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gères, etc. Nous reçûmes un ordre impérial approuvant nos conclusions. Plus tard, parut un décret envoyant le Vice-Président expectant Kouo Soung-tao et le fonctionnaire de 2o classe, intendant expectant pour la province du Tché-li, Siu Keng-chen, en mission à l'étranger. En présentant au Trône un rapport tendant à faire un choix parmi ces sujets versés dans la diplomatie, notre but n'était pas seulement de faciliter l'expédition des affaires courantes avec les États étrangers, ni de préparer l'établissement de rapports avec les pays étrangers par l'établissement de légations; notre rapport visait à un autre but: nous ne voulions pas que la défiance pùt se glisser dans nos relations avec les États étrangers, et nous voulions éviter toute cause de désaccord. Or, pour cela, ne faut-il pas que, de part et d'autre, on connaisse les particularités inhérentes à chaque peuple?

Dans la 6 année de Toung-Tché (1868) Tche-Kang et Souen Kia-kou (les deux envoyés chinois qui accompagnaient M. Burlingame dans sa mission) membres de notre Yamen, furent envoyés en mission à l'étranger. Lors de leur retour à Pé-King, ils nous dirent avoir eu des rapports personnels avec les hauts dignitaires de chacun des Ministères des États où ils s'étaient rendus. Les représentants étrangers à Pé-King nous confirmèrent ce récit, et ajoutèrent qu'ils n'avaient aucun rapport avec les hauts dignitaires des tribunaux de la capitale, et que, vu l'absence de toute relation entre ces fonctionnaires et eux, il n'était pas étonnant que la population n'eût aucune considération pour eux.

Si, depuis longtemps, les hauts fonctionnaires des divers tribunaux n'ont jamais eu de relation avec les étrangers, c'est qu'ils obéissaient aux règles concernant ces relations1. Or la Chine ayant depuis de longues années des rapports amicaux avec les États étrangers et envoyant actuellement des ambassades à l'étranger, la situation actuelle n'est plus la même qu'autrefois, et, de ce qu'on ne peut pas traiter les Envoyés d'après les anciens rites, on ne doit pas conclure qu'il ne faille pas établir de rapports personnels avec eux.

Nous prions l'Empereur de donner l'ordre à notre Yamen et hauts dignitaires des divers tribunaux et des différentes adminis

1. Que les fonctionnaires n'aient pas de relations [avec les étrangers]. » Li Ki.

trations de se réunir pour délibérer sur le mode le meilleur à adopter dans ces rapports, de telle sorte que, lorsqu'ils se seront établis, il ne puisse plus y avoir de rupture.

De cette façon, ceux qui n'ont pas encore eu de rapports avec les étrangers ne garderont plus aucun doute à l'égard des liens d'amitié qui unissent la Chine aux États étrangers. Nous ne pouvons pas nous empêcher de faire connaître à tous, Chinois et étrangers, l'établissement de ces rapports.

Dès le début, les États étrangers ont été traités par la Chine sur le pied d'égalité. Or des étrangers peu versés dans la connaissance des choses de la Chine, ne voyant pas le nom de leur pays mis en vedette dans les copies des édits impériaux, y voient une marque d'infériorité, et craignent que les fonctionnaires et le peuple chinois en aient moins de considération pour leur pays. Aussi avons-nous dit et répété que les décrets impériaux s'adressent au peuple et aux fonctionnaires chinois, et que les rites n'admettent pas que les noms des Empires y soient mis en vedette. Quand il s'agit d'une lettre du Souverain, le nom de l'État étranger est mis en vedette, et, dans toutes les lettres adressées aux souverains par l'Empereur, les noms des souverains des deux pays ont été placés sur la même ligne, et le nom de tout État a été mis en vedette. On a fait de même dans l'impression des traités de la Chine avec les autres puissances. Il ne faut pas que l'on doute plus longtemps de nos intentions, car, après les explications que nous venons de donner, quelle raison pourrait-on avoir de nous accuser de placer les États étrangers dans une situation inférieure à la nôtre! Bien que nous avons donné souvent ces explications, elles n'avaient pas encore été publiées clairement et de façon à ne laisser aucun doute dans l'esprit tant des Chinois que des étrangers. Dans la crainte que des gens sans aveu ne causent quelque catastrophe, nous ne pouvons nous empêcher de déclarer hautement quelle est la ligne de conduite. qui préside aux rapports de la Chine avec les pays étrangers. Nous allons nous concerter pour élaborer et arrêter un projet de réglement, dont le but sera de ne laisser ignorer cette explication à personne, et de prévenir les inconvénients qui pourraient résulter de malentendus, inconvénients qui ne feraient qu'augmenter avec le temps.

Pénétrés de la haute importance que nous devons attacher au maintien de nos bonnes relations avec les puissances étrangères, nous présentons à l'examen bienveillant de S. M. cet exposé

minutieux, conçu dans le but d'écarter toute méfiance et d'augmenter la splendeur de l'Empire. Nous prions les deux Impératrices et l'Empereur d'examiner et d'appouver ou désapprouver ce rapport1.

INTERVENTION DU CORPS DIPLOMATIQUE

Le rapport du Tsoung-li Yamen ne pouvait laisser indifférent le corps diplomatique étranger accrédité à Pé-king. M. de Butzov, ministre de Russie, second doyen du corps diplomatique, écrivit la lettre suivante à M. Wade, le prévenant de la démarche qui allait être faite par les représentants étrangers auprès du Tsoung-li Yamen. M. Wade « prit très bien la chose, et répondit de vive voix à M. de Butzov que, s'il s'était agi d'une note et non d'une visite, il se serait joint à ses collègues2 ».

LETTRE DE M. BUTZOV A M. WADE

MON CHER DOYEN,

L'action du Tsoung-li Yamen dans la question des rapports. des hauts fonctionnaires chinois avec les représentants étrangers nous oblige, mes collègues des États-Unis, d'Allemagne et de France et moi-même d'appeler l'attention du Yamen sur les inconvénients qui pourraient se produire si, à l'avenir, le gouvernement chinois procédait seul au réglement de questions qui nous intéressent directement sans avoir obtenu au préalable notre adhésion.

Nous allons faire une démarche collective dans ce sens auprès du Yamen, et nous nous faisons un devoir de vous en prévenir.

Nous aurions préféré maintenir en cette occasion l'action commune à laquelle nous attachons tant de prix; mais nous craignons que vos négociations antérieures avec le gouvernement chinois ne vous permettent pas de vous joindre à nous.

Veuillez recevoir, etc.

Signé: BUTZOV.

1. Pour traduction conforme, Signé: F. SCHERZER, interprète, p. i. 2. Rochechouart, 1er octobre 1875.

En conséquence, le 30 septembre 1875, à trois heures, les Ministres de Russie, des États-Unis et d'Allemagne, ainsi que M. de Roquette, représentant M. de Rochechouart, retenu au lit à la suite d'une chute de cheval, se rendirent au Tsoung-li Yamen.

Après avoir échangé quelques phrases de politesse, M. de Butzov, en sa qualité de second doyen du corps diplomatique, s'exprima à peu près en ces termes':

« Nous avons appris que VV. EE. avaient présenté au Trône un placet qui modifiait dans une certaine mesure les rapports des Légations étrangères avec les autorités chinoises, et que ce placet avait reçu la sanction impériale. Tout en rendant justice aux sentiments de bonne amitié que cette pièce exprimait, nous sommes venus ici pour vous déclarer que nous ne pouvions admettre dans le présent comme dans le futur qu'on disposât en dehors de nous de nos propres intérêts, et que le moins qu'on aurait dû faire eût été de nous prévenir et de nous consulter avant de prendre une décision dont nous demeurons profondément surpris. »

Le Ministre Chen, qui suivait avec la plus vive attention la traduction de M. l'interprète Arendt, se tourna vers ses deux collègues, les consulta du regard et répondit ces seuls mots : « Vous avez raison. >>

M. Wade, auquel M. de Butzov fit part de cette entrevue tant en son nom qu'en celui de ses collègues, ne sembla pas attacher grande importance à la démarche collective du corps diplomatique.

« J'ai causé deux heures avec notre collègue d'Angleterre, disait le ministre de Russie à la suite de sa visite, et je vous avoue que je me sens incapable de vous rapporter ce qu'il m'a dit; ses idées sont si confuses, et les questions qu'il a embrassées si hétérogènes que j'ai renoncé à les comprendre. Cependant,

1. Rapport de M. de Roquette à M. de Rochechouart.

si on venait me dire que M. Wade partira demain, je n'en éprouverais aucun étonnement. »

A ce sujet, M. de Rochechouart écrivait à M. le duc Decazes, Pé-king, le 1 octobre 1875:

M. Wade avait dit à l'un de nous que le secret qu'il avait tenu à garder vis-à-vis de ses collègues provenait de deux causes : le désir de réserver entièrement à son pays le droit de régler une affaire anglaise, et le sentiment qu'il avait de ne pas être approuvé de nous, en introduisant dans ses négociations certaines questions complètement étrangères au meurtre de M. Margary, telles que la révision des droits du likin, et les prérogatives du corps diplomatique établi à Pé-king.

Comme M. Wade change souvent de plan, nous n'avions pas attaché plus d'importance à celui-ci qu'à bien d'autres, lorsque nous apprimes simplement par la Gazette Officielle que M. Wade avait demandé et obtenu pour les représentants étrangers le droit d'entrer en relations personnelles avec les différents fonctionnaires qui président aux principales administrations.

M. Wade se décida enfin à envoyer à ses collègues du corps diplomatique une lettre identique et confidentielle:

LETTRE DE M. WADE, 9 OCTOBRE 1875

MY DEAR COLLEAGUE,

Pe-King, 9th october 1875.

I acquainted you some days since with my determination to send Mr. Grosvenor to England. I have now received from the Chinese Government guarantees in my opinion sufficient to induce me to change my earlier decision, and I hope to leave this for Shanghaï on the 11th instant for the purpose of despatching Mr. Grosvenor to Yün-Nan.

I have as yet spoken on this subject only to yourself and such other of my colleagues as I was associated with in conference on the question of Emigration to Cuba, last March when the intelligence of the Yün-Nan outrage obliged me to inform you that I must for the time withdraw from the work of mediation, and I

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