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qu'il en avait espéré. En présence d'adversaires nombreux, il n'y avait qu'une chance de salut; c'était d'opérer la jonction avec les autres corps d'armée que les Russes tenaient en échec au fond de la Hongrie, le gouvernement magyar l'avait bien compris et lui en intima l'ordre; mais soit conviction, soit mauvaise volonté, Goergeï répondit par un refus.

Le feld-maréchal Paskevitch savait que le système de défense adopté par Goergeï ne pouvait être combattu que par des masses concentrées sur un même point, à un jour donné, et il combina aussitôt les mouvements de trois corps d'armée qu'il dirigea contre le général hongrois, de telle sorte qu'ils pussent l'attaquér simultanément, et frapper ainsi un coup décisif pour le succès de la campagne. Après avoir adopté ce plan qui, en effet, était le plus rationnel, il se dirigea lui-même sur Kapolna, point cental d'où il pouvait surveiller et appuyer tout à la fois les divisions qui allaient attaquer Goergeï et forcer le passage de la Theïss pour ouvrir aux Russes le chemin de Debreczin. Le prince Gortchakoff, chef de l'état-major, fut chargé par le maréchal de cette expédition difficile. Arrivé le 25 juillet 1849 à Poroszlo, il trouva la rive gauche de la Theïss gardée par six mille Magyars avec dix pièces de canon. Il s'agissait de traverser, sous le

feu de l'ennemi, une chaussée située entre la rivière et de dangereux marécages; cet obstacle fut franchi par les Russes. Protégés par des batteries heureusement disposées, ils rétablirent les ponts enlevés par les Hongrois, et pendant la nuit passèrent la rivière sous le feu des Magyars embusqués dans les bois qui bordaient la rive. Ceux-ci se retirèrent sur Ujvaros, et l'armée de Paskevitch resta maîtresse de la route de Debreczin. Mais cette place était couverte par un corps d'armée commandé par Nagy-Sandor; le prince de Varsovie, marcha immédiatement contre lui.

Bientôt il eut atteint Ujvaros que les Hongrois venaient d'évacuer, pour prendre position en avant de Debreczin; il y laissa tous les équipages de l'armée, rétablit son ordre de bataille, que les accidents de terrain avaient pu déranger, et s'avança, le deuxième corps formant son aile droite, le troisième l'aile gauche, et la cavalerie protégeant ses flancs. La réserve était composée de la douzième division d'infanterie et de la quatrième division de cavalerie légère.

Les Hongrois avaient dissimulé la majeure partie de leurs forces derrière les collines et les jardins qui entourent Debreczin. Quelques escadrons et deux pièces d'artillerie étaient seuls en vue. La cavalerie légère du prince de Varsovie

reçut l'ordre de se porter en avant et d'enlever ces troupes si peu nombreuses en apparence. Mais elle fut accueillie par une pluie de boulets qui porta le désordre dans ses rangs, et presque aussitôt les colonnes magyares débouchèrent des ravins et des bois qui les dissimulaient.

Une division d'infanterie russe et quatre batteries d'artillerie à cheval s'étaient avancées pour soutenir la cavalerie si péniblement engagée. Une canonnade très-vive s'échangea de part et d'autre, et le feld-maréchal, qui venait de découvrir que le flanc droit de l'ennemi pouvait être tourné, fit exécuter ce mouvement par deux divisions appuyées de quatre batteries d'artillerie, pendant qu'une colonne d'infanterie et de cavalerie marchait directement sur Debreczin.

Surprise par cette manoeuvre, la cavalerie magyare fut mise en pleine déroute. Les fantassins, retranchés dans les fossés et les jardins, firent une longue résistance; mais abordés avec une rare énergie par les régiments musulmans et causasiens du général prince Beboutoff, ils furent rejetés vers la ville. Le général y pénétra lui-même en les poursuivant, et le reste de l'armée, suivant cette impulsion, secondée par le feld-maréchal Paskevitch, entra dans Debreczin qui demeura définitivement au pouvoir des Russes. Trois mille prisonniers, de l'artillerie et

tous les bagages de l'armée hongroise, devinrent les trophées de cette bataille de Debreczin, dont les résultats furent immenses, car elle concentrait naturellement l'action des Magyars dans la partie méridionale de la Hongrie, et donnait aux Russes une position centrale des plus importantes, puisqu'elle dominait tout à la fois les routes d'Arad, de Grosswardein, de la Theïss et de Transylvanie. Le 2 août, un service d'actions de grâces fut célébré dans la même église, où, quelques semaines auparavant, la déchéance de la maison d'Autriche avait été proclamée par le dictateur Kossuth.

XXII.

SUITE DES OPÉRATIONS DE L'ARMÉE RUSSE EN HONGRIE.

DÉFAITES SUCCESSIVES DES HONGROIS.

DENCES ENTRE LES CHEFS MAGYARES.
DÉMET DE SES POUVOIRS.

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DISSI

KOSSUTH SE

SOUMISSION De goergeï.

SA

IL NE VEUT SE RENDRE QU'AUX RUSSES.
CONSEILS DE LA RUSSIE AU GOUVERNE-
EXÉCUTION DE GÉNÉRAUX

LETTRE.

MENT AUTRICHIEN.
HONGROIS.

Après la bataille de Debreczin, le prince de Varsovie, profitant rapidement de sa victoire, lança sept régiments de cavalerie à la poursuite des colonnes magyares en déroute, et se porta

sur Arad pour ouvrir ses communications avec l'armée autrichienne qui, elle-même, avait occupé Szegedin et s'avançait vers Arad et Temeswar. Cette manoeuvre fut décisive; mais n'anticipons pas sur les faits.

Deux corps d'armée commandés par les généraux Lüders et Grottenhelm avaient reçu la mission de pénétrer en Transylvanie, l'un par la Valachie, l'autre par la Bucowine; ils devaient soumettre la Transylvanie, puis ensuite rallier l'armée du feld-maréchal Paskevitch.

Bem, ainsi que nous l'avons dit, commandait les forces magyares en Transylvanie. Il avait successivement grossi sa petite armée et l'avait portée au chiffre de vingt mille hommes; son plan était d'agir d'abord contre le général Grottenhelm, et, après l'avoir rejeté dans la Bucowine, de porter tous ses efforts contre le général Lüders, son autre adversaire du midi. Mais les choses ne se passèrent pas comme il l'avait espéré : Lüders s'empara successivement du couvent de Prédial, qu'il attaqua et enleva le 1er juillet 1849, de Tomosch, que les Hongrois ne purent défendre, de la place de Kronstadt, qui se rendit à discrétion, et enfin d'Hermanstadt, qu'il occupa le 21 juillet, après avoir laissé pour garder Kronstadt un détachement autrichien sous les ordres du général Clamm.

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