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Aussi n'y a-t-il de difficulté sérieuse qu'à raison du caractère spécial du ministère de l'avocat: en vertu des règles de son ordre, ce dernier doit prêter son concours sans pouvoir exiger la remise d'une provision. Comme son intervention ne finit qu'avec le procès, on en a conclu que pendant la durée de l'instance, la femme n'a rien à payer à son conseil et que par suite une provision lui est inutile. Cette thèse est erronée.

Le raisonnement, duquel on la déduit, repose tout entier sur cette idée que les aliments sont donnés à la femme, uniquement pour lui permettre de lui permettre de payer immédiatement les dettes qu'elle contracte.

Or c'est là une idée fausse.

La question de savoir à quel moment le payement de la dette peut être poursuivi, est sans importance. Les aliments ont pour objet de mettre la femme à même de tenir les engagements contractés par elle en vue de subvenir à ses besoins; lorsqu'elle a recours aux conseils d'un avocat, elle s'engage vis-à-vis de lui à payer ses honoraires; dès lors, elle doit recevoir, à titre alimentaire, la somme nécessaire pour tenir cet engagement. Dire le contraire, c'est forcer la femme, sans fortune personnelle, à commettre cet acte malhonnête consistant à s'engager vis-àvis d'un avocat, alors qu'elle sait être impuissante à exécuter son engagement.

On ne peut contester que si l'avocat avait le droit de se faire payer d'avance, il faudrait en tenir compte dans l'estimation de la provision alimentaire; le fait que ce payement anticipé ne peut être exigé, ne change rien à la question, car dans les deux cas, la femme est débitrice et par conséquent doit être mise à même de payer.

Sic trib. Bruxelles, 20 juillet 1897, Pasic., 1897, III, 261; — Liège, 14 juillet 1890, Pasic., 1890, II, 370; — Pand. fr., Rép., vo Divorce, no 1801. Cons. Pand. belges, vo Divorce, nos 1091 et s.

Contrà : trib. Liège, 21 janvier 1893, Pand. pér. belges, 1893, 404, et la note: Pasic., 1893, III, 144; Bruxelles, 11 mai 1888, Pand. pér. belges, 1888, 2, 1435; Pasic., 1888, II, 226; -10 décembre 1887, Pasic., 1888, III, 51; CL. et BONJ., t. XXXVI, 581; Pand. pér. belges, 1888, 3, 51; Poitiers, 21 juillet 1890, D. P., 1891, 2, 56. Comp. trib. Bruxelles, 17 juillet 1897, Pasic., 1897, III, 251; - Rouen, 30 janvier 1897, SIR. et J. Pal., 1897, 2, 239.

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728. Le mari ne peut certainement pas être condamné à fournir à sa femme une provision ad litem s'il jouit du bénéfice de la procédure gratuite. Lorsque ce bénéfice a été accordé à la femme, pourra-t-elle réclamer une provision ad litem, par exemple pour payer les témoins, et dans le cas où l'on adopte la thèse développée au numéro précédent, pour payer son avocat?

Elle n'aura obtenu le pro Deo que si elle est indigente; or, elle ne serait pas indigente si elle pouvait se faire payer par son mari les frais nécessités par sa défense. Du fait que le bénéfice de la procédure gratuite lui a été octroyé, on doit donc conclure que les facultés du mari ne lui permettent pas de donner une provision ad litem à sa femme, ou tout au moins qu'à défaut d'avoir saisissable, il est impossible de l'y contraindre. Au reste, si la femme jouit du pro Deo, elle n'aura aucun frais de justice à faire; il lui sera en effet désigné un avocat qui lui prêtera gratuitement son concours, et les témoins devront comparaître, même assignés par un huissier qui aura instrumenté gratuitement.

Sic DALL., Rep., Supp., vo Divorce et séparation de corps, no 330. Contrà : trib. Liège, 5 juin 1895, Pand. pér. belges, 1895, 1672; xelles, 23 juin 1884, J. Trib., 1884, 934.

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Comp. trib. Anvers, 14 juillet 1883, Pasic., 1883, III, 325; Pand. belges, vo Divorce, nos 1100 et s.; Pand. fr., Rép., vo Divorce, nos 1777 et s.; trib. Seine, 13 février 1883, Journal du droit international privé, 1883, 295, qui décide que la femme admise au bénéfice de l'assistance judiciaire, a néanmoins exceptionnellement droit à une provision ad litem, si elle se trouve astreinte à des frais et débours exceptionnels.

729. On discute la question de savoir si la femme a droit à des aliments en cas de déconfiture ou de faillite du mari. La solution dépend des faits de la cause et une règle absolue ne peut être consacrée. Nonobstant son état de faillite, le mari a-t-il encore des ressources? il doit les aliments; au contraire, est-il dans une situation telle que ses facultés sont nulles? il ne doit rien.

Sic, Pand. fr. rép., v° Divorce, nos 1693 à 1696.

Jugé que la déclaration de faillite du mari ne prive pas la femme, demanderesse en séparation de corps, du droit d'obtenir une provision

Tome III 1 262.

Tome III no 263.

alimentaire et une provision ad litem : trib. Bruges, 1er juin 1874, Pasic., 1874, III, 301; — Dijon, 4 février 1880, D. P., 1881, 2, 36.

Comp. trib. Liège, 11 juillet 1885, Belg. jud., 1885, 1039, et les observations de la Belgique judiciaire; Pand. belges, vo Divorce, no 1041.

730. La provision ad litem constitue une quotité des aliments dus à la femme; elle lui est allouée pour lui permettre de payer les frais de sa défense. Le mari, pour se refuser à la fournir, ne pourrait donc opposer en compensation une créance qu'il aurait à charge de sa femme, notamment à raison des dépens auxquels celle-ci aurait été condamnée par des jugements incidentels rendus au cours de l'instance en divorce.

Sic trib. Bruxelles, 28 mars 1896, Pasic., 1896, III, 250.

731. Le tribunal fixe la pension. Le président, comme juge des référés, peut accorder une pension, à titre de mesure d'urgence. La pension alimentaire peut être demandée en appel ou pendant l'instance en cassation. Elle doit être payée jusqu'au jour où le divorce est prononcé ou auquel l'instance est définitivement terminée.

La loi française a donné expressément au président, agissant comme juge conciliateur, le pouvoir de statuer sur la pension alimentaire. (Voy. supra, n° 716.)

Quant à la compétence du président comme juge des référés, voyez pour la Belgique supra, no 715, pour la France supra, no 714.

Sic, quant à la durée de l'obligation alimentaire, Bruxelles, 12 janvier 1897, Pasic., 1897, II, 190; trib. Anvers, 24 mai 1893, Pand. pér. belges, 1893, 1819; Verviers, 4 avril 1889, Pasic., 1889, III, 338, CL. et BONJ., t. XXXVII, 719; - Paris, 13 décembre 1895, D. P., 1896, II, 418: SIR. et J. Pal., 1896, II, 80; trib. Seine, 27 mai 1887, Pand. pér. fr.; 1890, 2, 12; - Pand. belges, vo Divorce, nos 1053 et s.

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732. Même lorsque la femme n'a pas une résidence séparée, elle peut, si son mari lui refuse l'argent nécessaire à sa subsistance, demander une provision pour ses besoins personnels, ceux de ses enfants et pour les frais du procès.

Le mari peut refuser la provision alimentaire à la femme qui ne justifie pas de sa résidence.

L'article 268 du code civil ne donne qu'à la femme, qui ne réside plus avec son mari, le droit d'exiger une pension alimentaire; dès lors, cette disposition ne peut être invoquée lorsque les époux habitent encore ensemble; toutefois, dans ce cas, la femme peut, si elle est dans le besoin, se prévaloir, pour réclamer une pension, de l'article 214 du code civil, dont l'article 268 n'est qu'une application.

La même solution doit être adoptée en France, où l'article 268 est remplacé par les articles 238, 240 nou

veaux.

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Sic Pand. belges, vo Divorce, nos 1007 et s.; Pand. fr., Rép., vo Divorce, no 1705; DALL., Rép., Suppl., vo Divorce et séparation de corps, n 325. - Comp. Nancy, 6 juillet 1895, SIR. et J. Pal., 1897, II, 45. Quant au droit du mari de refuser la pension, supra, no 725.

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733. L'obligation alimentaire, imposée au mari durant l'instance en divorce, est en réalité l'obligation générale, qui lui incombe en vertu de l'article 214, de fournir, selon ses facultés et son état, à sa femme, tout ce qui lui est nécessaire pour les besoins de la vie.

Pendant la procédure en divorce, la femme est autorisée à se séparer de son mari et à vivre dans une résidence désignée par la justice; dès lors, le mari, au lieu de remettre les secours en nature, aura à les donner en argent; c'est le but de l'article 268 du code civil (238, 240 nouveaux).

Nonobstant cette différence, l'obligation du mari de donner des secours pendant le mariage et son obligation de fournir des aliments pendant l'instance en divorce ont le même caractère, de même que l'obligation, imposée à la femme, de résider dans la maison désignée par la justice, est identique à celle qui lui était imposée de vivre au domicile conjugal; à cause de l'identité de ces obligations, la pension alimentaire n'est pas due à la femme qui ne justifie pas de sa résidence dans la maison indiquée, et qui

Tome III no 264.

a voulu se soustraire à la surveillance maritale. Il résulte de là que la femme qui a quitté le domicile conjugal sans se faire indiquer une résidence par la justice, en principe n'aura pas, même si elle est en instance de divorce, droit à des aliments. Il y aura exception s'il se rencontre des circonstances particulières excusant l'abandon.

Sic Liège, 19 mai 1897, Pasic., 1897, II, 356; Anvers, 27 novembre 1884, Pasic., 1885, III, 91; CL. et BONJ., t. XXXIII, 200; - trib. Gand, 8 juin 1881, Pasic., 1882, III, 283; Belg. jud., 1884, 714, et la note.

Contrà trib. Bruxelles, 12 février 1887, Pasic., 1887, III, 166. Comp. trib. Bruxelles, 4 avril 1896, Pasic., 1896, III, 258, qui ne précise pas les faits de la cause; - 3 mars 1896, Pasic., 1896, III, 184; 9 mars 1889, J. Trib., 1889, 723; Pand. fr., Rép., vo Divorce, nos 1613 et s. - Supra, no 514.

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734. L'obligation alimentaire entre époux étant réciproque, le mari a durant l'instance en divorce droit, le cas échéant, à une pension alimentaire et à une pension ad litem dont le taux sera déterminé suivant les règles qui eussent fixé le montant de la pension qu'en cas d'indigence la femme eût pu réclamer.

En France, la même solution doit être admise d'autant plus que le texte des articles 238 et 240 nouveaux ne vise pas spécialement la femme, comme le fait celui de l'article 268 ancien.

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Conformes au texte : Bruxelles, 5 novembre 1890, Pasic., 1891, II, 206;
Rouen, 13 novembre 1878, D. P., 1880, 2, 190; - Paris, 4 août 1871,
D. P., 1873, 2, 21; Pand. fr., Rép., vo Divorce, no 1678; — DALL., Rép.,
Supp., vo Divorce et séparation de corps, no 322..
Contrà trib. Bruxelles, 24 juin 1876, Pasic., 1877, III, 250.

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735. Le jugement qui accorde la pension alimentaire, est exécutoire comme toute autre décision judiciaire; en cas de saisie, il doit toutefois être tenu compte du caractère alimentaire de la dette dont le payement est poursuivi.

Sic trib. Bruxelles, 30 novembre 1895, Pasic., 1896, III, 64; Bruxelles, 15 juin 1894, Pand. pér. belges, 1894, 1372; Pasic., 1896, II, 36; — trib. Anvers, 1er mars 1894, Pand. pér. belges, 1895, 1051; - Bruxelles,

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