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matical et la simple explication des mots, bien qu'il ne parlât pas correctement, on le pourroit supporter, puisque la saine doctrine demeureroit en son entier; mais non, il fait partout le théologien, et il travaille seulement à nous insinuer que sa théologie, qui est, comme on a vu et comme on verra, l'arienne et la socinienne, peut-être un peu déguisée, est fondée sur le texte, pendant que celle de saint Augustin, qui en ce point comme dans les autres, est celle de toute l'Ecole et des interprètes, n'est plus qu'un discours en l'air et détaché de la lettre; et tout cela s'insinue en faisant semblant de louer ces beaux principes de théologie et saint Augustin qui les débite. On n'entend partout que ces beaux mots : Ce grand homme, ce saint évêque, ce savant évêque, ces belles leçons de théologie, ces beaux principes. Telles sont les louanges de M. Simon, semblables à celles des Juifs et des gentils, qui saluoient notre Seigneur dans sa passion. Comme eux il salue les Pères en qualité de prophètes, à condition d'être frappés, et les coups suivent de près la génuflexion.

Et pour montrer avec encore plus d'évidence que ces beaux principes, comme il les appelle, sont l'objet de son mépris, il ne faut que considérer ce qu'il en dit dans un autre endroit (1): Saint Augustin explique dans son second livre de la Trinité plusieurs passages du nouveau Testament, où il est parlé du Fils et du Saint-Esprit, comme s'ils étoient inférieurs au Père (ce sont ceux où il est parlé du Fils de Dieu comme n'ayant rien de lui-même, et les (1) P. 272, 273.

autres de même nature). Là il rapporte en abrégé les principes de saint Augustin, qui constamment sont les mêmes dans ce second livre de la Trinité que dans les traités sur saint Jean; et sans qu'il soit nécessaire d'entrer ici dans le détail de ces principes, voici à quoi M. Simon les fait aboutir (1): Il propose en même-temps cette règle qu'on doit toujours se remettre devant les yeux, qu'il n'est pas dit en ce lieu-là que le Fils soit inférieur au Père, mais seulement qu'il est né de lui: ces expressions ne marquent pas son inégalité, mais seulement son origine. Voilà sans doute la théologie de saint Augustin expliquée en termes clairs (car l'auteur n'en manque pas quand il veut ). Il faudroit donc l'approuver aussi clairement qu'il l'énonce, puisque sans elle la foi ne subsiste plus. Mais voyons ce que dira notre auteur, et apprenons de plus en plus à le connoître. Voici les paroles qui suivent incontinent après celles que nous venons de rapporter (2). Il y a beaucoup d'esprit et beaucoup de jugement dans ces réflexions: elles donnent un grand jour à plusieurs passages du nouveau Testament, qui paroissent embarrassés. On voit ici la louange, et, pour ainsi dire, la salutation de M. Simon, et voici le coup aussitôt après: Mais après tout, poursuit-il, elles ne sont point capables de résoudre toutes les difficultés des ariens. Il faut que M. Simon prête la main à saint Augustin et à l'Eglise, qui jusqu'à lui constamment se défendoit de cette sorte. Je n'ai que faire d'entrer en raisonnement avec lui sur ses prétendues défenses. Un homme qui prétend défendre la foi con(1) P. 272, 273. — (2) Ibid, et 274.

tre l'hérésie arienne mieux que les Pères ne faisoient lorsque l'Eglise étoit toute en action pour la combattre, dès-là doit être suspect; et il ne faut pas aller bien loin pour trouver dans notre auteur l'arianisme à découvert. Pour faire voir, dit-il (1), que ce passage, MA DOCTRINE N'EST PAS MA DOCTRINE, se peut entendre, en Jésus-Christ, de la nature divine, saint Augustin rapporte pour exemple cet autre endroit de saint Jean, où il est dit que le Père a donné la vie au Fils; et comme cela signifie qu'il a engendré le Fils qui est la vie, de même lorsqu'il dit qu'il a donné la doctrine au Fils, on entend facilement qu'il a engendré le Fils qui est la doctrine. Voilà encore une fois la doctrine de saint Augustin bien expliquée; mais pour être plus clairement censurée par les paroles suivantes : Cela, dit-il (2), paroit plutôt appuyé sur un raisonnement que sur les paroles du texte. Ainsi, cette parole du Sauveur, le Père a donné la vie au Fils (3), ou comme porte le texte, de même que le Père a la vie en lui, de même aussi il a donné au Fils d'avoir la vie en lui-même, ne veut pas dire naturellement que le Fils reçoit la vie de son père aussi parfaitement et aussi substantiellement que le Père même la possède; cette explication est de l'homme plutôt que du texte sacré. Saint Augustin, et non-seulement saint Augustin, mais saint Athanase, mais saint Basile, mais saint Grégoire de Nazianze et les autres Pères de cet âge (car ils sont tous d'accord en ce point) n'ont pas dû presser les ariens par un passage si formel. Après treize cents ans M. Simon leur vient faire (3) P. 272 et 274. — (2) Ibid.

(3) Joan. v. 26.

leur procès avec une autorité absolue, et leur apprendre que le sens qu'ils ont opposé aux ariens n'est qu'un raisonnement humain. Jusqu'à quand ce hardi critique croira-t-il que celui qui garde Israël sommeille et dort? Jusqu'à quand' croira-t-il qu'il peut débiter un arianisme tout pur, et mépriser tous les Pères, à cause qu'il mêle avec des louanges les opprobres dont il les couvre; car écoutons comme il continue (1): On peut expliquer sur le même pied le premier passage, COMME LE PÈRE A LA VIE EN SOI, IL A AUSSI DONNÉ Au Fils D'AVOIR LA VIE EN LUI-MÊME. Il est vrai que la plupart des commentateurs l'entendent de la divinité; mais le sens le plus naturel est de l'entendre de Jésus-Christ en qualité d'envoyé. C'est l'arrêt de M. Simon, qui en sait plus lui seul que tous les commentateurs, que saint Augustin, que tous les Pères. Mais pendant que ce téméraire critique veut mieux dire qu'eux tous, visiblement il ne dit rien. Son dénouement est que dans ces passages il faut regarder le Fils, non pas comme Dieu ou comme homme, mais comme l'envoyé du Père, pour annoncer aux hommes la nouvelle loi (2). Or, ce n'est pas là le dénouement, mais le noeud même et la propre difficulté qui est à résoudre, et que les Pères vouloient éclaircir. Il s'agissoit, dis-je, d'expliquer, non pas que Jésus-Christ fût l'envoyé de son Père; mais comment étant son envoyé, il étoit en même temps son égal. Les prophètes étoient envoyés, et comme Jésus-Christ étoit envoyé, selon la définition de M. Simon, pour annoncer aux hommes la nou(1) P. 272 et 275. — (2) P. 272.

velle loi, Moïse étoit envoyé pour leur annoncer la loi ancienne; mais Moïse ne disoit pas pour cela : Comme le Père a la vie en soi, ainsi il a donné au Fils d'avoir la vie en soi : et encore, tout ce que le Père fait, le Fils le fait semblablement, et avec une égale perfection: et encore, tout ce qui est à vous est à moi, et tout ce qui est à moi est à vous : et enfin, moi et mon Père nous ne sommes qu'une même chose. Il falloit donc distinguer l'envoyé qui parloit ainsi, et qui s'égaloit à Dieu dans sa nature comme son Fils unique et proprement dit, d'avec les autres envoyés, et Moïse même, qui parloient comme simples serviteurs. C'est ce que les Pères ont fait parfaitement, en disant que le Fils de Dieu est envoyé à même titre qu'il est Fils, sorti du sein paternel pour venir aux hommes; en sorte que sa mission n'a point d'autre fondement ni d'autre origine que son éternelle naissance. C'est le principe des Pères pour expliquer le particulier de la mission de Jésus-Christ, et par le même principe ils ont encore développé comment il est Dieu, et comment en même temps il reçoit tout. Car, même parmi les hommes, le Fils n'en est pas moins homme pour avoir reçu de son Père la nature humaine; au contraire c'est ce qui fait qu'il est homme ainsi JésusChrist est Dieu, parce qu'il est Fils de Dieu, non point par adoption, autrement il ne seroit pas le Fils unique, mais par nature: ce qui ne peut être qu'il ne soit de même nature que son Père. Cette doctrine des Pères concilioit tout et expliquoit, par un seul et même principe, tous les passages de l'Evangile qui paroissoient opposés. Si M. Simon n'a pas

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