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mark; mais la négociation fut reprise ensuite, et nous la verrons l'année prochaine arriver à bonne fin.

SUÈDE,

L'année commence pour le royaume par la ratification d'un traite d'extradition conclu précédemment avec la Belgique, Plusieurs événements graves ont rendu cette période importante pour la Suède; le premier de tous est la mort du souverain monté sur le trône en 1818. Le 26 janvier, le jour même où Charles-Jean XIV entrait dans sa quatre-vingtdeuxième année, sa santé, qui jusque-là avait vigoureusement soutenu les atteintes de l'âge, parut chancelante et sérieusement altérée, Une ordonnance du 1er février confia le gouvernement au prince royal; la maladie du roi se prolongea jusqu'au 8 mars, jour où il cessa de vivre. Son fils lui succéda sous le nom d'Oscar I. Le règne qui venait de finir laissait bien des questions à résoudre à celui qui commençail. Depuis que les Suédois, par un vote unanime, avaient élu le prince de Ponte-Corvo pour héritier présomptif de Charles XIII, surtout depuis son avénement, l'opinion publique, les tendances, l'esprit du pays tout entier s'étaient modifiées d'une façon considérable. A côté des anciennes institutions, héritage d'un autre âge, des idées nouvelles s'étaient fait une place au sein de cette société organisée politiquement et civilement sur la distinction des classes. La constitution de 1809, qui avait donné beaucoup d'espoir aux esprits libéraux sans les satisfaire, l'ébranlement démocratique de 1815, contre lequel le pouvoir avait eu soin de se mettre en garde, plus tard, son penchant avoué pour le maintien des choses existantes et sa politique hostile aux innovations, tout cela n'avait pas empêché un parti vraiment démocratique de se constituer et de se développer dans ce pays. Quelque temps incertaines, les idées progressives avaient éclaté en 1829 à propos de la loi sur la presse. En 1834 il avait été présenté

un projet de réforme; et le parti démocratique, sans se décourager des échecs qu'il avait subis dans ces deux questions, avait de nouveau produit en 1840 un plan de réforme définitivement adopté par la diète. Le rôle de résistance que le gouvernement s'était fait en présence de ces vœux d'une rénovation politique et sociale avait diminué peu à peu la considération et l'autorité dont il avait joui dans le commencement. Assurément Charles XIV avait beaucoup contribué avec l'aide de la paix et de l'activité générale à rétablir la prospérité matérielle de la Suède, détruite par le règne du dernier Gustave-Wasa. Il avait remis l'ordre dans les finances de l'État et donné une heureuse impulsion à l'industrie et au commerce. De grands travaux d'utilité publique s'étaient accomplis par ses soins; la dette étrangère avait été éteinte par lui; mais tous ces grands services rendus au pays par le roi ne faisaient pas oublier qu'en l'appelant à régner sur un pays libre, on en avait attendu d'autres de lui; son ancienne gloire, née au sein d'une démocratie, restée pure même sous un régime absolu, avait fait concevoir aux suédois des espérances plus vastes; en le voyant monter sur le trône ils n'avaient compté sur rien moins qu'une réforme complète de leur législation civile et politique; et ce qu'ils avaient obtenu en améliorations matérielles ne les consolait pas de ce qui leur avait été refusé en améliorations sociales. L'irritation avait acquis une certaine intensité à la fin du règne dernier; il s'était formé une opposition puissante capable d'inquiéter vivement le pouvoir.

Le nouveau règne commençait donc au milieu de difficultés assez graves; ce n'est pas que le parti libéral eût pour le jeune roi des dispositions peu bienveillantes ni même qu'il lui marquât de la défiance: loin de là, l'opposition qui avait été faite jusque-là au gouvernement et à la personne royale cessa tout d'un coup; les organes les plus avancés de l'opinion' publique témoignèrent de leur bon vouloir et de leur confiance pour le nouveau souverain. La question dé

mocratique ne cessa point pour cela d'agiter les esprits, mais elle se débattit toute entière entre la majorité de la noblesse et du clergé d'une part, et de l'autre, les deux derniers ordres avec le pays tout entier. La royauté, qui s'efforça dès le commencement de prendre une attitude impartiale, fut regardée par les libéraux comme favorable à la réforme. Mais son rôle ne laissait pas pour cela d'être difficile et embarrassant. Sa prudence et sa dignité lui conseillaient de tenter tous les essais de conciliation qui pouvaient être tentés sagement. C'est le principe d'après lequel elle semble avoir dirigé sa conduite.

Les premiers soins du roi furent d'annoncer à la nation la mort du roi son père et son avénement au trône, suivant les formules d'usage, de recevoir le serment des fonctionnaires publics, de l'armée de terre et de mer, enfin, de convoquer les États-Généraux en session extraordinaire. Tout se fit dans le calme le plus parfait et avec la plus grande régularité. Il est vrai que le prince Wasa voulut par une protestation officielle faire valoir ses droits à la succession, droits perdus par son père et transférés par la nation à une autre dynastie, mais cette démarche n'obtint l'attention ni de l'Europe ni de la Suède. On ne remarqua que la manière généreuse dont le roi y répondit. Dès le lendemain du jour où elle lui fut connue, il abolit la loi qui défendait sous des peines assez graves toutes relations avec le prétendant (7 mai).

A la même époque, quelques changements s'opéraient dans le ministère. Les nominations qui furent faites n'avaient pas une signification bien précise, cependant elles donnaient à l'administration des hommes peut-être plus actifs que ceux auxquels ils succédaient. Les Affaires étrangères fu-' rent données à M. le baron Irhe, l'Intérieur à M. Fahrens, la Marine à M. le baron Lagerbjelke, les Finances à M. Munthe, la Guerre à M. Peyron, les Cultes à M. Silverstope. Les États-Généraux s'assemblèrent le 11 juillet. Le roi en fit

l'ouverture par un discours qui témoignait de ses bonnes intentions pour la réforme de certaines parties de la législation, par exemple, du droit criminel, et qui parlait avec faveur des grandes questions sociales léguées par la dernière diète à celle-ci.

Après avoir rendu hommage à la mémoire de son père et appelé sur lui-même la protection de la Providence,

Je vous promels, dit-il aux États, de défendre et de maintenir la Justice et la vérité, de seconder le progrès des lumières et de concourir de tous mes efforts au développement des qualités nobles et solides qui distinguent le caractère mâle et énergique des habitants du nord. Je m'attends, de votre part, à une sincère coopération pour ce but élevé, et à cette confiance que la pureté des intentions et des soins incessants pour le bien de la patrie dolvent inspirer à un peuple magnanime.

> En vous appelant, messieurs, à cette diete extraordinaire, j'ai consulté mon vif désir de vous voir assemblés à une époque aussi grave pour moi el pour le pays, plutôt que la possibilité de préparer, dans un espace de temps aussi restreint, et de vous exposer les affaires importantes qui forment l'objet de ma sollicitude, et à l'égard desquelles je comple demander vos résolutions et apprendre vos avis. Les grandes questions sociales que la dernière diete vous a léguées vous fourniront d'ailleurs de sérieuses occupations en réclamant votre altention particulière. J'espère cependant pouvoir, pendant la durée de celle cession, vous présenter plusieurs objets d'un intérêt majeur, et en premier lieu celui d'un nouveau Code criminel, plus conforme aux vues de notre époque, ainsi qu'à ses efforts de concilier avec la sévérité nécessaire dans l'application des peines le respect que l'on doit à la dignitė de l'homme.

Appréciant l'importance et le besoin de simplifier l'administration intérieure et dé compléter notre système de défense, je vouerai mes soins non interrompus à ces questions vitales. Afin de m'appuyer dans ces travaux sur votre concours éclairé, je me propose de vous réunir sous peu à une nouvelle diète extraordinaire.

C'est avec une vive satisfaction que je puis vous communiquer les sentiments d'intérêt et d'amitié qui, lors de mon avénement au trône, m'ont été exprimés par toutes les puissances étrangères, de la manière la plus affeetueuse. Je suis heureux de trouver une occasion d'en témoigner ma reconnaissance. »

Le roi terminait en annonçant la détermination prise par le gouvernement de refuser le honteux tribut levé jusque-là par l'empire de Maroc sur la marine suédoise.

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En effet, des vaisseaux avaient été envoyés sur la côte d'Afrique sous le commandement du prince royal pour protester par leur présence, sinon par la force; et les succès obtenus par les français dans ces parages mirent la Suède en demeure de commencer la négociation de cette grave affaire, dont la solution appartient à l'année suivante.

La diète travailla avec ardeur à l'organisation de ses comités; la formation du comité de constitution avait une grande importance: suivant qu'il serait favorable ou non aux innovations, on pouvait préjuger de ce que feraient les États pour la réforme. Malheureusement ce premier indice des dispositions et de la force relative des partis ne promit rien de bon; le comité de constitution fut composé en trèsgrande partie de conservateurs déterminés. Le parti du progrès en fut sérieusement alarmé, et avec raison. En effet, le projet de loi pour la réforme de la constitution fut rejeté; la même question qui avait été résolue par un vote libéral à la diète de 1840, cette grande question qui porte en elle le sort des deux principes partout opposés de la résistance et du progrès, fut décidée dans le sens de la conservation et de l'ajournement indéfini du progrès. Les bourgeois et des paysans se prononcèrent pour, et la noblesse et le clergé contre la réforme. Cette solution à laquelle on s'attendait produisit cependant une profonde impression sur les esprits. Le parti libéral, voyant la réalisation de ses projets encore une fois reculée après avoir été rendue possible par la diète précédente, entra dans une grande irritation, sans sortir pour cela des voies légales. Des comités furent organisés par lui en dehors des États; la prèsse redoubla d'ardeur; on travailla par tous les moyens de persuasion à rendre le parti libéral plus compact, à lui faire de nouveaux prosélytes et

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