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Dans cet intervalle, des tentatives de négociations entre les deux frères furent faites sous la médiation plus ou moins directe de l'Espagne et de l'Angleterre. Entré dans un nouveau système de politique depuis la mort de Ferdinand VII, le gouvernement espagnol avait rompu toutes relations diplomatiques avec don Miguel, auquel il reprochait de donner un asile à don Carlos, de protéger ses intrigues, ses machinations; et il avait annoncé officiellement que la reine-régente s'occuperait, de concert avec le roi de la Grande-Bretagne, des moyens de mettre un terme aux calamités et à la désolation du Portugal. Mais cette démarche n'eut aucun succès, don Miguel ayant refusé de s'éloigner du pays, condition préalable des arrangemens qui paraissent lui avoir été proposés.

Cette détermination semblait indiquer que don Miguel nourrissait des espérances, avait encore des ressources qui l'autorisaient à compter sur le rétablissement de ses affaires. Il faut voir ce qui en était par le bilan des deux parties belligérantes. Six mois auparavant, don Miguel, maître de la capitale, obéi dans toute l'étendue du royaume, à la réserve d'une seule place, bloquait étroitement son rival dans Porto ; aujourd'hui, don Pedro occupait Lisbonne, Porto, plusieurs autres villes importantes, et bloquait à son tour don Miguel dans Santarem. Toutefois, envisagée sous le point de vue militaire seul, la question pouvait encore être regardée comme étant dans le domaine des conjectures et des accidens; mais sous le rapport moral et politique, on eût imaginé difficilement un résultat définitif qui aboutît à assurer le possession du trône à don Miguel. En effet, que voyait-on ? d'un côté quinze à vingt mille hommes que la fortune avait depuis long-temps abandonnés, des guérillas assez nombreuses sans doute, et les voeux du parti apostolique espagnol, qui était lui-même en décadence; de l'autre, don Pedro appuyé par la capitale et par la seconde ville du royaume, des troupes victorieuses dans toutes les rencon

tres, une flotte imposante, et la reconnaissance de la France, de l'Angleterre et de la Suède. Il est vrai que les deux partis paraissaient peu disposés à des mouvemens offensifs; en d'autres termes, les forces étaient partagées de manière à ce que chacun redoutât de risquer le sort de la campagne dans une action décisive. Dans de telles circonstances, le triomphe complet de l'un ou de l'autre n'était plus qu'une affaire de temps, et l'on ne pouvait douter que les délais ne fussent plus favorables à dona Maria qu'à don Miguel.

CHAPITRE X

GRANDE-BRETAGNE. Etat des partis. - Ouverture du premier parlement réformé. — Débats sur la présidence dans la Chambre des communes. · Discours du roi. Discussion de l'adresse. Modification du ré

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glement de la Chambre des communes. Admission d'un quaker sans serment. Bill de coërcition contre l'Irlande. -.Bill pour le changement des juridictions criminelles en Irlande. Bill relatif aux dimes irlandaises. - Budget. - Motions diverses sur les taxes. -Troubles à Londres. Motions sur la peine du fouet et sur la presse des matelots. Renouvellement de la Charte de la banque. Nouvelle Charte de la compagnie des Indes orientales. Abolition de l'esclavage des noirs. Motion sur les céréales.

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Motion sur le vote secret.

Corruption électorale. — Motion sur l'abrégement de la durée des parlemens. Motion sur les modifications à faire au bill de la réforme. Bill pour l'émancipation des Juifs. Bill sur les cours locales. Bill sur les bourgs d'Ecosse. Clôture de la session.

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Résumé.

Pour le parti qui l'avait conquise, la réforme parlementaire n'était qu'un moyen ; le but, c'était le redressement de tous ces griefs, l'extirpation de tous ces abus, l'abrogation de toutes ces lois dont l'Angleterre depuis si long-temps accusait le règne tout puissant et sans contrôle d'une aristocratie maîtresse des deux Chambres du parlement. La Chambre démocratique lui échappait enfin, et désormais il fallait s'attendre à de nombreux conflits entre ce pouvoir rival et celui des lords. Pour la première fois, l'aristocratie et les communes allaient se trouver en présence, avec toute leur force, toute leur indépendance, et montrer s'il était possible qu'elles vécusscnt en bonne intelligence, se faisant à chacune une part équitable d'influence et de richesse, ou si tôt ou tard, l'une ne devait pas s'effacer devant l'autre. La composition de la seconde Chambre était telle que le ministère pouvait compter sur son appui dans la plupart des circonstances.

Placé entre deux minorités, celle des radicaux et celle des conservateurs ou torys, il avait derrière lui une grande majorité à laquelle les premiers et les seconds manqueraient rarement de se réunir, suivant la couleur des mesures qu'il proposerait. Ces mesures pouvaient rester bien en-deçà de ce qu'attendaient et désiraient les partisans des innovations, ou dépasser de beaucoup les craintes des conservateurs ; dans tous les cas, le ministère était sûr de voir l'un des deux partis se rallier à lui, pour l'aider à surmonter la résistance de l'autre. Ce n'est pas toutefois, quelque haut que parlât dans le cœur des Anglais le bienfait de la réforme, qu'il pût se promettre une carrière exempte de difficultés et une condescendance inaltérable de la part de la Chambre des communes. Le ministère avait beaucoup à faire encore pour ne pas déchoir de sa popularité. Tant d'espérances de réformes ultérieures, d'améliorations, de changemens, avaient été excitées et entretenues dans la nation, que lui-même aurait reculé devant la tâche de les réaliser; et d'ailleurs la Chambre des pairs, avec sa majorité compacte et irrévocablement hostile, était toujours là pour y mettre obstacle. De cette situation respective des partis, du gouvernement et du pays, il résultait que l'intérêt et l'anxiété, au milieu desquels s'étaient écoulées les dernières sessions, subsistaient dans toute leur force à l'ouverture du premier parlement réformé.

Cette ouverture se fit le 29 janvier, par commission, car l'usage n'est pas en Angleterre que le roi adresse son discours au parlement, avant que les Chambres soient constituées. Les communes procédèrent immédiatement à l'élection de leur président (speaker). Depuis seize années M. Manners Sutton avait été chaque fois nommé à cette place, sans même avoir à la disputer à aucun autre candidat, et toujours, malgré ses opinions aristocratiques, il l'avait remplie avec une impartialité et une habileté reconnues de tous les partis. A la fin de la dernière session, il avait annoncé qu'il

abandonnait le fauteuil, pour ne plus l'occuper, et aussi tôt une pension annuelle de 4,000 liv. ster. lui avait été accordée par acte du parlement. Outre une pension considérable, celui qui a été président de la Chambre des communes pendant long-temps, obtient ordinairement la pairie; mais les torys comptaient déjà une majorité si förmidable dans la Chambre des lords, que le ministère ne pouvait songer à leur donner un nouvel allié dans la personne de M. Manners Sutton: Celui-ci ayant été renvoyé à la Chambre des communes par l'université de Cambridge, les ministres, pensant que sa longue expérience serait surtout utile dans une Chambre nouvelle, résolurent d'appuyer sa nomination à la présidence.

Cette nomination, toujours incontestée jusqu'alors, rencon tra cette fois des opposans qui, sans méconnaître les éminentes qualités que M. Sutton avait déployées dans ses fonctions, firent remarquer qu'ayant été un adversaire de la réforme, la Chambre, s'il était élu, aurait un président dont les opinions ne s'accordéraient pas avec les siennes, et qui ne pourrait pas avoir sa confiance. Le peuple verrait avec déplaisir que le seul emploi élevé qui soit à la discrétion de ses représentans, fût ainsi conféré à un homme qui n'avait pas embrassé sa causé. On reprochait d'ailleurs au candidat les nombreuses sinécures dont sa famille était en possession (MM. Hume et O'connell). D'un autre côté, on insistait sur l'expérience de M. Sutton, sur son talent pour affaires, sur sa profonde connaissance des usages et des règles du parlement, qui le rendaient plus que jamais nécessaire. Quant à la différence existant entre ses principes politiques et ceux de la majorité, cette circonstance était plutôt en sa faveur que contre lui, puisque, dans aucun temps, ses opinions ne l'avaient empêché de diriger les délibérations de la Chambre avec la plus grande impartialité (Lord Morpeth, sir F. Burdett, lord Ebrington, lord Althorp). Le débat s'engagea ensuite sur la question de savoir

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