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Marano et le val Venosta, Toll ayant pour lui une plus grande ressemblance de nom avec un voisinage plus rapproché de Trente, et, en outre, le fait qu'on y a découvert une inscription romaine de la même année 46 (56); 3° dans le val Sugana, du côté opposé de Trente, c'est-à-dire à l'est, entre Trente et Feltre, vallée où l'on trouve divers noms qui semblent rappeler les Tulliasses, Telvana, Telve, Telve di Sopra, Telvagola. Un quatrième emplacement a été proposé par M. Mommsen, d'après Wattenbach et Kiepert (57) c'est celui de Dolas, dans la vallée de la Sarca, à l'ouest de Trente, entre Stenico et CastelDoblino. Cette dernière hypothèse paraît la plus plausible (58).

Lignes 22-23 Sindunorum. - Voilà le troisième nom de peuple que notre table fait sortir de l'oubli (59).

(56) Orelli, no 708 : mais Telonii, nom latin du lieu dans l'inscription, est assez éloigné de Tulliasses.

(57) Zeitschrift für Rechtsgeschichte, t. IX, p. 181.

(58) Il ne semble pas y avoir de rapprochement à faire entre nos Tulliasses et le nom latin de la ville française de Toul, près Nancy. Ce nom est, le plus souvent, Tullum et non Tullium. Les monnaies frappées à Toul portent Tullo. On trouve pourtant Tullium dans quelques éditions de Ptolémée, II, 9, et dans la table de Peutinger ou théodosienne, B, a.

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(59) Constatons cependant ici que le nom de Sindunum se trouve déjà dans un chroniqueur du dixième siècle, Flodoard ou Frodoard, auteur d'une Histoire de l'Eglise de Reims. On lit ce qui suit au livre Ier de cette Histoire, chapitre VIII, intitulé De sancto Oriculo et sororibus ejus « Sub eadem Vandalorum vel Hunnorum persecutione, quidam Dei servus, Oriculus nomine, Deo vacabat, cum sororibus ejus Oricula et Basilica, in hoc eodem episcopatu Remensi, in pago Dulcumensi, vico Sinduno. » V. t. Ier, p. 51, de l'édition de Flodoard donnée par M. Lejeune, Reims, 1854, in-8°. Cp. dans la Collection des Mémoires relatifs à l'Histoire de France de M. Guizot, t. V, p. 25 (la traduction française seulement de Frodoard). MM. Lejeune, Ches

Le pays qu'ils occupaient n'est pas moins difficile à déterminer que celui des Tulliasses. M. Mommsen ne propose aucune conjecture à cet égard. M. Schupfer (60) pense qu'on pourrait les chercher dans la vallée de Giudicaria, à l'ouest de Trente, et les prendre pour le même peuple que les Stoni. On retrouverait les traces de leur nom dans les localités actuelles de Stenico et de Storo. Dans cette hypothèse, les Sinduni auraient été très-voisins des Tulliasses, si l'on place ces derniers dans la vallée de la Sarca, et, avec les Anauni, ils auraient précisément occupé les trois principales vallées qui sont les plus rapprochées de Trente au sud-ouest, à l'ouest et au nord-ouest. Ces deux conjectures se fortifient l'une l'autre, et conduisent à un résultat qui, dans son ensemble, est fort acceptable.

Lignes 23-24 Quorum partem delator adtributam Tridentinis partem ne adtributam quidem arguisse dicitur. Tout délateur devait faire sa preuve, c'est-àdire prouver que le bien qu'il dénonçait était bien de la classe de ceux qui pouvaient être revendiqués par le fisc comme caduca, vacantia ou ereptoria. S'il réussissait à faire cette preuve, il recevait une récompense en argent; s'il échouait, il subissait une peine. Dans l'espèce, notre Camurius Statutus avait-il en partie échoué, en partie réussi? C'est ce que l'on ne peut affirmer. Sans doute, en tant qu'une partie du territoire des Anauni, des Tulliasses et des Sinduni était attribuée à Trente, le fisc n'y avait pas

neau et Guizot s'accordent à traduire Sindunum in pago Dulcumensi par Senuc en Dormois (canton de Grandpré, Ardennes). C'est là qu'on honore encore aujourd'hui les reliques de saint Oricle.

(60) Archivio, p. 570, note 5, et p. 590.

droit, l'état romain ayant renoncé à son droit en faveur de la ville de Trente (61). Mais, d'une part, il pouvait se faire que les termes de la délation fussent conçus de manière à ne porter que sur la partie non attribuée à Trente; d'un autre côté, la controversia de locis publicis pouvait s'étendre des réclamations faites par l'état romain à celles des communes demandant aux particuliers la restitution de territoires communaux (62). Que faut-il entendre par cette attribution à Trente? Quels en étaient la nature et les effets? C'est un point sur lequel je reviendrai tout à l'heure, sur les mots ita permixtum, etc... afin de réunir dans une même observation les questions relatives à l'histoire de Trente et de nos trois peuples.

Les mots partem ne adtributam doivent auparavant m'occuper un instant. En ce qui concerne cette partie de territoire non attribuée à Trente, le délateur avait affirmé avec raison qu'elle appartenait au fisc; car elle avait été conquise en guerre et il n'avait point été pris de disposition à son égard. L'empereur pouvait, soit abandonner ces fonds (agros et saltus), soit les reprendre, soit les frapper d'impôts. Que fit-il? Nous ne le savons pas; notre table ne contient pas de décision à ce sujet, car celle qu'elle renferme concernant le droit personnel des possesseurs, qui deviennent citoyens romains, est entièrement distincte des décisions à intervenir quant au droit territorial applicable à leur pays (63).

Ligne 26-27 Cum longa usurpatione. - La qualité de citoyen romain pouvait s'acquérir de diverses ma

(61) Mommsen, Hermès, p. 114.

(62) Ibid. et p. 115.

(63) Mommsen, p. 115.

nières par concession, soit à des individus, soit en masse à des villes ou à des contrées, émanant du peuple, du sénat ou d'un magistrat spécialement autorisé à cet effet, et plus tard de l'empereur. Mais elle ne pouvait pas s'acquérir par le long usage: ce n'était pas matière à usucapion.

Lignes 27-29: Et ita permixtum cum Tridentinis ut diduci ab is sine gravi splendidi (64) municipii injuria non possit. Plaçons ici quelques observations sur l'histoire de Trente, sur celle de nos trois peuples et sur leur union avec Trente.

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L'origine de Trente est fort controversée : rhétoétrusque selon les uns, celtique selon les autres. M. Schupfer (65) admet l'origine étrusque; mais il ajoute que les Gaulois s'étant emparés de Brescia, devinrent maîtres aussi de Trente, et qu'il se fit entre eux et les anciens habitants étrusques une fusion dont on peut chercher à découvrir les traces dans le dialecte actuel du pays de Trente (66). Il en conclut

(64) Le texte porte splendi, qu'expliquerait suffisamment le besoin de retrancher une syllabe d'une ligne assez chargée. Peut-être y a-t-il simplement une négligence du graveur. (65) Archivio, p. 573 et suiv. Il cite comme partisans de l'origine rhéto-étrusque : Müller, Etrusker, 1, 163; Niebuhr, Romische Geschichte, p. 118; Mommsen, Nordetruskische Alphabete; Daumer, Zur tirol. Alterthumskunde; Steub, Urbewohner Rhätiens et Rhätische Etnologie; Giovanelli, spécialement dans son ouvrage: Trento, città de' Rezi e colonia romana, 1825; comme partisans de l'origine celtique: Leo, Ferienstunden et Geschichte des d. Reichs; Holtzmann, Kelten und Germanen ; Roschmann, Bella romana in Rhætia, ms.; Zeuss, die Deutschen und die Nachbarstämme; Diefenbach, Celtica; Koch, die Alpenetrusker; Stofella et Martini.

(66) Entre autres particularités l'ü est peut-être plus marqué encore dans le dialecte trentin que dans celui de la Lombardie : sur ce point et sur d'autres, M. Schupfer, p. 573, note 2, renvoie au journal Il Trentino, 2 année, nos 116, 117, au Saggio sopra i dialetti volgari del

que Trente fut conquis par les Romains avec le reste de la Gaule Cisalpine, dont cette ville fit désormais partie, dès l'année 532 de Rome, et par conséquent avant la première guerre rhétique. Un siècle après, Trente obtint le droit municipal des Latins par la loi Pompéia, de 665, puis, en 705, la cité romaine, reçut l'application de la loi Rubria et de la loi Julia municipalis, et fut compris dans la tribu Papiria (67), faisant corps désormais avec l'Italie et séparé du reste de la Rhétie, son origine. C'est donc à tort que beaucoup de livres et d'atlas placent dans la Rhétie Trente, qui doit au contraire être placé dans l'Italie, ainsi que son territoire qui formait la limite septentrionale de l'Italie au temps de l'Empire (68).

Quelle fut la situation de Trente sous la domination romaine? Fut-ce un municipe ou une colonie, ou successivement l'un et l'autre, ou enfin tout à la fois un municipe et une colonie?

Le titre de municipe lui est expressément donné dans deux inscriptions, dans notre table de Cles, de la manière la plus formelle, et dans une inscription sépulcrale rapportée par Spon (69). Il résulte encore,

Tirolo italiano de Schneller, Rovereto, 1865, et au Vocabolario d'Azzolini, Venezia, 1856.

(67) Selon Giovanelli; dans la tribu Fabia, selon Stofella; Schupfer, p. 575, note 1. Mommsen, Hermès, p. 116, note 4, se prononce pour

la tribu Papiria.

(68) Mommsen, Hermès, p. 110 et p. 111, note 1: Ptolémée, 3, 1, 31: Justin, 20, 5, 8, et surtout Phlégon, fr. 53: ñò ñóλews Tpidéνtou tŷs 'Italia. Pline, il est vrai, appelle Trente Rhæticum oppidum (Hist. nat., III, 19), mais c'est par allusion à l'ancienne nationalité de ses habitants, car il mentionne Trente avec Vérone, Mantoue, Vicence, Padoue, Crémone, Brescia, dans la dixième région, tandis qu'il place es Rhétiens parmi les peuples alpestres.

(69) M. Schupfer, Archivio, p. 568, note 2, la reproduit ainsi : Dis

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