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minutes dans lefquelles on a partagé l'heure. Nous avons rapporté dans le premier Livre (N°. 76.) la maniére de faire un Pendule fimple qui marque exactement les fecondes de tems par fes ofcillations ou balancemens. On ne peut pas s'en fervir à la Mer dans toutes les occasions; mais c'eft affez qu'on puiffe, en l'employant quelquefois, vérifier de tems en tems fi les Sabliers confervent toujours leur même état.

I I.

De l'Imperfection du Loch conftruit par la méthode précédente, avec le moyen de corriger cet Inftrument.

(Voyez les Figures 48, 49 & 50. )

77. Quelque foin qu'on apporte dans la conftruction du Loch que nous venons de décrire, cet inftrument ne peut donner que le mouvement particulier du Navire, par rapport à la Mer. On fuppofe que le morceau de bois qu'on prend pour terme, eft parfaitement immobile; mais fi la Mer eft elle-même fujette à fe mouvoir, fi elle avance vers un certain côté, fon mouvement fe communiquera au Loch de même qu'au Navire; ainfi on ne trouvera, en fe fervant de cet inftrument, que le furplus de la vîtesse du fillage fur celle de la Mer, fi les deux mouvemens se font dans le même sens ; & on aura au contraire leur fomme, s'ils fe font dans des fens oppofés.

78. On fçait par plufieurs obfervations fûres, que la Mer dans la Zone Torride fe meut vers l'Occident, & qu'elle forme un courant continuel qui fait dans le milieu de l'Océan 2 ou 3 lieues par jour & même davantage. Si l'on single donc vers l'Oueft dans ces endroits où il un mouvement continuel, & qu'on fe ferve du Loch pour mefurer la marche du Navire, on ne trouvera que la quan tité dont on avance plus vite que la Mer, puifqu'on ne

y a

comptera pas le mouvement que reçoit fecrétement le Fig. 48. 49Loch. Si l'on fait route au contraire vers l'Eft en allant & so. contre le courant, on croira faire plus de chemin qu'on n'en fait effectivement; parce que fans le fçavoir on ajoûtera à la vîtesse réelle du Navire, celle de la Mer qui entraîne le Loch, & qui l'éloigne du Vaisseau.

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79. J'ai vu des Pilotes qui ne faifant pas attention au
mouvement vers l'Occident qu'ont les eaux de l'Océan
dans la Zone Torride, avoient changé les divifions de
leur Loch, ou altéré la durée de leur Sablier. Lorsqu'ils
alloient d'Europe aux Ifles de l'Amérique, & qu'ils met-
toient entre les noeuds de leur ficelle 47 pieds & demi,
comme il le faut abfolument, il leur étoit toujours arrivé
de découvrir la Terre plûtôt qu'ils ne s'y attendoient. Ils
croyoient donc que leur Loch étoit mal divifé, & que
les nœuds en étoient trop éloignés les uns des autres : ils
en diminuoient enfuite les intervalles, afin d'en pouvoir
compter un plus grand nombre, & d'être en droit de fup-
pofer avoir fait un plus grand nombre de lieues. Mais ils
tomboient dans une erreur qui n'étoit pas excufable
faute de fçavoir qu'il falloit ajoûter au chemin que le vent
leur faifoit faire, le mouvement fecret que la Mer leur
communiquoit de plus, & qu'elle communiquoit auffi au
Loch: mouvement qui pouvoit être, comme je l'ai dit, de
plus de 3 lieues par jour. Lorfque ces Pilotes revenoient
de l'Amérique, ils ne s'appercevoient pas de leur mécom- ·
pre; parce qu'on prend toujours un autre chemin pour le:
retour. On fort promptement de la Zone Torride en di-·
rigeant la proüe vers le Nord, & on trouve des vents va-
riables qui obligent à changer fouvent de routes.
80. Pour éclaircir ce que nous venons de dire, fup- «<
pofons que AB (Fig. 48.) repréfente le mouvement <<
que reçoit le Navire A par l'effort du vent, pendant l'ex-«
périence du Loch; & que dans le même tems la Mer «<
foit fujette à un mouvement qui la transporte de A en C, «
felon la direction AC. Le Navire obéit aux deux mou- «A

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Fig. 48. 49. » vemens : il ne fuivra pas la ligne AB, parce que le cou

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»rant que forme la Mer felon AC, & felon une infinité » d'autres lignes paralleles, l'en empêche ; & il ne fuivra » pas non plus AC, comme s'il n'étoit livré qu'à l'action » du courant, puifque le vent lui communique du mou>vement felon A B. Pour avoir la route réelle du Navire, » il faut achever le parallelograme A BGC, & tirer la » diagonale AG; le Navire en partant du point A, fui»vra AG, & il parviendra dans les points K, L, G dans » le même tems qu'il feroit parvenu aux points E, F & B, >> & que l'eau qui l'environnoit en A, parviendra en H, >>en I & en C.

81. » Mais fervons - nous du Loch dans cette fuppo-
>> fition pour mesurer la vîteffe du fillage. Le morceau
>> de bois qu'on prend pour terme, & qu'on s'imagine
» mal-à-propos être immobile, parcourra AC en rece-
>> vant le mouvement du courant. Il arrivera dans les points
» H, I & C dans le même tems que le Navire arrivera
» dans les points K, L & G.

82.
» Ainfi la ficelle fera tendue fucceffivement fur
» HK, fur IL & fur C G ; & on croira qu'elle fera tou-
»jours restée dans la même place, parce qu'elle aura tou-
» jours la même fituation par rapport auVaiffeau, & qu'elle
>> fera toujours dirigée fur le même rumb. La trace que
» le Navire laiffe derrière lui, & qu'on nomme la Hoйa-
» che, aura été tranfportée de A E en HK par le cou-
»rant, lorfque le Navire fera parvenu en K; elle aura
» été transportée de AF en IL, lorfque le Navire fera
» arrivé en L, & elle fe trouvera dirigée fur CG, lorfque
» le Navire sera en G. On la croira immobile, de même
» que le morceau de bois du Loch, qui eft néanmoins
» transporté de A en C. Enfin on prendra la longueur CG
» de la ficelle
pour le chemin du Navire, & on croira
que
>>le fillage s'eft fait fous cette direction, quoique le tranf-
» port réel fe foit fait fur AG, & que ce foit cette ligne
» qu'on ne connoît pas, qui eft le chemin effectif.

83. Il est évident que felon que la direction AC du « courant fera différemment fituée par rapport à la route << primitive A B, la diagonale A G qui repréfente le transport actuel du Navire, deviendra plus ou moins longue. « Si l'angle B A C étoit encore plus obtus, le courant fe « trouvant plus directement contraire à la route A B du « Vaiffeau, y apporteroit une plus grande diminution, en « rendant encore plus court le chemin actuel A G. Ce fe- « roit le contraire fi l'angle B A C étoit aigu: le courant << favoriferoit alors la marche du Navire, & fe joindroit «< à A B pour rendre A G plus grande. Malheureusement, « fi on excepte quelques endroits où on a pû faire de fré- « quentes obfervations, on ne fçait en Mer ni la direc- « tion du courant ni fa vîteffe ; & on porte inutilement la « vûe autour de foi pour tâcher de les découvrir. Tout ne se « meut pas; mais tout paroît fe mouvoir; & il n'eft pas aifé « de démêler dans cette apparence ce qu'il y a de réel. « 84. Je crois qu'il n'y a pas de moyen de lever cette « difficulté, fi le courant s'étend en-bas jufqu'à une grande «< profondeur. Mais fi le mouvement n'eft que fuperficiel, « s'il ne s'étend en-bas que de 50 ou 60 pieds, comme cela «< doit arriver ordinairement, parce que la plupart des cau- «< fes qui agiffent fur la Mer, font extérieures & n'ont d'ac- « tion que fur la furface, nous pourrons en changeant quel- «< que chofe dans la construction du Loch, chercher dans << la Mer même le point fixe dont nous avons befoin. « 85. Suppofons que le morceau de bois B A C (Fig. 49.) au lieu d'être chargé comme à l'ordinaire par en-bas d'un « morceau de plomb, foutienne par la ficelle AG le « corps G H qui defcende affez bas pour se trouver dans «< une eau parfaitement tranquille : il eft certain que ce « corps par la difficulté qu'il trouvera à traverser un mi- « lieu qui réfifte, empêchera le morceau de bois B A C de « céder auffi aisément à l'impreffion du courant, & que le «< Loch fera moins défectueux. Pour achever de décrire le « nouvel inftrument, la ficelle G A fera une continuation «

Q

Fig. 48

Fig. 49.

» de celle AO E qui fe rend au Vaiffeau vers E. Cette fi-
>> celle traversera le morceau de bois BA C, qui fera percé
» de haut en bas, & qui fera à demi- creux par-deffous.
» Lorsque l'expérience fera achevée, & qu'on fera effort
» dans le Navire pour tirer le Loch, la partie de ficelle
» CD fe féparera, & auffi - tôt le corps G H viendra fe
» loger en partie dans le morceau de bois B A C avec le-
» quel il fe rendra à bord. On fera dans le tems de l'expé-
»rience defcendre le corps G H de 40 ou 50 pieds: mais
> il fera quelquefois à propos de le faire defcendre plus
»bas, pour voir fi l'on trouve toujours le même résultat.
86. Il eft vrai qu'il faudroit que la furface du corps
>> inférieur fût infiniment grande pour que l'inftrument re-
» ftât exactement en repos. Mais fi on eft obligé de ne
>> donner qu'une certaine grandeur au corps inférieur,
» on peut au moins mettre une proportion conftante entret
>> les deux furfaces, & faire enforte que le Loch ne pren-
>>ne toujours qu'une certaine partie connue de la vîteffe
» qu'a la Mer en haut. Je crois qu'on pourroit donner tou-
>> jours une figure conique au morceau de bois BAC, ou
>> celle d'un pain de fucre dont les côtés fuffent parfaite-
»ment droits. On feroit ces côtés de 6 pouces de lon-
» gueur, & le diamétre de la base de 3 pouces. Quant au
» corps GH, on le formeroit de deux morceaux quarrés
» de tole ou de fer noir, qui feroient égaux, & qui fe
>> couperoient perpendiculairement par leur diagonale;
>> & on leur donneroit 9 pouc. 8 lignes de côté. Comme
» le corps GH, avec auffi peu de poids qu'on voudroit
» présenteroit enfuite une affez grande furface à l'eau
> tranquille, le Loch ne prendroit qu'une petite partie
» de la vîteffe du courant; & il eft facile de s'afsûrer
» qu'il n'en prendroit guére que la cinquiéme partie.
87. » Ainfi il faudroit toujours continuer à se servir du
» Loch ancien, afin de le comparer avec le nouveau ;
» excepté dans les endroits où il y a peu de fond, & où
>on pourroit faire defcendre le corps G H jufqu'en bas

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