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plus tendre enfance il avait toujours eu la tête volumineuse; que sa mère lui faisait des coiffures exprès, qu'enfin, depuis qu'il se connaissait, le volume de sa tête avait toujours été considérable, et qu'il était obligé de commander ses chapeaux à l'avance: je le questionnai alors sur son état, sur sa manière de vivre; ses réponses furent toujours claires et nettes, son intelligence était ordinaire; du reste, cet homme, balayeur de son état, n'avait jamais été à même de l'exercer fortement, il ne savait ni lire ni écrire. Sa physionomie était expressive et très mobile; ses yeux vifs et recouverts par la saillie considérable des arcades sourcilières. Ses traits maigres et fins à côté du volume de son crâne, lui donnaient un aspect fort singulier. Ses mouvemens jouissaient de la plus entière liberté. Il entrait à l'hôpital pour y être traité d'un asthme qui le tournientait depuis long-temps. Du reste, il avait bon appétit, et ses fonctions s'accomplissaient avec régularité. Il demeura à l'hôpital pendant dix jours, et mourut tout à coup, au bout de ce temps, au milieu d'un violent accès d'asthme.

L'autopsie fut faite 24 heures après la mort : le cœur et les voies respiratoires nous donnèrent la raison de la mort de cet individu; je ne parlerai ici que de ce qui a trait à sa tête et à son système ósseux en général.

Taille de quatre pieds dix pouces; membres grêles et très maigres; raideur cadavérique nulle. A l'ouverture du crâne, la dure-mère se sépara facilement des os; cette membrane n'avait éprouvé aucun changement, nå dans son aspect ni dans sa texture : l'arachnoïde et la pie-mère avaient conservé leur transparence ordinaire; à la première vue, le cerveau nous parut aplati, moins volumineux qu'à l'ordinaire; mais, retiré du creux pro

fond où il se trouvait couché, nous nous aperçûmes bientôt que c'était par une illusion d'optique que nous avions mal apprécié son volume: ces circonvolutions, petites et nombreuses, n'offraient aucune trace d'aplatissement, rien qui pût même faire soupçonner qu'elles avaient éprouvé une compression quelconque. Le canal vertébral avait partout conservé son calibre; les vertèbres, ainsi que les autres os du squelette, n'avaient éprouvé aucun dérangement dans leur aspect physique; les os du crâne seuls ont éprouvé un remarquable travail.

En examinant ce crâne avec attention, on est d'abord frappé de la proéminence considérable du front : l'angle que la portion supérieure du coronal forme avec la portion orbitaire est presque entièrement effacé : disposition qui, solon Camper, suffirait seule pour caractériser et faire reconnaître l'hydrocéphale. La portion écailleuse des temporaux est déjetée en dehors, et fait saillie audessus de l'apophyse zygomatique. Toutes les sutures, qui se remarquent sur la voûte du crâne ont disparu.

Si nous examinons maintenant les os qui se trouvent à la base du crâne, en avant du trou occipital, ils nous présenteront très peu d'altérations, soit de forme, soit d'épaisseur. C'est ainsi que l'apophyse basilaire, le rocher, le corps du sphénoïde, l'ethmoïde, n'ont subi que quelques déformations peu importantes, les os de la face ont à peu près conservé leur volume ordinaire. D'un autre côté, la cavité crânienne me paraît avoir les dimensions qu'elle présente chez le commun des hommes. La portion droite de la base du crâne paraît au premier abord plus étendue d'avant en arrière, mais la portion gauche a plus de largeur.

Une question se présente ici à examiner : ne pourrions-nous pas, en nous aidant de l'analogie, découvrir la cause qui a ainsi accumulé autour du cerveau une si grande quantité de phosphate calcaire?

Le sujet de cette observation me paraît avoir été hydrocéphale dans le principe: la forme du crâne, cette forme qu'on pourrait appeler hydrocéphalique, s'il est permis de parler ainsi, le démontre. J'ai eu occasion d'examiner plusieurs crânes très épais; mais, dans aucun d'eux, la forme extérieure n'était changée; chez quelques-uns, l'épaississement n'était que partiel, et chez tous c'était la table interne qui s'était hypertrophiée, l'externe n'ayant subi aucun changement de forme ni de volume.

L'hypothèse que le sujet a été hydrocéphale admise, il nous reste à rechercher quel était le siége de la collection séreuse : l'épanchement ne pouvait se trouver dans la cavité de l'arachnoïde; l'intégrité parfaite du cerveau et de ses ventricules le prouve; il existait donc entre la dure-mère et la pie-mère : dans son accroissement primitif il aura, d'un côté, comprimé le cerveau et forcé les parois du crâne à s'étendre peu à peu. Malheureusement les renseignemens nous manquent pour établir les accidens que le sujet peut avoir éprouvés à cette époque de sa vie. La quantité de sérosité restant la même, les òs du crâne ont achevé leur entier développement, en affectant la forme vicieuse qu'ils avaient d'abord contractée. Enfin, ce développement achevé, il est arrivé un moment où l'épanchement a commencé à être resorbé, et en vertu de cette loi que toutes les fois qu'un vide tend s'opérer dans l'économie, la nature s'empresse de le combler, si je puis ainsi parler; le cerveau,

d'un côté, aura repris peu à peu sa forme et son volume; mais, comme il ne pouvait à lui seul remplir la cavité considérable qui s'était formée, la table interne de la voûte du crâne s'est peu à peu chargée de phosphate calcaire, a lentement suivi les progrès de la résorption du liquide, et le dépôt de sel terreux s'est enfin arrêté lorsque sa continuation n'aurait plus amené que la compression d'un organe important.

Mais, me dira-t-on, vous n'avez trouvé aucune trace d'altération dans les membranes du cerveau, rien qui puisse faire soupçonner qu'elles ont contenu une quantité si considérable de liquide? Non sans doute; mais la pathologie ne nous présente-t-elle aucun fait qui puisse éclairer celui-ci? Ne voit-on pas quelquefois une ascite guérir, disparaître, et ne laisser après elle aucune trace? Lorsqu'on ouvre des individus morts avec des hydrocèles, trouve-t-on quelque altération dans la membrane séreuse qui contenait le liquide? Il est bien entendu que je ne veux parler ici que des hydropisies essentielles, celles produites par la rupture de l'équilibre entre l'exhalation et l'absorption, pour me servir des expressions de Bichat; car il est bien clair que des hydropisies symptômatiques de l'altération organique d'une membrane séreuse laissent toujours après elles des traces de leur passage.

En dernière analyse, ce fait démontre, selon moi, un mode de guérison de l'hydrocéphale; je le soumets à l'appréciation de la Société anatomique.

CANCER du rein droit. Présence de la matière cancéreuse dans la veine rénale, dans la veine cave et dans le bassinet; par M. Peltier.

Le nommé Nicolas-Charles Bonin, âgé de 49 aus, né à Villadet, département de l'Aube, entra le 13 mars 1833 à l'hôpital de la Pitié, et fut placé au no 17 de la salle St-Raphaël, service de M. Clément.

Cet homme nous donna les détails suivans sur l'état antérieur de sa santé: il s'était toujours très bien porté jusqu'à l'époque du choléra; il fut atteint de cette ma·ladie, dont il guérit, mais la convalescence fut longue et pénible. Depuis même il resta valétudinaire. Au mois de septembre cet état empira, et bientôt il ressentit de violentes douleurs dans le rein droit, douleurs que son médecin rapporta à une néphrite. Celle-ci fut traitée convenablement et guérie.

A l'époque de son entrée, il était dans l'état suivant : facies altéré, figure pâle, œdème considérable des jambes, des cuisses et du scrotum; ascite déjà assez développée; dyspnée extrême; toux fréquente et sèche, Il avait souvent, en outre, des étourdissemens, des bourdonnemens dans les oreilles, et des bluettes, Il avait craché le sang au mois de décembre; depuis, cette hémoptysie n'avait plus reparu. L'œdème, qui datait à peu près de la même époque, avait commencé par les extrémités inférieures et avait remonté insensiblement. L'auscultation fut pratiquée. Le rhythme des battemens du cœur n'était pas altéré, le bruit en était un peu augmenté, mais l'impulsion en était très considérable. La percus

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