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Zollverein, dont les produits ne peuvent lutter avec ceux de France, mais qui rappelait et reproduisait le fâcheux procédé du 28 août 1842.

Une clause plus grave était celle par laquelle la Belgique, dans le cas où elle viendrait à augmenter son tarif sur les tissus de coton, s'engageait à accepter ceux de l'Allemagne.

L'importance du traité du 1er septembre reposait particulièrement sur deux points: l'abaissement, pour la Belgique, du droit sur ses fontes et fers importés en Allemagne, et les avantages accordés en échange au Zollverein, pour sa navigation dans les ports belges. Le Zollverein abolissait la surtaxe qui frappait par exception les fers et les fontes de la Belgique, et réduisait en outre de 5 00 le droit établi dans le Zollverein sur les fontes et fers en barre étrangers. Le droit sur la fonte étant de 2 fr. 50 c. les 100 kilog., il ne serait que de i fr. 25 c. sur la fonte venant de Belgique. Le droit sur le fer en barres étant de 1 fr. 16 c. les 100 kilogrammes, il ne serait que de 5 fr. 58 c. pour l'entrée des fers belges en Allemagne.

La Belgique obtenait encore une réduction de 50 910 sur le droit qui frappe les laines d'Allemagne à la sortie, et les fromages à l'entrée.

Quant au Zollverein, les véritables avantages obtenus par lui dans le traité du 1er septembre, c'était les facilités nouvelles accordées à sa navigation, qui, luttant avec la Néerlande depuis la naissance de l'association, eût perdu, par une rupture complète avec la Belgique, ces débouchés de la mer pour lesquels elle a construit le chemin de fer rhénan. Ces avantages étaient; 19 le remboursement du péage sur l'Escaut; 2° l'égalité de droits de tonnage, de pilotage, quai, bassin, etc., pour les navires du Zollverein; 3o l'assimilation complète et réciproque de pavillon pour les provenances de tous les ports situés entre l'Elbe et la Meuse, ainsi que la suppression, dans ce cas, de tout droit diffé

rentiel; 4° la suppression de tout droit de transit; 5° le maintien des avantages faits à la partie allemande du Luxembourg par la loi du 16 juin 1839.

Le principe du système des droits différentiels était maintenu pour les provenances indirectes. Le traité était conclu pour six ans,

Si la Néerlande et la Grande-Bretagne étaient plus profondément atteintes par le traité du 1er septembre que la France elle-même, celle ci n'en avait pas moins à se plaindre. Le système de bascule, appliqué par la Belgique à ses relations commerciales, avait fini par une préférence hostile à la France pour le Zollverein. Telles n'avaient pas été les relations de la Belgique avec la France, selon l'administration belge, et, dans la discussion des voies et moyens, M. le ministre de l'Intérieur avait saisi l'occasion d'interpellations adressées par M. Castian, relativement à la convention du 16 juillet, pour expliquer la conduite du gouvernement belge. Selon M. le ministre, la France, envahie par l'industrie linière de l'Angleterre, avait voulu lui opposer des entraves. Placée, en face de la Belgique, dans une position plus favorable, elle n'avait pu l'envelopper dans des mesures prohibitives qui n'eussent été la réponse à aucune menace. La Belgique avait donc été jugée digne d'une exception; mais cette exception, il lui avait fallu l'acheter. La situation faite à la Belgique par la France, dans la convention du 16 juillet, n'avait été qu'un statu quo. Ce statu quo, le gouvernement belge ne l'avait pas accepté avec une grande reconnaissance, le regardant comme son droit, aux termes de la convention de 1836. Il y avait eu alors une sorte d'accord tacite de maintenir ce statu quo entre les deux pays. Mais la France y avait porté atteinte deux fois d'abord par l'ordonnance royale qui avait introduit un nouveau système pour le comptage des fils et l'appréciation des nuances; puis par l'ordonnance du 28 juin. La Belgique avait obtenu une exception à cette or

donnance, mais au prix d'un sacrifice. Elle s'était, au reste, réservé le droit de faire les mêmes avantages à d'autres pays, et ces avantages, elle les avait accordés à l'Allemagne, sur la frontière de laquelle elle venait de porter le droit en quelque sorte prohibitif du tarif français. La Belgique n'avait aucun grief à reprocher à l'Allemagne ; elle lui avait accordé un avantage provisoire, dans l'attente des résultats. Vis-à-vis de l'Allemagne, c'était la Belgique qui avait changé le statu quo. Pour la première fois elle avait introduit le système des droits différentiels dans son système commercial.

Depuis lors, le gouvernement français avait porté atteinte à la convention du 16 juillet par l'ordonnance, contresignée par le ministre de la Guerre, qui avait décidé que les toiles belges ne pourraient plus être employées dans les fournitures militaires. La Belgique avait espéré vainement, d'après les termes de la convention du 16 juillet, que ses toiles seraient admises dans toute la consommation.

Le gouvernement belge fait de rapides progrès dans le système de protection commerciale, et tous les jours s'efface quelque trace de l'ancienne libéralité du régime commercial de la Néerlande. Sous le gouvernement des PaysBas, la protection assurée à l'industrie nationale par le tarif des douanes était, on le sait, très-modérée ; mais, en retour, cette industrie jouissait d'avantages précieux quant au bon marché des denrées de consommation et quant aux facilités pour se procurer les matières premières. Ces avantages disparaissent incessamment avec la révision des tarifs. Déjà les lois sur les céréales et sur le bétail ont été révisées, afin d'assurer plus de protection à l'agriculture. Les tissus de lin et de laine, les fontes et les fers, et une foule d'autres articles secondaires ont été frappés d'augmentations de droits; il ne reste plus aujourd'hui à élever que les droits sur les tissus de coton, les glaces, les machines et quelques articles insignifiants.

Ann. hist. pour 1844.

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La dernière démonstration faite par le gouvernement belge, dans ce système de protection excessive, fut un arrêté du 12 octobre, par lequel plusieurs modifications importantes étaient apportées au tarif des douanes. La principale disposition de l'arrêté concernait les tissus de coton teints, dont le droit d'entrée, porté à 325 fr. les 100 kilogrammes, se trouvait aggravé d'environ cinq pour cent. Au reste, cette disposition n'atteignait que les produits de l'Angleterre, ceux de la France, ainsi que ceux du Zollverein, devant rester admissibles au taux du tarif actuel. Mais cette concession en faveur de la France n'était guère que provisoire et limitée à un an. Le but non dissimulé de cette exception était d'amener le gouvernement français au renouvellement de la convention du 16 juillet 1842. Cette espérance du gouvernement belge pouvait-elle se réaliser ! Les dispositions de la Chambre des députés de France permettaient d'en douter. Le rapport de la commission des douanes avait signalé hautement les inconvénients de cette convention et exprimé le vœu de ne pas la voir se renouveler.

Le même arrêté, en élevant de 5 à 10 fr. le droit sur les tissus de soie, maintenait aussi en faveur de la France le droit minimum de 4 francs. Ici, l'exception était de droit et découlait directement de la convention du 16 juillet 1842. Par suite du traité du 1er septembre, le Zollverein était également excepté de cette augmentation.

Un autre disposition bien remarquable de l'ordonnance concernait les machines et les mécaniques. Le gouvernement belge, suivant en cela l'exemple du gouvernement français, qui venait d'élever les droits sur les machines à l'entrée, élevait à 35 fr., pour les locomotives, le droit d'entrée, primitivement fixé à 14 fr. et à 25 fr. pour la plupart des autres mécaniques.

Il y avait dans la conduite tenue envers la France en cette occasion une intention évidente de créer des facilités nouvelles à un arrangement ultérieur. Mais, en définitive, cet

arrangement paraissait peu probable. Tous les avantages faits par la Belgique à la France, le Zollverein les partageait, et cela pour une durée indéterminée, tandis que la France était assignée à court terme pour des concessions nouvelles. Par l'assimilation du pavillon, les intérêts belges s'étaient intimement unis à ceux de l'union allemande, dont Anvers allait devenir le port. La Belgique inclinait évidemment vers l'Allemagne et chaque jour la détachait de la France. La session des chambres belges (1844-1845) fut ouverte le 22 octobre. L'époque ordinaire de cette solennité avait été devancée pour que les Chambres fussent à même de voter les budgets avant le commencement de l'année à laquelle ils s'appliqueraient.

Le discours royal faisait allusion au traité conclu avec l'union allemande des douanes et à une convention postale faite avec l'Angleterre. Par cette convention, des avantages spéciaux avaient été stipulés pour l'expédition des correspondances étrangères. Le port des lettres avait été réduit à un schilling et celui des journaux à cinq centimes.

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Une convention d'extradition conclue, le 28 octobre 1843, entre la Belgique et le royaume de Suède et de Norvége fut ratifiée par S. M. le roi de Suède le 18 novembre, par S. M. le roi des Belges le 18 décembre, et l'échange des ratifications eut lieu à Bruxelles le 29 janvier de cette année. En dehors de ces faits politiques d'importance secondaire toute l'histoire de la Belgique est dans ces oscillations commerciales et industrielles que nous avons racontées avec toute l'étendue que comporte un semblable sujet.

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