Tu prenois fur l'Autel un glaive qu'on révére Pour frapper faintement les plus fages humains; Mon Roi va te percer du fer que le vulgaire Adoroit dans tes mains. Il te frappe, tu meurs, il venge notre injure, La terre éléve au Ciel une voix libre & pure, Et vous, de Borgia détestables maximes, Science d'être injufte à la faveur des Loix, Art d'opprimer la terre, Art malheureux des crimes, Qu'on nommoit l'Art des Rois. Périffent à jamais vos leçons tyranniques; Ouvrons du monde entier les Annales fidelles, Voyons-y les tyrans; ils font tous malheureux; Les foudres qu'ils portoientdans leurs mains criminelles, Sont retombés fur eux. Ils font morts dans l'opprobre, ils font morts dans la rage; Mais Antonin, Trajan, Marc-Aurèle, Titus, Ils renaîtront en vous, ces vrais Héros de Rome, A les remplacer tous vous êtes destiné; Regnez, vivez heureux, que le plus honnête-homme Soit le plus fortuné. Un Philofophe regne; ah! le fiécle où nous femmes Le defiioit fans doute, & n'ofoit l'espérer; Seul il a mérité de gouverner les hommes ; Il fçait les éclairer. On a vû trop long-tems l'orgueilleufe ignorance Avec un ris moqueur, avec un ton de maître, Il n'en eft point pour vous, ame ftupide & fiére, Le Salomon du Nord apporte la lumière, ODE SUR LA MORT DE L'EMPEREUR CHARLES VI I 2. Novembre 1740. L tombe pour jamais ce Cédre, dont la tête Défia fi long-tems les vents & la tempête, Et dont les grands rameaux ombrageoient tant d'Etats En un instant frappée Sa racine eft coupée Par la faulx du trépas. Voilà ce Roi des Rois, & fes grandeurs fuprêmes, La mort a déchiré fes trente Diadêmes, D'un front chargé d'ennuis, dangereux ornement. Un refte de pouffiére Son nom même eft détruit; le tombeau le dévore; Et fi le faible bruit s'en fait entendre encore, On dira quelquefois, il regnoit, il n'eft plus ; Eloges funéraires De tant de Rois vulgaires Ah! s'il avoit lui-même en ces plaines fumantes Qu'Eugéne enfanglanta de ses mains triomphantes, Conduit de fes Germains les nombreux armemens, Et raffermi l'Empire De qui la gloire expire S'il n'avoit pas langui dans fa Ville allarmée, Au Sultan invincible, Ou fi plus fage encor, & détournant la guerre, Il eût par fes bienfaits ramené sur la terre Les beaux jours, les vertus, l'abondance & les arts, Et cette paix profonde Que fçut donner au monde. Le fecond des Céfars. La La renommée alors en étendant fes aîles, Eût répandu sur lui les clartés immortelles, Qui de la nuit du tems percent les profondeurs, Et fon nom refpectable Eût été plus durable Que ceux de ses vainqueurs. Je ne profane point les dons de l'harmonie; Le févére Apollon défend à mon génie De verfer, en bravant & les mœurs & les Loix, Le fiel de la fatyre Sur la tombe où respire Mais, â vérité fainte! O jufte renommée ! Amour du genre humain, dont mon ame enflâmée Reçoit avidement les ordres éternels; Dictez à la mémoire Les leçons de la gloire Pour les biens des mortels. Rois, la mort vous appelle au Tribunal augufte Où vous êtes pefés aux balances du Jufte. Votre fiécle eft témoin; le Juge eft l'avenir. Demi-Dieux mis en poudre, Lui feul peut vous abfoudre, Lui feul peut yous punir, |