Images de page
PDF
ePub

ceau, Championet et Bernadotte, qui étaient 1796. restées dans le Hunsdruch, pour continuer le blocus de Mayence; ces trois divisions formaient quarante mille hommes.

L'armée de Moreau s'étendait le long du fleuve, depuis Huningue jusque vis-à-vis de Manheim. Le feld-maréchal de Wurmser s'occupait à fortifier cette place, que les Français avaient prise l'année précédente, et qu'ils paraissaient vouloir attaquer de nou

veau.

Les trois armées françaises du Nord, de Sambre et Meuse et de Rhin et Moselle ne formaient qu'une seule chaîne sur les bords du Rhin; et d'après le plan de campagne adopté, elles devaient agir de concert à la droite du fleuve. Cette disposition avait déterminé le général Beurnonville à augmenter les fortifications de Dusseldorf place regardée, avec raison, par les Français, comme la clef de l'Allemagne inférieure. Moreau devait concourir au plan général, en passant le Rhin dans l'Alsace, opération d'autant plus difficile, que les Autrichiens rassemblés en force dans le Brisgaw, sous les ordres du général comte de Latour maîtres de Kell, dont ils avaient coupé le pont, faisaient eux-mêmes leurs dispositions. pour pénétrer en France.

Moreau , pour cacher son projet, et pour

détourner l'attention de l'ennemi, exécutait des marches et des contre-marches qui An iv. semblaient se contrarier. Dans une de ces opérations, l'aile gauche de son armée força, en avant de Mayence, des lignes que Custine avait construites avec beaucoup d'art, et dont la prise par le comte de Clairfayt, l'année précédente, avait été regardée comme le chef-d'œuvre des opérations militaires de ce général.

Tous les préparatifs du général Français étaient faits pour tenter le passage du fleuve pendant la nuit du cinq au six messidor. Le mouvement des troupes qui devaient agir, était couvert par le prétexte d'un envoi de dix mille hommes à l'armée d'Italie, pour lesquels des subsistances étaient préparées sur la route de Besançon. Moreau, convaincu que le succès de cette entreprise serait devenu impossible, si les ennemis en avaient eu la moindre connaissance, avait masqué ses préparatifs avec tant d'habileté, que dans Strasbourg même, on ne s'en doutait pas au moment de l'exécution.

Tout étant prêt, le cinq à midi, le général fit fermer les portes de Strasbourg, dans la crainte que quelque espion n'avertît les Autrichiens des dispositions qu'on ne pouvait plus cacher. C'était le passage des bateaux dans le bras Maible. Les adjudans-généraux

Abatuici, Bellavène, Decaen, Montrichard, 1796. et le chef de bataillon des pontonniers, chargés de la reconnaissance du Rhin, et de tous les détails qu'exigeait une opération de cette importance, avaient rassemblé les troupes, qui ne savaient à quelle expédition elles étaient destinées. Des vivres leur furent distribués pour trois jours.

A trois heures du matin les bataillons s'embarquèrent. On devait exécuter plusieurs fausses attaques, mais les deux principales étaient dirigées sur Gambshein, à l'embouchure de la rivière d'Ill, et sur le fort de Kell. Le but de l'attaque de Gambshein était de s'emparer de la route de Rastadt, par où les secours pouvaient arriver à la garnison de Kell, et d'envoyer quelques corps en avant de cette place, pour en multiplier les attaques. Le général Desaix, qui conduisit l'expédition, était encore la veille devant Manheim, en pourparler avec les généraux Autrichiens. Il se rendit à Strasbourg ventre à terre, quand le moment d'agir fut arrivé.

La difficulté de rassembler un grand nombre de bateaux sans donner l'éveil à l'ennemi, qui avait un corps de sept à huit mille hommes campé à Wilstelle près de Kell, réduisit à deux mille six cents hommes le premier embarquement. Ils avaient à vaincre

des obstacles presque insurmontables; on ne pouvait, nulle part, débarquer en terre AN IV, ferme. Il fallait, après avoir abordé dans des isles, dont le Rhin est parsemé entre la Souabe et l'Alsace chasser l'ennemi des postes qu'il occupait, franchir d'autres passages, s'y établir. Toutes ces opérations rendaient une surprise absolument imposible, et devaient naturellement donner aux renforts allemands le tems d'arriver. La rapidité et la bonne conduite de ces attaques ôtèrent ces avantages aux Autrichiens.

Tous les retranchemens des isles furent forcés à la bayonnette. A peine les ennemis eurent-ils le tems de tirer un coup à mitraille de chacune des pièces qu'ils défendaient. Leur surprise fut si grande, qu'arrachés des bras du sommeil, pour prendre la fuite, ils n'eurent pas le tems de détruire les petits ponts qui leur servaient de communication, et dont les Français s'emparèrent; ils parvinrent heureusement, par ce moyen, à la rive droite du Rhin.

1796.

CHAPITRE IV.

Prise du fort de Kell sur les Impériaux.

Pour attaquer les retranchemens de Kell,

il fallait déboucher dans une plaine assez étendue, que défendait un corps de cavalerie ennemie, auquel les Français n'avaient rien à opposer. L'artillerie qui avait accompagné la première embarcation, n'avait pu traverser le terrein marécageux des isles. L'intrépidité des troupes suppléant à ce dernier moyen, on mit en batterie les canons qu'avaient abandonnés les Autrichiens.

Les deux mille six cents hommes débarqués ne pouvaient long-tems suffire aux attaques de l'ennemi , que son camp de Wilstelle lui permettait de réitérer sans cesse. La rapidité excessive du Rhin, augmentée par la crue des eaux, rendant trèsdifficiles l'encrage et les autres manoeuvres du pont volant de Strasbourg, retardait les secours qu'il pouvait rendre, de sorte que le détachement français courait risque, faute de munitions et de renforts, de se voir enlever le fruit de son audacieuse entreprise. Dans cette situation délicate, les soldats retranchés

à

« PrécédentContinuer »