être, Monfieur, que vous vous trouvez fi bien au coin de votre feu avec Mademoifelle de Buffy, que vous en oubliez tout le refte. J'avoue franchement que quand vous êtes ensemble, vous pouvez vous paffer de beaucoup de gens; mais je ne fuis pas affez fincere ni affez modefte, pour demeurer d'accord que vous deviez m'oublier. Il me femble même que vous estimant & vous admirant autant que je fais, vous êtes obligé en confcience de m'aimer un peu. C'eft à vous, Monfieur, à me détremper fi je fuis dans l'erreur. Je ne fçai pourtant fi je voudrois être détrompé là-deffus. Car il y

comme vous fçavez, des erreurs agréa bles qui valent mieux que ce qu'on appelle defengaño en Espagnol, & ce qu'on pourroit appeller en notre langue defabufement, fi ce mot qu'un de nos meilleurs Ecrivains a hazardé, avoit été reçu.

Du Comte de Buffy au Duc de
Saint-Aignan.

A Autun, ce 19. Janvier 1675.

A1 appris par Madame de Sc*** avec J'A combien de chaleur vous aviez parlé au

1

Roi de mon retour, Monfieur ; & je vous affure que fi Vous l'aviez obtenu avec dés graces confidérables enfuite, je ne vous ferois pas plus obligé que je le fuis; car il n'a pas tenu à vous. Auffi vous protestai-je qu'il n'y a jamais eu une fi tendre reconnoiffance qu'eft la mienne ; que je dirai par tout où je pourrai toute ma vie, obligations que je vous ai; & que vous êtes le meilleur & le plus genereux ami du monde. Je le dirai même à la pofterité. Si je pouvois vous faire plus d'honneur, je le ferois, quoi qu'il m'en coûtât; car mon bien & ma vie font à vous, auffi-bien que

mon cœur.

CHII LETTRE.

les

Du Comte de Buffy à Madame la Marquife de V...

J

Ce 21. Janvier 1675.

E commençois à me détacher un peu de vous, Madame, quand j'ai reçu votre lettre. Elle m'a fait rompre les demi-réfolutions que j'avois faites de ne vous plus tant aimer, & me revoilà plus à vous que jamais. Si j'avois la liberté de vous l'aller dire moi-même, jé yous affure que je ne

ferois pas ici; mais tel n'eft pas encore le bon plaifir du Roi. J'efpere toujours que ceci finira bientôt. Cependant, Madame,, ayez un peu plus de foin de votre ami malheureux que vous n'avez eu jufqu'ici.. Vous feriez la plus ingrate femme du monde fi vous m'aviez oublié ; car perfonne ne vous aime & ne vous eftime tant que je fais..

CIV. LETTRE.

Du Comte de Buffy à l'Evêque de Verdun.

A Chafeu, ce 27. Janvier 1675.

L faut dire la verité; Monfieur de Tu renne a bien acquis de la gloire cette campagne. Je dirois volontiers de lui ce que Jean de Vert disoit avec bien moins de raifon du Comte d'Harcourt, quand il battit les Efpagnols qui affiegeoient Tutin, & qu'il fecourut cette place: J'aimerois mieux être General Harcourt qu'Empereur; mais effectivement j'aimerois mieux être General Turenne qu'Empereur. Je croi qu'on le hait bien en Allemagne; mais. je croi qu'on le hait bien auffi en France & voilà des haines qui valent bien mieux:

que

des amitiez. On ne laiffera point éta blir les Espagnols dans Ivoy. S'ils font plus forts que nous, nous avons plus de bons Officiers qu'eux, & plus de bonnes troupes. Dieu, fi l'on ofe parler ainsi, est bien François depuis quelques années. Je ne fçai pas quand il tournera cafaque mais jufques ici il eft bien déclaré pour

nous.

CV. LETTRE

Du Comte de Buffy à Madame de Buffy fa fille, Religieufe à Sainte Marie:

A Chafeu, ce r. Février 1675

OMME Chrétiens il nous faut avoir

Cde la patience dans nos maux,ma fille:

mais quand je ferois Turc, je fouffrirois avec fermeté ce que je ne pourrois empêcher. J'efpere toûjours que je verrai la fin de tout ceci, & que plus elle fera éloignée, plus elle me fera avantageufe. Cependant je fuis auffi content que fi j'avois les honneurs & les établiffemens que je devrois avoir, & je me fais des plaifirs dans ma petite fortune,qui font plus purs & moins troublez que ceux que j'aurois dans une

plus grande. On a tort à mon avis de me vouloir donner des foupçons du peu d'a mitié, ou même de la mauvaise volonté de Madame de S***. Il me faut de grandes convictions pour me faire croire qu'une perfonne que j'aime & que j'eftime, foit fourbe.

CVI.

LETTRE.

Du Pere B... au Comte de Buffy.

J'

A Paris, ce 6. Février 1675.

'A1 reçu votre lettre, Monfieur, avec toute la joye que donnent les lettres qu'on fouhaite extrémement, & qu'on n'attend prefque plus. Je ne fçavois à qui me prendre de votre filence; il ne s'en eft rien fallu que je ne m'en fois pris à cette réfignation que le Ciel vous a donnée depuis peu, & qui vous a un peu endurci. A vous parler franchement, Monfieur, quelque zele que j'aye pour votre repos & pour votre falut, je ne ferois pas bien-aife que vous fuffiez fi Philofophe & fi Chrétien pour moi. Je vous plains à la campagne ; mais je ne vous plains pas tant depuis que Mademoiselle de Buffy eft venue à votre fecours. C'eft une grande reffource pour