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Souhaitons, en attendant que les alouettes, les ortolans et d'autres petits oiseaux, non mentionnés sur la liste de la Convention internationale de 1902, soient classés comme utiles, que les préfets veillent à l'application des sages mesures qui précèdent.

D'autre part, nombre de fois, de judicieuses circulaires émanant du ministère de l'Agriculture ont invité les chefs des services agricoles départementaux à enseigner la protection des oiseaux utiles. Or, quelle attitude aurait, se demandait avec raison un jour M. Henri Sagnier dans le Journal d'Agriculture pratique, dans tel ou tel département, à l'égard de son préfet, le professeur qui montrerait que des procédés de destruction autorisés par ce préfet sont contraires à la loi?

XIV

A PROPOS DES INSECTES UTILES

Des professionnels du lacet, des filets et autres engins de destruction en masse des petits oiseaux ont voulu, pour s'opposer à l'idée de protection de ces derniers, dire que, si nos auxiliaires ailés mangent des insectes nuisibles à l'agriculture, ils en mangent aussi d'utiles. Sans aller plus loin, on pourrait leur répondre peu importe qu'ils détruisent des utiles si, en même temps,ils nous débarrassent des nuisibles.

En admettant qu'ils mangeassent indifféremment les bons et les mauvais insectes, ils ne changeraient pas leurs proportions numériques.

On ne saurait nier le rôle utilitaire des insectes entomophages. M. le Dr Feytaud l'a mis nettement en lumière, en 1917, dans son cours d'entomologie agricole.

Il semble d'ailleurs bien établi que les insectes végétariens, nuisibles, sont proportionnellement détruits par les oiseaux en plus grand nombre que les insectes carnassiers utiles. Beaucoup de ceux-ci ne sont-ils pas munis de

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moyens qui les mettent, dans une certaine mesure, à l'abri des attaques des oiseaux? L'extrême agilité et la petitesse des ichneumons parasites, ceux de la cochylis et de l'eudémis, par exemple, dont quelques-uns se mesurent par dixièmes de millimètre, les odeurs et les goûts répugnants de certains autres, ou leurs solides défenses comme chez la larve de la coccinelle chilocorus renipustulatus, hérissée de piquants, n'en rendent-ils pas la consommation rare par les oiseaux?

Chez les coléoptères carnassiers, on trouve des sécrétions repoussantes. Les cicindèles, les carabes, les staphylins, les silphes ont une salive acre et nauséabonde. Plusieurs d'entre eux, les carabiques surtout, sécrètent aussi dans les glandes anales un liquide malodorant et caustique qu'ils rejettent par l'anus au moment où ils se sentent attaqués.

Les coccinelles ont également une sécrétion repoussante, mais au lieu de rejeter le liquide par l'anus, elles le font sourdre à l'extrémité de leurs cuisses.

Le fait suivant, que nous avons personnellement constaté, a ici sa place.

Sur le bord de la Garonne, des moineaux capturaient au vol des hannetons. L'un d'eux s'élança vers un autre insecte d'une quinzaine de millimètres de longueur, mais que nous ne pouvons désigner, ne l'ayant pas vu d'assez près. Le moineau étant arrivé sur lui, à le toucher du bec, l'insecte se redressa, sans cesser de voler, et parut se mettre sur la défensive. Quel phénomène se produisit?..... Le moineau changea subitement de direction et fondit sur un hanneton qu'il prit. Atterrir sur la berge avec sa proie, la déchiqueter, en manger, puis emporter la plus grosse part au nid pour les petits avides. de la nourriture fortement azotée que leur fournissent les insectes, fut l'affaire de quelques secondes.

XV

SUR LE MOINEAU

Ne rien dire du populaire moineau, bien qu'il ne soit pas classé au nombre des oiseaux utiles, mais plutôt considéré comme un pillard de nos récoltes, serait une lacune. Ce passereau, maraudeur s'il en fût, vaut mieux que sa réputation. Il fait une grande consommation d'insectes de toutes sortes, principalement pour nourrir ses couvées qui sont généralement au nombre de trois par an. Nous l'avons vu, et d'autres aussi, s'emparer de sauterelles, de fourmis ailées, de hannetons, de larves, de pucerons, etc. Il mange aussi des graines sauvages. Dans ses Causeries de l'oncle Paul sur les Auxiliaires le grand Fabre a compté autour d'un seul nid de moineaux les débris de sept cents hannetons.

Quand il était conseiller général de la Meuse, M. Raymond Poincaré, qui devait être plus tard Président de la République, disait dans un de ses rapports au Conseil général : « Tout bien pesé, l'aide efficace que le moineau fournit au printemps à l'agriculture compense, et au delà, la gêne accidentelle qu'il lui impose quelques mois plus tard. Quand vient le mois de juillet, il trouve qu'il a droit à une petite récompense; il la prélève luimême avec un peu d'effronterie; mais on peut lui pardonner son indiscrétion, dans un temps où les hommes n'attendent pas toujours eux-mêmes qu'on les remercie. ou qu'on les félicite de leurs bonnes actions. »

Concluons avec Fabre: «Laissons les moineaux en paix tant qu'ils ne deviennent pas trop incommodes »>, et avec le Dr Feytaud: « Défendons-nous contre les déprédations du moineau lorsqu'elles sont manifestes, mais sachons le respecter dans la mesure où il ne nous fait pas de mal. »

XVI

QUELQUES MAMMIFÈRES DESTRUCTEURS

Le chat,

la genette, l'écureuil.

les loirs, etc.

D'OISEAUX

Un grand ennemi des oiseaux, c'est le chat, surtout lorsque, négligeant son rôle domestique, il va rôder loin des habi

tations.

S'il retourne à l'état sauvage, il devient un fléau destructeur des oiseaux. Sus au chat vagabond!

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Aux États-Unis, les chats vagabonds étaient devenus si nombreux que plusieurs États ont dû prendre des mesures pour établir des lois en vue de les raréfier. C'est ainsi que l'État de New-York a, le premier, promulgué une loi contre les chats maraudeurs, qui permet à toute personne âgée de plus de vingt et un ans et portant un permis d'arme à feu de les tuer.

La genette commune (Viverra genetta) détruit aussi les oiseaux. Ce petit digitigrade qui forme une tribu de la famille des Viverres ou Civettes, a le pelage gris, tacheté de brun ou de noir. Ses ongles sont presque aussi contractiles que ceux des chats.

L'écureuil est aussi un ennemi des oiseaux; il les gêne

pendant la construction du nid et va jusqu'à le faire tomber de l'arbre.

Les loirs mangent des œufs et de jeunes oiseaux. La belette, l'hermine, le putois, le renard et d'autres encore font de même.

La chasse au lacet.

XVII

UNE POIGNÉE DE FAITS

Aux environs de Bergerac (Dordogne), un oiseleur tendait, chaque année, de cent à cent mille lacets. On comprend aisément que la confection de ces engins, la préparation du terrain de la chasse et enfin la pose des lacets demandent un temps considérable. Le chasseur y consacre plusieurs semaines chaque année. Aussi, quand une fois la chasse est disposée pour le premier passage de l'alouette, qui a lieu dans le courant d'octobre, les lacets restent-ils en place après ce passage et sont-ils soigneusement entretenus en bon état jusqu'au second passage, en mars. Il en résulte que pour les quelque six semaines que dure au maximum, en deux fois, la chasse aux alouettes, les lacets restent en fonction pendant six à sept mois, et ils ne se privent point d'étrangler pendant ce laps de temps les petits oiseaux : pinsons, verdiers, linots, bergeronnettes et autres, qui ont le malheur de venir se poser sur le terrain de la chasse, appelés par les appeaux de l'oiseleur, alors que l'alouette, prétexte de la chasse, a depuis longtemps disparu ou n'est pas encore revenue.

Un jour de janvier, le chasseur bergeracois prit, dans une matinée, 112 douzaines de pinsons. Le cas n'était pas exceptionnel.

<< Lorsque j'étais ministre de l'Agriculture, a dit M. Léon Mongeot à la Chambre des députés1, je reçus

I. Séance du 29 novembre 1906.

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