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CHAPITRE XII

L'AFFAIRE DE KOULDJA

(Fin.)

Enfin le marquis Ts'êng réussissait à signer à SaintPétersbourg le 12 février 1881 un traité qui rendait à la Chine la plus grande partie du Pe-Lou, y compris Kouldja et la passe de Mouzarte et modifiait les règlements commer

ciaux :

TRAITÉ DE SAINT-PÉTERSBOURG, 12 (24) FÉVRIER 1881 '

1

Sa Majesté l'Empereur et Autocrate de toutes les Russies et Sa Majesté l'Empereur de la Chine, désirant régler quelques questions de frontière et de commerce touchant aux intérêts des deux Empires, afin de cimenter les rapports d'amitié entre les deux pays, ont nommé pour leurs plénipotentiaires, à l'effet d'établir un accord sur ces questions:

Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies;

Son secrétaire d'état Nicolas de GIERS, sénateur, conseiller privé actuel, dirigeant le Ministère Impérial des Affaires Étrangères, et

Son envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire près

1. China, no 1 (1882). Despatch from Mr. Wyndham, Her Majesty's chargé d'affaires at St-Petersburgh, inclosing copy of a Treaty between Russia and China, signed at St-Petersburgh, February 12, 1881; with Documents relating thereto, Presented..., 1882. Lond., in-fol. [C. — 3134]. · Traité 12/24 février 1881. Le traité a été ratifié à Pé-king, le 15 mai 1881.

Sa Majesté l'Empereur de la Chine, Eugène de Burzov, conseiller d'état actuel ;

et Sa Majesté l'Empereur de la Chine :

TS'ENG, marquis de Neyong, vice-président de la haute cour de justice, Son envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire près Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies, muni de pouvoirs spéciaux pour signer le présent Traité en qualité d'ambassadeur extraordinaire.

Les susdits plénipotentiaires, munis de pleins pouvoirs qui ont été trouvés suffisants, sont convenus des stipulations suivantes : ARTICLE PREMIER. Sa Majesté l'Empereur de toutes les Russies consent au rétablissement de l'autorité du gouvernement chinois dans le pays d'lli, temporairement occupé, depuis 1871, par les armées russes.

La Russie reste en possession de la partie occidentale de ce pays, dans les limites indiquées à l'article 7 du présent Traité. ART. 2. Sa Majesté l'Empereur de la Chine s'engage à décréter les mesures propres à mettre les habitants du pays d'lli, à quelque race et à quelque religion qu'ils appartiennent, à l'abri de toute poursuite, dans leurs biens ou dans leurs personnes, pour actes commis durant ou après les troubles qui ont eu lieu dans ce pays.

Une proclamation conforme à cet engagement sera adressée par les autorités chinoises, au nom de Sa Majesté l'Empereur de la Chine, à la population du pays d'lli, avant la remise de ce pays aux dites autorités.

ART. 3. Les habitants du pays d'lli seront libres de rester sur les lieux de leur résidence actuelle, comme sujets chinois ou d'émigrer en Russie et d'adopter la sujétion russe. Ils seront appelés à se prononcer à ce sujet avant le rétablissement de l'autorité chinoise dans le pays d'lli, et un délai d'un an, à partir du jour de la remise du pays aux autorités chinoises, sera accordé à ceux qui témoigneront le désir d'émigrer en Russie. Les autorités chinoises n'opposeront aucune entrave à leur émigration et à l'exportation de leur propriété mobilière.

ART. 4. Les sujets russes possédant des terrains dans le pays d'lli conserveront leurs droits de propriété, même après le rétablissement de l'autorité du gouvernement chinois dans ce pays.

Cette disposition n'est pas applicable aux habitants du pays d'Ili qui adopteront la sujétion russe, lors du rétablissement de l'autorité chinoise dans ce pays.

Les sujets russes dont les terrains sont situés en dehors des emplacements affectés aux factoreries russes, en vertu de l'article 13 du traité de Kouldja de 1851, devront acquitter les mêmes impôts et contributions que les sujets chinois.

ART. 5. Les deux gouvernements délégueront à Kouldja des commissaires qui procèderont à la remise d'une part, et à la reprise de l'autre, de l'administration de la province d'Ili, et qui seront chargés, en général, de l'exécution des stipulations du présent Traité se rapportant au rétablissement, dans ce pays, de l'autorité du gouvernement chinois.

Les dits commissaires rempliront leur mandat, en se conformant à l'entente qui sera établie quant au mode de remise d'une part et de reprise de l'autre, de l'administration du pays d'lli, entre le gouverneur-général du Turkestan et le gouverneur-général des provinces du Chen-si et du Kan-Sou, chargés par les deux gouvernements de la haute direction de cette affaire.

La remise de l'administration du pays d'Ili doit être terminée dans un délai de trois mois ou plus tôt, si faire se peut, à dater du jour de l'arrivée à Tachkent du fonctionnaire qui sera délégué par le gouverneur-général du Chen-si et du Kan-Sou auprès du gouverneur-général du Turkestan, pour lui notifier lat ratification et la promulgation du présent Traité par Sa Majesté l'Empereur de la Chine.

ART. VI. Le gouvernement de Sa Majesté l'Empereur de la Chine paiera au gouvernement russe la somme de neuf millions de roubles métalliques destinée à couvrir les frais occasionnés par l'occupation du pays d'Ili par les troupes russes depuis 1871, à satisfaire toutes les réclamations pécuniaires auxquelles ont donné lieu, jusqu'aujourd'hui, les pertes que les sujets russes ont subies dans leurs biens pillés sur territoire chinois, et à fournir des secours aux familles des sujets russes tués dans les attaques armées, dont ils ont été victimes sur territoire chinois

La somme sus-mentionnée de neuf millions de roubles métalliques sera versée, dans le terme de deux ans à partir du jour de l'échange des ratifications du présent Traité, suivant l'ordre et les conditions convenus entre les deux gouvernements dans le Protocole spécial annexé au présent Traité.

ART. 7. La partie occidentale du pays d'Ili est incorporée à la Russie, pour servir de lieu d'établissement aux habitants de ce pays qui adopteront la sujétion russe, et qui, par ce fait, auront dû abandonner les terrains qu'ils y possédaient.

CORDIER.

II.

15

La frontière entre les possessions de la Russie et la province chinoise d'lli suivra, en partant des montagnes Bédjin-taou, le cours de la rivière Khorgos, jusqu'à l'endroit où celle-ci se jette dans la rivière Ili et, traversant cette dernière, se dirigera au sud, vers les montagnes Ouzoun-taou, en laissant à l'ouest le village de Koldjat. A partir de ce point, elle suivra, en se dirigeant au sud, le tracé fixé par le protocole signé à Tchougoutchak en 1864.

ART. 8. Une partie de la ligne frontière, fixée par le protocole signé à Tchougoutchak en 1864, à l'est du lac Zaïsan, ayant été trouvée défectueuse, les deux gouvernements nommeront des commissaires qui modifieront, d'un commun accord, l'ancien tracé, de manière à écarter les défectuosités signalées et à établir une séparation efficaces entre les tribus Kirghises soumises aux deux Empires.

Il sera donné au nouveau tracé, en tant que possible, une direction intermédiaire entre l'ancienne frontière et une ligne droite se dirigeant des monts Kouïtoun vers les monts Saour, en traversant le Tcherny-Irtych.

ART. 9. Des commissaires seront nommés par les deux parties contractantes, pour procéder à la pose de poteaux de démarcation, tant sur le tracé fixé par les articles précédents 7 et 8, que sur les parties de la frontière où il n'a pas encore été posé de poteaux. L'époque et le lieu de réunion de ces commissaires seront fixés par une entente entre les deux gouverne

ments.

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Les deux gouvernements nommeront également des commissaires pour examiner la frontière et pour poser des poteaux de démarcation entre la province russe de Ferganah et la partic occidentale de la province chinoise de Kachgar. Ces commissaires prendront pour base de leurs travaux la frontière existante. ART. 10. Le droit reconnu au gouvernement russe, par les traités, de nommer des consuls à Ili, à Tarbagataï, à Kachgar et à Ourga, est étendu, dès à présent, aux villes de Sou-tchéou (Kia-yü-Kouan) et de Tourfan. Dans les villes suivantes : Kobdo, Ouliasoutaï, Hami, Ouroumtsi et Goutchen, le gouvernement russe établira des consulats au fur et à mesure du développement du commerce et après entente avec le gouvernement chinois.

Les consuls de Sou-tchéou (Kia-yü-Kouan) et de Tourfan exerceront les fonctions consulaires dans les districts voisins, où les intérêts des sujets russes réclameront leur présence.

Les dispositions contenues dans les articles 5 et 6 du traité conclu à Pé-King, en 1860, et relatives à la concession de terrains pour les maisons des consulats, pour les cimetières et pour les pâturages, s'appliqueront également aux villes de Sou-tchéou (Kia-yü-Kouan) et de Tourfan. Les autorités locales aideront les consuls à trouver des habitations provisoires jusqu'au moment où les maisons des consulats seront construites.

Les consuls russes en Mongolie et dans les arrondissements situés sur les deux versants du Ti'en-Chan se serviront, pour leurs voyages et pour l'envoi de leur correspondance, des institutions postales du gouvernement, conformément aux stipulations de l'article 11 du traité de Tien-Tsin et de l'article 12 du traité de Pé-King. Les autorités chinoises, auxquelles ils s'adresseront à ces fins, leur prêteront aide et assistance.

La ville de Tourfan n'étant pas une localité ouverte au commerce étranger, le droit d'y établir un consulat ne saurait être invoqué comme précédent pour obtenir un droit analogue par rapport aux ports de la Chine, aux provinces intérieures et à la Mandchourie.

ART. II. Les consuls russes en Chine communiqueront, pour affaires de service, soit avec les autorités locales de la ville de leur résidence, soit avec les autorités supérieures de l'arrondissement ou de la province, suivant que les intérêts qui leur sont respectivement confiés, l'importance des affaires à traiter et leur prompte expédition l'exigeront. La correspondance entre eux se fera sous forme de lettres officielles. Quant aux règles d'étiquette à observer lors de leurs entrevues et, en général, dans leurs relations, elles seront basées sur les égards que se doivent réciproquement les fonctionnaires de deux puissances

amies.

Toutes les affaires qui surgiront sur territoire chinois, au sujet de transactions commerciales ou autres, entre les ressortissants des deux états, seront examinées et réglées, d'un commun accord, par les consuls et les autorités chinoises.

Dans les litiges en matière de commerce, les deux parties pourront terminer leurs différends à l'amiable, au moyen d'arbitres choisis de part et d'autre. Si l'entente ne s'établit pas par cette voie, l'affaire sera examinée et réglée par les autorités des deux états.

Les engagements contractés par écrit, entre sujets russes et chinois, relativement à des commandes de marchandises, au

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