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melon. Or, l'augmentation de la transpiration, qui se perpétue pendant long-temps après l'accouchement, tandis que les autres sécrétions ne subissent aucun changement, indique assez que la nature a choisi cette voie pour se débarrasser des humeurs superflues. Mais il ne s'ensuit pas que le lait en nature et avec toutes ses qualités physiques et chimiques passe dans le sang, et circule dans toute l'économie. Ce n'est pas ici le lieu d'examiner les questions de pathologie qui se rapportent à ce point; elles seront traitées ailleurs. (Voyez LAITEUSES (maladies). La sécrétion de l'urine ne présente rien de remarquable; son excrétion éprouve souvent de la difficulté à cause du gonflement du méat urinaire, lorsque celui-ci a été fortement comprimé par la tête du fœtus, et que cette pression a duré long-temps. Il y a ordinairement constipation, soit que cette constipation soit la suite de celle qui a souvent lieu vers la fin de la grossesse et qu'elle dépende des mêmes causes, soit qu'elle dépende de l'abondance de la transpiration et de la déperdition qui a lieu par les lochies.

Après avoir tracé le tableau de l'état des nouvelles accouchées, il convient de revenir en particulier sur les principaux phénomènes dont je n'ai pas parlé avec assez de détail: ce sont les tranchées et les lochies. Nous avons vu que les tranchées sont dues à la contraction de l'utérus, et quelles conditions de cet organe influent sur leur production et leur intensité; nous pouvons, d'après cela, nous rendre compte des différences qu'elles présentent. En général, les femmes en sont exemptes à leurs premières couches, et ces tranchées deviennent de plus en plus intenses aux couches suivantes. Elles sont aussi plus intenses après un accouchement très-facile qu'après un accouchement long et un peu difficile. Cependant, lorsqu'il l'a été à un degré fort considérable, les tranchées sont souvent fort douloureuses, parce que l'utérus est tout endolori par suite de la fatigue extrême qu'il a éprouvée. Ces tranchées commencent peu d'instans après la délivrance, elles acquièrent bientôt leur plus haut degré d'intensité, et vont ensuite en s'éloignant et en diminuant jusqu'à l'époque de la fièvre de lait, où elles cessent souvent. Quand l'utérus renferme un caillot volumineux, elles deviennent de plus en plus vives jusqu'à ce qu'il soit expulsé; après quoi elles se trouvent fort diminuées. Dans quelques cas, elle se prolongent bien au delà de la fièvre de lait; elles diminuent seulement pendant la durée de cette fièvre. Les tranchées utérines se distinguent des autres douleurs, parce qu'elles reviennent à des intervalles assez grands et réguliers, que pendant la douleur le globe de l'utérus durcit, et qu'elles sont suivies de l'expulsion de quelque caillot ou d'une plus grande quantité de liquide. Lorsque l'enfant saisit le mamelon, la douleur qu'il excite dans cette partie détermine souvent aussi le développement d'une tranchée. Il est superflu de combattre le ridicule préjugé: que plus l'enfant a de tranchées, moins la mère en éprouve, et vice versa.

Les lochies se présentent dans l'ordre suivant: immédiatement après la délivrance et l'issue du flot de sang qui l'accompagne, tout écoulement est suspendu, probablement parce que le sang qui transsude de la surface de l'utérus s'accumule dans la cavité de cet organe; mais bientôt du sang pur commence à couler. Au bout de douze à quinze heures, ce sang perd de sa consistance, sa couleur devient moins foncée; et après quelque temps, il ne s'écoule plus qu'une sérosité sanguinolente. La fièvre de lait survient quarante-huit heures après l'accouchement. L'écoulement des lochies est alors complétement suspendu, quelquefois il est seulement diminué. Lorsque la fièvre de lait est terminée, les lochies reparaissent, mais alors elles sont d'un blanc jaunâtre, et plus ou moins épaisses. Elles continuent ainsi pendant quinze jours, trois semaines, ou un mois; chez quelques femmes qui n'allaitent pas, elles ne cessent qu'à l'époque où les règles reparaissent, ce qui a ordinairement lieu six semaines ou deux mois après l'accouchement, et ce que l'on appelle vulgairement le retour de couches. Les lochies, suivant leur couleur, ont été distinguées en lochies sanguinolentes, lochies séreuses, et lochies laiteuses, puriformes ou purulentes. Ces der nières dénominations ont été données, non-seulement en raison de la couleur de la matière excrétée, mais encore par suite de l'idée qu'on s'est faite de la nature de cette matière. Aussi les gardes disent-elles que le lait coule par en bas pour désigner les lochies du troisième temps. L'odeur des lochies est d'abord fade, c'est celle du sang lui-même; mais peu à peu elles prennent un caractère de fétidité particulière, que l'on retrouve toutes les fois que des caillots ou quelque autre substance se putréfie dans l'utérus ou le vagin, et qui est sûrement due à la décomposition d'une portion de la membrane caduque ou de quelque caillot. Dans ce dernier ças, les lochies prennent souvent une couleur noirâtre. Vers les derniers temps, leur odeur est uniquement

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celle de la mucosité qu'elles entraînent. On a comparé l'odeur des lochies à celle d'un civet de lièvre. Pour moi, je n'ai jamais trouvé d'analogie entre ces deux odeurs; mais la manière de juger les odeurs varie suivant les personnes. C'est à cette odeur des lochies qu'on attribue surtout ce qu'on appelle l'odeur des couches, gravis odor puerperii, odeur qui est plus ou moins forte, suivant qu'on entretient plus ou moins de propreté autour des nouvelles accouchées, et d'après laquelle quelques personnes assurent pouvoir juger d'un accouchement précédent. Mais à l'odeur des lochies se joint aussi celle de la transpiration et celle du lait, qui, en suintant du mamelon, imbibe les linges et s'y aigrit. Les lochies sont en général plus abondantes chez les femmes dont la menstruation est copieuse, chez celles qui ont déjà eu plusieurs enfans, ou qui font usage d'un régime trop nourrissant ou échauffant, et chez celles qui n'allaitent pas. Les lochies sanguinolentes se prolongent souvent bien au delà du terme ordinaire; souvent aussi le sang, qui avait cessé de teindre la matière de l'écoulement, reparaît par intervalle, ce qui tient ordinairement à quelque écart de régime. On a vu des femmes n'avoir pas de lochieş; mais malgré ces exemples très-rares, l'absence de cette excrétion ne doit pas moins inspirer des craintes, car c'est le plus souvent à quelque maladie grave, déclarée ou imminente, qu'on doit l'attribuer. Van-Swieten, Joerg et d'antres médecins ont comparé la surface interne de l'utérus après la séparation du placenta et des membranes de l'œuf à une large plaie qui doit suppurer, et ensuite se couvrir d'une cicatrice. L'écoulement des lochies leur offrait l'image des fluides qui s'écoulent d'une plaie récente, et il y a en effet une analogie assez grande. Ceux qui regardaient la membrane caduque comme le produit de l'exfoliation de la membrane interne de l'utérus trouvaient dans cette circonstance une nouvelle preuve. Astruc, appliquant à la théorie de cette excrétion son hypothèse sur la menstruation, attribuait les changemens successifs de l'écoulement sanguin au resserrement progressif des orifices des sinus utérins, et l'écoulement puriforme à la lymphe laiteuse qui suintait des appendices vermiformes qu'il supposait entourer ces sinus. L'opinion la plus généralement répandue actuellement, et qui paraît la plus vraisemblable, se rapproche beaucoup de cette dernière. On pense que le sang qui s'écoule vient des orifices qui le versaient dans les sinus du placenta. En effet, ce sang sort avec beaucoup moins d'abondance, et devient de plus en plus séreux, à mesure que les vaisseaux utérins se contractent. Si la contraction de l'utérus se fait lentement, qu'il y ait inertie de cet organe, l'écoulement de sang augmente presque immanquablement, au point de constituer une hémorrhagie souvent trèsgrave. La matière, qui est ensuite excrétée est regardée comme le produit d'une sécrétion de la membrane muqueuse de l'utérus, et on y reconnaît un mucus altéré analogue à celui qui est excrété dans d'autres circonstances, mucus qui, en affluant dans la cavité de l'utérus, achève de détacher, et entraîne avec lui les restes de la membrane caduque. Peut-être doit-on admettre que l'épiderme de la membrane muqueuse se sépare alors; mais si l'existence de la membrane muqueuse elle-même est si difficile à prouver que des anatomistes très-habiles se croient fondés à nier son existence, comment pourrait-on prouver la séparation et la régénérescence de cet épiderme? Les rapports qui existent entre les menstrues et les lochies donnent du poids à cette opinion. Eichèle cherche encore à la fortifier en remarquant que l'utérus, outre ses autres fonctions, exerce aussi celles d'organe sécréteur, et qu'après avoir subi un si grand développement pendant la gestation, après que sa vitalité a été si notablement exaltée, il est dans les circonstances les plus propres à fournir une sécrétion abondante, et que ce n'est qu'au moyen de cette sécrétion qu'il peut revenir à son état ordinaire. D'ailleurs, s'il était vrai que la cavité de l'utérus présentât alors une large surface, d'abord saignante, et ensuite suppurante, ne devrait-il pas se développer une fièvre traumatique proportionnée? Peutêtre regardera-t-on comme telle la fièvre de, lait? Mais cette fièvre n'est nullement en rapport avec la marche de cette prétendue plaie; elle appartient évidemment à un autre ordre de phénomènes. Comment concevoir aussi qu'une surface qui offrirait une cicatrice tant de fois renouvelée, pourrait encore être apte à exercer les fonctions qu'elle doit remplir pendant la menstruation et la gestation?

Je n'ai jusqu'à présent parlé que des phénomènes qui appartiennent exclusivement à l'état de couches; mais en même temps que ces phénomènes ont lieu, il s'en développe d'autres qui sont relatifs à la sécrétion du lait, et dont l'exposition sera faite à l'article LACTATION. Je me bornerai à les indiquer seulement ici, pour faciliter l'intelligence de ce qui va suivre. Pendant les deux premiers jours qui suivent l'accouchement, la sécrétion du lait est peu abondante, et les mamelles n'augmentent pas notablement de volume. Après ce temps, la fièvre de lait se déclare et dure ordinairement vingt-quatre heures; les mamelles se gonflent, se durcissent; mais ce n'est que vers le déolin de la fièvre qu'elles arrivent au plus haut degré de distension. Bientôt elles décroissent, et la sécrétion du lait ou s'établit d'une manière régulière et continue, si la femme allaite, ou va en diminuant progressivement dans le cas contraire.

Régime des femmes en couches. La connaissance exacte de l'état dans lequel se trouvent les nouvelles accouchées nous met à même d'apprécier les vues qu'on doit se proposer dans la fixation des règles diététiques qui leur conviennent, de juger ce qu'il y a de véritablement utile ou de minutieux et de superflu dans celles qu'on a généralement tracées, de ridicule et de-dangereux dans certaines pratiques vulgaires, enfin d'estimer l'influence que la constitution des femmes, leur manière de vivre antérieure, les circonstances de leur grossesse et de leur accouchement doivent exercer sur l'état des organes et des fonctions pendant le temps des couches, et quelles modifications il convient de faire subir aux règles générales dans leur application aux cas particuliers. Ici, comme dans bien d'autres cas, il y a plus de préjugés à combattre, que de règles positives à établir. On a comparé la condition d'une femme en couches à celle d'une personne qui aurait reçu une grande plaie ou subi une grande opération. Cette comparaison cadrait parfaitement avec l'idée qu'on s'était faite de l'état de l'utérus. Sous certains rapports elle est assez juste, et elle ne pouvait induire en aucune erreur grave dans la pratique; mais il me semble préférable de se guider d'après des considérations plus sûres que des analogies. C'est dans cet esprit que je vais indiquer ce régime dans sa plus stricte rigueur.

Après la délivrance, on laissé la femme sur le petit lit où elle est accouchée. Elle s'y repose un peu, et se débarrasse d'une portion du sang qui, s'écoulant dans les premiers instans avec abondance, salirait les linges dont on va l'envelopper. Ensuite on fait étuver les parties avec de l'eau tiède, simple ou mêlée de vin, pour enlever le sang et les caillots qui salissent ces parties. Le vin est employé dans l'intention de les raffermir et

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