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populations leur étaient hostiles. C'est ce que la bourgeoisie de Rouen osa remontrer au duc de Bedford, régent pour le roi d'Angleterre, mineur (Monstrelet). La reddition de la ville et chastel de Cherbourg, le 12 août 1450, sera l'objet d'un article spécial; c'est mon devoir en ma qualité de citoyen de Cherbourg; après quoi et quelques Analecta, j'aurai terminé, le tableau des guerres des Anglais et des Français dans le territoire qui compose le département de la Manche. Mais nous ne pouvons pas oublier un touchant épisode de l'histoire de ces déplorables époques, relatif à la capitulation de Bayeux.

Exempie remarquable de l'amour maternel.

Après la bataille de Formigny, les Français victorieux ne pouvaient oublier la longue tyrannic des Anglais, et ils usèrent d'abord, peut-être immodérément, des droits de la victoire. Ils se présentèrent devant Bayeux, ville fortifiée comme presque toutes les cités du moyen-àgc. Bayeux était habité présque entierement par des familles anglaises; dénuéc de troupes, parce que les fuyards de Formigny s'étaient précipités vers Cherbourg en passant les Veys Saint-Clément, celte ville n'avait donc d'autre parti à prendre qu'une capitulation. Les Anglais demandèrent à sortir avec tous leurs biens mobiliers, ce qui leur fut nettement refusé; il ne leur fut accordé que la vie sauve et la sortie, un simple bâton à la main, pour se rendre en ligne directe à Cherbourg sans s'arrèter en route. A. force de sollicitations, les assiégés obtinrent d'emporter ce que chacun pourrait sur sa personne seulement, sans voitures, ni chevaux. Du reste, les officiers français promirent d'avoir soin des vieillards et des enfants jusqu'à ce que les familles pussent revenir les chercher. A ces nouvelles, il n'y eut que cris, plaintes et lamentations dans la ville; cependant, il fallut se résigner. Mais le Français, terrible dans le combat, est généreux dans son triomphe. Les officiers offrirent aux dames et demoiselles des commandants anglais, leurs charrettes de guerre pour les transporter. Mais qu'allaient devenir les classes inférieures? Au moment fixé pour la sortie, on voit paraitre des hommes portant sur leur dos quelques provisions de voyage et conduisant par la main les enfants déjà grands; puis venaient les femmes, dont les unes portaient de petits enfants dans des berceaux sur leurs tètes, les autres sur leur cou, d'autres en avaient de pendus autour d'elles avec des bandeaux de toile roulés en forme de hamacs, ce qui n'empêchait pas les mères de nombreuses familles de donner encore la main à d'autres enfants en état de marcher. J'emprunte tous ces détails touchants d'Alain Chartier, né à Bayeux, un des meilleurs historiens de Charles VII. A ce spectacle tout le monde, du côté des Français, les femmes

surtout, fondaient en larmes. Les commandants français, les paysans, les simples soldats, rassemblèrent le plus qu'ils purent de chevaux et de charrettes pour aider à ces bonnes mères à faire leur route. Il est certain qu'un peintre d'histoire trouverait, dans cette sortie, le sujet d'un tableau intéressant. L'amour maternel est, dans l'ordre moral de l'univers, le chef-d'œuvre du Créateur.

COUPPEY.

Notes

nes foires

du départe

ment

de la Manche.

NOTES SUR LES ANCIENNES FOIRES

DU DÉPARTEMENT DE LA MANCHE.

Dans les pages qu'on va lire, nous avons réuni quelques sur les ancien- renseignements sur l'origine et l'existence, au moyen-âge, d'un certain nombre des foires et marchés de notre département. Nous n'en possédons pas d'antérieurs au onzième siècle, et nous avons écarté tout ce qui est postérieur au quinzième. Nous savons que notre travail sera bien incomplet. Mais nous espérons qu'en appelant l'attention du public sur cette matière, nous provoquerons des communications qui nous mettront à même de compléter une autre fois la liste que nous allons ébaucher.

AGON. Le 27 décembre 1199, Jean Sans-Terre autorisa Guillaume des Roches, sénéchal d'Anjou, à établir à Agon un marché le jeudi de chaque semaine, et une foire de huit jours à la Pentecôte (4). Ce seigneur en donna la dime aux moines de Bois-Renouf (2). Plusieurs auteurs modernes prétendent que la foire d'Agon fut transférée à Montmartin en 4238. Nous ignorons à quelle source ils ont puisé ce renseignement. Plus loin nous verrons que la foire de Montmartin était célèbre dès le onzième siècle. Mais rien n'empêche qu'on y ait réuni celle d'Agon. Ce qui porterait même à le penser, c'est que, en 1257, la veuve de Raoul de Fougères, Isabelle de Craon, dont le père, Amauri de Craon, était gendre de Guillaume des Roches, confirma à l'abbaye de Savigny une rente de dix livres sur la foire de Montmartin (3).

ANNEVILLE-EN-SAIRE. D'après un aveu de 1399, Jean de Villiers y avait la moitié d'une foire le jour Saint-Léger (4).

(1) Rotuli chartarum, p. 34, c. 1. L'éditeur, M. Duffus Hardy, a imprimé <«< apud Agen» mais il faut lire « apud Agon. »

(2) Foustain de Billy.

(3) Archives nationales, carton L. 1146. 8. Cf. Olim, t. 11, p. 263,
(4) Archives nationales, registre P. 304, no ccxc.

Dans la même paroisse, au Tourp, près la chapelle Saint-Gilles, se tenait, le jour de la fète de ce saint, une foire dont les produits appartenaient à l'abbaye de Lessai, en 1424 (1).

ANNEVILLE-SUR-MER. En juillet 1324, le Roi y établit, en faveur de Robert des Moitiers, chevalier, une foire à tenir le jour Saint-Pierre ès-liens (2).

ARDEVON. En 1088, Robert-Courte-Heuse, duc de Normandie, donna aux religieux du Mont-Saint-Michel un marché et une foire à la Nativité Notre-Dame, dans le fief d'Ardevon (3). ARGOUGES. En juillet 1329, le Roi concéda à Philippe de Saint-Hilaire, chevalier, une foire à Argouges, dans le bailliage de Cotentin. Elle devait se tenir à la Saint-Pierre et Saint-Paul (4).

AUBIGNI. Henri II, roi d'Angleterre, confirma à l'abbaye de Lessai la dime du marché d'Aubigni (5). Voyez plus loin au mot Saint-Christophe.

AVRANCHES. Henri I avait donné à la cathédrale d'Avranches la moitié de la foire Saint-André (6). En 1495, cette foire rapporte au domaine la somme de 10 livres (7), et, en 1198, 12 livres 4 sous 5 deniers (8). Nous la trouvons citée en 1324 (9). Louis XI, étant à Baïeux au mois de septembre 1470, donna au Chapitre d'Avranches le droit qu'il avait sur cette foire (10).-La cathédrale avait pareillement reçu de la libéralité de Henri I la moitié de la foire Saint-Lambert (11). Dans une charte de l'année 1244, G., évêque d'Avranches, déclara que le chapitre aurait la moitié du havage et des autres produits de la foire tenue le jour Saint-Lambert, à Avranches (12). En 1259, on mentionne le champ où se vendent les chevaux à la foire Saint Lambert (43).-Sous Henri II, les hommes de l'abbé de Caen, à Vains, étaient francs de tous droits à Avranches, sauf le jour du marché (44). En 1210, Geoffroi de la

(1) Ib., no CLXXXV.

(2) Ib., registre J. LXII, n° CCXXXHI.

(3) Cartulaire du Mont-Saint-Michel, ms. n° 80 de la bibliothèque d'Avranches, f. LXXVи r".

(4) Arch. nat., reg. J. LXVI, no LX.

(5) Liber de beneficiis Exaquii, ms, des Archives de la Manche, fo 3 r".

(6) Livre vert du Chapitre d'Avranches, ms, de la bibliothèque d'Avranches, p. IX, c. 2.

(7) Rotuli Scaccarii Normanniæ, édit. de Londres, t. 1, p. 215.

(8) Ib., t. 11, p. 289.

(9) Compte du Mont-Saint-Michel, ins. des Archives de la Manche, f° 3, v". (10) Livre vert, p. CCLXXVII, c. 2,

(11) Ib., p. ix, c. 2.

(12) lb., p. LXXVIII, c. 1., no XLVIII.

(13) Ib., p. xcI, c. 1, no LXXIII.

(14) Cartulaire de Normandie, ms. de la fin du XIII*siècle, appartenant

à M. Auguste Le Prevost, f' x1x V”.

Champagne donna aux religieux de Saint-Lo un tenement sur le marché d'Avranches (1). En 1341, est citée la cohue du Roi pour le froment (2). Au commencement du XIVe siècle, la halle aux draps fut transférée de l'intérieur de la cité dans le faubourg; mais, sur la plainte de quelques habitants, le bailli rétablit les choses dans leur premier état en 1348 (3).

BARNEVILLE. En 4413, Richard Carbonnel y jouissait de deux foires, l'une à la Saint Pierre ès liens; l'autre, à la Saint-Michel, en octobre (4). ·

BAUTE. Cette paroisse renfermait un prieuré de l'abbaye de Saint-Etienne de Caen, que Guillaume-le-Conquérant avait doté d'un marché (5). Un peu plus tard, Guillaume, comte de Mortain, donna aux chanoines de Saint-Evroul la dime de la foire de Baute (6).

BEUZEVILLE LA BASTILLE. Le même comte de Mortain dota sa collégiale de la dime de la foire de Beuzeville (7).

BEUZEVILLE AU PLAIN. En 1237, un chanoine de Coutances était en procès avec Guillaume, connétable de Normandie, au sujet de 11 deniers qu'on lui réclamait pour achat de 7 porcs et de 4 bœufs à la foire Saint-Clement de Beuzeville (8). La foire de Beuzeville est encore citée dans une charte de Jean d'Essei, en 1273 (9).

BINIVILLE. En mars 1330, à la demande de Guillaume de Caretot, le Roi y établit une foire le jour Saint-Blaise (10).

BION. En 1082, la dime de la foire de Bion servit à dot er une des prébendes de la collégiale de Mortain (14).

BOLLEVILLE. En 1399, le seigneur de la Haie-du-Puits exerçait la juridiction de deux foires séantes à Bolleville, le jour de la Madeleine et le jour Saint-Barthélemi (12). Les religieux de Lessai comprennent l'une et l'autre dans leur aveu du 4 janvier 1423—4 (13).

BOUTTEVILLE. Henri II confirma à l'abbaye de Saint-Sauveur

(1) Cartulaire de l'abbaye de Saint-Lo, rédigé par M. Dubosc, p. 889. (2) Registrum pitanciarie Montis Sancti Michaelis, ms. des archives de la Manche, fo ш гo.

(3) Archives nationales, reg. J. LIX, no xv.

(4) Ib., reg. P. 304, n° CXLIX.

(5) Neustria pia, p. 627. Gallia Christiana, t. xi, instr., c. 67.

(6) Archives nationales, reg. J. LXVI, no XI© LVIII.

(7) Ib.

(8) Cartulaire du chapitre de Coutances, ms. no 1 des Archives de l'Evêché, no 292 de la copie de M. de Gerville.

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le-Vicomte une foire à Saint Hermeland, le jour de la fète de ce saint (1). A la fin du XIIe siècle, Raoul Le Bouteiller permit aux moines de la tenir sur sa terre (2).

BRÉHAL.Vers 1440, Fouque Painel donna à l'abbaye de Hambie la dime de la foire de Bréhal (3).

BRIQUEBEC. Le seigneur de Bricquebec confirma au prieuré de Beaumont en Auge la dime de la foire Saint Paul, en 1221 (4) et en 1255 (5). Mais nous ne sommes pas certain qu'elle se tint à cette époque à Bricquebec. Voyez plus loin au mot Saint-Paul des Sablons.

En juillet 1325, établissement de la foire Sainte-Catherine au profit de Robert Bertran (6). En 1395, on remarque parmi les dépendances de la barounie de Bricquebec un marché le samedi, et deux foires, l'une à la Sainte-Catherine, l'autre à la Saint-Nicolas, en mai (7). Voyez plus loin au mot Etang (L').

*BRIX. En 1444, Adam, fils de Robert de Brix, donna à l'abbaye de Saint-Sauveur, pour le prieuré de la Lutumière, la dime de ses foires de Saint-Christophe et de Saint-Nicolas (8); mais nous ignorons si elles se tenaient sur le territoire même de Brix. D'après le pouillé de Jean d'Essei, les profits de la foire Saint-Denis étaient attachés à la cure de Brix (9).

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BUAIS. En 1336, le curé de Buais dessaisit les trésoriers du Tilleul de la foire Sainte-Anne de Buais, qui leur appartenait quand il n'y avait pas de malades en la maladerie du Tilleul (10).

CARENTAN. Le 7 février 1200, Jean-Sans-Terre accorda aux lépreux de Carentan une foire d'un jour. Elle se tenait près de leur maladerie, à la fin de la Pàque (14). En 4336, on accrut le marché aux bêtes de Carentan (12).

CERENCES. En 1327, la cohue des blés de Cérences est portée pour 15 livres sur le compte de la vicomté de Coutances (13).

(1) Cartulaire de Saint-Sauveur, ins. des Archives de la Manche, fo 1, r*, n° 1.

(2) Ib., xxv ro, no 124.

(3) Cartulaire de Hambie, ms. des Archives de la Manche, charte no 2. (4) La confirmation de 1221 est dans un vidimus, conservé aux Archives de la Seine-Inférieure, fonds de Saint-Quen.

(5) L'original de cette confirmation appartient à M. Auguste Le Prevost. (6) Archives nationales, reg. J. LXIV, no XLV.

(7) Ib., reg. P. 304, no 111© xVIII.

(8) Cartulaire de Saint-Sauveur, fo xxx v“, n° 158; Cartulaire de la Lutumière, ms, des Archives de la Manche, charte no1.

(9) P. 63 du ms. de M. l'abbé Pitton-Desprez.

(10) Cartulaire du Plessis, ms. des Archives du Calvados, no 876, t. 11; chapitre BUEYS, fш v° et mг. Voy. M. Lechaudé, Extrait des chartes, t. II, p. 114.

(11) Rotuli chartarum, p. 35, c. 2.

(12) Archives nationales, carton J. 222, CARENTAN, no 5.

(13) Assiette de terres au Roi de Navarre, document communiqué par M. de Gerville.

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