Images de page
PDF
ePub

que le précis des canons du concile de Bâle, mais encore une loi de l'Etat, puisqu'elle a été faite et publiée dans une assemblée nationale, et que loin d'avoir été abrogée par une Joi contraire, son exécution a été réclamée, plus de quarante-quatre ans après le concordat, par les Etats-généraux assemblés à Orléans en 156o. Le concordat, au contraire, loin d'être une loi de l'Etat, est déclaré opposé aux conciles de l'Eglise universelle et aux libertés de l'Eglise gallicane, par un arrêt du Parlement (Lib. de l'Egl. gall., c. 22); et cet arrêt n'a été donné que depuis un édit de Charles IX, rendu sur les remontrances de cette Cour, et conforme d'ailleurs au vœu du clergé de France, qui n'a jamais reçu le concordat comme loi. Dans l'assemblée de 1635, les promoteurs représentèrent que dans le Recueil des affaires du clergé, on avait inséré le concordat, ce qui pouvait impliquer une approbation tacite du clergé, quoiqu'il eût toujours fait difficulté d'en admettre les dispositions. Ils requirent en conséquence qu'il plût à l'assemblée de pourvoir à cet inconvénient: voici la réponse de l'assemblée : 1 a été déclaré et protesté que ledit concordat n'est mis dans les livres du clergé que pour la commodité des ecclésiastiques qui peuvent en avoir besoin, et non pour une plus grande approbation.

NOTICE

SUR L'ÉTAT DES JUIFS EN FRANCE,

DEPUIS L'ORIGINE DE LA MONARCHIE, jusqu'au siècLE
DERNIER. (Edit. J. C.)

Saint Justin, dans son Dialogue avec Triphon, nous apprend que les Juifs choisirent, par une commune délibération, des personnes qu'ils envoyèrent par toute la terre, et par le moyen desquelles ils publièrent les plus atroces calomnies contre les chrétiens et contre leur auteur.

On ne sait pas au juste à quelle époque ces émis saires pénétrèrent dans les Gaules; mais il est certain qu'il y en avait sous Marc-Aurèle, car Bardesane, qui écrivait dans la Mésopotamie en l'an 170, dit positivement, dans son livre contre le Destin, que les Juifs pratiquent la circoncision, que Moïse leur a commandée, en quelques lieux qu'ils demeurent, soit en Syrie, soit dans la Gaule, en Italie, en Grèce ou parmi les Parthes. Quoi qu'il en soit, ils étaient encore peu nombreux à cette époque; et selon toutes les apparences, il n'y en avait point à Lyon, car on ne voit pas qu'ils aient pris part à la cruelle persécution de l'an 177, tandis qu'ils étaient, pour l'ordi

naire, les acteurs les plus acharnés dans ces sanglantes catastrophes.

Le nombre des Juifs augmenta considérablement pendant les siècles qui suivirent, témoin le canon du concile d'Agde, tenu l'an 506, qui défend aux chrétiens d'avoir aucun commerce, et surtout de manger avec un infidèle. Celui qui se tint à Orléans l'an 533, excommunia tous ceux qui feraient quelque alliance

avec eux.

Nos premiers rois en trouvèrent un assez grand nombre qui s'étaient mariés à Paris. Ils occupaient, au milieu de la ville, toute une rue, qui en a retenu le nom de Juiverie, et ils s'étendaient en deux autres rues qui aboutissent de celle-ci au Palais.

Dans ces siècles de barbarie, la plus grande partie du commerce se trouvant entre leurs mains, ils firent des gains considérables. Grégoire de Tours nous apprend qu'ils affectaient, pour insulter aux chrétiens, de paraître, la semaine sainte, plus magnifiquement vêtus qu'à l'ordinaire, et de la passer en réjouissance; ils se montraient, au contraire, tristes et en deuil dans le temps de Pâques.

Childebert, fils de Clovis, fit cesser ce scandale, par un édit de l'an 533, qui défendit aux Juifs de paraître en public pendant le saint temps de la Passion et à Pâques. Il leur défendit aussi d'avoir aucun esclave ou domestique chrétien; «n'étant pas juste, << dit cette loi, que celui qui a été racheté par le pré<< cieux sang de Jésus-Christ, soit soumis à servir un <«< infidèle qui blasphême son saint nom. »>

Sous Chilpéric, plusieurs Juifs se convertirent; et ce prince fit l'honneur, aux principaux de leur nation, d'être leur parrain.

Dagobert rendit un édit, l'an 633, par lequel il enjoignit expressément à tous ceux qui ne confessaient pas la foi de Jésus-Christ, de sortir de ses Etats dans un certain temps. Quelques Juifs se firent baptiser, et tous les autres, en plus grand nombre, se retirèrent.

ya

On ne voit pas combien dura leur exil; mais il y a lieu de penser que, sous Louis-le-Débonnaire, ils jouissaient d'une grande liberté. Ils eurent des discussions fort vives avec Agobard, évêque de Lyon; et l'empereur, à ce qu'il paraît, prit en diverses occasions leur parti contre le prélat.

Il est fait mention des Juifs dans le concile de Meaux, de l'an 845, et dans celui de Paris, de l'an 850; toutes les lois précédentes y sont renouvelées contre eux. Charles-le-Chauve, dans l'un de ses édits de l'an 877, en réglant les droits qu'il imposa sur les denrées et marchandises, ordonna que les marchands chrétiens paieraient l'onzième denier, et les Juifs le dixième. Plus tard, ce même prince étant mort, Sédécias, son médecin, qui professait la religion juive, fut accusé de l'avoir empoisonné, mais ce crime ne fut jamais éclairci; et le président Hénault ajoute à ce qu'il en dit, qu'aucun historien ne nous a appris si ce médecin avait été puni.

.

Au commencement du onzième siècle, on accusa les Juifs de France, et particulièrement ceux d'Or

léans, d'avoir donné des avis secrets au prince de Babylone. Ces avis consistaient, disait-on, à l'avoir prévenu que, s'il ne détruisait au plus tôt l'église des chrétiens qui étaient à Jérusalem, ils se rendraient en peu de temps les maîtres de ses Etats. Baronius rapporte, d'après Othon de Trisnique, qu'un moine nommé Radulphe s'efforça d'attirer à lui les habitans de Cologne, de Mayence, de Spire et de Strasbourg, pour se croiser contre les Juifs. Il enseignait publiquement qu'il fallait tous les mettre à mort, comme ennemis de la religion chrétienne. Il ne réussit que trop bien dans plusieurs villes d'Allemagne et de France : le sang des Juifs y fut répandu à grands flots; et ils furent enfin obligés d'avoir recours au roi des Romains, et à chercher leur sûreté dans Nuremberg.

Philippe I chassa les Juifs de ses Etats l'an 1096; mais ils ne tardèrent pas à être rétablis en France. On leur accorda des conditions, favorables en apparence à leur sûreté, mais qui augmentaient de beaucoup le poids de leur servitude. Ils se rendirent tributaires, et le roi partagea les bénéfices qu'il en tirait, avec les princes et les grands seigneurs de sa cour. Sous cette condition, ils continuèrent leur commerce, et il fut convenu que moyennant le payement de la somme fixée, ils conserveraient en propriété le reste de leur bien; mais ils demeuraient tellement attachés à leur seigneur, qu'ils étaient réputés faire partie de son domaine. C'était lui qui fixait leur domicile, et ils ne pouvaient en changer sans sa permission. Ils en

« PrécédentContinuer »