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porter ses pas, il a fait l'expérience que la Nation entière, les Citoy ens et les Soldats l'avaient rejeté pour jamais.

Le Roi heureux de l'amour de son Peuple, s'est empressé de convoquer les 2 Chambres. C'était la première pensée de son cœur. Sa Majesté a ordonné en même temps des mesures de précaution et de prévoyance. Elle est secondée par tous les vœux, par toutes les volontés, par la confiance universelle; et cette fois c'est la France qui se charge de faire justice de l'audacieux perturbateur de son repos.

Le Roi, Mylord, est persuadé que les Puissances, naguères Alliées, non contre la France, mais contre ce même homme qui avait aspiré à la domination de l'Europe, s'empresseraient au besoin de joindre leurs Forces, pour réprimer et pour venger toute atteinte portée aux principes de légitimité et de justice si longtems outragés.

La punition de celui, qui pendant la durée de sa puissance monstrueuse, fut le seul obstacle à la paix de l'Univers, et dont la turbulente audace a osé de nouveau la violer, affermira tous les liens qui unissent les Nations aux Nations et les Souverains à leur Peuple; et la France, réconciliée par son Roi, y trouvera l'entière garantie de sa tranquillité intérieure et d'une prospérité qui lui sera commune avec le Monde civilisé.

Veuillez, Mylord, porter à la connoissance de votre Gouvernement les faits dont je viens d'avoir l'honneur de vous informer; et agréez les assurances, &c.

Lord Fitzroy-Somerset.

LE COMTE DE JAUCOURT.

(3.)-CIRCULAIRE aux Ministres des Cours Etrangères à Paris. Paris, le 8 Mars, 1815.

EN conséquence des nouvelles dont le Soussigné Ministre d'Etat, chargé par intérim du Portefeuille des Affaires Etrangères, a eu l'honneur d'informer par sa Note d'hier, Lord Fitzroy-Somerset, le Roi a ordonné une Croisière de Bâtimens de Guerre sur les Côtes de Provence, du Piémont, de Gênes et de la Toscane; ils ne laisseront approcher ni sortir des Ports Français aucun Bâtiment sans le visiter, et ils arrêteront, pour les conduire à Toulon, les Militaires armés et les Individus non munis de Passeports réguliers, qui se trouveraient à bord d'un Navire, quelque fut son Pavillon.

Cette Croisière, qui est une suite des Mesures de sûreté générale prescrites par l'Ordonnance du Roi, publiée dans le Moniteur d'hier, n'a d'autre but que d'arrêter les hommes qui auraient accompagné Napoléon Buonaparte, qui tenteraient de le joindre ou de lui procurer des secours d'un genre quelconque.

Monsieur le Comte de Gourdon, Contre-Amiral, chargé de commander la Division Navale qui va être mise en activité, exécutera les

ordres de Sa Majesté avec tous les égards dûs au Pavillon des Puissances amies; mais il lui est prescrit de s'opposer par la force à tout débarquement d'hommes et de munitions.

Le Soussigné, chargé de donner au Lord Fitzroy Somerset connoissance de ces dispositions, qui seront transitoires comme les circonstances qui les exigent, le prie d'en instruire son Gouvernement. Le Soussigné est convaincu que toutes les Puissances, non seulement approuveront des mesures de précaution aussi légitimes, mais que par les ordres qu'elles donneront dans l'intérêt de la cause commune, Elles s'empresseront de concourir à leur succès.

Il a l'honneur de renouveler, &c.

Lord Fitzroy Somerset.

LE COMTE DE JAUCOURT.

(4.)—DISCOURS du Président de la Chambre des Pairs, à l'occasion de l'Ouverture de la Session Extraordinaire, à Paris, le 9 Mars, 1815.

MESSIEURS,

LE meilleur des Rois, après avoir fondé sur des bases inébranlables le bonheur de ses Sujets, et donné conjointement avec vous les premières Lois qui devaient renouveler l'existence et assurer la prospérité de ce beau Royaume, avait cru pouvoir sans inconvénient vous rendre pour quelques mois au repos qu'exigeaient vos affaires, si long-temps sacrifiées à celles de l'Etat.

Les 2 Chambres, pendant leur longue Session, avaient présenté à l'Europe entière, l'exemple touchant de l'union intime et du concert parfait qui doivent constamment rallier à leur Père tous les Enfans de la même Famille. Restitués pour quelques momens à la condition privée, vous ne deviez pas cesser de servir encore et très-utilement la Patrie, en devenant pour tous les Français des modèles plus rapprochés de fidélité pour le Roi et pour la sage Constitution qu'il nous a donnée.

Pendant que les Pairs de France et les Députés des Départemens, disséminés dans nos Provinces, devaient y porter cet excellent esprit qui a dirigé toutes leurs délibérations, n'avaient qu'à parler du Roi pour le faire aimer et bénir,-devaient dire à leurs Concitoyens ce qu'ils ont vu, répéter ce qu'ils ont entendu, annoncer toutes les améliorations qui se préparent, calmer toutes les craintes, ranimer toutes les espérances, effacer toutes les haines, réconcilier en un mot tous les esprits, le Roi, dirigeant par sa haute sagesse tous les Ministres qu'il honore de sa confiance, joignait aux soins de cette administration suprême qui n'appartient qu'à lui, la sage préparation des Lois, qu'il doit rendre conjointement avec vous, méditait toutes celles que sa

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tendre sollicitude pour le bonheur de la France lui ferait juger convenable de vous proposer.

Deux mois nous restaient pour cet important travail, et voilà qu'il est inopinément interrompu : la tranquillité publique est toutà-coup menacée par l'apparition subite dans le Royaume, de l'éternel Ennemi de la paix et du repos de l'Europe. Celui qui, pour la bouleverser, prodigua tant de sang et de trésors, dont la soif insatiable de pouvoir sacrifia tant de millions d'hommes à l'édifice monstrueux de son éphémère puissance, Buonaparte, a quitte P'Ile que l'indulgence Européenne lui avait concédée pour asyle; débarqué sur nos Côtes, il ose, avec quelques centaines d'hommes égares, tenter encore une fois d'asservir ce beau Royaume.

Qu'il n'espère pas détourner du sentier de l'honneur et du devoir, ces valeureuses phalanges qui ont donné tant de preuves d'attachement et de fidélité! N'a-t-il pas échoué dès ses premiers pas, dans ses premières tentatives de séduction? Le brave Officier qui commande au Fort d'Antibes n'a répondu à ses sommations qu'en arrêtant ses Emissaires. Pendant qu'il continue sa route à travers les montagnes, évitant les Villes et les grandes Communes, cherchant partout des Traîtres, et ne rencontrant que des Français fidèles, nos Gouverneurs et nos Généraux ne répondent à ses perfides insinuations, qu'en préparant contre lui tous les moyens d'attaque. La population entière est prête à se lever contre l'odieux Oppresseur de sa liberté; elle a pu comparer le Gouvernement paternel qui lui est rendu avec le joug de fer sous lequel elle a gémi trop longtems. Le Peuple Français a été témoin des tendres sollicitudes du Roi pour son bonheur, il a reçu avec reconnaissance la Charte Constitutionnelle que la sagesse de ce Prince lui a donnée; il a vu avec quelle fidélité le Gouvernement en maintenait les principes, en faisait respecter les maximes. que la liberté des per sonnes, le respect dû aux propriétés, l'indépendance des opinions, n'étaient plus de vains noms; que notre bon Roi aimait à récompenser tous les genres de mérite, tous les genres de services rendus à la Patrie; qu'il aimait à s'entourer de tous les braves qui ont bien servi l'Etat; que c'était à ses premiers Capitaines qu'il aimait à confier la garde même de sa personne.

C'est au moment où la France, si longtems comprimée par la terreur, si longtems déchirée par les haines et les passions, commence enfin à renaître au bonheur; c'est au moment où le concert le plus intime entre son Roi et ses Représentans, lui promet de nouveaux moyens de gloire et de prospérité, qu'un Etranger qu'elle a rejete vient lui présenter de nouveaux fers et préparer des supplices et des proscriptions à tous les déserteurs de sa cause.

Ce Peuple, qui a reçu le Souverain légitime avec tant de transports, qui lui a procuré de si douces jouissances par ces nombreux témoi guages d'amour, ne balancera pas, sans doute, entre l'Héritier cheri de

60 Rois, et l'audacieux Corse, dont l'odieuse usurpation lui a coûté tant de sang et de larmes.

Le Roi, Messieurs, Chef Suprême de l'Etat, investi par la Constitution du droit et du devoir de repousser par la force toutes les attaques dirigées contre son autorité, de pourvoir au besoiu, seul et par lui-même, à tout ce que peut exiger la sûreté du Royaume, devait prendre, et a déjà pris, toutes les mesures provisoires propres à déjouer les complots de l'Ennemi de la France. Les Princes de son sang sont partis sur-le-champ pour en faire justice; c'est dans la Chambre des Pairs, c'est parmi les plus illustres Maréchaux dont elle se compose, qu'ils ont choisi des Généraux glorieusement habitués à conduire nos Troupes à la victoire. Leurs soins vigilans auront bientôt détourné le fléau de la Guerre Civile, dont l'audace d'un seul homme menace en vain le Royaume. La sécurité personnelle du Roi est entière au milieu de ses bons Parisiens, si dévoués à son service; il n'a pas besoin d'autre garde que celle de leur amour et de leur fidélité.

Mais dans une circonstance qui peut exiger l'emploi de moyens extraordinaires, toujours légitimes quand c'est le salut de l'Etat qui les commande, Sa Majesté se plait à s'entourer des Pairs et des Députés fidèles qui ont déjà concouru avec tant de courage et de zèle au grand œuvre de la restauration. C'est à leur fidélité qu'elle veut confier, c'est à leur sagesse qu'elle veut soumettre toutes les mesures que prescrivent l'intérêt et la sûreté de l'Etat. Elle m'a chargé de vous communiquer l'Ordonnance qu'elle a rendue, et celles qui pourront la suivre; de mettre journellement sous vos yeux tous les renseignemens nouveaux qu'elle pourra recevoir; de lui transmettre toutes les vues qu'un patriotisme éclairé pourra vous suggérer pour le maintien ou le rétablissement de l'ordre et de la tranquillité publique. Vous remplirez, Messieurs, vos hautes destinées; premiers soutiens de cette Monarchie tempérée qui fit pendant tant de siècles le bonheur de nos Pères; premiers gardiens de cette sage Constitution, qui l'assure, vous défendrez de tout votre pouvoir le Roi désiré, que vous auriez choisi si le Ciel ne vous l'avait pas donné. C'est la pierre fondamentale de cet édifice respectable que la Providence a relevé, et vous en êtes les premières colonnes.

Le Trône de St.-Louis et du bon Henri est inébranlable, puisque c'est toujours la justice et la vertu qui l'occupent. Pourrait-on concevoir des doutes sur sa permanente solidité, quand elle est garantie par l'amour de tous les Français, par cette union touchante qui fait leur force, par cette ferme volonté du bien qui inspire toutes les pensées du Prince, par ce respect et cet attachement profond qui caractérisent les premiers Corps de l'Etat.

Je déclare que la Session de la Chambre des Pairs, interrompue par Ja Proclamation de Sa Majesté, du 31 Décembre dernier, est r'ouverte.

(5.)—DISCOURS du Président de la Chambre des Députés, à l'occasion de l'Ouverture de la Session Extraordinaire, à Paris, le 11 Mars, 1815.

MESSIEURS,

Vous deviez être réunis sous de meilleurs auspices, et les objets dont nous devions nous occuper, n'avaient rien que de consolant. Votre première pensée devait se porter sur une Loi destinée à remplacer même pour la Session de 1815, ceux de nos Collègues que la mort nous a enlevés. Par là vous auriez eu l'espoir de voir siéger auprès de vous d'illustres Amis de la France et de la liberté, respectés dans toute l'Europe.

On préparait sur les réélections une proposition qui, sans cesser de regarder la propriété foncière comme la condition principale de la représentation, admettait, comme Représentans nécessaires, les Députés nommés par les Universités et le Commerce.

On travaillait sans relâche à ces réglemens qui promettaient sans danger à l'impatience, toute la liberté de la Presse, dont l'histoire dira que nous jouissions déjà beaucoup.

Pour se conformer aux intentions manifestées par les Représentans, les Ministres s'occupaient sans relâche, afin de mettre sous vos yeux tous les Comptes et tous les Etats propres à vous éclairer sur le meilleur systême de Finances qui convient à la France.

L'Administration des Douanes achevait de travailler à un Tarif, dans lequel se combinaient sagement les intérêts de l'industrie, du commerce et des Consommateurs. Tout était disposé pour encourager notre navigation et notre commerce renaissans.

Nous avions l'espérance, si chère au cœur de Sa Majesté, que les Impôts Indirects, relatifs aux boissons surtout, dont elle n'avait consenti à grever le Peuple que pour payer les dettes de l'Etat envers l'Armée, allaient être adoucis et coordonnés aux mœurs Françaises.

Pourquoi faut-il que le Génie du Mal soit venu tout-à-coup interrompre ces travaux et ces espérances!

Quoiqu'il arrive, Messieurs, continuons nos travaux, votre attention va sans doute se porter d'abord sur les circonstances graves qui ont causé votre convocation extraordinaire; et comme dans l'intervalle du tems qu'elles vous laisseront, il est dans votre pensée de suivre les travaux commencés, je vais vous rappeler les principaux objets qui vous restaient à terminer.

Vous vous proposiez d'adopter quelques changemens à votre Réglement, surtout en ce qui concerne le droit de Pétition, que vous vouliez consacrer de nouveau et consolider, en écartant les abus par lesquels on cherchait à rendre un si beau droit ridicule.

Vous regrettiez, en vous séparant, de n'avoir pu changer en résolution, cette proposition qui devait maintenir à jamais la Légion d'Honneur que vous vouliez doter irrévocablement.

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