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CHAPITRE VIII

TRAITÉ ALLEMAND.

TRAITÉS AMÉRICAINS

Dès l'été de 1872, le traité négocié à Tien-Tsin, le 2 septembre 1861 par le comte d'Eulenbourg avait été dénoncé ; ce n'était qu'une simple mesure de conservation. Mais en 1876, alors que la Chine n'avait pas encore réglé l'affaire Margary, les circonstances parurent favorables au gouvernement impérial pour commencer les négociations, et après s'être assuré le concours de la plupart des grandes puissances, l'Allemagne réclama également les bons offices de la France par la note suivante du prince de Hohenlohe, son ambassadeur à Paris :

AMBASSADE IMPÉRIALE D'ALLEMAGNE EN FRANCE

NOTE VERBALE

Depuis nombre d'années, les diverses puissances européennes qui ont conclu des traités de commerce avec la Chine, ont pris en considération la révision de ces traités. Dès l'été 1873, le Gouvernement Allemand a informé le Gouvernement Chinois de son intention de se prévaloir du droit de révision prévu par l'article 71 du traité du 2 septembre 1861.

L'ouverture des négociations ayant été retardée pour différentes causes, le ministre d'Allemagne à Pé-king n'a reçu que tout récemment les instructions nécessaires à cet effet. Le Gouvernement Allemand se place au point de vue qu'il s'agit, d'une part

d'inspirer au Gouvernement Chinois la conviction qu'on ne lui demande pas de nouveaux sacrifices, et d'autre part, de lui démontrer que, malgré la divergence de certains intérêts, les puissances européennes sont unies en ce qui concerne la question principale.

Le Gouvernement Allemand fera abstraction de toute réclamation non basée sur un fait? ainsi que de celles qui n'ont aucune chance d'être accueillies par le Gouvernement Chinois. On évitera également de faire des propositions de nature à provoquer des demandes de réciprocité qui pourraient être gênantes soit pour l'Allemagne, soit pour une des autres puissances contractantes. Nous nous abstiendrons, par exemple, de formuler des demandes pour l'abaissement du tarif, ou pour un droit absolu d'établissement des étrangers à l'intérieur ou pour l'exploitation des mines par des étrangers.

En bornant nos réclamations strictement au domaine commercial, en évitant d'introduire dès à présent des questions avant une portée politique et sur lesquelles l'identité d'intérêts n'est pas encore établie parmi les puissances, nous croyons contribuer pour notre part à une révision plus prompte.

Malgré ce programme restreint nous espérons arriver à un résultat utile pour toutes les puissances contractantes, si nous réussissons à procurer au commerce étranger quelques ports nouveaux et quelques voies navigables vers l'intérieur, à assurer l'emploi des droits de tonnage pour des travaux utiles à la navigation, mais surtout si nous pouvons arriver à faire mettre fin à l'arbitraire qui régit actuellement la perception des droits dits Likin, et qui sont considérés par les commerçants comme l'obstacle principal contre le développement du commerce extérieur de la Chine.

Nous essaierons également d'obtenir quelques-unes des concessions faites à l'Angleterre en 1869. Il est vrai que cette convention additionnelle', qui ne fut pas ratifiée, stipulait pour la Chine des avantages considérables par rapport à la perception des droits Likin.

Quelque modeste que puisse être le résultat de nos négociations, il constituerait un progrès réel, parce que la voie se trouverait ainsi ouverte pour la révision des Traités des autres puissances.

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Nous croyons servir les intérêts solidaires de toutes les puissances contractantes, en traitant isolément avec la Chine. Les autres puissances, pourront, en procédant subséquemment et chacune séparément à la révision des traités respectifs, obtenir petit à petit des avantages que le Gouvernement Chinois ne sera guère disposé à accorder en première instance. Mais nous avons l'espoir que toutes les puissances intéressées à ce résultat ultérieur voudront donner expression au sentiment de solidarité, en faisant appuyer à Pé-king le négociateur allemand par leurs représentants respectifs.

Après avoir, dans une phase précédente de la question, acquis la conviction que les Gouvernements de la Grande Bretagne, de l'Autriche-Hongrie, de la Russie et des États-Unis partagent la manière de voir qui vient d'être exposée, le Gouvernement Allemand s'adresse aujourd'hui à toutes les puissances contractantes, en les priant de l'informer si elles sont disposées à faire donner leur appui et leurs bons conseils au Ministre d'Allemagne à Pé-king dans les négociations qu'il va entamer en vue de la révision du traité actuellement existant entre l'Allemagne et la Chine.

Le Gouvernement Impérial ne doute pas que l'attitude du Gouvernement Français correspondra aux bons rapports des deux Gouvernements.

Paris, le 22 mars 1876.

Rien dans le projet allemand n'était contraire aux idées générales de notre politique en Chine, il est d'ailleurs de l'intérêt des puissances étrangères de se montrer unies autant que possible dans l'Extrême-Orient, en conséquence des instructions furent données à notre Chargé d'Affaires à Pé-King, M. de Rochechouart, de prêter ses bons offices au ministre d'Allemagne, M. v. Brandt. L'aide de la France était d'ailleurs presque indispensable. L'article 40 de notre traité de Tien Tsin de 1858 a une importance capitale; il n'est inséré dans aucun autre traité, et il empêchait toute négociation sans le concours de notre pays.

1. I,
p. 36

LE MINISTRE DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES A M. DE ROCHECHOUART

MONSIEUR,

Versailles, le 7 avril 1876.

M. l'Ambassadeur d'Allemagne m'a annoncé l'intention où se trouverait le Gouvernement Impérial d'entamer avec la Chine des négociations dont l'objet serait d'arriver à faire modifier dans un sens profitable à toutes les Puissances Européennes les stipulations du traité de 1861. Se fondant sur le caractère d'intérêt général que présenteraient les démarches dont M. de Brandt doit être chargé auprès du Tsoung-li Yamen, le Cabinet de Berlin désirerait que son représentant fùt appuyé par les différents chefs de Mission accrédités à Pé-king. Le Prince de Hohenlohe m'a remis à cet effet une note verbale que vous trouverez ci-annexée en copie et où vous verrez que le Gouvernement Allemand croit pouvoir compter sur le concours que l'Angleterre, l'Autriche-Hongrie, la Russie et les États-Unis seraient disposés à lui fournir en cette occasion. Je n'ai pour ma part aucune objection à faire aux idées générales exprimées dans ce document et je ne puis que vous engager à prêter à M. de Brandt vos bons offices pour l'aider à réaliser le programme tracé par son Gouverne

ment.

La clause du Traité de Tien-Tsin qui nous réserve le traitement de la nation la plus favorisée nous assure effectivement notre part dans le bénéfice des concessions nouvelles qui viendraient à être accordées par le Gouvernement Chinois et la modération mème des demandes que le Ministre d'Allemagne a mission de lui soumettre doit écarter pour nous toute crainte de complications embarrassantes. Je me propose toutefois, après avoir murement examiné le projet qui nous a été communiqué dans son ensemble, de vous adresser sous le timbre de la Direction des Consulats et affaires commerciales des indications plus précises sur les points particuliers au sujet desquels nous pourrions avoir des observations de détail à présenter. Recevez...

v.

D'autre part, M. Brandt reçut, au comi ncement d'avril 1876, l'ordre de se mettre en rapport avec le Chargé d'Affaires de France en vue de la revision du traité.

La note du prince de Hohenlohe reçut la réponse sui

vante :

NOTE VERBALE, 12 avril 1876

Le Gouvernement français reconnait l'avantage que peuvent présenter les négociations que le Gouvernement Allemand propose d'ouvrir à Pé-king, à l'effet de provoquer la révision du traité conclu en 1861 entre le Représentant du Zollverein et le Céleste Empire et d'obtenir des concessions dont toutes les puissances seraient appelées à profiter. Les vues exposées dans la note verbale de Son Altesse le Prince de Hohenlohe sont en complète harmonie avec cet esprit de solidarité dont la France s'est inspirée toutes les fois qu'elle a eu l'occasion de s'associer à des tentatives ayant pour objet d'étendre en Chine et au Japon la situation faite aux Étrangers. Le Gouvernement français est, par suite, tout disposé, en ce qui le concerne, à concourir à une œuvre de progrès pacifique dont la poursuite est le principal objet de sa politique générale en Chine. Le Chargé d'Affaires de France appuiera donc les démarches présentes de M. de Brandt et recommandera de concert avec ses collègues, au Tsoung-li Yamen, l'adoption du programme tracé par le Gouvernement Impérial. Des instructions conçues dans cet esprit ont été envoyées par le courrier du 7 Avril à M. le Comte de Rochechouart.

Si les arrangements projetés doivent avoir pour effet d'accroi– tre les privilèges dont jouissent les étrangers de toute nationalité en Chine et d'ajouter, en leur faveur, des garanties nouvelles à celles que le Traité de Tien-Tsin a déjà stipulées, le Gouvernement français s'estimera heureux d'avoir aidé, pour sa part, à atteindre un résultat conforme aux intérêts collectifs de toutes les Puissances maritimes.

Paris, le 12 avril 1876.

M. de Brandt adressa, en mai 1876, au Gouvernement chinois, un memorandum dans lequel il exposait ses desiderata, peu nombreux d'ailleurs et peu importants:

« Les réformes qu'il réclame, écrit un diplomate, portent sur les droits de transit, sur la juridiction des cours mixtes, sur les délais accordés au cabotage pour le payement des droits de ton

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