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entretien et leur réparation. Il demandait enfin que la Belgique payât annuellement, jusqu'à la conclusion d'un traité définitif avec la Hollande, la somme de 8,400,000 florins pour sa part des intérêts de la dette commune de l'ancien royaume des Pays-Bas. Mais cette charge considérable avait été assignée à la Belgique, dans le traité du 15 novembre 1831, comme partie d'un arrangement général et final, par lequel différens avantages commerciaux devaient lui être assurés, en même temps que le roi grand-duc accéderait formellement à la délimitation territoriale et reconnaîtrait le souverain du nouveau royaume. Il était donc évidemment impossible que la Belgique prît sur elle le paiement d'une portion quelconque de cette charge annuelle antérieurement à la signature d'un traité définitif.

Inadmissible par les raisons ci-dessus mentionnées, la stipulation en question ne l'était pas moins, sous un autre rapport. Pourquoi, en effet, prévoir dans une convention préliminaire, des paiemens annuels dont le premier terme ne serait dû qu'en juin ou juillet prochain, lorsque longtemps avant cette époque, un traité définitif pourrait être signé, si le gouvernement hollandais avait un désir réel de terminer la négociation? On ne pouvait voir dans une pareille proposition que le désir de s'assurer, par une convention préliminaire, des avantages qui missent ce gouvernement en position d'empêcher ou de reculer indéfiniment la conclusion d'un traité définitif.

D'un autre côté, le contre-projet avait omis les deux articles concernant la levée de l'embargo et la réduction sur le pied de paix des armées belge et hollandaise. Le cabinet de La Haye proposait que ces deux points fussent établis par un échange de notes, au lieu d'être l'objet d'une stipulation formelle. Il entendait par là que l'embargo fût immédiatement levé, d'après ce que les deux plénipotentiaires avaient appris par les expressions d'une note du ministre des affaires étrangères de Hollande, et ils avaient conclu des explications Ann, hist. pour 1833.

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verbales de M. le baron Van Zuylen, que son gouvernement voulait faire dépendre la réduction de son armée au pied de paix, d'un désarmement général en Europe, et non pas seu lement d'un désarmement simultané en Belgique.

Le rejct pur et simple du projet des plénipotentiaires anglais et français et la nature du contre-projet hollandais les ayant portés à craindre qu'ils ne dussent renoncer à tout espoir de signer une convention préliminaire, ils proposèrent à M. le baron Van Zuylen de discuter avec lui les conditions d'un arrangement définitif. Mais il objecta qu'il n'avait jamais eu le pouvoir de traiter ou de signer de cette manière, autrement qu'avec les plénipotentiaires des cinq puissances réunis en conférence.

Forcés de revenir au plan d'une convention préliminaire pour laquelle seule M. le baron Van Zuylen annonçait qu'il avait des pouvoirs, les deux plénipotentiaires lui présentèrent un projet qui, outre les articles déjà proposés à La Haye le 2 janvier, stipulait que la neutralité de la Belgique, dans les limites que lui assigne le traité du 15 novembre, serait reconnue par le gouvernement hollandais, et un armistice formel arrêté entre les deux parties. Ces stipulations qu'ils avaient cru convenable d'insérer dans le projet pour prévenir toute possibilité de reprise éventuelle d'hostilités, M. le baron Van Zuylen déclara qu'il ne pouvait les accepter. En même temps, ils lui avaient remis le projet d'un plan qui aurait combiné l'avantage d'un arrangement définitif avec la forme d'une convention préliminaire, parce qu'on aurait compris dans un article séparé et additionnel, les articles de ces arrangemens, tels qu'ils auraient été consentis par les parties intéressées. Par ce moyen, les conditions de paix entre la Hollande et la Belgique auraient été finalement établies, quoiqu'elles eussent pu ne pas être immédiatement revêtues de la forme précise d'un traité définitif. Mais M. lé baron Van Zuylen allégua encore un défaut de pouvoirs pour discuter ou signer une pareille convention.

Jusqu'ici les plénipotentiaires français et anglais avaient basé leurs propositions sur l'évacuation de part et d'autre des territoires respectifs. Ils résolurent alors de faire une nouvelle tentative'd'accommodement préliminaire, en laissant la possession territoriale des deux parties dans son état actuel. Ainsi, Lillo et Liefkensoeck resteraient provisoirement à lá Hollande, pendant que Venloo, le Limbourg hollandais et le Luxembourg allemand continueraient à être occupés par les Belges; en conséquence, les stipulations concernant les routes du Limbourg et l'amnistie dans les districts évacués, étaient réservées pour le traité définitif. L'établissement d'un armistice formel entre les deux pays, et la reconnaissance de la neutralité de la Belgique par la Hollande, paraissaient, dans ce plan, des sûretés suffisantes pour la paix, sans stipuler spécialement la réduction de l'une et l'autre armées. On réclamait comme indispensable l'ouverture immédiate de la Meuse et le maintien de la libre navigation de l'Escaut, telle qu'elle existait au mois de novembre dernier. Enfin, la France et l'Angleterre offraient de lever l'embargo et de renvoyer dans leur pays les troupes qui composaient la garnison de la citadelle d'Anvers de plus, les trois parties contractantes devaient s'engager à s'occuper sans délai de la solution définitive des affaires de la Hollande et de la Belgique.

Par une note du 5 février le plénipotentiaire hollandais, en rejetant ce dernier plan, présenta un autre projet de convention qui fut à son tour repoussé par les plénipotentiaires français et anglais. Il demandait, en fait, que l'embargo fût levé, et que les troupes hollandaises prisonnières en France rentrassent dans leur pays, tandis que la seule chose que le gouvernement hollandais accordât de son côté, c'était de mettre sur la navigation de l'Escaut des droits qui' existaient, disait-il, en 1814, et de soumettre les bâtimens naviguant sur ce fleuve à des visites et à des recherches dont ils avaient été exemptés durant les deux dernières années,

Les plénipotentiaires anglais et français déclarèrent, dans leur note du 14 février, qu'ils étaient fortement fondés à croire qu'aucun droit n'avait été légalement perçu, ni aucune visite de bâtiment légalement faite en 1814, avant l'union de la Belgique et de la Hollande. Ils ne pouvaient voir une disposition bien pacifique de la part du gouvernement hollandais, ni un désir bien franc d'en finir sur les conditions de la séparation, dans le refus exprimé par son plénipotentiaire d'en venir à la discussion d'un traité définitif au sujet de l'Escaut, et dans l'intention qu'il montrait de mettre en avant des prétentions qui reposaient sur des faits contestés. Ils ajoutaient qu'ils avaient maintenant épuisé tous les moyens d'amener M. le baron Van Zuylen à tomber d'accord pour aucune convention, soit préliminaire, soit définitive; et ils rejetaient sur lui, ainsi que sur le gouvernement par les instructions duquel il était guidé, la responsabilité de toutes les conséquences qui pourraient sortir de l'insuccès des efforts sincères et persévérans de la France et de l'Angleterre, dans le but d'effectuer un arrangement pacifique.

Le cabinet de La Haye ne répondit pas directement à cette note qui accusait d'une manière si nette les lenteurs et les tergiversations de sa diplomatie; mais dans la séance des États-généraux du 1er mars, le ministre des affaires étrangères, après avoir parcouru la série des négociations depuis le 18 décembre dernier jusqu'à la note du 14 février, ajouta que le gouvernement hollandais avait pensé devoir considérer cette note comme d'une nature historique, sans être destinée à influer sur la marche des négociations. Toutefois il avait été fait une réponse telle que cette note paraissait la réclamer de la part de ce gouvernement, dans la forme d'un mémoire remis, le 26 février, par ce ministre aux envoyés de la France et de l'Angleterre, et communiqué le même jour aux représentans des cours d'Autriche, de Prusse et de Russie.

Cette réponse est une justification naturellement partiale de la conduite de la Hollande, en même temps qu'une récri

mination contre celle de la France et de l'Angleterre dont on n'avait pas accepté les dernières popositions, parce que la Belgique, après la signature de la convention qui lui eût assuré à peu près tout ce qu'elle désirait, sans aucune charge, n'aurait presque plus eu de motif de conclure un accommodement définitif. Quant à la levée de l'embargo, le roi de Hollande attachait trop de prix, disait encore le mémoire, aux relations amicales avec la France et l'Angleterre pour que S. M. n'éprouvât pas le désir qu'il ne demeurât aucune trace de cet acte dans un des articles de la convention. Le plénipotentiaire hollandais en déclarant qu'il ne pouvait signer un traité définitif qu'avec les plénipotentiaires des cinq cours s'était conformé à ses instructions et aux circonstances actuelles de l'Europe. D'après le troisième projet de convention présenté par les plénipotentiaires anglais et français, on devait s'occuper sans délai du traité définitif, et inviter les cours de Russie, d'Autriche et de Prusse, à y concourir. Cependant il devait être entendu, suivant l'article séparé, que le projet de traité définitif, joint audit article, serait déjà regardé comme décidément arrêté entre la France, l'Angleterre, la Belgique et le roi de Hollande. Ici le cabinet de La Haye ne savait pas comment on s'engageait à s'occuper sans délai d'un traité déjà définitivement arrêté, ni quelle part réelle serait laissée, dans la négociation, aux trois cours, lorsqu'on leur adresserait uniquement l'invitation de concourir à convertir en traité définitif un acte déjà obligatoire indépendamment de cette conversion; ni enfin quels seraient les effets du traité et ses résultats pour le système politique de l'Europe, si les trois cours ne se rendaient pas à l'invitation sus-mentionnée. En ce qui concernait le quatrième et dernier projet de convention préliminaire proposé au plénipotentiaire hollandais, il était évident qu'à moins d'admettre que des mesures illégales confèrent des droits qui n'existaient pas auparavant, et qu'aussi la révocation de ces mesures offre un équivalent pour des concessions réelles, tous les

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