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11 555 000 dollars; mais il est possible qu'il se trouvât de l'or français dans l'importation anglaise.

Pour l'année 1913-1914, les importations françaises d'or avaient été de 1 195 300 dollars et les importations britanniques de 38 219 000 dollars. Les importations d'or japonaises qui, l'année précédente, avaient été de 480 000 dollars, se sont élevées dans la dernière année, à 17 745 000.

Cet excédent d'exportations de marchandises et d'importations d'or devrait réjouir tous les bullionnistes, tous les partisans du système mercantile, tous les protectionnistes. Pas du tout. Au lieu de provoquer un enthousiasme optimiste, il provoque du malaise et de l'inquiétude.

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IX. L'élévation des prix. On sait qu'en 1886, un courtier en laines de Londres, M. Sauerbeck, a commencé d'établir un index numbers du prix de 45 marchandises en prenant comme prix de base 100, chiffre représentant la moyenne des prix de 1867 à 1877. Le Statist a continué cette publication. Si on compare les prix des quatre mois, mai, juin, juillet, août 1915, à ceux de juin 1914, on trouve:

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Si on répartit les prix entre les principales classes d'objets, on trouve:

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Parmi les divers, sont compris les prix du bois et du pétrole qui ont augmenté, tandis que ceux des peaux et des graines. ont diminué.

Le prix des minerais a baissé depuis juillet, tandis que celui des textiles a augmenté.

Il faut remarquer que si ces prix sont de beaucoup supérieurs de 44,5 et de 24 p. 100 à ceux de juin 1914, ils ne sont supérieurs que de 8 et de 6 p. 100 à ce qu'ils étaient pendant la période de 1867 à 1877.

C'est une constatation qu'il est bon de rappeler aux pessimistes qui se lamentent amèrement sur l'augmentation des prix. Sans doute, elle ne facilite pas les conditions de l'existence mais, actuellement, les prix ne sont pas des prix de disette. Ils dépassent à peine ceux qui étaient la normale, il y a une quarantaine d'années.

X. La conférence de Cernobbio. M. Raphaël-Georges Lévy a rendu compte à l'Académie des sciences morales et politiques, de la conférence de Cernobbio, sur les bords du lac de Côme, entre des délégués du comité franco-italien et des représentants de l'Italie.

M. Luzzatti y a reproduit son projet de « la paix monétaire », fortement modifié. On y a parlé commerce, tarifs et transports; et on a fait des mea culpa de la guerre de tarifs, commencée en 1887.

Quant aux conventions de travail et aux lois ouvrières, l'Italie les a adoptées sous l'influence de l'Allemagne. Cette belle législation a été une des formes de la propagande pangermaniste, que j'ai vue à l'œuvre, au congrès de Milan sur les accidents du travail en 1894.

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XI. L' Arabic» et les sous-marins. M. de Jagow avait bien voulu dire : « Nous ne nous opposerons pas à ce que la question de l'Arabic soit portée devant le Tribunal de La Haye.

Vraiment ? Mais quand ? Et devant qui? Où sont les membres du Tribunal de La Haye? Qui sont-ils? A quels États appartiennent-ils ?

Est-ce qu'on peut constituer actuellement un Tribunal de La Haye dont les membres soient désintéressés? Ils ne peuvent appartenir aux belligérants. Dans le cas actuel, ils ne peuvent appartenir aux Etats-Unis qui sont partie dans la cause?

Peuvent-ils appartenir à des neutres qui sont sous le coup de la menace de l'Allemagne ? Quelle serait la situation d'un membre danois ou hollandais?

La réunion de tout tribunal international est impossible; et la condescendance de M. de Jagow n'était qu'une lourde plaisanterie ajoutée à toutes celles que les diplomates allemands nous ont offertes depuis quinze mois.

Mais cette plaisanterie a un côté utile: elle rappelle la fragilité des conventions de La Haye, le mépris que l'Allemagne n'a cessé de témoigner pour la convention de 1907, l'impuissance dans laquelle se sont trouvés les neutres pour la faire respecter. C'est une nouvelle preuve que l'humanité tout entière, au point de vue du respect des principes élémentaires du droit, n'a rien à attendre que de la victoire des alliés.

L'Allemagne a fini, maladroitement, par déclarer qu'elle payerait des dommages-intérêts pour les Américains que son sous-marin a noyés. Le vergheld ne ressuscite pas les

morts.

Ses sous-marins ont perdu toute activité mais une note d'origine anglaise a appris que l'amirauté avait détruit une cinquantaine de sous-marins et ni les sous-marins ni leurs équipages ne s'improvisent.

Il y a trois ou quatre mois, dans un de mes voyages à Londres, il me revint de deux sources différentes, mais également bien informées, que dans la semaine les Anglais avaient détruit six sous-marins. Seulement on ajouta : « Ne le dites pas. Il y a intérêt à ce que les Allemands continuent de compter sur ceux de leurs sous-marins qui sont dé

truits. »

XII. Les Bulgares. Dans la cinquième partie de mon volume les Causes et les Conséquences de la guerre, j'examine les conditions des préliminaires de paix. Mais à la fin du chapitre x, consacré à la Turquie, je dis :

Je ne parle ni de la Grèce, ni de la Bulgarie, ni du Monténégro, ni de l'Albanie. Le règlement des questions qui les intéressent ne jouera qu'un rôle très secondaire lors de la conclusion de la paix.

Les événements actuels confirment cette prévision. Les Bulgares n'ont vu, dans la guerre, qu'un moyen de prendre leur revanche de l'échec qu'ils avaient subi en 1913 quand, poussés par l'Autriche-Hongrie, ils s'étaient jetés sur les Serbes, leurs alliés de la veille. Pendant qu'ils négo

ciaient avec l'Allemagne et la Turquie, ils faisaient du chantage auprès de la Russie, de l'Angleterre, de la France et aux dépens de la Serbie et de la Grèce; et ce chantage avait réussi, il faut l'avouer.

Les Bulgares, d'origine asiatique, ne sont pas des Slaves. Ils avaient disparu depuis 1393, du nombre des peuples indépendants, quand le général Ignatieff, ambassadeur de Russie à Constantinople, persuada au sultan de sanctionner la création de l'exarchat bulgare excommunié par le Phanar. Il se brouillait avec la Grèce mais « la Bulgarie future était faite, a dit M. de Vogüé: Ignatieff savait qu'en Orient, toute confession séparée réveille ou crée une nationalité politique ».

Des savants russes vinrent apprendre aux Bulgares qu'ils avaient eu deux fois un empire. Ils éveillèrent, avec leur passé, un idéal. Ce sont les Russes qui ont fait, au dix-neuvième siècle, la nationalité bulgare. Après l'échec de la Conférence des puissances en 1876, M. Gladstone éveilla l'Europe en faveur des Bulgares par ses réquisitoires contre les Turcs, et l'empereur de Russie, vainqueur de la Turquie, constituait, par le traité de San-Stefano, une grande Bulgarie. Le Congrès de Berlin de 1878, organisé par Bismarck contre la Russie, enleva à la Bulgarie la Roumélie Orientale et la part de Macédoine qui lui a été donnée.

La Bulgarie réduite n'était cependant qu'une création de la Russie, mais Stambouloff fit élire en 1887 le prince Ferdinand de Saxe-Cobourg contre la Russie.

Il a eu soin à certains moments de rappeler qu'il était petit-fils de Louis-Philippe; mais sa politique a toujours été allemande.

La nation bulgare a disparu deux fois de l'histoire. Ressuscitée par la Russie, son roi, serviteur du Kaiser, la conduit au suicide. Ses patriotes ont-ils assez de décision et de force pour y échapper?

Ou l'opposition bulgare a une valeur ou elle est impuis

sante.

Si elle est assez forte pour éveiller le sentiment national, c'est maintenant qu'elle doit agir.

Si elle est incapable de le faire prévaloir contre la volonté du roi, elle démontre l'incapacité de la Bulgarie à continuer son rôle de nation indépendante. Il ne faut pas qu'elle se fasse d'illusions au lendemain de la guerre, les membres de l'opposition pas plus que les membres du gouvernement

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actuel ne pourront défendre l'indépendance de la Bulgarie. Ce foyer d'intrigues et de trahison devra être éteint.

L'attitude du roi de Grèce et du roi de Roumanie, à la suite de l'attitude du roi de Bulgarie, pose la question des dynasties étrangères. Le roi de Grèce est marié à une sœur du Kaiser; il met à la porte M. Venizelos et il fait un cabinet dans lequel se trouve M. Theodotokis, bien connu pour sa passion germanophile.

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