le résultat de leur négligence et de leur incurie, vigilantibus, non dormientibus jura subveniunt. L'application à l'espèce de cette théorie fondée sur l'esprit (1) autant

(1) Voyez la discussion qui a eu lieu au Conseil d'état, dans la séance du 27 ventose an 11, sur les articles 1003 et suivans, tom. 2, p. 630 des procès-verbaux.

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