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rée, fera rentrer dans le néant une audacieuse usurpation. L'appui tutélaire, les droits réservés d'un Roi qui n'a régné que par les bienfaits, rétabliront sur des bases inébranlables l'autorité légitime.

No LXXXV.

Adresse de la garde nationale d'Amiens à toutes les gardes nationales du royaume, du 6 mai 1815 (1).

Au moment où Buonaparte veut, par un acte arbitraire et despotique, nous engager dans une guerre infâme, et nous forcer à défendre un trône usurpé, nous attestons l'honneur, la patrie et le Roi, que rien ne pourra jamais nous déterminer à prendre les armes pour un homme vomi par les gouffres de l'enfer...

Nous sommes, dit-on, menacés par une invasion ennemie. Non, ces ennemis sont nos amis: ils viennent pour rendre à la France son légitime souverain, dont la trahison de l'armée l'a privée.

0.

Qui a rappelé Buonaparte en France? Quels

(1) Nous voudrions pouvoir garantir l'authenticité de cette adresse.

sont ceux qui ont trahi leur Roi pour placer sur le trône ce vil proscrit? Ce fut l'armée! Laissons donc l'armée le défendre: tels sont les sentimens de la garde nationale. Buonaparte dit que les Bourbons amènent les étrangers en France. Eh quoi, s'il n'eût pas souillé par sa présence le sol françois, ne serions-nous pas en paix avec toute l'Europe?

Sébastiani vient pour nous faire prendre les armes. Nous jurons tous que si ce satellite de Buonaparte entre dans nos murs avec ses pouvoirs proconsulaires, et avec le dessein de faire exécuter cette déshonorante mesure, il trouvera le châtiment dû à ses crimes; et malheur aux traîtres qui oseroient seconder ses infâmes projets !

Le cri de ralliement de la garde nationale est: VIVE LE ROI! VIVENT LES BOURBONS! Mort au tyran et aux brigands qui l'ont secondé dans sa criminelle entreprise!

François le jour approche où vous verrez flotter sur vos tours le pavillon blanc, le pavillon sans tache, symbole de votre bonheur. Vive le Roi!

voir encore, pour la bénir davantage, et former mille vœux pour sa conservation. Dans tous les villages qu'elle traverse, même empressement; des troupes de jeunes filles viennent lui offrir des bouquets, et au retour de sa promenade elle trouve, comme à l'ordinaire, les chemins jonchés de fleurs. Plus les périls augmentoient, et plus on redoubloit d'attachement pour elle.

Sensible à tant de témoignages d'amour, Madame étoit bien déterminée à ne pas quitter Bordeaux, et à mettre tout en œuvre pour conserver au Roi jusqu'à la dernière extrémité cette ville fidèle. On redoubla de zèle et d'activité pour organiser différens corps de troupes choisies dans l'élite de la garde nationale; on les équipe à la hâte; et sur la nouvelle que le général Clauzel avançoit de plus en plus, on fit partir aussitôt un de ces corps pour défendre le passage de la Dordogne à Saint-André-deÇubzac. Une affaire s'engage, et je n'oublierai jamais le cri de joie qui se fit entendre dans le palais en répétant ces mots.... enfin on se bat! Notre petite troupe eut l'avantage, et le général Clauzel eut quelques-uns des siens tués par notre artillerie. La nuit suspendit le combat, qui devoit recommencer le lendemain à la pointe du jour, lorsqu'un incident malheureu

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sement trop à craindre depuis long-temps survint enfin, et fut la principale cause de la perte de Bordeaux.

la

La garnison de Blayes, forteresse si importante pour la sûreté de cette ville, venoit de se révoltér; l'étendard tricolor y étoit arboré, et la troupe de ligne étoit, sortie de ce fort pour aller se joindre au général Clauzel, ce qui lui donnoit des forces bien supérieures à celles qu'on pouvoit lui opposer: il ne trouva done plus aucun obstacle sur sa route, et le samedi premier d'avril, il parut avec sa troupe sur la rive droite de la Garonne, en face de Bordeaux. S'étant posté à la Bastide, il n'avoit plus que rivière entre la ville et lui. C'est de là qu'il pro posa une capitulation. Comme, selon lui, Madame étoit la seule cause des mesures hos tiles, il promettoit que si la ville vouloit promp tement se soumettre, les habitans ne seroient point inquiétés. Personne n'auroit rien à crain dre pour sa sûreté. Tout le monde devoit être parfaitement tranquille; la tête seule de M. Linch étoit exceptée de ces conditions pacifiques. Un cri général d'indignation retentit dans toute la ville, et d'une voix unanime on entendit répéter : « Des armes ! des armés!... combattons « tous pour sauver Bordeaux! » Le tumulte

augmentoit à chaque instant; Madame ne demandoit pas mieux que de tout tenter pour soutenir une si courageuse disposition.

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Mais, pour assurer le succès de l'entreprise contre le général Clauzel, le concours des troupes de ligne en garnison dans la ville étoit nécessaire, les seules forces de la garde nationale n'étant pas suffisantes. Malgré le serment de fidélité que ces troupes avoient renouvelé, comme je l'ai déjà dit plus haut; malgré un grand et magnifique repas où peu de jours auparavant ces régimens et la garde nationale avoient fraternisé le verre à la main, en buvant ensemble à la santé du Roi, ce n'étoit plus le même esprit : ils étoient totalement changés, de perfides agens de Buonaparte les avoient excités à la révolte, et, selon le rapport des officiers-généraux, l'insurrection étoit à son comble dans les casernes. Les autorités militaires tenoient un langage très-effrayant sur la disposition des troupes, même à l'égard de Madame! Des chefs de bataillons déclarèrent qu'ils ne répondoient plus de la sûreté de son Altesse Royale, tant les propos devenoient affreux! On avoit tout à redouter pour ses jours, ajoutoient-ils, si elle ne quittoit pas promptement Bordeaux. Une opinion bien

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