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mais voyant que mon affaire traînoit un peu, l'impatience m'a pris; & j'ai voulu vous rendre très-humbles graces des bontez que vous avez témoignées pour moi. Il faut dire la verité, Madame, vous êtes bien aimable, non feulement par votre perfonne, mais encore par votre cœur: & fi l'on a mille raifons de fe retenir fur les fentimens que vous infpirez, on en a deux mille de s'y abandonner. En arrive ce qui pourra, quelque dangereux que foit votre commerce, je ne le romprai jamais, & je ferai au moins toute ma vie votre ami, & votre tres obéiffant ferviteur..

CCXXXVII. LETTRE.

Da Comte de Buffy à Mademoi felle de C....

J

A Chafeu, ce 16. Septembre 1677.

E vous le dis franchement, Mademoifelle, je ne comprens pas que je vous aime & que je vous eftime fi fort, & que je vous écrive fi peu. Il faut affurement que je me fie trop à l'amitié que j'ai pour vous, & que je croye trop que vous n'en doutez pas. Cependant je pourrois bien à la fin yous donner fujet de croire qu'il y a du relâchement.

relâchement en moi; & c'eft ce que je veux éviter plus que chofe du monde. Je ne vous demande pas fi vos affaires font faitas; car fi cela étoit, vous me l'auriez mandé mais feulement fi vous ne voyez pas plus d'apparence à quelque bon fuc cès, que vous n'en voyiez quand je vous quittai. Je vous affure que je regarde vôtre fortune comme une partie de la mienne, & que je pourrois fort bien être heureux en vôtre perforne, fi je ne le pouvois

être moi-même.

CCXXXVIII.

LETTRE.

Du Comte de Buffy au Duc de Saint-Aignan.

A Chaseu, ce 7. Septembre 1677.

le Roi n'avoit donné des marques St confidérables de fon radouciffement pour moi, Monfieur, il ne m'auroit pas fait plus de plaifir, que de vous donner des marques de la continuation de fes bonnes

graces; & il n'a pas affez de puiffance pour

vous faire auffi grand Seigneur que je le fouhaiterois. Je doute que j'aille à Paris cet hiver. Je n'ai point de raifon preffante d'en demander au Roi la permiffion, & Tome IV.

Ff

pour rien du monde je n'irois fans cela. If continuëra ma difgrace tant & fi longtemps qu'il lui plaira, je ne l'en aimerai ni je ne l'en refpecterai pas moins ; & je vous ai toûjours dit & mandé, que j'etois affuré que Dieu étoit trop jufte pour ne pas enfin couronner ma patience & ma réfignation, & pour ne pas infpirer à Sa Majefté des fentimens de bonté pour moi. J'efpere même que cela paffera par vos mains,& qu'avec toutes les graces qu'il aime à vous faiil vous fera encore celle de me faire du

re,

bien.

CCXXXIX LETTRE.

De Madame de Sc

...

au Comte

J

de Buffy.

A Buffy, ce 10. Septembre 1677.

E fuis trifte, Monfieur, je viens de l'enterrement de Madame de Puifieux. On n'a jamais vû une perfonne mourir si vivante, avec tant de feu & tant de presence d'efprit. Il n'y avoit pas quinze perfon ne à l'enterrement de cette femme fi connue & fi recherchée. Je fuis fort aife de vous fçavoir auffi heureux qu'on le peut être. Les gens raisonnables fe le font tous

feuls malgré la fortune. Vous avez de la fanté & de l'efprit bien reglé; vous avez le néceffaire pour la vie d'un homme dé qualité, & auprès de vous une fille heu reufe, d'un grand mérite, & que vous ail mez fort. En voilà affez pour vivre agréa blement. Vous mériteriez affurément une fortune plus brillante: mais Dieu ne l'a pas voulu ; & quand vous l'auriez, vous au riez auffi peu d'amertume. Pour moi j'eflaye de mettre toute forte d'ambition hors de mon cœur. J'aime prefque autant avoir ces fentimens-là que la fortune.

CCXL. LETTRE.

Réponse du Comte de Buffy a Madame de Sc...

L

A Chafeu ce 15. Septembre 1677.

A mort de Madame de Puifieux m'a autant furpris que fi elle n'avoit eu que trente ans. La maladie dont elle fe tirail y a deux ans, m'avoit fait attendre à une plus longue fuite d'années pour elle. Cependant elle en avoit affez. Dieu veuille que nous allions auffi loin avec un auffi bon efprit qu'elle en avoit. Ce peu de mon de connu à fon enterrement après avoir

été fi recherchée pendant fa vie, marque non feulement la lâcheté du cœur humain, mais encore la crainte qu'on avoit d'elle quand elle vivoit. D'un autre côté auffice délaiffement ne lui importe guéres.

CCXLI. LETTRE.

Du Comte de Buffy à Madame de la R*

A Buffy, ce 2. Octobre 1677.

Ous dites, Madame, que fi on n'ofe

V pas m'aimer autant que je fuis aima

ble, on fçait au moins m'honorer autant que je fuis honorable. Je ne prendrois pas le change d'une belle Dame, comme vous, Madame. Il ne m'appartient pas d'être honoré de vous; & je vous permettrois fort bien de m'aimer, fi vous y trouviez vôtre compte. Pour moi fi je me fentois digne d'être aimé, j'aimerois affez facilement les perfonnes aimables: mais la gloire me retient; & cela me fera contenter de vous dire que perfonne n'eft plus affurément vôtre ami & votre très-obéiffant ferviteur que moi,

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