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monnaie, tandis que le Royaume de Naples a des produits en surabondance; la monnaie de Venise gagne, si elle est exportée à Naples, et le contraire se produit pour celle de Naples; des décrets rigoureux, draconiens même, d'exporter de la monnaie, sévissent dans le Royaume, tandis que Venise laisse pleine liberté d'exportation pour sa monnaie; les entrées publiques sont évaluées à un prix élevé à Venise et à bas prix à Naples, et, par suite, il semblerait que les capitaux dussent affluer à Naples pour être employés aux entrées publiques. Et pourtant, malgré tout cela, l'or et l'argent abondent à Venise, alors que Naples a une pénurie extrême de monnaie.

« Les conditions de la ville de Venise, ainsi que nous l'avons dit, comportent presque toutes des sorties et, par contre, celles de Naples des entrées; par ce fait, celle-là devrait être pauvre et celle-ci riche en monnaie; or, les résultats sont contraires, et celle-là est riche, tandis que celle-ci est pauvre. Il faut donc trouver la cause d'où provient ce résultat contraire. »

Les causes consistent dans la quantité des industries, l'expansion du trafic, le bon gouvernement.

«La disposition de celui qui gouverne agit comme cause génératrice, pouvant produire et retenir les autres accidents; c'est elle qui maintient l'ordre, sans lequel aucune chose au monde ne peut bien exister, de même que la confusion, qui est le contraire de l'ordre, est la principale cause de tous les maux... »

L'ancienneté et la longue durée du bon gouvernement constituent la plus grande chance de Venise, la principale cause de sa prospérité.

«De même qu'un médecin ayant soigné plusieurs fois un malade et connaissant sa complexion et ses qualités, aura, s'il doit le soigner de nouveau, plus d'expérience et prendra de plus sûres dispositions qu'un médecin qui ne connaît pas le malade, ainsi il me semble qu'il y ait une différence entre les dispositions que pourra prendre en présence de certains désordres ou pour un nouvel ordre de son Etat, celui qui gouverne pour la première fois, ou celui qui est ancien dans ce même gouvernement et a connu les désordres passés et les remèdes appliqués en présence des autres accidents de son Royaume... >>

J'ai déjà dit que Serra, malgré son génie, ne peut être considéré comme entièrement affranchi des erreurs de son temps. Il est facile de le démontrer. Il prouve, sans aucun doute, qu'il possède quelques justes conceptions sur la fonction et la valeur de la monnaie, tant de la monnaie étalon que de la monnaie divisionnaire. Il faut toutefois reconnaître qu'il est, à ce sujet, très inférieur à Bodin, à Davanzati et qu'il ne réussit pas à se rendre un compte exact de l'in

fluence de la quantité sur la valeur. Il note les effets des altérations monétaires sur les prix, mais il ne comprend pas, ainsi que le comprirent les deux prédécesseurs que nous avons cités, que l'augmentation de la masse monétaire détermine ceteris paribus une diminution de la valeur de la monnaie, c'est-à-dire une hausse des prix 1. Il accepte, comme vérité indiscutable, qu'il soit profitable à un pays d'avoir en abondance l'or et l'argent, et il ne songe pas aux effets qu'aura l'augmentation de la masse qui circule sur les prix à l'intérieur.

Mais, s'il n'a pas une connaissance exacte des lois réglant la valeur de la monnaie, cela tient précisément à ce qu'il est lié à la conception mercantiliste que l'enrichissement monétaire constitue l'indice exact de l'enrichissement d'un pays. Il est en cela un homme de son temps; c'est pour lui un axiome que prospérité d'un royaume et abondance de monnaie sont des termes équivalents.

De Viti de Marco, dans un examen critique très pénétrant, entrepris, il y a quelques années, sur l'œuvre de Serra, affirme que Serra recherche les causes de l'enrichissement monétaire et non celles de la richesse des nations, que son problème est uniquement celui de « l'enrichissement monétaire ».

A mon avis, la vérité est un peu différente. Serra se propose vraiment de rechercher les causes de la prospérité des nations, à travers l'enrichissement monétaire; mais bien qu'il soit dominé par cette fausse conception, il arrive, en méditant sur les faits, à établir le premier de sûres vérités sur les causes desquelles dépend le développement de la richesse des nations, sur les lois économiques réglant les différentes formes de la production, sur les règles auxquelles doit s'inspirer la politique économique des Etats, et, suprême mérite, sur les facteurs multiples qui constituent la balance des payements internationaux.

Il inaugure, dans la science économique, la méthode d'observation et de comparaison des faits, qui produira ses meilleurs fruits en Italie, au cours du dix-huitième siècle.

Complètement ignoré pendant plus d'un siècle, son esprit revivra enfin chez Galiani, Verri, Beccaria et chez les autres écrivains de l'école italienne.

Gino ARIAS.

1. C'est la théorie quantitative qui n'est pas exacte. La Science économique, par Yves-Guyot; Inflation et Déflation, par Yves-Guyot et Arthur Raffalovich.

ÉMISSION DE BONS DU TRÉSOR (1922)

I.

CONDITIONS DE L'ÉMISSION

Un décret en date du 20 septembre et un arrêté du ministre des Finances en date du 28 septembre ont fixé, comme suit, les conditions de l'émission :

Bons de 500 francs (ou de 5 000 francs) 6 p. 100, coupons semestriels payables les 25 mars et 25 septembre, remboursement, au gré du porteur, soit au pair, le 25 septembre 1925, soit à 507 fr. 50, le 25 septembre 1927.

Prix d'émission: 497 fr. 50, payable en un seul versement et exclusivement en espèces.

Les bons seront exempts de tous impôts.

L'émission commencera le 9 octobre 1922 pour prendre fin au plus tard le 10 novembre suivant.

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En prenant comme date de calcul des valeurs actuelles le 9 octobre 1922, date d'ouverture des souscriptions, le taux effectif semestriel y, pour le souscripteur, résultera, suivant que le bon sera remboursé le 25 septembre 1925 ou le 25 septembre 1927, des équations suivantes

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:

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: 497,50 = (x + y), ' [15 (1+ y) = 1

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y (1+ y)

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Les équations (1) et (2) se résolvent facilement par la méthode des approximatives successives et donnent les résultats suivants : Pour les Bons à 3 ans : y = 3,1402 0/0 d'où pour le taux annuel x == 6,38 o/o Pour les Bons à 5 ans : y = 3,2199 o/o d'où pour le taux annuel = 6,54 0/0

Le taux réel, pour l'Etat, est évidemment plus élevé en raison de la commission allouée aux intermédiaires pour le placement des bons.

Nous avons toujours fait abstraction de cette commission dans les calculs que nous avons effectués à propos des emprunts d'Etat antérieurs, car leur influence sur le taux de ces emprunts était très sensiblement atténuée par la durée relativement longue de l'amortissement de ces emprunts.

Ici la durée est très courte et il est bien évident que la surcharge afférente à la commission n'est plus négligeable.

En admettant, par exemple, que la commission y compris l'intérêt alloué aux banques pour la période comprise entre l'encaissement de la souscription et la date extrême de versement à l'Etat soit seulement de 5 francs, les taux ressortiraient à :

6,77 0/0, pour les Bons à 3 ans

6,79 0/0, pour les Bons à 5 ans

On voit que l'écart entre les taux des deux catégories de bons qui était de 0,16 p. 100 sans tenir compte de la commission se réduit ici à 0,02 p. 100. Il deviendrait nul si la commission était de 5 fr. 60 par titre; au delà de 5 fr. 60, les titres à cinq ans deviendraient moins onéreux pour l'Etat que les titres à trois ans. Nous ajouterons une dernière remarque en ce qui concerne les impôts.

Comme il s'agit d'un emprunt d'Etat, l'exemption des impôts ne se traduit par aucun sacrifice de la part du Trésor, car la recette éventuelle que lui procureraient ces impôts serait sensiblement compensée par la différence des prix d'émission qu'il serait obligé de consentir pour attirer les souscripteurs.

Mais il importe d'observer que si l'on voulait comparer l'émission des bons du Trésor 1922, à l'émission d'une société, d'une Compagnie de chemins de fer, par exemple, il serait nécessaire de tenir compte des impôts qui constituent pour cette société une charge réelle s'ajoutant au service des coupons et amortissements.

A. BARRIOL et I. BROCHU,

Membres de l'Institut des Actuaires français.

I. La valeur exacte de la commission est différente, mais nous ne croyons pas devoir l'indiquer.

LE BRÉSIL

Le centenaire de l'Indépendance.

L'inflation.

La situation économique.

I

Découvert en mai 1500 par le navigateur portugais Pedro Alvarez Cabral, le Brésil resta sous la domination du Portugal pendant plus de trois siècles. En 1807, lorsque les troupes françaises commandées par Junot envahirent le Portugal, le roi Jean VI de Bragance se retira au Brésil d'où il ne rentra en Europe qu'en 1821, rapportant de grandes richesses. Il laissait la régence du Brésil à son fils, don Pedro, entouré d'un ministère portugais. L'année suivante, Jean VI voulut rappeler, en Portugal, don Pedro, lequel refusa d'abandonner les Brésiliens. Ceux-ci, de leur côté, manifestèrent la volonté de se séparer du Portugal. Une assemblée législative fut nommée et l'indépendance du Brésil fut proclamée le 1er août 1822. Le 30 août, le nouvel Etat était doté d'une constitution et le 12 octobre, à Rio de Janeiro, l'assemblée nationale nommait don Pedro empereur héréditaire et constitutionnel du Brésil.

Le centenaire de ce grand événement a été commémoré ces temps-ci par des fêtes et des manifestations, dont l'une des principales a été l'ouverture d'une exposition internationale.

La Constitution de 1822 a eu une courte durée; le fils du fondateur de l'empire, don Pedro II a été détrôné, en 1888, et est venu mourir à Paris. Le Brésil s'est alors constitué en république fédérale sur le modèle de l'union nord-américaine. Il comple vingt Etats, dont chacun a sa constitution propre, une organisation législative, administrative, judiciaire autonomes. En plus, il y a le district fédéral de Rio de Janeiro et le territoire fédéral de l'Acré.

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