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« Il faut agir sur l'opinion, et par celle-ci sur la justice et la législation, afin que le père de famille soit rétabli dans sa juridiction domestique, dans ses honneurs et son autorité. Si les femmes ne se sentent pas contenues au for intérieur, comme dans le foyer domestique, il y a trahison dans les pouvoirs de l'État ce serait le cas de dire que l'insurrection des citoyens est un devoir. (P. 202.) v

:

« Cas où le mari peut tuer sa femme, selon la rigueur de la justice paternelle : 1o adultère; 2o impudicité ; 3° trahison; 4° invrognerie et débauche; 5o dilapidation et vol; 6° insoumission obstinée, impérieuse, méprisante. (P. 203.) »

« L'homme, époux, a droit de justice sur sa feinme; la femme n'a pas droit de justice sur le mari. Cette réciprocité est incompatible avec la subordination matrimoniale; elle implique contradiction. La femme maltraitée, outragée, a son recours dans le conseil de famille, et, par l'entremise de celui-ci, dans la justice publique. (P. 204.) »

« C'est une honte pour notre société, une marque de déchéance, que la femme puisse demander le divorce pour incompatibilité d'humeur, ou violences du mari. Tant qu'il n'y a pas haine de celui-ci, immoralité, incapacité, sévices graves et sans motifs, la femme qui se plaint doit être présumée coupable et renvoyée à son ménage. Au conseil de famille seul appartient de formuler pour elle la demande de séparation. Le mari a la faculté de répudiation ad libitum. L'obligation, à celui qui a l'autorité, de vivre malgré lui avec son épouse, implique contradiction. Seulement, le conseil de famille, et les tribunaux après lui, s'il y a lieu, jugeront des restitutions et indemnités. (P. 205.) »

« Le meurtre de l'épouse infidèle est un acte de justice maritale. L'amour conjugal est exclusif, unique, sacré ; c'est pourquoi sa violation est punissable de mort. (P. 209.) »>

« Je raisonne des rapports entre l'homme et la femme comme du droit de propriété... Soyez juste, hommes, et possédez en pleine supériorité et souveraineté sur la terre; la justice vous fait tous souverains; la nature entière est votre domaine. Soyez justes, hommes, et possédez en pleine supériorité vos femmes (1); la justice qui est vôtre est supérieure à l'amour, qui est leur. Toute doctrine contraire est prostitution, et négative du droit; elle doit être poursuivie et punie (2). Mais ne vous effrayez pas des réclamations incessantes de vos femmes leur nature est de tendre sans cesse à la domination et je dirai même que leur droit est d'éprouver sans cesse notre autorité et notre justice. (P. 223.) ›

« Il faut exterminer toutes les mauvaises natures, et renouveler le sexe, par

(1) Mahomet aussi avait assimilé la possession de la femme à celle de la terre. « Les femmes sont votre champ; cultivez-le de la manière que vous l'entendrez, » dit le Koran. Comine Proudhon, Mahomet accorde au mari la faculté de répudiation, en admettant qu'il peut y avoir lieu à restitutions et indemnités. Le Koran déclare qu'un « entretien honnête est dû aux femmes répu liées ».

(2) Quelle tolérance! Quel respect des sentiments et des raisonnements d'autrui sur la justice! Quelle foi naïvement présomptueu e en sa propre infaillibilité de moraliste, au moment où, sur cette question des femmes, on se donne à soi même les plus incroyables démentis, au moment où l'on se reproche d'avoir été « ridicule » en disant « trop de bien »> du sexe, où l'on désavoue les hommages que l'on avait cru devoir rendre à la beauté féminine!

l'élimination des sujets vicieux, comme les Anglais refont une race de bœufs, de moutons et de porcs par l'alimentation. (P. 252.) »

« Garde-toi d'épouser une femme qui prétend à la parité et à l'égalité. Laisse cette bête féroce à elle-même, à l'imbécile qui en vondra. Que si le lien est consommé, si des enfants sont venus: oh! alors, n'hésite pas. Par raison ou par force, il faut qu'elle plie. Ne dis pas : Je la quitterai; c'est d'une âme faible. Il faut qu'elle soit, dès le premier jour convaincue d'une chose, que tu ne la quitteras pas, et qu'elle pliera. Un homme intelligent et résolu possède en lui ce qu'il faut pour dompter cette révoltée. Il n'y a qu'un péril, c'est la conspiration de la société contre le droit marital. Facilité des tribunaux à admettre la plainte des mauvaises femmes, à s'ingérer dans la famille, à intervenir dans le droit domestique usurpation d'autorité et d'attributions... Regarder la justice établie comme l'ennemie du repos domestique, et le soutien de l'immoralité et de la révolte féminine. (P. 201.) »

Il y a dans ces notes un système bien lié, un système qui n'est ni celui de l'égalité de facultés et d'attributions entre les deux sexes, ni celui de l'équivalence morale, de l'égalité de dignité et d'honneur; c'est celui-là même que Proudhon, au commencement de sa réponse à Mmes J. L. et J. d'H., écartait comme injurieux au sexe féminin, et comme impossible, lorsqu'il déclarait, en termes qu'on n'a pas oubliés, que « le législateur est tenu de fournir une équation, la femme, créature raisonnable et morale, ne pouvant être traitée comme si son sexe impliquait déchéance ». C'est celui de l'autorité et de la souveraineté absolue du mâle, fondé sur l'incapacité et l'indignité de nature de la femelle. La femme, dans ce troisième système qui n'est pas nouveau, il s'en faut est inférieure à l'homme sous tous les rapports; incapable et indigne, sa vie ne peut être qu'une enfance éternelle; c'est une mineure qui n'atteint jamais la majorité; elle doit être tenue en une tutelle permanente, sous une constante et sévère discipline. Elle est, non pas même, comme le voulait de Bonald, le ministre, mais le premier des sujets de son mari. Le mariage n'est plus le pacte d'union de la force et de la beauté; c'est une institution de domestication et d'éducation, disons d'asservissement de la femme ad majorem viri gloriam.

L'ULTRAMONTANISME ET L'ÉTAT, par Bernard Lavergne, ancien représentant du peuple (Paris, Germer Baillière, 1875).

Excellente brochure que nous recommandons vivement à nos lecteurs. L'auteur y développe avec vigueur et talent les vues de notre école sur le danger clérical et sur le droit de défense de l'État contre l'Église papiste. Il ad net, comme Locke et comme nous, que le principe de réciprocité s'applique à tous les droits garantis par la société civile et qu'on ne doit pas la tolérance aux intolérants, la protection du droit commun à ceux qui se font de cette protection un moyen d'attaque sûre

constante, savamment organisée, contre le droit commun. Il cite à ce sujet la Critique philosophique et reproduit les arguments de M. Renouvier. Nous aurions plus d'un passage à signaer; nous choisissons le suivant, propre à faire counaître en M. B. L. le philosophe, et qui contient un jugement remarquable, d'esprit criticiste, sur les négations dédaigneuses et tranchantes du matérialisme contemporain :

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<<< Nous admettons que la libre pensée, adversaire de l'ultramontanisme, a pris quelquefois, trop souvent- mais pas toujours comme on l'en accuse des allures capables d'effrayer et de faire reculer vers les anciennes croyances ceux qui considèrent la religion comme indispensable aux individus et aux peuples. La ibre pensée a trop souvent non pas professé l'athéisme, comme on serait embarrassé de le prouver mais traité les croyances religieuses et le sentiment religieux lui-même, soit avec mépris, soit avec une ironie moqueuse, soit, tout au moins, avec une grande indifférence. Et, si l'on a tort de lui contester son droit de s'affirmer, tort surtout de la désigner au bras séculier au lieu de la réfuter, elle a pourtant, à notre avis, mérité un reproche le seul qu'on fût en droit de lui faire- - c'est que, se réclamant de la science et puisant dans la science seule sa légitimité, elle n'a point été toujours fidèle à la science. Ses adeptes sont allés au delà des limites où la science leur permettait d'aller.

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» Que la libre pensée ait combattu le catholicisme, le christianisme lui-même, c'était son droit, sauf à fournir ses preuves contre. Mais qu'après s'être posée comme l'interprète fidèle de la science, comme son esclave, elle ait, au nom de la science, nié, dans la religion, un des besoins du cœur humain, refusé de reconnaître le sentiment religieux comme un des éléments de la nature de l'homme, c'est ce que la science ne lui a jamais permis.

» Qu'après avoir démontré, à sa manière, que la science se tait sur les questions de Dieu et de la durée de la personnalité humaine au delà de cette vie, elle prenne parti et dise: « Je n'y crois pas », elle n'en a pas le droit. « Je n'en sais rien », voilà tout ce qu'elle est autorisée à dire.

«Enfin, affirmer que le domaine de l'esprit humain est borné à la science, qu'il doit rester muré dans la science et que, hors d'elle, c'est-à-dire hors des limites mêmes de nos connaissances po-itives, il soit interdit à la pensée de parcourir d'autres champs d'investigation, alors qu'un invincible besoin naturel l'y pousse, et même alors que, toujours prudente, elle fait ses réserves et n'oublie point qu'elle n'a plus pour appui le terrain soli le et positif; que, par conséquent elle doit plus que ja nais surveiller ses déductions: refuser cela, condamner cela, ce peut être d'un esprit fort », mais ce n'est point d'un homme de science, parce que, encore une fois, de ce que la science a un domaine, il ne s'ensuit point qu'il ne puisse en exister un autre à côté du sien. Il sera moins sûr sans doute; mais, tel quel, vous n'avez aucun droit de me l'enlever. Et si, dans la nuit qui m'environne, je lui demande des jalons pour m'orienter vers un inconnu, dont, quoi que je fasse, je ne puis me distraire, je dis que la science n'a point qualité pour m'en empêcher.

» Et j'ajoute qu'en y prétendant, vous rendez aux nations le plus funeste de

tous les services. L'individu, vous le jetez, non dans le désespoir. - pour en arriver là, il ne croit plus assez aujourd'hui mais dans un indifférentisme lamentable, qui fait perdre le sens de l'existence, lui enlève son sérieux, en dégoûte et tourne les aspirations, savez-vous vers quoi? Savez-vous ce que l'on arrive à considérer comme le souverain bien? Le néant, le nirvâna: vous nous faites une génération de bouddhistes.

» Quant à notre cause, vous la faites déserter par ceux pour qui une croyance religieuse est le plus indispensable élément de l'homme et des nations. Plutôt que rien, ceux-là préfèrent même une erreur. Qu'ils aient tort, ce n'est point la question: elle est tout entière, au résultat, dans le parti qu'ils prennent. Or n'en êtesvous pas témoins? Ils retournent, en se fermant les oreilles et les yeux, vers les temples abandonnés.

» Le philosophe peut s'étonner et gémir que l'humanité n'ait pas assez de force et de sagesse pour s'en tenir à la satisfaction d'être « débarrassée d'un monstre », comme disait Voltaire. En fait, elle n'a trêve ni repos qu'elle n'ait mis quelque chose à la place. Proudhon, en confessant loyalement qu à la place de la religion, il entendait ne rien mettre, Proudhon est resté honnête là comme toujours; mais avons-nous à nous applaudir, dans la démocratie, des conséquences de cette déclaration?

>> Certes, non; or on a conclu de ce que Proudon ne trouvait rien à mettre à la place de la religion, que la libre pensée était dans l'incapacité absolue d'y rien mettre. Et il faut dire que des écrivains plus téméraires sont allés jusqu'à nier ce que lui, Proudhon, se contentait de tenir en dehors de ses recherches, déclarant qu'il ne voyait aucun intérêt à s'en occuper: Dieu et l'immortalité; mais cela ne fait point que la conclusion qu'on a tirée de là contre la libre pensée soit légitime.

>> Il n'est pas vrai que la libre pensée arrive logiquement à ces négations; il n'est pas vrai que tous les philosophes qui se réclament d'elle affirment l'athéisme et le matérialisme.

>> Pour nous, nous déclarons appartenir à une école philosophique qui, tout en ayant la prétention de rester strictement fidèle aux règles et aux méthodes les plus sévères de la science, et précisément parce qu'elle y reste exactement fidèle en ne faisant point porter ses affirmations au delà de ses limites, reconnaît, en dehors du domaine scientifique, un vaste champ d'exploration; déclare cette exploration licite, et, à la condition de ne se mettre jamais en contradiction avec les lois scientifiques, permet d'accorder aux découvertes que l'on y opère le degré de foi ou de croyance que, par leur nature, elles comportent. Cette école laisse ouvert ce que les autres ferment sans aucun droit de le fermer, et qu'on veuille bien y réfléchir elle comble ainsi, quoique à première vue il semble qu'elle n'y réussisse pas, une lacune qui, je le reconnais, doit être comblée. »

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CATÉCHISME RELigieux des librES PENSEURS, par M Louis Ménard, docteur és lettres (Paris, 1875; Hurtau, galeries de l'Odéon).

Ce catéchisme a paru, par chapitres détachés, dans la Critique philosop hique : nous n'avons donc pas à le faire connaître. Nous dirons seulement qu'il y a plaisir et profit à le relire de suite en entier, parce qu'on en saisit mieux ainsi l'esprit et la portée. Nous pourrions y noter quelques points où notre manière de voir et de sentir est différente de celle de l'auteur. Nous croyons, par exemple, que son admiration et son amour du polythéisme et de la mythologie helléniques, joints à la méthode d'interprétation symbolique qu'il a adoptée, lui inspirent une sympathie excessive pour certaines parties du catholicisme et l'empêchent de bien comprendre la valeur religieuse, morale et sociale du protestantisme. Nous tenons pour superficielle l'assimilation dédaigneuse qu'il semble porté à faire du protestantisme unitaire et libéral au monothéisme mahométan; et nous ne pouvons prendre au sérieux le rapport de filiation qu'il croit voir entre le théisme philosophique et un régime politique de dictature et de despotisme. Ce n'est pas ici d'ailleurs que nous avons à louer en M. L. M. l'écrivain de gout exquis, vrai fils de la Grèce, dont nos lecteurs ont pu apprécier, comme nous, le talent; le philosophe, dont les idées sur les rapports généraux de la religion, de la science, de la morale, de la politique et de l'art ont à nos yeux le grand mérite de contredire carrément les lieux communs ordinaires de la libre pensée contemporaine; l'ingénieux critique des religions, dont les vues, oujours originales, séduisent l'esprit lors même qu'elles ne peuvent le satisfaire entièrement.

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REVUE DE THÉOLOGIE

Et compte rendu des principales publications scientifiques sous la direction de MM. Dandiran et Astié (Lausanne, Georges Bridel).

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SOMMAIRE DE LA LIVRAISON DE JUILLET 1875

Le libre arbitre, étude critique, de J.-H. Scholten, par le docteur Van Goêns ;

La théologie des réunions de l'alliance évangélique à New-York en 4873, par

J.-F. Astié; Le droit, ses motifs, ses moyens et ses règles, par Henry Brocher; Bulletin.

Le rédacteur-gérant: F. PILLON.

FAR16. - IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2

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