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bien ceci), je ne sais pas si l'homme, issu de parents vicieux, et qui a su se faire remarquer par sa vertu, ne brille pas davantage. Que personne donc ne s'enorgueillisse de ce qu'il appartient à des parents élevés ; qu'il considère ceux de Jésus-Christ, et il comprimera tout sentiment d'orgueil; il ne faut se glorifier que de ses vertus; que dis-je ? pas même de ses vertus, puisque c'est pour s'en être glorifié que le pharisien descendit au-dessous du publicain.

Gardez-vous donc de gâter le fruit de vos travaux; de répandre en vain des sueurs; d'entreprendre une course inutile; et, après mille peines, de voir s'évanouir la récompense qui vous était due. Le Seigneur connaît mieux que nous les mérites de nos vertus; ne nous enorgueillissons donc pas; regardons-nous comme des serviteurs inutiles, pour mériter d'être un jour au nombre de ceux qui ont su se rendre utiles. Car, si vous réclamez l'éloge, vous serez blâmé, eussiez-vous été fondé dans votre demande. Si vous reconnaissez au contraire votre néant, vous serez loué, parce que l'oubli de vos vertus passées est une chose nécessaire; c'est le vrai trésor où se conservent les vertus. En ayant toujours nos vertus présentés à la mémoire, nous agaçons l'ennemi de nos âmes, nous lui fournissons des armes contre nous, et l'engageons à nous ravir notre trésor. Què Dieu seul, à l'œil duquel les choses les plus secrètes ne peuvent échapper, connaisse notre trésor, et il sera en sûreté. Gardons-nous donc bien de nous glorifier de nous-mêmes; cela nous rend odieux aux hommes et abominables aux yeux de Dieu. C'est pourquoi plus sont grandes les choses que nous faisons, plus nous devons parler humblement de nous; ainsi nous acquerrons une très-grande gloire devant Dieu et devant les homme ; bien

plus, devant Dieu, nous n'aurons pas seulement la gloire, mais une riche récompense; car, lorsque nous faisons de bonnes actions, Dieu devient notre débiteur. Lorsque nous pensons n'avoir rien fait, c'est alors que nous sommes dignes d'une plus grande récompense. L'humilité est la reine de toutes les vertus, et ce n'est que par l'humilité que les actes deviennent méritoires. Voyez le centurion; il dit: Je ne suis pas digne que vous entriez dans ma demeure, et il en devient digne, et sa foi est au-dessus de celle de tous les Juifs. Saint Paul dit: Je ne mérite pas d'être appelé votre apôtre, et il devient le premier des apôtres. Saint Jean dit : Je ne suis pas digne de dénouer les cordons de vos souliers, et il devient l'ami de l'Époux ; et cette main, qu'il regardait comme indigne de dénouer les cordons des souliers du Sauveur, celui-ci la fait reposer sur son cœur. Pierre dit : Éloignez-vous de moi, Seigneur, parce que je suis un pécheur, et il devient la pierre fondamentale de l'Église.

Oui, rien de plus agréable à Dieu que de s'estimer peu de chose. L'humilité prend sa naissance ou trouve son développement dans la pensée et l'étude incessante de l'esprit; car celui qui s'humilie dans son cœur, qui se brise de douleur, ne s'enorgueillira pas, ne tombera pas dans la jalousie, dans la colère, en un mot, dans aucune passion mauvaise. Apprenez de moi, dit Jésus, que je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos de vos âmes. Voulons-nous donc jouir d'une tranquillité d'âme parfaite? possédons dans nos âmes l'humilité, la mère de toutes les vertus. Ainsi nous pourrons traverser la mer orageuse de ce monde, et arriver au port du salut, où nous goûterons le repos absolu.

CHAPITRE VIII

DE CE QUE JOSEPH VOULUT RENVOYER MARIE

1

En donnant la généalogie de Jésus-Christ, saint Mathieu vient de démontrer que le Christ est véritablement homme; il va démontrer maintenant sa divinité par la manière miraculeuse dont il a été conçu. Il dit en effet : Voici quelle était la génération de Jésus-Christ 1; comme s'il disait : N'allez pas croire que Dieu soit engendré de l'union de l'homme et de la femme, comme tous les personnages dont nous venons de parler; non, il a une naissance toute miraculeuse. Voici comment: Marie était fiancée à Joseph; après avoir visité sa cousine Élisabeth, elle était revenue dans sa maison de Nazareth; Joseph, arrivant de Judée en Galilée, voulut emmener chez lui sa fiancée, avant qu'ils fussent unis, c'est-à-dire avant la

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solennité des noces, non pas, remarquez bien, qu'ils se soient unis plus tard. C'est une façon de parler semblable à celle-ci : Avant qu'il eût fait pénitence, il fut frappé par la mort, ce qui n'implique pas qu'il ait fait pénitence. On peut dire aussi : Avant qu'ils se réunissent dans une habitation commune, qu'ils restassent dans la même maison; car jusqu'alors tous les deux avaient leur domicile particulier, puisque chez les Juifs il n'était pas permis à des fiancés de se réunir et d'habiter ensemble, si les noces n'avaient pas été célébrées; or, avant cette réunion, Joseph s'aperçut que Marie était en état de gros

sesse.

Mais, qu'arrive-t-il? Il ne peut pas reconnaître d'une manière évidente l'opération du Saint-Esprit. Malgré l'examen le plus sérieux, il ne pouvait pénétrer le secret d'un si grand mystère, et était en proie à la douleur et au trouble; ne voulant pas la traduire en public, c'est-à-dire divulguer son crime et la diffamer, parce que la lapidation devait être le châtiment de son adultère; ou bien ne voulant pas la conduire chez lui, pour habiter avec elle, parce que, ignorant la cause de ce grand miracle, il s'estimait indigne d'une pareille société, il voulut la renvoyer secrètement à ses parents qui la lui avaient donnée. Joseph connaissait ces paroles : Il sortira un rejeton de la tige de Jessé1, et il savait que Marie sortait de cette tige. Il n'ignorait pas la fameuse prophétie : Voilà qu'une Vierge concerra', et il l'appliquait à Marie, d'autant plus qu'après la conception, un éclat tout divin illumina son front virginal, et les yeux éblouis de Joseph ne pouvaient

• Isaïe, 11.

Isaïe, 7.

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