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chus. Cette Déesse Cotyto avait un ancien portique à Epidaure, ville consacrée à Esculape, dont les serpens étaient nourris dans le temple de la bonne Déesse '; dans ce temple, où, suivant Macrobe, on portait toutes les herbes médicinales, dont se servaient les prêtresses pour composer les remèdes qu'elles distribuaient au peuple. Esculape entortillé du serpent dont Faune prit la forme dans sa métamorphose, avait été nourri par une chèvre, et cette chèvre est la chèvre Amalthée, qui se couche au lever du serpentaire Esculape, et qui se lève à son coucher. On y voyait aussi une colonne, monument de la piété d'Hippolyte 2, dont le cocher porte aussi le nom, et dans la constellation duquel brillait le fils de Thésée, suivant les traditions de Trézène, voisine d'Epidaure.

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Synésius nous peint les efféminés, qui célébraient les mystères de Cotyto, à peu près sous les mêmes traits que les a représentés Juvénal, et surtout fort occupés de parfumer et d'arranger artistement leur chevelure; ces cheveux, qu'Horace appelle crines adulteros dans le beau Paris. Cet écrivain confond les mystères avec les ithyphalles, fêtes lubriques, où sous toutes les formes, on rappelait l'action génératrice du principe actif de la Nature; et il dit que la Déesse de Chio en était l'objet. Il paraît que la longue chevelure, et le soin qu'on en prenait, faisaient partie de ce cérémonial;

1 Macrob. Sat., 1. 1, c. 12, p. 215.2 Paus. Cor., p. 74. 3 Synes. in Calvit., p. 85.

TOME V.

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ce qui nous rapproche encore des fêtes ou du culte du cocher, en honneur de qui on nourrissait sa chevelure. Les filles, au moment de se marier, coupaient alors cette chevelure, et la déposaient dans le temple d'Hippolyte ou du cocher. Lorsque Leucippe, ou l'homme aux cheveux blancs, fils d'OEnomaüs dont le cocher céleste était cocher, voulut, suivant les traditions d'Arcadie, épouser Daphné, il fit croître sa chevelure, se fit passer pour femme et en prit l'habit pour tromper son amante; aussi la longue chevelure semble avoir caractérisé la femme et les efféminés. En général il paraît que dans le culte astrologique, on changeait de costume à raison du sexe des divinités qu'on adorait. Les adorateurs de la planète de Vénus prenaient l'habillement de femme; et les femmes qui adoraient la planète de Mars, prenaient celui d'homme. Le culte de l'étoile de la chèvre faisait incontestablement partie du sabisme.

Quant aux Baptes dont parle Juvénal dans cet endroit, ils étaient les initiés aux cérémonies sacrées de Cotyto, dont les

mystères paraissent Thraces, et ressemblaient assez aux bacchanales dont ils imitaient la licence.

avoir leur origine chez les

Le célèbre Eupolis les joua dans une comédie. qu'il intitula Les Baptes. Il en fut la victime: il

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1 Arcadic., p. 253.—2 Seld. Synt. 2, c. 4, p. 281. Maimon. More Nevoch., part. 3, c 38. Firm. de Errore Prof. Rel., c. 4. -5 Hephaest. Enchirid, p. 14.

connaissait mal les dévots, qui ne pardonnent jamais à ceux qui les démasquent. On prétend qu'ils le précipitèrent dans la mer. Nos Baptes d'aujourd'hui ou baptisés, ne sont guère plus tolérans.

Le culte de Cotyto et des divinités femelles, dont nous avons parlé jusqu'ici ainsi que de la licence de leurs fêtes, nous conduit naturellement à celui de Vénus et de Cybèle, et à l'examen de leurs mystères. C'est un article qui nous reste encore à terminer, avant de passer aux mystères des divinités mâles, telles qu'Osiris, Bacchus, Adonis, Mithra, Atys, les dioscures, etc., qui tous, excepté les Dieux de Samothrace, ne sont que le soleil, adoré sous différens noms et différentes formes. Son culte s'unit souvent à celui des divinités femelles, telles qu'Isis, Cérès, dont nous avons déjà parlé ; ou telles que Vénus et Cybèle, dont nous allons en ce moment parler, et que conséquemment nous ferons souvent marcher ensemble, comme dans l'article suivant.

Le culte de Vénus et d'Adonis son amant, et les mystères qu'on célébrait en honneur de ces divinités, semblent appartenir principalement à la Syrie et à la Phénicie, d'où ils passèrent ensuite en Grèce et en Sicile. Vénus ou Astarté est la grande Déesse des Phéniciens, comme Hercule est leur plus grand Dieu. On donna à ce dernier les noms de grand roi ou de Melecarte, et celui d'Adoni, mon maître ou seigneur, dont les Grecs firent Adonis. Nous avons déjà traité l'article de cette divinité, et nous

1 Politian. Miscell., c. 10.

en parlerons encore ailleurs à l'article de la religion des chrétiens : nous ne parlons ici que de ce qui a rapport aux mystères (r).

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Lucien 1, dans son traité de la Déesse de Syrie, nous a donné en grande partie la description des. fêtes mystérieuses d'Adonis et de Vénus à Byblos, en Syrie. On y donnait le spectacle de la mort de ce Dieu et de la désolation de son amante. Tous les ans, durant une semaine consacrée à la douleur, espèce de semaine sainte, on célébrait les mystères du Dieu mis à mort et ressuscité 2. Adonis, mort dans ce pays de la blessure d'un sanglier, devenait l'objet de ces fêtes de deuil, qui chaque année, se célébraient en mémoire de ce tragique événement. L'image d'un deuil public était répandue sur toute cette contrée pendant tout ce temps. Les dévots se flagellaient et faisaient retentir l'air de leurs cris lamentables, et ensuite on célébrait les orgies, ou les cérémonies mystérieuses, auxquelles la mort du Dieu donnait lieu. On rendait au Dieu mort les honneurs funèbres; après quoi le deuil et les macérations étant finies, on annonçait sa résurrection et son ascension au ciel. Les prêtres dans cette fête se rasaient la tête, à l'imitation des prêtres d'Isis en Egypte. L'origine de ce culte et sa filiation avec le culte égyptien, étaient aisées à reconnaître par la cérémonie même qui se pratiquait en même temps aux bouches du Nil. Au commencement de cette se

1 Lucian., l. 2, de Deâ Syria., p. 878.-2 Ammian Marcel., 1. 9, c. 22.

maine sainte, les Egyptiens faisaient porter une espèce de mannequin d'osier représentant la tête d'Osiris (s), lequel, après avoir été poussé par les flots, arrivait régulièrement le huitième jour à Byblos 1; et son arrivée, qui ne manquait jamais, y annonçait le terme des malheurs du Dieu, et son retour à la vie. Lucien assure qu'il a été témoin de ce miracle qui avait lieu tous les ans; comme si les vents, par une providence toute particulière, se fussent engagés tous les ans à remplir cette fonction, sans que jamais le panier s'écartât de sa route et retardât un instant sa marche. Il faut beaucoup de foi pour y croire. Les femmes phéniciennes attendaient le panier sacré impatiemment; et dès qu'il était arrivé au rivage, elles l'emportaient avec elles et mettaient fin à leur deuil.

La tradition venait encore à l'appui de cette cérémonie pour prouver l'origine égyptienne de ces mystères : car on prétendait que ce n'était point Adonis, mais Osiris qui était l'objet de ce culte, et que c'était Osiris qui était enterré en Egypte. Telle était l'opinion de plusieurs des habitans même de Byblos, suivant Lucien. Mais tout ceci se concilie quand on sait qu'Adonis et Osiris ne sont que deux noms différens du même Dieu-soleil, comme le disent Macrobe et Martianus Capella, et comme notre système d'explications le pro uve. Le nom d'Adonis, qui était plus familier par cela même qu'il étati dans la langue du pays, fit oublier l'ancien nom

1 Lucian., ibid., p. 879.

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