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Pardon, fi ma plume légére,

Que fouvent la vôtre enhardit,
Ecrit toujours au bel-esprit,

Beaucoup plus qu'au Roi qu'on révére.
Le Nord à vos fanglans progrès,
Vit des Rois le plus formidable;
Moi qui vous approchai de près,
Je n'y vis que le plus aimable.

A MONSIEUR

LE DUC DE SULLY.

LETTRE IV. *

JIRAL

IRAI chez vous, Duc adorable,
Vous, dont le goût, la vérité,
L'efprit, la candeur, la bonté 9.
Et la douceur inaltérable,
Font respecter la volupté,
Et rendent la sagesse aiınables
Que dans ce champêtre séjour,
Je me fais un plaisir extrême
De parler fur la fin du jour,
De vers, de musique & d'amour,

Et

pas un

feul mot du Systême,†

*A Paris le 18. Août 1720.

Le Sykême de Mr. Lavv, qui bouleverfa la France

en 1720.

De ce Systême tant vanté,

Par qui nos Héros de Finance
Embourfent l'argent de la France,
Et le tout par pure bonté.
Pareils à la vieille Sybille,
Dont il eft parté dans Virgile,
Qui poffédant pour tout tréfor
Des recettes d'Energuméne,
Prend du Troyen le rameau d'or,
Et lui rend des feuilles de chêne.

Peut-être les larmes aux yeux,
Je vous apprendrai pour nouvelle
Le trépas de ce vieux gouteux,
Qu'anima l'esprit de Chapelle.
L'éternel Abbé de Chaulieu
Paraîtra bientôt devant Dieu;
Et fi d'une Muse féconde,

Les Vers aimables & polis

Sauvent une ame en l'autre monde,

Il ira droit en Paradis.

L'autre jour à fon agonie,

Son Curé vint de grand matin
Lui donner en cérémonie,
Avec fon Huile & fon Latin,
Un paffe-port pour l'autre vie.
Il vit tous fes péchés lavez
D'un petit mot de pénitence,
Et reçut ce que vous fçavez,
Avec beaucoup de bienséance;

Il fit même un très-beau Serinion,
Qui fatisfit tout l'Auditoire.
Tout haut il demanda pardon
D'avoir eu trop de vaine gloire.
C'étoit là, dit-il, le péché
Dont il fut le plus entické ;
Car on fçait qu'il étoit Poëte;
Et que fur ce point tout Auteur
Ainfi que tout Prédicateur,
N'a jamais eu l'ame bien nette.
Il fera pourtant regretté,
Comme s'il eût été modefte;
Sa perte au Parnafle eft funefte;
Prefque feul il étoit résté

D'un fiécle plein de politefle.
On dit qu'aujourd'hui la jeuneffe
A fait à la délicateffe

Succéder la groffiéreté,

La débauche à la volupté,
Et la vaine & lâche pareffe
A cette fage oifiveté,

Que l'étude occupoit fans ceffe.
Pour notre petit Génonville,
Si digne du fiécle paffé

Et des faifeurs de Vaudeville,
Il me paraît très-empreffé
D'abandonner pour vous la Ville.
Le Syftême n'a point gâté
Son efprit aimable & facile;
Il a toujours le même style,

Et toujours la même gaité.
Je fçai que par déloïauté,
He fripon n'aguére a tâté
De la Maîtreffe tant jolie,
Dont j'étois fi fort entêté ;
Il rit de cette perfidie,

Et j'aurois pû m'en courroucer;
Mais je fçai qu'il faut fe paffer
Des bagatelles dans la vie.

A

MONSIEUR

LE DUC.

DE LA FEUILLADE.

LETTRE V.

CONSERVEZ

NSERVEZ précieusement

L'imagination fleurie

Et la bonne plaisanterie,
Dont vous poffédez l'agrément,
Au défaut. du tempérament
Dont vous vous vantez hardiment,
Et que tout le monde vous nie.
La Dame, qui depuis long-tems
Connaît à fond votre perfonne,
A dit: Hélas! je lui pardonne

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D'en vouloir imposer aux gens;
Son efprit eft dans fon printems;
Mais fon corps eft dans fon automne,
Adieu, Monfieur le Gouverneur,
Non plus de Province frontiére,
Máis d'une beauté finguliére,,
Qui par fon efprit, par fon cœur
Et par fon humeur libertine,
De jour en jour fait grand honneur
Au Gouverneur qui l'endoctrine ;
Priez le Seigneur feulement,
Qu'il empêche que Cythérée
Ne fubftitue inceffamment
. Quelque jeune & frais Lieutenant,
Qui feroit fans vous fon entrée
Dans un fi beau Gouvernement.

A MR LE MARÉ CHAL DE VILLARS.

JE

LETTRE VI.*

E me flattois de l'efpérance
D'aller goûter quelque repos.
Dans votre Maifon de plaifance ;
Mais Vinache ta ma confiance,

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