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A l'égard du tarif, aussi bien que pour toute stipulation introduite ou à introduire dans les Traités existants ou qui seraient ultérieurement conclus, il demeure bien et dûment établi que les négociants, et en général tous les citoyens français en Chine, auront droit toujours et partout au traitement de la nation la plus favorisée.

Art. 28. La publication d'un tarif convenable et régulier ôtant désormais tout pretexte à la contrebande, il n'est pas à présumer qu'aucun acte de cette nature soit commis par des bâtiments du commerce français dans les ports de la Chine. S'il en était autrement, toute marchandise introduite en contrebande par des navires ou par des négociants français dans ces ports, quelles que soient d'ailleurs sa valeur et sa nature comme aussi toute denrée prohibée débarquée frauduleusement, seront saisies par l'autorité locale et confisquées au profit du Gouvernement chinois. En outre, celui-ci pourra, si bon lui semble, interdire l'entrée de la Chine au bâtiment surpris en contravention et le contraindre à partir aussitôt après l'apuration de ses comptes. Si quelque navire étranger se couvrait frauduleusement du pavillon de la France, le Gouvernement français prendrait les mesures nécessaires pour la répression de cet abus.

Art. 29. Sa Majesté l'Empereur des Français pourra faire stationner un bâtiment de guerre dans les ports principaux de l'Empire où sa présence serait jugée nécessaire pour maintenir le bon ordre et la discipline parmi les équipages des navires marchands et faciliter l'exercice de l'autorité consulaire. Toutes les mesures nécessaires seraient prises pour que la présence de ces navires de guerre n'entraîne aucun inconvénient, et leurs commandants recevraient l'ordre de faire exécuter les dispositions stipulées dans l'article 33 par rapport aux communications avec la terre et à la police des équipages. Les bâtiments de guerre ne seront assujettis à aucun droit.

Art. 30. Tout bâtiment de guerre français croisant pour la protection du commerce sera reçu en ami et traité comme tel dans tous les ports de la Chine où il se présentera. Ces bâtiments pourront s'y procurer les divers objets de rechange et de ravitaillement dont ils auraient besoin, et s'ils ont fait des avaries, les réparer et acheter dans ce but les materiaux nécessaires; le tout sans la moindre opposition.

Il en sera de même à l'égard des navires de commerce français qui, par suite d'avaries majeures ou pour toute autre cause, seraient contraints de chercher refuge dans un port quelconque de la Chine.

Si quelqu'un de ces bâtiments venait à se perdre sur la côte, l'autorité chinoise la plus proche, dès qu'elle en serait informée, porterait sur-le-champ assistance à l'équipage, pourvoirait à ses premiers besoins et prendrait les mesures d'urgence nécessaires pour le sauvetage du navire et la préservation des marchandises. Puis elle porterait le tout à la connaissance du consul ou agent consulaire le plus à portée du sinistre, pour que celuici, de concert avec l'autorité compétente, pût aviser au moyen de rapatrier l'équipage et de sauver les débris du navire et de la cargaison.

Art. 31. Dans le cas où, par la suite des temps, la Chine entrerait en guerre avec une autre puissance, cette circonstance ne porterait aucune atteinte au libre commerce de la France avec la Chine ou avec la nation ennemie. Les navires français pourraient toujours, sauf le cas de blocus effectif, circuler sans obstacle des ports. de l'une aux ports de l'autre, y trafiquer comme à l'ordinaire, y importer et en exporter toute espèce de marchandises non prohibées.

Art. 32. S'il arrive que des matelots ou autres individus désertent des bâtiments de guerre ou s'évadent des navires de commerce français, l'autorité chinoise, sur la réquisition du consul ou, à son defaut, du capitaine, fera tous ses efforts pour découvrir et restituer sur-le-champ, entre les mains de l'un ou de l'autre, les susdits déserteurs ou fugitifs.

Pareillement, si des Chinois déserteurs ou prévenus de quelque crime vont se réfugier dans des maisons françaises ou à bord des navires appartenant à des Français, l'autorité locale s'adressera au consul, qui, sur la preuve de la culpabilité des prévenus, prendra immédiatement les mesures pour que leur extradition soit effectuée. De part et d'autre, on évitera soigneusement tout recel et toute connivence.

Art. 33. Quand des matelots descendront à terre, ils seront soumis à des règlements de discipline spéciale qui seront arrêtés par le consul et communiqués à l'autorité locale, de manière à prévenir, autant que possi

ble, toute occasion de querelle entre les marins français et les gens du pays.

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Art. 34. Dans le cas où les navires de commerce français seraient attaqués ou pillés par des pirates, dans des parages dépendants de la Chine, l'autorité civile et militaire du lieu le plus rapporté, dès qu'elle aura connaissance du fait, en poursuivra activement les auteurs, et ne négligera rien pour qu'ils soient arrêtés et punis conformément aux lois. Les marchandises enlevées, quelque lieu et dans quelque état qu'elles se trouvent, seront remises entre les mains du consul, qui se chargera de les restituer aux ayants droit. Si l'on ne peut s'emparer des coupables, ni recouvrer la totalité des objets volés, les fonctionnaires chinois subiront la peine infligée par la loi en pareille circonstance; mais ils ne sauraient être rendus pécuniairement responsables.

Art. 35. Lorsqu'un sujet français aura quelque motif de plainte ou quelque réclamation à formuler contre un Chinois, il devra d'abord exposer ses griefs au consul qui, après avoir examiné l'affaire, s'efforcera de l'arranger à l'amiable. De même, quand un Chinois aura à se plaindre d'un Français, le consul écoutera ses réclamations avec intérêt et cherchera à ménager un arrangement à l'amiable; mais si, dans l'un ou l'autre cas, la chose était impossible, le consul requerra l'assistance du fonctionnaire chinois compétent, et tous deux, après avoir examiné conjointement l'affaire, statueront suivant l'équité.

Art. 36. Si, dorénavant, des citoyens français éprouvaient quelques dommages, ou s'ils étaient l'objet de quelque insulte ou vexation de la part de sujets chinois, ceux-ci seraient poursuivis par l'autorité locale, qui prendra les mesures nécessaires pour la défense et la protection des Français; à bien plus forte raison, si des malfaiteurs ou quelque partie égarée de la population tentaient de piller, de détruire ou d'incendier les maisons, les magasins des Français, ou tout autre établissement. formé par eux, la même autorité, soit à la réquisition du consul, soit de son propre mouvement, enverrait en toute hâte la force armée pour dissiper l'émente, s'emparer des coupables, les livrer à toute la rigueur des lois; le tout sans préjudice des poursuites à exercer par qui de droit pour indemnisation des pertes éprouvées.

Art. 37. Si des Chinois, à l'avenir, deviennent déNouv. Recueil gén. Tome XVII. Part. I.

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biteurs de capitaines ou de négociants français et leur font éprouver des pertes par fraude ou de toute autre manière, ceux-ci n'auront plus à se prévaloir de la solidarité qui résultait de l'ancien état de choses; ils pourront seulement s'adresser, par l'entremise de leurs consuls, à l'autorité locale qui ne négligera rien, après avoir examiné l'affaire, pour contraindre, les prévenus à satisfaire à leurs engagements, suivant la loi du pays. Mais si le débiteur ne peut être retrouvé, s'il est mort ou en faillite, et s'il ne reste rien pour payer, les négociants français ne pourront point appeler l'autorité chinoise en garantie.

En cas de fraude ou de non-payement de la part des négociants français, le consul prêtera, de la même manière, assistance aux réclamants, sans que, toutefois, ni lui ni son Gouvernement puissent, en aucune manière, être rendus responsables.

Art. 38. Si, malheureusement, il s'élevait quelque rixe ou quelque querelle entre des Français et des Chinois, comme aussi dans le cas où, durant le cours d'une semblable querelle, un ou plusieurs individus seraient tués ou blessés, soit par des coups de feu, soit autrement, les Chinois seront arrêtés par l'autorité chinoise, qui se chargera de les faire examiner et punir, s'il y a lieu, conformément aux lois du pays. Quant aux Français, ils seront arrêtés à la diligence du consul, et celui-ci prendra toutes les mesures nécessaires pour que les prévenus soient livrés à l'action régulière des lois françaises, dans la forme et suivant les dispositions qui seront ultérieurement déterminées par le gouvernement français.

Il en sera de même en toute circonstance analogue et non prévue dans la présente Convention, le principe étant que, pour la répression des crimes et délits commis par eux en Chine, les Français seront constamment régis par les lois françaises.

Art. 39. Les Français en Chine dépendront également, pour toutes les difficultés ou les contestations qui pourraient s'élever entre eux, de la juridiction française. En cas de différents survenus entre Français et étrangers, il est bien stipulé que l'autorité chinoise n'aura à s'en mêler en aucune manière. Elle n'aura pareillement à exercer aucune action sur les navires français; ceuxci ne relèveront que de l'autorité française et du capitaine.

Art. 40. Si, dorénavant, le Gouvernement de Sa Majesté l'Empereur des Français jugeait convenable d'apporter des modifications à quelques-unes des clauses du présent Traité, il sera libre d'ouvrir, à cet effet, des négociations avec le gouvernement chinois, après un intervalle de douze années révolues à partir de l'échange des ratifications. Il est d'ailleurs entendu que toute obligation non consignée expressément dans la présente Convention ne saura être imposée aux consuls ou aux agents consulaires, non plus qu'à leurs nationaux, tandis que, comme il a été stipulé, les Français jouiront de tous les droits, priviléges, immunités et garanties quelconques qui auraient été ou qui seraient accordées par le Gouvernement chinois à d'autres puissances.

Art. 41. Sa Majesté l'Empereur des Français, voulant donner à Sa Majesté l'Empereur de la Chine une preuve des sentiments qui l'animent, consent à stipuler, dans des articles séparés ayant la même force et valeur que s'ils étaient insérés mot à mot au présent Traité, les arrangements au sujet des questions antérieures aux événements de Canton et aux frais qu'ils ont occasionnés au Gouvernement de Sa Majesté l'Empereur des Français.

Art. 42. Les ratifications du présent Traité d'amitié, de commerce et de navigation, seront échangées à Pékin, dans l'intervalle d'un an à partir du jour de la signature, ou plus tôt si faire se peut, par Sa Majesté l'Empereur des Français et par Sa Majesté l'empereur de la Chine.

Après l'échange de ces ratifications, le Traité sera porté à la connaissance de toutes les autorités supérieures de l'Empire dans les provinces et dans la capitale, afin que sa publicité soit bien établie.

En foi de quoi, les plénipotentiaires respectifs ont signé le présent Traité et y ont apposé leurs cachets.

Fait à Tien-Tsin, en quatre expéditions, le vingtseptième jour du mois de juin de l'an de grâce 1858, correspondant au dix-septième jour de la cinquième lune de la huitième année de Hien-Foung.

(L. S.) Signé: baron Gros.

(L. S.) Les signatures des plénipotentiaires chinois.

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