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sance immédiate du libre usage des routes commerciales au travers du Limbourg, qui leur a été garanti par les cinq puissances comme une condition de l'arrangement par lequel la rive droite de la Meuse et la souveraineté entière de Maestricht étaient assurées à S. M. le roi des Pays-Bas, grand-duc de Luxembourg.

Ces dispositions une fois effectuées, une réduction sur le pied de paix des armées des deux pays paraissait bien calculée pour prévenir la reprise d'hostilités, que les cinq puissances ont tant de fois et si clairement déclaré être leur intention d'empêcher par tous les moyens possibles; et il semblait raisonnable d'espérer qu'une manifestation si prononcée d'intentions pacifiques des deux côtés, tendrait à adoucir cette irritation mutuelle que l'attitude menaçante d'armées stationnées presque en face l'une de l'autre devait inévitablement produire; et qu'on pourrait trouver par là de nouvelles facilités pour arranger le peu de questions qui étaient restées en litige.

Il est évident que les Belges ne pouvaient accepter aucun arrangement provisoire qui ne leur donnât pas la jouissance immédiate de la navigation de la Meuse, et qui ne leur assurât pas, jusqu'à la conclusion d'un traité définitif, la continuation de la navigation de l'Escaut, telle qu'ils en jouissaient depuis le mois de janvier 1831.

En retour de ces conditions, les gouvernemens de France et de la Grande-Bretagne offraient la cessation immédiate de l'embargo mis sur les vaisseaux hollandais, et le envoi des troupes hollandaises, maintenant détenues en France.

Ce fut avec un extrême regret que les soussignés apprirent, par la dépêche du baron Verstolk, datée du 9 janvier, et par le contre-projet qui y était joint, que les propositions ci-dessus mentionnées avaient été rejetées par le gouvernement néerlandais.

Le baron Verstolk n'a pas, à la

vérité, établi positivement que ces propositions fussent rejetées; mais on a dû conclure du contre-projet qui accompagnait sa dépêche, que ces propositions n'étaient point acceptées.

Ce contre-projet était inadmissible, pour ce qu'il contenait; et il présentait des objections déci sives, pour ce qu'il ne contenait pas.

Il demandait que le gouvernement néerlandais fùt autorisé à lever un droit de tonnage sur l'Escant, sans entrer dans aucune des obligations dépendantes de ce droit, telles que celles qui ont rapport au balisage et au pilotage sur cette rivière, et qui doivent être inséparablement liées à la perception du droit; et il demandait même que ce droit fût payé à Flessingue ou à Bathz; demande qui était sujette à de fortes objections, puisqu'elle entraînait des détentions et des retards pour les bâtimens naviguant sur l'Escaut.

Il demandait encore un droit de transit sur les routes au travers du Limbourg, quoique les cinq puissances alent garanti à la Belgique l'usage de ces routes, pour l'utilité du commerce, et sans autre droit qu'un péage pour leur réparation et leur entretien.

Il demandait enfin que les gouvernemens de France et de la Grande-Bretagne s'engageassent à ce que la Belgique payat annuellement, jusqu'à la conclusion d'un traité définitif avec la Hollande, la somme de 8,400,000 florins par paiemens semestriels, pour sa part des inférêts de la dette commune du cidevant royaume-uni des Pays-Bas,

Mais cette charge considérable annuelle a été assignée à la Belgique, par le traité du 15 novembre 1831, comme partie d'un arrangement général et final, par lequel différens avantages commerciaux devaient lui être assurés, et par lequel le roi gand-duc devait accéder formellement à la délimitation territoriale et reconnaitre le souverain de la Belgique.

Il est donc évidemment impossible que la Belgique prenne sur elle le paiement d'une partie queiconque de cette charge annuelle, avant qu'elle soit mise en jouissance de tous les avantages commerciaux qu'un traité définitif doit lui assurer, et avant que les limites territoriales et son souverain soient formellement reconnus par le roi grand-duc.

Mais si la stipulation en question était inadmissible pour les raisons ci-dessus mentionnées, elle ne l'était pas moins comme indiquant l'intention, de la part du gouvernement néerlandais, de remettre à une époque infiniment reculée la conclusion d'un traité définitif. Car, si ce gouvernement avait eu la moindre disposition à arriver à un prompt accord sur les deux ou trois points qui restaient encore à régler, pourquoi une convention préliminaire devait-elle prévoir des paiemens annuels à faire pendant la. négociation de ce traité, tandis même que le premier terme n'aurait été dû qu'en juin ou juillet prochain? Or, il n'est pas douteux que, long-temps avant cette époque, un traité définitif pourrait être signé, si le gouvernement née landais avait un désir rél de terminer la négociation. Une proposition telle que celle qu'il a faite, indique donc clairement, de la part de ce gouvernement, le désir de s'assurer, par une convention préliminaire, des avantages qui puissent le mettre en position d'empêcher, ou de retarder jusqu'à une époque indéfinie, la conclusion d'un traité définitif.

Mais, pendant que le contre-projet hollandais contenait ces stipulations inadmissibles, il omettait les deux articles par lesquels, d'une part, l'embargo devait être levé, et de l'autre les armées hollandaise et belge devaient être, à une époque fixée, mises sur le pied de paix.

Le gouvernement hollandais proposait que ces deux points fussent établis par un échange.de notes, au lieu d'être l'objet d'une stipula❤

tion formelle mais les soussignés ont appris, par les expressions employées dans la note de M. le baron Verstolk, que ce qu'il entendait par là était que l'embargo fût immédiatement levé, et sans attendre la ratification d'une convention ; et ils ont conclu des explications verbales de M. le baron de Zuylen, que le gouvernement néerlandais voulait faire dépendre la réduction de son armée au pied de paix, d'un désarmement général en Europe, et non pas seulement d'un désarmement simultané en Belgique, comme la France et l'Angleterre l'avaient proposé.

Le rejet pur et simple des propositions faites par la France et la Grande-Bretange, et la nature du contre-projet qui leur avait été substitué par le gouvernement néerlandais, ont porté les soussignés à craindre qu'ils ne dussent renoncer à tout espoir de signer une convention préliminaire.

Les soussignés ont dû proposer alors à M. de Zuylen de discuter avec eux les conditions d'un arrangement définitif; et c'est dans ce but qu'ils lui ont indiqué que, si les arrangemens au sujet de l'Escaut, et ceux relatifs au syndicat d'amortissement, pouvaient être réglés d'une manière satisfaisante, il ne resterait aucune difficulté réelle qui empêchât la Hollande de signer un traité définitif avec les cinq puissances et avec la Belgique.

Les soussignés étaient d'autant plus portés à supposer que M. le baron de Zuylen serait préparé et autorisé à ouvrir avec eux une telle négociation, que, le 9 novembre dernier, il avait présenté au comte Grey le projet d'un traité définitif, quoique la conférence, près de laquelle seule M. le baron de Zuylen était accrédité, eût été rompue à cette époque par la retraite des plénipotentiaires russes.

Les soussignés ont fait valoir cette proposition auprès de M. le baron de Zuylen, dans leurs deux premières entrevues avec lui; mais il a invariablement persisté à déclarer

qu'il n'avait jamais eu, à aucune époque de la négociation, le pouvoir de traiter ou signer autrement qu'a. vec les plénipotentiaires des cinq puissances réunis en conférence.

Les soussignés, n'ayant pas encore réussi dans leurs efforts à préparer les voies pour un arrangement définitif, ont été forcés de revenir au plan d'une convention préliminaire, pour laquelle seule M. le baron de Zuylen annonçait qu'il avait des pouvoirs, et lui ont présenté le projet annexé n° 1, qui, contenant les articles proposés à La Haye le 2 janvier, renfermait de plus des stipulations par lesquelles la neutralité de la Belgique devait être reconnue par le gouvernement néer. landais, et un armistice formel convenu entre les deux parties: stipulations que les soussignés ont jugé convenable d'insérer pour prévenir toute possibilité de reprises éventuelles d'hostilités (1).

M. le baron de Zuylen déclara alors qu'il ne pouvait accepter cette proposition.

En même temps que les soussignés remettaient à M. le baron de Zuylen le second projet d'une convention préliminaire, ils lui communiquaient aussi le projet no 2 d'un plan au moyen duquel, s'il avait été autorisé à discuter avec eux les questions qui restent encore à régler entre la Hollande et la Belgique, l'avantage d'un arrangement définitif aurait pu se combiner avec la forme d'une convention préliminaire, puisqu'on aurait inséré verbatim dans un article 6, séparé et additionnel, les articles d'un arrangement complet, tels qu'ils auraient pu être consentis par les parties intéressées. Par ce moyen, les conditions de paix entre la Hollande et la Belgique auraient été finalement établics, quoique ces conditions eussent pu ne pas être immédiatement revêtues de la forme précise d'un traité définitif.

Mais M. le baron de Zuylen allégua encore son manque de pou

I foyez plus haut.

voirs pour faire, discuter ou signer une telle convention.

Les conventions préliminaires que les soussignés avaient jusqu'ici proposées, étaient basées sur l'évacuation réciproque des territoires, de part et d'autre.

Les soussignés résolurent alors de faire une autre tentative d'arrangement, en proposant une nouvelle convention préliminaire, qui aurait pour principe de laisser les deux parties, jusqu'à la conclusion d'un traité définitif, en possession des territoires qu'elles occupaient respectivement en ce moment.

En conséquence, les soussignés présentèrent à M. le baron de Zuylen le projet no 3.

Par ce plan Lillo et Liefkenshoeck devaient rester provisoirement entre les mains des Hollandais, pendant que Venloo, le Limbourg hollandais et le Luxembourg allemand devaient continuer à être oceupés par les Belges; et, comme l'évacuation rẻciproque était retardée, les stipulations pour les routes du Limbourg, et pour une amnistie dans les districts évacués, étaient réservées pour le traité définitif.

mel entre les deux parties, et la reconnaissance de la neutralité de proposés comme des sûretés suffila Belgique par la Hollande, étaient santes pour la paix, sans aucune réductions d'armée de part et d'auautre stipulation spéciale, pour les sable l'ouverture immédiate de la tre. On réclamait comme indispenvigation de l'Escaut, telle qu'elle Meuse, et le maintien de la libre naexistait au mois de novembre dernier. La France et la Grande-Bretagne offraient de lever l'embargo, daises dans leur pays; et, en outre, et de renvoyer les troupes hollanvaient s'engager à s'occuper immédiales trois parties contractantes detement d'un arrangement définitif entre la Hollande et la Belgique.

L'établissement d'un armistice for

Les soussignés pouvaient espérer avec confiance que M. le baron de Zuylen se trouverait libre d'accéder à une proposition si loyale, calculée

pour offrir un soulagement immédiat à la Hollande et à la Belgique, et qui, renfermant de telles sûretés contre une reprise d'hostilités, conduirait si directement à un arrangement définitif.

Leur attente a donc été grandement trompée, lorsque, le 5 du courant, M. le baron de Zuylen leur a présenté la note de ce jour,et le projet d'une convention qui y était annexé.

Les soussignés ne peuvent hésiter un instant à lui déclarer que son projet était entièrement inadmissible.

Il contenait, en fait, la demande que l'embargo soit levé, et que les troupes hollandaises actuellement en France rentrent dans leur pays, pendant que la seule chose que le gouvernement néerlandais offre de faire de son côté, c'est de mettre sur la navigation de l'Escaut des droits qui n'ont pas été levés pendant les deux dernières années, et de soumettre les bâtimens naviguant sur cette rivière à des visites et à des recherches dont ils ont été exemptés durant cette période.

Les soussignés ont de fortes raisons de croire qu'aucuns droits n'ont été légalement levés, ni aucune visite de bâtimens légalement faite sur l'Escaut dans l'année 1814, avant l'union de la Belgique et de la Hollande; et ils ne saurient voir une disposition bien pacifique, de la part du gouvernement néerlandais, ni un désir bien sincère d'arriver à un arrangement définitif avec la Belgique, dans le refus fait que ce gouvernement, par son plénipotentiaire, d'entrer dans la discussion d'un arrangement final au sujet de l'Escaut, et dans l'intention qu'il montre, en même temps, de mettre en avant des prétentions qui reposent sur des faits contestés, et qui sont applicables seulement à cet état de choses intermédiaire qu'un traité définitif pourrait terminer si promp

tement.

Les soussignes ont maintenant épuisé tous les moyens d'amener M. le baron de Zuylen à tomber d'accord sur un arrangement, soit préliminaire, soit définitif; et, en

l'invitant, comme ils l'ont fait, à transmettre à La Haye, pour l'information de son gouvernement, cette note et les documens qui l'accompagnent; ils sentent qu'ils se doivent à eux-mêmes, et aux gouvernemens pour lesquels ils agissent, de déclarer qu'ils rejettent sur M. le plénipotentiaire hollandais, et sur le gouvernement par les instructions duquel il est guide, la responsabilité de toutes les conséquences qui peuvent sortir de la non-réussite des efforts sincères et persévérans des soussignés pour effectuer un arrangement pacifique. Les soussignés, etc.

Signés TALLEɣrand,
PALMERSTON.

MEMOIRE, contenant la réponse à la notede LL. EE. les plénipotentiaires de France et de la GrandeBretagne, du 14 février 1833, au plénipotentiaire des Pays-Bas à Londres.

Le 2 janvier 1833, les chargés d'affaires de France et de la Grande. Bretagne à La Haye, adresserent au ministre des affaires étrangères des Pays-Bas une note accompagnée d'un projet de convention entre les trois puissances. Cette convention stipulait l'évacuation des territoires respectifs, la libre navigation de la Meuse et de ses embranchemens sur le pied de la convention de Mayence; celle de PEscaut, comme elle l'avait été depuis le 20 janvier 1831; les communications par le Limbourg, sans droit de transit; les désarmemens de la Hollande et de la Belgique, et la levée de l'embargo.

Le gouvernement néerlandais, qui, depuis le commencement des négociations résultées de l'insurrection de la Belgique, avait, dans le but de parvenir à un accommodement, déjà jusqu'à quatre reprises, et toujours à la veille de la conclusion, suivi les puissances sur le nouveau terrain qu'elles avaient chaque fois paru préférer, ne se re

fusa pas à entrer dans la cinquième voie qu'on venait lui proposer, et, tout en regrettant l'ajournement, fût-il même momentané, de la négociation définitive, il s'empressa d'offrir, par la note du 9 janvier, un projet modifié de convention préliminaire qu'il se déclara prêt à conclure avec la France et la GrandeBretagne, ainsi qu'avec l'Autriche, la Prusse et la Russie. Dans ce projet, il chercha à rétablir l'équilibre entre les deux parties, en ajoutant certains arrangemens réclamés par les droits de la Hollande; car, s'il était évident pour la France et la Grande-Bretagne, que les Belges ne pouvaient accepter aucun arrangement provisoire qui ne leur donnât pas la jouissance immédiate de la navigation de la Meuse et celle de l'Escaut, il ne l'était pas moins pour la Hollande que cette jouissance ne pouvait avoir lieu à son détriment.

Sans ces modifications, la Belgique, après la signature de la convention, qui lui eût assuré à peu près tout ce qu'elle désirait, sans aucune charge, n'eût presque plus eu de motif de conclure un arrangement définitif. Elles concernaient la levée d'un droit unique sur l'Escaut, sans visite ni formalité de douane, ainsi que la France et la Grande-Bretagne l'avaient elles-mêmes désiré ; un droit de transit dans le Limbourg, n'excédant jamais un pour cent, mais demeurant, pour la très-grande majorité des articles de commerce, infiniment au dessous de ce maximum; et le paiement par la Belgique, à partir du 1er janvier 1833, de sa quote-part dans le service des rentes des dettes publiques, à raison d'une somme annuelle de fls. 8,400,000.

Le plénipotentiaire des Pays-Bas ne se serait pas refusé d'entrer dans les détails du balisage et du pilotage de l'Escaut, bien qu'ils eussent paru moins propres à être compris dans une convention préliminaire.

A l'égard du droit de transit à travers le Limbourg, en reconnaissant que les cinq puissances eussent en vue de n'assujettir les communications par le Limbourg qu'à des

droits de barrière modérés, elles avaient garanti à la Hollande la perception des droits sur l'Escaut. Dès-lors le cabinet néerlandais ne saurait admettre l'objection de la garantie des puissances relativement au transit à travers le Limbourg, tandis que le roi se montre disposé à transiger sur la garantie des puissances, en ce qui concerne l'application des tarifs de Mayence à l'Escaut.

La stipulation que la Belgique paierait sa quote-part de la dette publique, à partir du 1er janvier 1833, était nécessaire, 1o pour mettre la Hollande et la Belgique en état de régler à temps, c'est-à-dire bien avant l'échéance du 1er juillet, leurs recettes et leurs dépenses; 2° à cause des retards que pourrait éprouver le traité définitif, par le nombre des parties intéressées, par l'éloigne. ment de quelques unes d'entre elles, et par le temps qu'exigerait l'échange des ratifications; mais spécialement, en troisième lieu, afin d'engager la Belgique à ne pas se soustraire à l'arrangement final.

Il était impossible à la pénétration la plus profonde de prévoir que cette stipulation et l'ajournement de l'arriéré considérable auquel consentait la Hollande, seraient représentés comme indiquant clairement le désir d'empêcher ou de retarder la conclusion d'un traité définitif.

Lorsque la conférence de Londres évalua cette quote-part à 8,400,000 fl., elle ne l'attacha pas exclusivement à d'autres clauses, témoin la teneur expresse du 48e protocole, avec le Memorandum y annexé. D'après le même protocole, elle n'en mit que la somme proportionnellement minime de fl. 600,000 en balance des avantages commerciaux, surcharge, comme on l'appela, dérivant également des pertes essuyées par la Hollande.

Les derniers mois de l'année 1832 virent introduire, sous le nom de mesures coërcitives, l'exercice d'une police dans les rapports des nations entre elles, et mettre en pratique envers la Hollande un système d'hos

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