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Nul art n'est méprifé; tout fuccès a sa gloire ;
Le vainqueur de Tallar:l, le fils de la victoire,
Le fublime Dryden, & le fage Addisson,
Et la charmante Ophils, & l'immortel Newton,
Ont part au Temple de Mémoire.

Et Le Couvreur à Londre auroit eu des tombeaux
Parmi les beaux efprits, les Rois & les Héros.
Quiconque a des talens, à Londre eft un grand-
homme..

L'abondance & la liberté

Ont après deux mille ans chez vous refsuscité
L'efprit de la Gréce & de Rome.

Des lauriers d'Apollon, dans nos ftériles champs,
La feuille négligée eft-elle donc flétrie ?

Dieux ! Pourquoi mon pays n'eft-il plus la patrie
Et de la gloire & des talens?

RÉPONSE

A UNE DAME,

OU SOI-DISANT TELLE. *

T

U commences par me louer,

Tu veux finir par me connaître.

Tu me loueras bien moins; mais il faut t'avouer
Ce que je fuis, ce que je voudrois être.,
J'aurai vû dans trois ans paffer quarante hyvers,
Apollon préfidoit au jour qui m'a vû naître,
Au fortir du berceau j'ai bégayé des Vers,
Bientôt ce Dieu puiffant m'ouvrit fon Sanctuaire:
Mon cœur vaincu par lui, fe rangea fous fa loi,
D'autres ont fait des

Vers par le défir d'en faire,

Je fus Poëte malgré moi.

Tous les goûts à la fois font entrés dans mon

ame.

Tout art a mon hommage & tout plaifir m'enfâme.
La Peinture me charme; on me voit quelquefois,
Au Palais de Philippe, ou dans celui des Rois,
Sous les efforts de l'art admirer la nature,
Du brillant Cagliari + faifir l'esprit divin,

L

En 1732. il y eut un homme de Bretagne qui s'avifa d'écrire des Lettres à plufieurs gens d'efprit de Paris, fous le nom d'une femme. Chacun y fut attrapé, & cette: meprife attira cette réponse.

Paul Véronèfe.

Er dévoret des yeux la touche noble & füre
De Raphaël & du Poussin.

De ces appartemens qu'anime la Peinture,
Sur les pas du plaisir je vole à l'Opéra.
J'applaudis tout ce qui me touche,
La fertilité de Campra,

La gaïté de Mouret, les graces de Deftouche, *
Péliffier par fon art, le Maure par sa voix, t
Tour-à-tour ont mes vœux & suspendent mon cheis,
Quelquefois embrassant la science hardie,
Que la curiofité

Honora par vanité`

Du nom de Philosophie,

Je cours après Newton dans l'abysme des Cieux;
Je veux voir fi des nuits la Couriére inégale,
Par le pouvoir changeant d'une force centrale,
En gravitant vers nous s'approche de nos yeux,
Et péfe d'autant plus, qu'elle eft près de ces lieux,
Dans les limites d'un ovale.

J'en entens raifonner les plus profonds efprits,
Maupertuis & Clairaut, calculante Cabale :
Je les voix qui des Cieux franchiffent l'intervale,
Et je vois trop fouvent, que j'ai très-peu compris..
De ces obfcurités, je paffe à la Morale,
Je lis au cœur de l'homme, & fouvent j'en rougis.
J'examine avec foin les informes écrits,

Les monumens épars, & le ftyle énergique
De ce fameux Pafcal, ce dévot fatyrique,

* Mufisiens agréables.

+ Actrices de ce tems-là..

Je vois ce rare efprit trop prompt à s'enflâmer.

Je combats fes rigueurs extrêmes.

Il enfeigne aux humains à fe haïr eux-mêmes.
Je voudrois malgré lui leur apprendre à s'ainter.
Ainfi mes jours égaux, que les Mufes rempliffent,
Sans foins, fans paffion, fans préjugés fâcheux,
Commencent avec joie & vivement finiffent
Par des foupers délicieux.

L'amour dans mes plaifirs ne mêle plus fes peines.
La tardive raifon vient de brifer mes chaînes,
J'ai quitté prudemment ce Dieu qui m'a quittê..
J'ai paffé l'heureux tems fait pour la volupté.
Eft-il donc vrai, Grands Dicux ! il ne faut plus que

j'aime !

La foule des beaux Arts, dont je veux tour-à-tour
Remplir le vuide de moi même,

N'eft point encor affez pour remplacet l'amour.

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