ÉPITRE IV. A M. LE COMTE DE TRESSAN. «Je suis persuadé, monsieur, que vous ne << doutez pas de l'empressement que j'ai de « répondre à votre lettre charmante: >> MAIS comment écrire à Paris? Où trouver le silence, où fuir la multitude? Pour cueillir les lauriers et les fruits de l'étude Je veux dès son coucher me livrer au sommeil : Dix fois je me le suis promis; Comment se coucher à Paris? Au badinage heureux d'une muse féconde: On croit que les vers sont des jeux, Et qu'on parle en courant le langage des dieux Comme on persifle ce bas monde : Par les Graces, dit-on, si vos jours sont remplis, Par les Muses du moins commencez vos journées. Oui, fort bien; mais est-il encor des matinées? Comment se lever à Paris ? Des yeux fermés trop tard par le pesant Morphée Sont-ils si promptement ouverts? De l'antre du Sommeil passe-t-on chez Orphée, Et du néant de l'ame à l'essor des beaux vers? N'importe: cependant, malgré l'ombre profonde Qui couvre mes yeux obscurcis, Dès que je me réveille, à peine encore au monde, Je m'arrange, je m'établis; Dans le silence et le mystere, Au coin d'un foyer solitaire Je me vois librement assis. Le ciel s'ouvre: volons, Muse, oublions la terre: Ces vers faits par l'amour, ces présents du génie, Déja: mais quel profane à l'instant me rappelle Quel insecte mortel vient m'arracher la rime? Bientôt il faut sortir : l'heure est évanouie; Prononcez, jugez si je puis Comment donc rimer à Paris? ÉPITRE V. AU P. BOUGEANT, JÉSUITE. De la paisible solitude E Où, loin de toute servitude, Le dédale des aventures, Les affiches et les brochures, Qu'à l'un de ces oisifs errants Je pourrois décorer ces rimes |