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fonder sur une base solide le bonheur de la population, en garantissant son bien-être. »

L'assemblée en s'associant à ce souhait, dans son adresse, fit sentir que s'il n'était pas encore exaucé, la cause s'en trouvait dans l'interruption réitérée des travaux des États, qui avait considérablement ajourné toutes les affaires. Au reste, cette adresse n'offrait pas un caractère décidément hostile ; mais une preuve que les dernières élections n'avaient pas modifié au fond les élémens de l'assemblée, c'est la persévérance qu'elle mit à reprendre l'accusation commencée contre le ministre de l'intérieur.

Ce procès pour violation de la constitution doit faire époque dans les annales de l'Allemagne constitutionnelle, parce qu'il était jusqu'alors sans exemple: ses formes sont aussi un objet de comparaison curieux avec celles qui sont suivies en pareille circonstance dans d'autres états représentatifs. Il remontait à la session de 1832. L'assemblée s'étant vue au mois de juillet frappée de dissolution à l'improyiste, avait chargé le comité permanent des États de le poursuivre, de dresser l'exposé des griefs à imputer au ministre de l'intérieur et de traduire celui-ci devant le tribunal suprême d'appel. Le premier acte du nouveau comité nommé après la dissolution, au mois de mars de cette année, avait été d'adresser à ce même tribunal, en vertu de pleins pouvoirs émanés des États avant cette dissolution, une déclaration confirmative de la plainte déposée par le comité précédent, et d'y joindre une seconde plainte contre le

ministre.

Dans le désir d'éviter un arrêt que l'on considérait comme un antécédent dangereux pour le principe monarchique, des tentatives furent faites par le gouvernement auprès des États, afin de les déterminer à revenir sur l'accusation : ces tentatives n'eurent point de succès. Bientôt après furent levées les dernières difficultés de formes que le ministère avait suscitées contre la procédure suivie dans

le procès intenté à M. Hassenpflug. Le ministère contestait la validité de l'accusation, sur le motif que les instructions pour ladite accusation auraient dû être données au comité accusateur, en présence de la commission du gouvernement.M. Hassenpflug avait fait valoir la même exception devant le tribunal suprême. Il fallait donc que l'assemblée renouvelât, en présence de cette commission, son adhésion explicite aux divers chefs d'accusation. Comme le parti ministériel s'était de plus en plus renforcé dans les derniers temps, la décision pouvait dépendre de fort peu de voix; aussi l'assemblée était-elle au grand complet. En définitive, tous les chefs d'accusation obtinrent, chacun en particulier, la majorité des suffrages, et le procès fut repris.

Des faits reprochés au ministre, résultait la violation des articles 102, 105, 71, 91, 77 et 95 de la constitution, en ce que 1o plusieurs projets de loi adoptés par les États n'avaient pas été exécutés, quoique de comité permanent eût fait des démarches réitérées auprès du ministère afin que cette exécution eût lieu; 2° toute motion des États ou du comité permanent devant faire l'objet d'une résolution quelconque, et, si l'on ne juge pas à propos de s'en occuper, le ministère étant tenu d'en donner un avis motivé aux États ou à leur comité, il avait négligé de donner cet avis sur plusieurs objets, malgré les démarches du comité pour connaître sa réponse; 3° bien qu'il soit du devoir de l'administration de ne refuser sa sanction à un fonctionnaire nommé député, que pour des motifs légaux, qui ne peuvent être fondés que sur le service que les fonctions d'un tel député lui imposent, le ministère n'avait pas trouvé bon d'indiquer les cas dans lesquels il jugerait à propos d'accorder cette sanction, rendant ainsi le vote dépendant en quelque sorte de sa volonté; 4° toute entrave mise au séjour d'un député admis par l'assemblée et dès lors ayant droit de prendre part provisoirement aux délibrations, dans l'endroit où se tiennent ses séances, est une atteinte Ann. hist. pour 1833.

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portée à ce droit, comme cela avait eu lieu à l'égard du fesseur Jordan qui avait reçu ordre de s'éloigner de Cassel, le 28 janvier dernier; 5° contrairement à l'article de la constitution qui veut qu'aucune loi ne puisse être promulguée, suspendue, modifiée ou expliquée d'une manière authentique, sans la participation des États, le ministère avait fait cesser l'action de la loi sur les barrières pour y substituer un autre tarif que celui qui avait été arrêté avec la coopération des Étais.

La séance du 20 septembre, dans laquelle l'acte d'accusation basé sur ces griefs fut confirmé par un triple vote, doit être comptée parmi les plus remarquables de la session actuelle. Quant à ses résultats législatifs, ils ne paraissaient pas avoir répondu aux désirs de l'assemblée et du pays, à en juger par ce discours du député de Hanau, M. Koenig:

« Nous sommes ici depuis plus de quatre mois, qu'avons-nous fait, ou plutôt, en quoi avons-nous réussi? Quel nouveau développement notre constitution a-t-elle reçu dans cette session? Quelles lois ont été gagnées? quels avantages acquis au pays? Avouons-le, messieurs, ces questions sont bien faites pour nous inquiéter grandement. L'assemblée n'a pas manqué de faire des efforts pour assurer au peuple les avantages si long-temps désirés, que doit donner la constitution. Pour tout essayer, elle est entrée dans une voie que les précédentes assemblées n'avaient peut-être pas suivie d'une manière aussi décidée: elle est entrée dans la voie d'une condescendance extraordinaire. Combien n'a-t-on pas parlé, ces mois derniers, de confiance réciproque? combien de complimens la Chambre et le gouvernement ne se sont-ils pas renvoyés ? Cependant, qu'avons-nous gagné de cette manière? En un mot, quand cette session touche à son terme, les promesses de clòture de la session dernière ont-elles été remplies? Rien, presque rien n'a été accordé au pays; nous ne sommes ici, ce me semble, que pour remplir les caisses. Et quand nous retournerons chez nous, après cinq grands mois qui ont coûté si cher au pays, qu'apporterons-nous? «Soyez les bienvenus, nous dira-t-on, quel avantage nous apportez-vous? Vous étiez les représentans de nos intérêts, les interprètes de nos désirs et de nos besoins qu'avez-vous fait et de combien avez-vous perfectionné notre constitution? Perfectionné? répondrons-nous; la saison n'a pas été favorable, la constitution n'a pas prospéré. Mais au moins nous donnerez-vous quelques unes des lois les plus pressantes? Que devient la loi municipale? Vos frères les Israélites sont-ils émancipés? A-t-il été par hasard question d'une loi raisonnable sur la presse? - Des lois? les lois n'ont pas mieux prospéré, cette année, que la constitution. La plupart n'ont pas été abordées, d'autres sont tombées sans mûrir; quelques unes aussi sont venues à terme. - Eh quoi! très-chers représentans, vous ne nous apportez rien, absolument rien! Eh qu'avez-vous donc fait? Ce que nous avons fait, très-chers commettans? N'avons-nous pas accordé les appointemens des hauts fonctionnaires de l'état? Et, certes, nous ne venons pas

-

Oui,

les mains vides; non, nous apportons une taxe sur les revenus. » messieurs, de tels actes législatifs, de telles acquisitions législatives nous procureront bientôt cette excellente réputation des vieux et fidèles Etats qui étaient assez bons pour accorder, mais qu'on renvoyait chez eux dès qu'ils demandaient quelque chose. N'y a-t-il pas là de quoi attacher le peuple à la constitution? Et une nation ne doit-elle pas se trouver heureuse quand on la soulage de son argent sans l'accabler de lois? »

La loi en faveur des Israélites, que M. Koenig réclamait dans son discours, ne tarda pas à être sanctionnée par le prince co-régent. Cette loi, votée à l'unanimité par les états de Hesse-Cassel, accordait aux Israélites de ce pays l'émancipation civile et politique que les députés de Bade avaient eu la faiblesse de refuser à leurs concitoyens de la même religion.

Sans disconvenir qu'il restât encore beaucoup à faire, le ministre des finances, en venant prononcer la clôture de cette session, le 31 octobre, déclara cependant que bien des éhoses importantes pour le progrès du bien-être public avaient déjà été faites. Plusieurs lois, en partie discutées lors de la session précédente, en partie soumises à l'assemblée actuelle, étaient achevées. Si l'on n'avait pu s'entendre sur tous les points relatifs aux revenus et aux dépenses de l'état, si les moyens de pourvoir avec certitude aux besoins du service public n'étaient pas suffisamment assurés, du moins des mesures avaient été prises pour combler le déficit existant. Ainsi parla en substance le ministre des finances, et l'on peut conclure de ce discours, comparé au précédent, que l'opposition était moins satisfaite de la session que le gouvernement, malgré l'échec qu'il avait essuyé dans l'affaire du ministre de l'intérieur.

Quoique sous le poids d'une accusation grave et solennelle, ce ministre était loin d'avoir perdu la faveur du prince co-régent qui persistait à le maintenir dans son poste, et il se sentait soutenu par de hautes protections pour son dévoûment à la cause du principe monarchique en lutte avec la démocratie. Il usa largement de tous les délais que la loi lui accordait; aussi ce procès traîna-t-il en longueur à tel

point qu'il ne fut terminé qu'au mois de juin de l'année suivante. Il y eut d'abord égalité de voix pour et contre l'accusé, dans la séance extraordinaire où les juges du tribunal suprême firent connaître leur opinion. Le président déclara alors qu'il préférait attendre le rétablissement d'un des membres du tribunal qu'une maladie empêchait de siéger, plutôt que de décider l'affaire par son vote. Plus tard, ce juge se présenta et donna sa voix en faveur du ministre. La seconde partie de l'accusation portée contre lui, ayant été ensuite examinée, il fut également acquitté sur ce point.

Cependant l'assemblée des Etats avait été de nouveau convoquée pour le 8 novembre, conformément à l'art. 80 de la constitution, et la session s'était ouverte le 20, après quelques séances préliminaires; mais elle fut presque aussitôt prorogée jusqu'au mois de février 1834. Une seule circonstance mérite d'être notée dans les premières opérations de l'assemblée : le prince co-régent, en témoignant sa satisfaction des sentimens que contenait l'adresse, ajouta que si, par un des derniers passages, on avait voulu adopter la théorie qui séparerait sa personne de son ministère, une telle distinction ne pouvait et ne pourrait jamais exister.

SAXE ROYALE.

Quoique la Saxe eût une nouvelle constitution, depuis le mois de septembre 1832, les travaux préparatoires pour la réunion des Chambres avaient été si long-temps à se terminer dans ce pays, qui n'en est encore qu'à l'enfance de la vie politique; les choix des électeurs et ceux que des commissaires-électeurs avaient dû faire dans les ordres des propriétaires fonciers des villes et des campagnes, avaient rencontré tant de difficultés, que c'est seulement le 27 janvier de cette année, que la première ouverture constitutionnelle de l'assemblée des Etats a pu avoir lieu. Le roi se félicita en quelques mots d'être témoin, dans un âge avancé,

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