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Mais le propriétaire du terrain asservi aurait le droit, aussitôt après l'instance au possessoire, d'actionner au pétitoire le possesseur des vues pour l'obliger à les boucher, à défaut par celui-ci de justifier d'un titre ou d'une possession de trente ans.

Le juge de pétitoire apprécie seul la possession trentenaire et les titres de propriété, en un mot tout ce qui constitue le fond du droit. Le juge du possessoire ne vérifie que la possession annale et le caractère de la servitude ou du droit réel possédé.

Construction nuisant à une servitude de vues droites.

Quiconque possède d'une manière définitive des vues droites sur le terrain d'autrui, peut s'opposer à ce que le propriétaire du terrain, joignant le mur où sont les ouvertures, établisse contre ce mur des constructions sans laisser la distance prescrite par l'article 678 du Code Napoléon (2 mètres) et cela, soit que les vues droites aient été acquises par titre, soit qu'elles l'aient été par prescription, en vertu de l'article 690, les effets de la servitude étant les mêmes dans les deux cas.

Le propriétaire joignant le mur dans lequel seraient pratiquées ces ouvertures, pourrait sans doute acquérir la mitoyenneté de ce mur, mais non y adosser des ouvrages nuisant à l'exercice de la servitude de vues droites, définitivement établies.

Destination de père de famille.

Toutefois la Cour de cassation a décidé qu'en l'absence d'un titre écrit, la destination de père de famille établissant une servitude de vues, ne peut autoriser le juge à prohiber toute construction sur le fonds servant, même aux distances déterminées par les articles 678 et 679.

Jours de souffrance.

Quant aux jours de souffrance, ils ne peuvent être pratiqués que dans les murs non mitoyens (art. 676). Le voisin qui acquiert la mitoyenneté d'une mur doit pouvoir les faire supprimer malgré leur ancienneté. La possession légale de ces jours est subordonnée à des conditions qui la restreignent (676 et 677) et lui ôtent le caractère d'une possession servant à prescrire (2229). Conséquemment ces jours ne peuvent pas fonder une servitude prescriptible.

Vues de prospect.

S'il y avait titre qui donnât, non des jours de souffrance ou simple lumière, non des vues droites ou fenêtres d'aspect, mais des vues libres que les anciennes coutumes appellent vues de prospect, le propriétaire du terrain sur lequel elles porteraient

ne pourrait faire aucune construction ou plantation qui limitât les vues acquises. Tel est l'effet de la servitude altius non tollendi.

Vues droites sur un passage public.

Des auteurs pensent que l'on peut établir des vues sur un passage public, lors même qu'il n'y aurait pas la distance légale entre le mur où elles seraient pratiquées et le sol du voisin.

Les circonstances et la position des lieux déterminent la décision.

La Cour de cassation a jugé, le 1er mars 1848, que ces vues pouvaient subsister.

Porte ouverte dans un mur joignant le fonds voisin, Une porte ouverte dans un mur ne doit pas être complétement assimilée à une vue, en sorte que le propriétaire pratiquant une porte dans son mur, pour se rendre sur un espace de terrain existant entre le mur et le fonds du voisin, n'est pas obligé d'observer la distance prescrite par l'article 678, si l'espace de terrain au-delà du mur et le joignant appartient au propriétaire de ce mur et est situé à la campagne où la clôture n'est pas obligatoire. On peut n'avoir pas de mur de clôture à l'extrémité de son terrain, et cependant marcher jusqu'à la limite de l'héritage du voisin et en voir l'intérieur s'il n'est pas clos.

Servitude sur un emplacement commun entre plusieurs.

S'il s'agit d'un emplacement de terrain commun entre plusieurs propriétaires et destiné à rester indivis, tel qu'une cour, une aire, etc., évidemment l'un des copropriétaires ne pourrait pas, sans le consentement des autres, élever une construction quelconque, anticiper sur le sol commun, y établir ou augmenter des servitudes de vues ou autres.

Un sol qui n'a pas une destination publique, telle que celle d'un chemin, mais une destination privée, quoique à l'usage de plusieurs, ne peut être grevé de servitudes par un des copropriétaires qu'avec le consentement des autres, à moins de nécessité absolue.

En matière de création ou d'aggravation de servitude, peu importe qu'elle ne paraisse pas causer un préjudice matériel à l'immeuble asservi. Elle n'en constitue pas moins une atteinte au droit de propriété.

Le droit romain, quoique plus favorable aux servitudes que le nôtre, ne veut pas qu'un propriétaire fasse des ouvrages ou établisse des servitudes, malgré l'autre, à qui il donne le droit d'arrêter les œuvres commencées (Digeste, 1. VIII, tit. II).

Il est interdit de bâtir sur un lieu commun malgré le copropriétaire: invicto socioni jure communi, non habeas jus ædificandi. Il dispose que l'on est

toujours censé faire un nouvel œuvre, lorsque, en bâtissant ou démolissant, l'on change l'état des lieux : opus novum facere videtur qui ædificando pristinam faciem operis mutat (Digeste, 1. XXXIX, tit. 1).

Il a été jugé que, dans l'intérêt de l'agriculture, l'on ne devait pas prohiber l'usage d'un passage commun pour d'autres fonds que ceux en faveur desquels il a été primitivement établi, si le voisin n'en éprouve aucun dommage.

§ V. POSSESSOIRE DES SERVITUDES.

Les servitudes discontinues ne peuvent s'acquérir que par titre; la possession même immémoriale ne suffit pas pour les établir (691). Elles s'acquéraient anciennement par prescription, en quelques provin– ces, ainsi que nous l'avons rappelé. Celles acquises de cette manière avant le Code Napoléon ont été maintenues par l'article 691, et entraînent des possessions auxquelles incomberait l'action possessoire.

Ces servitudes ont besoin du fait actuel de l'homme pour être exercées, tels sont les droits de passage, puisage, pacage et autres semblables (688).

Droits d'usage dans les bois et forêts.

Ce qui comprend les droits d'usage dans les bois

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